Pendant ce temps, l’euro…

L’euro va-t-il devenir la première monnaie mondiale, comme ses promoteurs l’espéraient? On ne peut pas le savoir encore, mais ce n’est pas mal parti. Jugez plutôt :

Pour la deuxième année consécutive, l’euro a dépassé le dollar comme première monnaie du marché international des obligations. De ce fait, les dettes libellées en euros correspondent à 45% du marché mondial, contre 37% pour le dollar. C’est un changement extrêmement rapide : en 2002, les dettes en euros représentaient 27% du total, contre 51% pour le dollar.

A l’origine de ce phénomène, on trouve le développement des dettes publiques en Europe, mais ce n’est pas l’élément principal : cela provient plutôt du fait que le passage à l’euro a rendu le marché des titres européens plus liquide, amplifiant la désintermédiation du financement : les entreprises européennes ont de moins en moins recours au crédit bancaire pour se financer, et font de plus en plus appel au marché des titres. S’y ajoute l’effet de taux d’intérêt plus stables qu’aux Etats-Unis, et une récente tendance pour certaines banques centrales asiatiques à rééquilibrer leurs portefeuilles en faveur de titres libellés en euros.

A cela s’ajoute un autre élément notable : l’euro est devenu la forme d’argent liquide favorite du monde, devant le dollar : l’équivalent de 800 milliards de dollars, au taux de change actuel, contre 759 milliards de dollars. Cela provient en bonne part d’une très forte demande de billets de 500 euros. On jettera un voile pudique sur les activités économiques internationales qui nécessitent l’utilisation de grandes quantités d’argent liquide, avec de préférence des billets d’un montant suffisant pour mettre le plus possible dans un attaché-case.

Quel est l’effet de cette évolution sur l’économie européenne? Absolument nul, mais il semble que “dépasser le dollar” constituait un objectif de fierté européenne assigné à l’euro. Il semble aujourd’hui plausible qu’il soit atteint, dans l’indifférence générale.

Et la politique de la zone euro? n’est-ce pas le vrai problème? Il est vrai qu’une grande économie européenne a connu, pendant l’année 2006, une forte inflation (3%), ce qui peut susciter des inquiétudes. Cette économie, c’est… la Grande Bretagne.

(via Macroblog)

Share Button

Alexandre Delaigue

Pour en savoir plus sur moi, cliquez ici.

6 Commentaires

  1. Avec tout le respect dû à cette vénérable institution, je doute que la politique de la BCE ait une rélle influence sur les revendications salariales de non-entrepreneurs de la zone euro.

  2. A l’époque de la création de l’Euro il y avait aussi un espoir que l’Euro serve de monnaie de référence pour les gros contrats stratégiques. Comme par exemple pouvoir acheter notre pétrole en euros, ou vendre nos airbus en euros. Cet objectif semble toujours loin…

  3. Yeti : le fait de qualifier un tel objectif de “stratégique” en dit long sur le fait qu’il s’agit d’une question d’orgueil, pas d’intérêt.

  4. L’Union Européenne manque de visibilité, et peu de citoyens se sont approprié l’idée qu’ils étaient européens. Dans le fond la mauvaise nouvelle de votre article c’est justement que l’on avait sous la main de quoi nourrir la fierté d’être européen, et qu’on le laisse passer.

  5. Quand le dollar a plongé il y a à peine quelques semaines, on a entendu crier qu’il fallait repolitiser la BCE ! Mame Royal trouvait ça intolérable, pensez, des gens même pas élus… On "dépassait" le dollar, mais on n’en concevait aucune fierté, à l’inverse de 2002. Maintenant que le dollar a repris des couleurs, on n’entend plus rien ! Mais il est vrai aussi que le métier de politique est de toujours se défausser des problèmes ; pour l’instant, l’euro en fait les frais, et c’est bien dommage.

Commentaires fermés.