Pas mal, mais…

Article dans Slate qui tente d’expliquer pourquoi les logiciels libres ne concurrencent pas plus brutalement les commerciaux. Dans le cas MS Office vs OpenOffice.org, l’auteur explique grosso modo que c’est parce que Open Office est un clone de MS Office et reste donc juste “pas mal”. Il me semble qu’il oublie au passage la question de la dépendance au sentier dans l’usage et des coûts du changement pour les usagers. Après des lustres de domination de MS Office, nous sommes presque tous conditionnés plus ou moins par l’environnement du pack Office. Passer à un autre environnement est extrêmement coûteux, en temps de formation notamment (d’ailleurs, Office 2007 souffre un peu de ce problème, certaines interfaces ayant été substantiellement modifiées). Il semble alors judicieux de copier le leader pour s’imposer, avant d’envisager innover radicalement. J’imagine que cela peut prendre un certain temps, voire ne jamais arriver. Autre argument mobilisable : tout le monde ne s’intéresse pas de près à la qualité des logiciels libres, aussi gratuits soient-ils. De sorte qu’il existe encore de nombreuses personnes pour considérer sans jamais avoir testé l’alternative, et quoi qu’on puisse en penser objectivement, que MS Office est nettement meilleur que Open Office (mon point de vue est qu’en matière de traitement de texte ou de tableur, pour l’essentiel des utilisateurs, Open Office est une excellente solution. C’est d’ailleurs celle que j’ai adoptée depuis deux ans maintenant, même si je dois encore utiliser MS Office pour enseigner son usage dans certains cours). Passer au maximum pour un clone semble là encore la meilleure option pour entrer dans la bergerie.

Au total, si l’article contient des choses intéressantes, je pense qu’il passe tout de même à côté de ces deux points qui, sans que j’en aie la certitude (il faudrait l’avis des développeurs d’Open Office), s’ajoutent à l’argument massue de la gratuité (auquel j’ajouterais encore la pérennité du projet OpenOffice.org).

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17 Commentaires

  1. Il ne faut pas négliger non plus le problème des macros : de nombreux utilisateurs avancés et entreprises ont développés des macros voire même des applications complètes en visual basic pour application (vba). Le portage de ses macros (non compatibles avec open-office) est un obstacle majeure à toute migration.

    Réponse de Stéphane Ménia
    C’est un authentique problème, que j’ai pu tester… Le portage est source de coûts conséquents.

  2. Pour le tableur d’Open Office, je vous arrête. Il est impossible de faire du traitement de données avec. Faire 3 jolis tableaux, oui. Traiter 10 000 points de données,non.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Exact. Mais peu de gens en font.

  3. De surcroit, on ne voit pas bien l’intérêt pour des gens se prétendant bénévoles altruistes de porter atteinte à l’économie marchande : les entreprises entre elles s’amusant à se facturer du vent pour affirmer valoir devant leurs actionnaires.

    Que les entreprises soucieuses d’améliorer leur rentabilité en s’intéressant aux réductions de charges que propose les alternatives gratuites aux services commerciaux n’a rien d’étonnant. Cette tendance est lourde, mais masquera toujours des intentions moins avouables de facturations de services annexes.

    Open Office est notoirement financé par les concurrents de la Microsoft Corp dans le but de lui tailler des croupières : simple jeu de la concurrence. Techniquement, c’est certes un logiciel libre, mais c’est avant tout une entreprise commerciale comme une autre : comparable aux usines de médicaments génériques.

    Le logiciel libre proprement n’a lui, par contre, aucune vocation à s’insérer dans l’économie marchande : il ne concurrence absolument pas son offre : il la complète : cela est particulièrement frappant dans le domaine du P2P par exemple.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Pas faux pour Sun. Néanmoins, au niveau des développeurs individuels, vous savez quel est leur intérêt (aller bosser ensuite chez MS 😉 )

  4. Exact, ça reste le même principe d’un traitement de texte. Si on veut un truc vraiment diffcrent il faut plutôt regarder du cote de LaTeX. Pour les math c’est imbattable.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Dans le temps, j’utilisais Scientific Workplace. Un truc commercial que j’ai apprécié à sa juste valeur (ajoutée : m’éviter de trop apprendre à coder en LaTeX) !

  5. Il y a aussi un souci de compatibilité des formats. Les documents créés sous OpenOffice ne sont pas toujours très lisibles avec MS Office, en particulier les schémas et les graphiques.

    Et comme MS Office est le logiciel dominant, il vaut mieux l’utiliser si les documents créés vont être diffusés à d’autres utilisateurs.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Oui, pas faux, mais je ne crois pas que ce soit franchement prégnant. D’autant que si j’ai bien compris, MS commence à fouetter et s’ouvre vers le XML. Il y a un temps de retard, c’est exact, mais une analyse coût-bénéfice es à faire selon les cas. Si c’est juste pour diffuser, un PDF règle le problème.

  6. A la limite, c’est pas plus mal. J’avais lu un article de Foray et Zimmermann où ils expliquaient que l’augmentation d’utilisateurs qui ne participent pas au développement du logiciel libre (passagers clandestins) pourrait avoir des effets négatifs sur les incitations des développeurs à participer (et notamment des plus compétents).

  7. Dans toute société commerciale, les développements sont généralement l’objet de tensions entre deux équipes : les ingénieurs d’un coté, le marketing de l’autre. Les logiciels libres restent hélas des produits d’ingénieur (j’en suis un donc je peux critiquer !). Ne cherchant pas vraiment à conquérir un marché, les développeurs se contentent de faire a peu près aussi bien que le leader du marché, au sens technique du terme. Il n’y a qu’à comparer Linux et MacOS (deux unix à la base) pour comprendre à quel point les contraintes du marketing imposent de sortir un produit extrêment novateur si l’on cherche à l’imposer tout en le vendant. On aurait pu croire il y a dix ans que les logiciels libres allaient révolutionner l’industrie du logiciel. Aujourd’hui, je pense que c’est plutôt des gens comme google (qui font aussi du "gratuit" d’une certaine façon) qui sont les leaders d’une nouvelle tendance, à des fins très mercantiles…

  8. Peut etre me trompes je mais "les gens" qui utilisent MS Office à la maison on rarement payé la license. La finance est donc du coté des entreprises. Pour enoncer une evidence, on s’interesse là au fait d’etre indépendant du format d’un éditeur, ne fut ce que pour maintenir la concurrence. Quant à l’"ouverture XML" de microsoft, elle ne signifie en rien l’ouverture tout court (http://www.noooxml.fr/). Un etat peut choisir entre stimuler les services IT locaux en achetant des formations open office, ou payer des licenses exportées ailleurs. Tout autre pays que les USA a donc interet a pousser open office, d’un point de vue protectioniste, non?

  9. J’abonde dans le sens de Tom Roud,
    je ne vois pas en quoi 10 000 points de données sont plus un problème sous Oo que sous excel… une matrice 100*100 passe comme une couque sous Oo.
    Il m’arrive fréquemment de sortir des tableau traité sous R qui ne s’ouvrent pas sous excel mais bien sous Oo qui gère plus de colonnes. Il me semble que le problème est plus dans la compatibilité de certaines fonction +/- avancées comme le solveur (celui d’Oo est crapoteux et est strictement limité au linéaire) ou les tableaux croisés dynamiques. Quand on les manie plus ou moins régulièrement c’est rédhibitoire.
    Pour moi,le mieux c’est un peu des deux.

  10. d’accord avec warmi, si le piratage de MS office a domicile était impossible les données seraient probablement différentes.

    Je ne suis pas trop d’accord avec Iupolin le monde du logiciel libre est varié, et dans l’open source des outils d’entreprise il y a une grande partie qui est faite partiellement ou non par des entreprises. Souvent par ce qu’elles ont besoin d’outils (un environnement de développement par exemple) a proposer à leur clients et que c’est moins couteux d’avoir un standard du marché commun à tous et de qualité que de faire chacun de son coté un produit moyen.

  11. Un point à ne pas négliger : les lois anti-trust américaines et le vélèbre précédent AT&T font qu’un acteur en position dominante ne voit aucun inconvévient à être concurrencée, tant que sa concurrence ne menace pas ses marges.

    De ce point de vue, le logiciel libre est le concurrent idéal : il ne vous prive d’aucune vente et dispose de tellement peu de moyens que vous en développement que vous conserverez toujours l’initiative.

    Un produit comme Open Office est donc le nécessaire concurrent de Microsoft : celui qui renvoit toujours son utilisateur vers Microsoft Office, et en aucun cas vers les alternatives plus radicales, susceptible de rompre l’équilibre du marché

  12. Il me semble que Open Office fait parfaitement concurrence avec Office… sur son segment de marché.

    On a quand même des version allégées (famille) de la suite office a 100-150 €, parfois en bundle avec un produit tiers.

  13. Iupolin, tes propos sont caricaturaux. Comme le dit justement pala, le logiciel libre couvre de nombreuses réalités.

    En particulier, il existe des entreprises qui développent des logiciels open source et commercialisent leur expertise dans le domaine. Il ne s’agit pas d’angéliques "bénévoles altruistes", mais de personnes qui ont dépassé le stade du "capitalisme opportuniste tout-pour-ma-gueule" pour agir de manière plus respectueuse du monde dans lequel ils vivent "gagnant pour moi, gagnant pour toi, gagnant pour la société".

    Pas de concurrence de l’économie marchande ? Apache représente 70% des serveurs web.

  14. Pas de concurrence directe ? mais ça dépend pour quelle type d’utilisation et donc pour quel public.
    Pour environnement de développement leader Eclipse (logiciel libre soutenu par IBM), pour les serveurs web : apache (soutenu par une fondation) 70% marché.
    Pour les logiciels de gestion de contenu leader spip ou joomla (dotclear pour les blogs).

    Pour le grand public oui MS est devant !! mais on oublie la réaction que l’apparition de logiciels a imposé à microsoft.
    Si vous avez eu IE7 et IE8 c’est aussi grâce à firefox (parce que après IE6 microsoft a laissé tomber un temps le dvlp de son navigateur). Si vous avez office 2007 (qui change radicalement) c’est que y a eu OO. Et si vous avez eu une amélioration notable de la qualité (- de bugs et ecran bleu) de windows XP c’est que linux est apparu comme une alternative (il y a 10 ans). C’est aussi de la concurrence.

    Réponse de Stéphane Ménia
    “Si vous avez office 2007 (qui change radicalement) c’est que y a eu OO”. Très juste, me semble-t-il. Notamment sur l’ouverture au XML. Et je me demandais même dans quelle mesure le changement d’interface n’était pas lié à la concurrence de OoO.

  15. @Sinclair
    Je ne vois vraiment pas pourquoi commercialiser son expertise serait plus "respectueux du monde" ou moins "capitalisme opportuniste tout-pour-ma-gueule" que commercialiser des produits tout faits qui peuvent être utilisés sans avoir trop besoin d’expertise.

  16. Le tableur OpenOffice est parfaitement suffisant pour développer toutes sortes de modèles utiles voire superflus dans l’entreprise, pour tous projets innovants en particulier, pour l’aide à la conception en général:
    -Modélisation de projets.
    -Estimation de coûts.
    -Liaisons aux bases de données.
    -Suivi de données.
    -Prospectives et résultats.
    -Évacuation de la mémoire d’encombrement général.
    -En outre: Intégration de logiciels graphiques ou autres, pour les développements techniques, les examens juridiques et connexes, donc simplification de cette aide à la conception, voire initiation à un degré de réalisme très efficace en communication de projets (L’arborescence est simpl-issime, les shoot PDF immédiats).
    …Faut just’y mettre un peu du sien, c’est à dire pas grand chose pour qui veut l’entendre, quand même beaucoup puisqu’un minimum de formation est nécessaire à étendre, bien moins sans doute que celui du passage au numérique (rappelez vous: Zéro papier!), pour échapper à l’usine à gaz MS.

    MS s’est très vite attaché par la nécessité du couple développement/séduction, bien plus que par flagornerie en réponse à l’éternelle fatuité, à modéliser mais reproduire en les accélérant les rôles usuels en instance dans l’extrême multiplicité des métiers et habitudes comportementales.
    Tout se passe pour MS comme si tenter un virage pour s’extraire maintenant par nécessité de la dite fatuité, celle consolidée par son acte et terrible contrainte de l’effet dialectique, serait presque impossible et au pire (meilleur) un pari gagné d’avance grâce étant rendue aux fidèles utilisateurs installés dans leurs usages et forts de leurs attachements, comme cela ne dure qu’un temps…
    Faut juste gager pour les supporters de MS que ça dure longtemps (option flagornerie), ou pas longtemps (option suffisance)!
    Mais bon, choisir le bon tuyau ressemble souvent choisir le gros tuyau!

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