La crise est finie

C’est officiel. Dixit Patrick Artus. Logiquement, ce devrait être la récession, maintenant. J’ai récemment dit que je n’étais pas oracle et encore moins habilité à donner une expertise sur le monde tel qu’il sera dans… disons 15 jours. Loin de moi l’idée de le faire aujourd’hui.

Mais, au sens économique du terme, la prévision d’Artus est tout sauf fantaisiste, si on la lit selon la terminologie des économistes. Terminologie finalement assez ignorée. Dans un cycle économique, on a 4 phases théoriques : l’expansion, phase de hausse du PIB dans le cycle ; la crise, moment du retournement ; la récession, phase de baisse [1]; la reprise, moment où la baisse s’arrête avant que ne démarre un nouveau cycle. Au fond, l’ampleur de la crise ne détermine que la brutalité de la phase de récession. De ce point de vue, annoncer la fin de la crise, c’est seulement annoncer que l’on y voit plus clair sur ce que sera l’ampleur à venir de la récession. Sur les marchés financiers, cela signifie qu’après une grande incertitude sur ce qu’il convenait de faire (vendre, acheter, les deux ?) les investisseurs retrouvent des points de repères et l’offre de titres rencontre une demande plus importante, ce qui stabilise les cours.

Ce n’est peut-être pas un hasard si le FMI prévoit aujourd’hui 0,5% de croissance aux Etats-Unis pour 2008. Notez que, techniquement, ça ne veut pas dire qu’il n’y aura pas récession, puisqu’il suffit de deux trimestres consécutifs de baisse du PIB pour déclarer une telle situation. Mais entre l’effondrement ultime du capitalisme et un ralentissement marqué, il y a une différence. Et à ceux qui voudraient me rentrer dedans parce que je n’annonce pas la fin du capitalisme-triomphant-financier-fou-spoliateur-inique-et-impérialiste qui, comme vous le dites souvent, va arriver, retenez-vous et ne vous inquiétez pas : quand elle sera là, je serai un des premiers à vous l’annoncer. Pour le reste, Artus donne sa version des faits, mi-figue, mi-raisin. Et c’est très prudemment encore que je me contente d’observer ce qui se dit et ce qui se fait.

Notes

[1] éventuellement, un simple ralentissement si le taux de croissance reste positif, le graphique présenté est compatible avec les deux cas, puisqu’il ne mentionne pas le 0.

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6 Commentaires

  1. Alors d’après ce que je lis c’est fini :

    "Challenges : Où en est la crise financière ?
    Patrick Artus : Le pire est passé. C’est fini."

    ca veut dire qu’on peut resortir de chez nous et consommer à gogo alors ?! Ca ne se transmettra pas à la sphère réelle ?

    Mon banquier va m’accorder mon crédit pour m’acheter mon appart ?!

    Dis Monsieur Artus, c’est quoi une crise ?

    En tout cas, son intervention a l’air définitif, catégorique… c’est fini !!! youhou !!!!

    Réponse de Stéphane Ménia
    C’est très mal de ne pas lire ce que disent les gens. Moi j’ai relevé ceci :
    “Challenges : Quel sera l’impact de cette crise financière sur l’économie réelle ?
    Artus : Il sera important. Tout ce qui tirait la croissance américaine depuis 2002, c’est-à-dire la hausse des prix de l’immobilier et l’endettement, est durement touché.”
    Pan, sur le bec à Aalexandre. Rassure toi, ton humiliation n’aura pas été inutile. Ca évitera des redites. Au passage, c’est tout le sens de mon billet. La crise, c’est pas la récession.

  2. La fin de la crise, c’est donc le moment où on arrête d’avoir peur de la baisse parce qu’on commence à prendre sa mesure ?

  3. La crise est le point critique, où l’on bascule d’un état à une autre.
    Au début de année 30 on a eu aussi une mild recession, avec hause des actions.

  4. Artus souligne bien que l’immobilier a encore de mauvais moments à passer. Les achats-reventes sont décalés de plusieurs années, les stocks élevés, et les prix devraient donc mettre du temps à s’ajuster. Il y a tendance à l’équilibre, mais ça convere lentement!

    En-dehors de l’immobilier, je me demande ce qu’il faut penser du terme "récession". Les Américains vont moins consommer, plus épargner, et surtout reconstituer le capital productif qui avait été évincé par la ruée sur l’immobilier. Il est curieux d’appeler "expansion" une période où ils brûlaient la chandelle par les deux bouts, et gaspillaient leurs investissements dans des projets immobilier vaseux, tout en s’endettant.

    Ils vont maintenant devoir renverser la vapeur, alors peut-être devrions-nous voir cette "récession" comme un bon augure.

  5. "Et à ceux qui voudraient me rentrer dedans parce que je n’annonce pas la fin du capitalisme-triomphant-financier-fou-spoliateur-inique-et-impérialiste qui, comme vous le dites souvent, va arriver, retenez-vous et ne vous inquiétez pas : quand elle sera là, je serai un des premiers à vous l’annoncer."

    Est-ce de l’ironie totale ou y a-t-il une pointe de vérité prophétique dans cette phrase?

    Plusieurs sites de part le web n’ont eu de cesse d’expliquer que ce genre de crises tendent à devenir nombreuses et de plus en plus longues, pour diverses raisons.

    Loin de moi l’idée d’être un de ces gaucho-anarcho-anticapitalistes primaires mais ne rien changer à notre système financier quand on le voit capable de tel sursaut me fait réfléchir.

    Enfin en même temps, qui peut faire quoi pour réglementer le système financier au niveau mondial?

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