Le shorter du jour

Shorter Eric le Boucher :

“Les allemands ont fait des réformes économiques et sociales. Ils ont constaté ensuite que ces réformes n’ont en rien contribué à leur croissance, mais ont par contre causé des problèmes sociaux significatifs; ils envisagent donc aujourd’hui de revenir sur celles-ci. C’est la preuve qu’en France, nous devons les imiter dans les réformes, par contre, nous ne devons en aucun cas revenir sur celles-ci.”

(voir sur le sujet W. Munchau cité dans ce post).

Share Button

Alexandre Delaigue

Pour en savoir plus sur moi, cliquez ici.

9 Commentaires

  1. Donc, si le retour en grâce de l’Allemagne ne vient pas des réformes qu’elle a faite, mais du retour de la croissance qui, visiblement, n’en est pas une conséquence, et si, comme un précédent billet de ce blog l’expliquait il me semble, les politiques publiques n’ont pas de réelles influences sur la croissance, que faut-il faire ? Mettre les pieds sur la table en attendant que la croissance voudra bien revenir d’elle même ? C’est assez déprimant je trouve…

    C’est vrai. Faire des réformes pour faire des réformes, c’est tellement mieux…

  2. à la différence de la France, l’Allemagne n’a pas une économie publique improductive et gloutonne à nourrir. Dès lors, elle peut se permettre de redistribuer les bénéfices des réformes, ce qui est inenvisageable en France (à moins de remettre en question la coûteuse culture interventionniste du pays).

    Vous avez raison. Il faut supprimer la PAC.

  3. Non mais je pose la question sérieusement : le bilan de toute la science économique, c’est un constat d’impuissance ?

    Ca l’est souvent effectivement. Et en soi, c’est une information, même si cela peut, effectivement, sembler un peu déprimant. L’information que cela apporte, c’est la méfiance envers les grands plans ambitieux sensés “dynamiser la croissance” et “faire entrer le pays dans le 21ème siècle” qui reviennent surtout à gaspiller des fonds publics en faisant des cadeaux à des clientèles électorales. Savoir cela, c’est déjà très utile.
    Cela dit, sur la question des “réformes” on n’est pas face à un constat de complète impuissance. Ce que montre l’exemple allemand, c’est que certaines séquences de réformes ne marchent pas. En particulier, les réformes du marché du travail ne fonctionnent que lorsqu’elles arrivent à la fin d’un édifice qui fait en sorte que les gens incités à retravailler vont effectivement pouvoir le faire. Surtout, la priorité, ce sont les réformes qui contribuent à la concurrence sur le marché des biens (genre abolition des lois Galland-Raffarin) parce qu’elles vont rapidement bénéficier à l’essentiel de la population. Il ne faut pas en attendre des miracles, mais ce genre de choses, sur le long terme, a des effets positifs.
    Le problème des gens comme Le Boucher et autres qui glapissent “réformes, réformes” c’est qu’ils partent du principe que réformer est bon en soi, qu’il y a une sorte de liste des “choses à faire” et que ne pas les faire revient à de la vile démagogie. Mais ce que montre l’exemple allemand, c’est que choisir quelles réformes faire est bien plus important que le contenu des réformes. Une réforme du marché du travail qui a fait beaucoup de mécontents et peu de contents fait que désormais, il n’y a plus d’adhésion à d’autres réformes qui seraient potentiellement plus utiles. La leçon est claire : parfois, il vaut mieux s’abstenir de faire certaines réformes pour pouvoir continuer de faire des choses utiles. Mais ce n’est pas la leçon que veulent entendre les fondamentalistes de la réforme pour la réforme comme ELB.

  4. Il est vrai que les réformes du marché du travail en Allemagne (principales mesures : raccourcissement des durées de versement des allocs pour inciter les chômeurs de longue durée à revenir sur le marché ; créations de mini-jobs et midi-jobs – emplois peu voire très peu rémunérés (<400 €) et à temps partiel – pour permettre d’augmenter l’emploi des peu qualifiés, notamment dans les services intensifs en main-d’oeuvre) ont finalement peu contribué à la relance de l’économie du pays.
    Le cycle actuel est porté par le dynamisme des industries exportatrices et celui des investissements en biens d’équipement. Or ces secteurs emploient très peu de personnes non qualifiés et les mini/midi-jobs y sont très peu présents.
    L’Allemagne est l’exemple parfait de la réforme qui passe à côté de ses objectifs, les emplois dans les services à la personne et les services commerciaux (resto, hotel, commerce…) restant persque atones. En revanche, les emplois qui se créent actuellement en Allemagne sont principalement des emplois "classiques", qui sont presque aussi rigides qu’avant les réformes.
    Les exemples les plus aboutis, à mon avis, d’économies ayant réussi à se réformer en pronfondeur et en suivant des stratégies claires, restent ceux des pays scandinaves au début des années 90 (certes après une crise cataclismique). Des réussites qui réconcilient avec la politique économique.

  5. Si la science économique peut contribuer à établir l’inanimité du volontarisme en politique, c’est déjà beaucoup !

  6. J’avais posté un commentaire sur la retranscription des deux articles de Munchau dans le billet cité. Il n’était pas passé et j’avais laissé tomber. Je fais une seconde tentative puisqu’il y a débat.

    A la lecture du post d’Alexandre, j’ai l’impression qu’un lecteur francophone va en déduire que les réformes du marché du travail ne fonctionnent pas et qu’il faut faciliter l’exportation des entreprises françaises. A la lecture des deux articles de Munchau, il me semble que le chroniqueur britannique dise a peu près l’inverse: il n’y a pas eu assez de réformes du marché du travail (et des autres marchés) et les politiques du continent risquent de ne pas poursuivre leurs efforts dans ce sens.
    Je cite: "You need to provide financial incentives for companies to hire older workers, at least for a transitional period. […] You would perhaps also need to rethink hiring-and-firing laws for older workers. […] In addition, by far the best way to create 1m jobs on a sustainable basis is deregulate the service sector. […] The lesson of this debacle for any reformer is not to give up, but to pursue reforms with a strategic approach."

    Je suis en outre un peu gêné par cette phrase : « Imposer des contraintes de retour à l’activité des chômeurs ne fonctionne qu’en présence d’un système efficace de formation des chômeurs, et pour les chômeurs âgés d’incitations pour les entreprises à les recruter – un résultat assez largement documenté. » Le livre de Cahuc et de Zylberberg est au contraire critique vis-à-vis des politiques de formation des chômeurs, souligne l’impact des incitations a la reprise d’emploi lorsque des sanctions existent et insistent sur l’effet positifs des subventions a l’embauche. On peut s’opposer a leurs conclusions ou critiquer leurs travaux, mais les citer comme exemple de l’inefficacité des reformes du marché du travail, je ne comprends pas trop. Les réformes Hartz IV avaient beaucoup de défauts, mais leurs évaluations sont en cours et les résultats semblent très variés selon leurs modalités.

    Sur le fond, on peut discuter de l’importance de la concurrence sur le marché des biens et des capitaux versus les réformes du marché du travail. Munchau semble pencher pour un agenda groupé de ces reformes et insister sur la flexibilité du marché du travail plutôt que les seules réformes de l’assurance chômage (a l’inverse d’un Blanchard qui insiste d’abord sur les réformes de l’assurance chômage ; Askenazy semble plus proche d’Alexandre en affirmant souvent que seules les réformes du marché des biens vont résoudre le problème de l’emploi en France). C’est un débat très intéressant, mais qui ne me semble pas aussi tranché que vous ne le laissez entendre.

    Tout d’abord, désolé pour les commentaires non postés. Il y a eu des soucis techniques indépendants de notre fait mais qui ont pénalisé des commentateurs.

    Sur le fond, j’avais cité Cahuc-Zylberberg pour les exemples qu’ils fournissent de politiques “incomplètes”, dans lesquelles on se contente d’inciter les chômeurs à reprendre une activité (si mes souvenirs sont bons, ils se fondaient sur des exemples suisses); sur la formation, effectivement, ils étaient très sceptiques. L’idée pourtant c’est que les incitations à aller travailler sont difficilement dissociables d’incitations pour les entreprises. De façon générale Munchau insiste sur le fait que le problème allemand, ce sont des réformes “partielles”, pas le principe de la réforme en lui-même. Des réformes utiles dans un certain contexte général peuvent devenir inefficaces si elles sont menées toutes seules.

    Enfin, sur l’évaluation des réformes, je pense qu’on oublie souvent la question “politique” – et c’est celle qui est importante dans le cas allemand. Si des réformes aliènent une partie significative de l’électorat vis à vis de l’idée même de réformes, elles empêchent des réformes utiles d’être menées. Cet argument stratégique vis à vis des réformes me paraît plus important que la question de leur efficacité relative. Surtout, ces deux dimensions (évaluation et “stratégie”) qui sont totalement absentes du discours de gens comme ELB (ce qui n’est pas très important) et des politiques eux-mêmes.

  7. Une première réforme en faveur de la croissance pourrait être d’acter le très faible rendement des moyens consacrés par la société à piloter et gérer son économie en les supprimant, pour restituer les moyens libérés à ceux auprès de qui ils ont été prélevés de sotre à ce qu’ils les affectent d’eux-mêmes à des finalités plus productives.

  8. "Si des réformes aliènent une partie significative de l’électorat vis à vis de l’idée même de réformes, elles empêchent des réformes utiles d’être menées"

    Existe-il des medicaments contre l’alienation du citoyen
    par rapport a l’idee de reforme? Peut-etre une chirurgie serait necessaire (je preconiserais une lobotomie). Ou alors faudrait-il faire une grosse mauvaise reforme qui n’aliene pas les citoyens, pour pouvoir mener de bonnes petites reformes utiles mais desagreables!!

Commentaires fermés.