Mystérieux emplois intermédiaires

Patrick Artus évoque dans le Monde les effets de la mondialisation : “elle conduit à la disparition d’une partie importante des emplois ayant des niveaux intermédiaires de rémunération, par exemple dans l’industrie ou dans les services délocalisables (informatique).” Ceci ayant pour conséquence des inégalités accrues, puisque seuls les riches et les pauvres ont des emplois.
Suit une démonstration expliquant que pour réduire ou maintenir les inégalités, il faut retenir une stratégie active “de restauration de la compétitivité et de retour précisément de la capacité à créer des emplois de niveau de revenu intermédiaire, en particulier par la qualité de la spécialisation productive.”, plutôt que de vouloir taxer les riches ou administrer les bas salaires (sur ces derniers points, on peut le suivre).
Well… De quels emplois parle-t-il ? Pas un mot à ce sujet. Je l’avais noté en lisant un de ses derniers livres, Artus verse dans la rhétorique de la compétitivité, regrettant la baisse des parts de marché. Bon, soit, admettons. Le problème, finalement, n’est pas là (pour tout dire, je suspecte fortement Artus de tenir ce genre de propos pop internationalist pour être mieux entendu sur d’autres points, stratégie utilement perfide décrite par l’ami Krugman ). Mais, même en admettant tout cela, on fait comment pour choisir les secteurs qui vont bien et y créer des emplois (vachement) intermédiaires ?

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4 Commentaires

  1. "stratégie utilement perfide décrite par l’ami Krugman"

    On a envie d’en savoir plus! De quoi s’agit-il?

    Si vous avez de bonnes idées, faites les passer dans un package incluant des (mauvaises) idées que la sagesse populaire acceptera plus facilement. Peut-être que l’article de Krugman traîne sur le web. On le saura vite, il y a pas mal de lecteurs assidus de l’époque où il faisait de l’économie. Exemple chez Artus : vous voulez faire libéraliser le marché des biens et service, dites que c’est bon pour la compétitivité des entreprises françaises. En réalité, c’est surtout bon pour l’emploi, mais presque personne en France ne vous croiera si vous évoquer un lien positif entre concurrence et emploi.

  2. L’article de Krugman se trouve ici (en anglais) : http://www.pkarchive.org/global/...

    "Beaucoup d’esprits brillants ont pensé pouvoir s’approprier la rhétorique de la compétitivité pour la mettre au service d’une bonne politique économique. Suppossons que que vous pensez que les EU devraient favoriser l’épargne ou réformer le système éducatif afin d’améliorer la productivité. Même si vous savez que les bénéfices d’une meilleure productivité n’ont rien à voir avec la concurrence internationale, pourquoi ne pas décrire cette politique comme étant destinée à améliorer la compétitivité si vous croyez pouvoir ainsi élargir votre auditoire ? il est toujours tentant de flatter les préjugés populaires pour les mettre au service d’une bonne cause ; j’ai moi-même succombé à cette tentation."
    (P. Krugman, "La mondialisation n’est pas coupable", p 36)

    Merci…

  3. J’ai rouvé l’article interessant alors que l’idée de problèmes sur les emplois intermédiaires m’a paru très discutable
    Si on prend comme emplois intermédiaires ceux qui demandent un niveau CAP à Bac + 2 ou 4, on observe plusieurs phénomènes en France (est ce pareil ailleurs? ?):
    les salaires stagnent plutôt, sous le double effet de la hausse continue du SMIC (et l’écrasement concomitant de la hièrarchie salariale) et de la hausse du niveau de diplôme (on peut interpréter de cette manière l’étude de Gary Bobo et consorts sur les salaires des profs voir mes deux articles sur l’eascenseur social) C’est aussi la question évoquéee par Louis Chauvel sur les classes moyennes
    C’est aussi là que se trouvent les métiers en tension, avec difficultés de recrutement. Certes se sont pour beaucoup des métiers non délocalisables comme infirmière maçons qualifiés opticien ou technicien d’entretien, mais il y a aussi des tensions sur beaucoup de métiers techniques liés à l’industrie

  4. J’ai un peu de mal a prendre au sérieux quelqu’un qui pense que le "capitalisme est en train de s’auto détruire".

    La confiance ne grandit pas apres la première phrase de son article, sans compter que j’ignore complètement ce qu’est exactement un niveau intermédiaire de rémunération. Sur cette partie concernant la globalisation et ses effets (e.g. la spécialisation productive "normale") il me semble en pleine contradiction avec le bouquin de S. Berger qui correspond plus a mon observation du phénomène. En fait les cadres intermédiaires des pays émergents sont tellement rares qu’ils sont payés plus que des expatriés et qu’ils ont un turnover dément.

    Ce que je trouve aussi irritant est de toujours parler du salaire moyen alors que le salaire net ne représente que 52% (je crois) du revenu disponible et d’oublier complètement l’aspect revenu & dépense sociale grandissants.

    La France est un pays ou la dépense est hautement socialisée, et l’impact du cout de la Santé par exemple, des retraites ou de l’éducation sur le pouvoir d’achat résiduel me parait plus important que celui du tabac ou du petit noir.

    Si en médecine, le docteur faisait systématiquement le diagnostic qui est celui que vous voulez entendre, je doute beaucoup que les remèdes corrects soient administrés.

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