Et si, finalement, rendre l’histoire géo optionnelle en terminale S en faisait le nouveau symbole de l’élite ? Benjamin Stora a eu – à peu près – la même idée que moi (j’ai de belles chevilles), affirmant que sa discipline va rejoindre les langues mortes. Justement, pendant longtemps, quelle option les bons élèves prenaient-ils ? Le latin, si je me souviens bien. C’est là que nos points de vue divergent. Lui n’évoque pas cet aspect, “mort” signifiant éteinte à son sens (ce qui, il est vrai, pourrait être le cas à long terme, comme pour le latin. Mais à long terme, nous le sommes tous – morts). Et quand Richard Descoings en déduit que cela va rendre la filière S moins élitiste, je suis très très dubitatif. Le raisonnement qui consiste à dire que les incitations à aller en L pour les profils littéraires seront plus importantes me semble discutable, au moins à court terme. On faisait déjà plus de lettres en L avant et rendre l’histoire géo optionnelle en S ne changera rien. Le volume horaire réduit n’est pas non plus une raison. Un bon élève, ça approfondit seul, ça sait lire. La seule chose qui déterminera l’évolution du rapport de forces entre filières sera le choix des familles. Pas sûr que le choc soit suffisant pour les faire sortir du sentier actuel.
Après, il y a les autres enjeux. Ceux dont tout le monde parle. Je n’ai vraiment rien d’intéressant à dire sur cet aspect.
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Ceci dit, tu as probablement énoncé l’essentiel : le prestige des filières est essentiellement déterminé par les choix des familles. Tant que les politiques de réforme poseront comme principe que celles-ci suivent bovinement la communication ministérielle, les stratégies de distinction et d’évitement auront de beaux jours devant elles. Apparemment, la critique de Lucas ou même la notion d’équilibre de Nash n’ont pas atteint les hauteurs du Ministère de l’éducation nationale.
Tenez, un examen d’économie à passer pour avoir les honneurs : http://www.thebigquestions.com/2... et part-ii pour la 2eme partie…
Exemple: When the price of peanuts rises, Frieda reduces her root beer consumption. If Frieda’s income rises, will her root beer consumption go up or down?
(je dirais qu’il n’y a pas de bonne réponse, quand il augmente elle diminue sa consommation parce qu’elle est obligée, mais quand elle peut se le permettre à nouveau elle ne va pas forcément en racheter, je peux acheter 30 barres de Mars par jour, ça fait pas de moi un diabétique… mais je peux me gourrer complètement dans ma réponse (et je me gourre certainement)
Il y a trop de questions pour lesquelles je n’ai aucun début de réponse, (mais j’ai fait S, donc pas d’économie) donc si vous aviez un corrigé (je précise que je suis pas un étudiant à qui son prof a filé cet exercice…
Ce matin sur France Q dans La fabrique de l’histoire : comment enseigner l’histoire-géographie ?
sites.radiofrance.fr/chai…
On peut la podcaster.
Je pense que le point intéressant est au contraire ce que dit Richard Descoings, si Sciences Po et consorts (c-a-d les filières sélectives post bac) se mettent a défavoriser les S au profit des ES et des L parce que ces derniers font de l’histoire géo, il y aura rééquilibrage, sinon cela restera un coup d’épée dans l’eau.
Il y a une quinzaine d’années (…) les classes préparatoires scientifiques avaient été reformées pour mettre l’accent sur la physique-chimie (filière PC), il y eu un rééquilibrage (par rapport a la filière MP qui insistait sur les maths) car Polytechnique et consort ont ouvert plus de places pour les PCs.
Le choix des familles, certes, mais si les familles qui veulent envoyer leurs enfants a Sciences Po ou a HEC savent qu’ils ont plus de chances en passant par la voie ES, alors il y aura du changement.
sea34101 : Je ne suis pas convaincu par l’analogie entre la dynamique sur un petit nombre d’étudiants sélectionnés et bien renseignés (le public des prépas) et celle de l’allocation des élèves de lycée. En particulier si on compte sur des établissements comme Sciences-Po ou HEC, dont le poids dans les recrutements post-bac est pratiquement négligeable à l’échelle du pays.
"Lui n’évoque pas cet aspect, "mort" signifiant éteinte à son sens"
Lorsque l’on étudie, donc, volontairement, les langues mortes, on apprend que la distinction entre langues vivantes et langues mortes vient du fait que le corpus (l’ensemble des textes et manifestaions de la langue par ses locuteurs authentiques) évolue pour les langues vivantes et est par définition fermé dans le cas des langues mortes.
Ce qui implique une très grande différence d’approche : un corpus vivant peut avoir des usages en évolution, un corpus figé peut simplement attester d’un passé.
C’est pour cette raison qu’il n’est pas inimaginable, pour certaines langues mortes (dont le vieux français), d’exiger de ceux qui prétendent à l’expertise voire simplement à une certaine connaissance de la chose une connaissance parfaite de l’intégralité du corpus connu à son époque de la langue en question.
Juste une remarque, en passant. Dire que le bac S attire l’élite est devenu inexact, du moins si on se place au niveau du seul lycée général.
Pour une raison simple : près de la moitié des lycéens généraux suivent cette filière. En 2008, 51% des candidats au bac général étaient en série S. Ce n’est plus une élite : c’est la majorité.
Réponse de Stéphane Ménia
Pas faux.
@matthieup: bien sur que le prestige depend des choix des familles, mais ceux-ci ne sont pas exogenes, comme sea34101 le mentionne, on a reussi a revaloriser la physique appliquee (phys, chimie PSI) en prepa alors qu’il y a 20 ans c’etait maths, maths, maths (M’). Si on voulait faire qqc de similaire au niveau du lycee ca marcherait ssdoute, au – partiellement.
je trouve ca bizarre d’etre meprisant comme ca contre le ministere educ nat (lucas, nash) => ils ne peuvent pas changer "les perceptions des familles", leurs leviers ce sont les programmes, l’organisation, etc. Et ils savent tres bien comment ca marche, ils ne vous ont pas attendu.
apres, je n’ai aucun avis sur la reforme, mais je suis 1 peu frappe du conservatisme ambiant – c’est mal de reduire l’histoire; bon, peut-etre, mais personne ne proposait d’augmenter sa part. J’en deduis qu’on etait comme par hasard a l’optimum. Idem avec l’eco, idem avec ttes les reformes.
Le bac S avec mention reste un marqueur de l’élite. Tous mes élèves à Sciences Po ont ça dans leur bagage.
L’hypothèse de rééquilibrage est bancale, Sciences Po se contentera de faire une remise à niveau, soit pendant l’été, soit pendant la 1e année. En revanche, les universités qui n’ont pas les moyens d’effectuer une mise à niveau devront baisser leur niveau.
Pour Sciences Po, il faut aussi tenir compte de la nouvelle tendance élitaire, le double cursus “Sciences Po/Sciences Ex” (à Paris 6 ou 7). Pour ce nouveau diplôme select, le baccalauréat S restera la norme. Bref, le rééquilibrage, je n’y crois pas.
Que ce gouvernement voie l’économie ou l’histoire comme des options, ça ne me surprend pas, ses actes manqués dans les deux domaines le laissaient déjà pressentir. Qu’il appartienne au bon petit soldat Chatel de mettre ça en œuvre, c’est finalement encore plus normal.
Enfin, faut pas critiquer à outrance : le gouvernement cherche à limiter la fuite des cerveaux en éliminant les cerveaux, c’est une solution comme une autre.
"le gouvernement cherche à limiter la fuite des cerveaux en éliminant les cerveaux, c’est une solution comme une autre."
S’il existait un moyen d’empêcher les gens de penser, ça se saurait. Et si le lycée avait l’exclusivité de l’éveil des jeunes esprits, ça se serait remarqué.
Le contenu de l’enseignement scolaire n’a ni la vocation, ni la capacité à répondre à la capacité de travail d’un jeune élève motivé et curieux. Certes, ce n’est pas la majorité : mais une certaine fascination pour les théories de la croissance font reposer des espoirs certainement irrationnels sur eux.
En considérant donc que le lycée ne sera qu’un des moyens de l’épanouissement des jeunes l’individus, la question que se pose est alors simple : dans le nombre donné d’heures de cours "obligatoires" financées par l’institution, l’offre d’enseignement, doit-elle inclure prioritairemet des matières améliorant l’employabilité de la majorité des lycéens ou des matières satisfaisant la curiosité d’une petite minorité pouvant dispenser une partie de ses moyens de cette fin d’amélioration de son employabilité dans une société qui fait de l’inégalitarisme un but en soit et du chômage de masse un moyen ?
Vous me direz, à juste titre, que les lycéens pourraient laisser à l’entreprise le soin de proposer une offre d’enseignement adaptée aux élèves dont la capacité de travail est supérieure à celle que la collectivité veut bien financer au bénéfice de tous. Mais bizarrement, j’ai l’impression que c’est précisément de ça dont personne ne veut entendre parler ….
François : si je suis un peu énervé contre le Ministère, c’est qu’il se moque ouvertement du monde, sur le mode du « plus c’est gros, mieux ça passe ». Par exemple, le coup de l’économie obligatoire… sauf pour ceux qui font une langue morte ou une LV3, ce qui revient à donner une prime à la stratégie déjà existante de distinction des bons élèves et à entériner l’idée que les sciences économiques et sociales sont une discipline destinée aux médiocres. De même, on parle de revaloriser la L, mais c’est essentiellement fait en diminuant l’attrait des options alternatives. Quelle autre conclusion en tirer que de penser qu’on prend les gens pour des veaux ?
RAS, "tous" vos élèves à Sciences Po ont un bac S dans leur bagage ? (non, parce que moi j’en connais beaucoup dont ça n’est pas le cas…)
Je n’ai pas réussi à trouver les stats pour SPo Paris, mais pour les IEP de province, certes beaucoup moins prestigieux, j’ai trouvé ça (2008 il me semble) :
Pourcentages des admis par filières :
• Bac ES : 55 %
• Bac S : 26,6%
• Bac L : 18 %
• Bac autres : 0,3%
A mon avis Descoings, qui reste très attaché à Sciences Po, ne doit pas penser que les (très bons) élèves des autres filières sont indignes de son école, sinon il ne soutiendrait pas autant une suppression de l’histoire en terminale qui va très certainement faire chuter la proportion de S admis à Bac+0.
@Mathieu : pour la revalorisation de la L, à mon avis ce n’est pas complètement (seulement très) illusoire, grâce à l’introduction du droit en option. Pour les SE (plus S), pas mieux.
Il est une ségrégation dont la HALDE ne semble pas avoir eu le temps de se préoccuper, c’est cette espèce de dictature des Maths qui interdit quasiment à ceux qui sont nuls dans cette matière d’intégrer une grande école ou d’envisager un poste important de responsabilité. On se demande bien pourquoi !
Car si l’on doit admettre qu’un certain niveau de maths soit requis pour être ingénieur ou chercheur scientifique, on ne voit pas en quoi cela est nécessaire pour faire MEDECINE ou PHARMACIE et encore moins pour intégrer une grande école de commerce ! Ou sont les maths dans la Psychiatrie ou la communication par exemple ?
Il faut donc que ces universités et grandes écoles sélectionnent non seulement sur les maths (optionnelles dans ce cas) mais aussi sur d’autres matières afin de diversifier leur recrutement.
Car c’est se priver de personnes extrêmement compétentes et intelligentes que de les éliminer d’emblée parcequ’elles ne comprennent rien aux mathématiques (ce qui ne veut pas dire d’ailleurs qu’elles soient réfractaires aux sciences…).
Et inversement il existe un nombre important de doués en maths qui sont de fieffés abrutis.
La vraie réforme de l’enseignement c’est celle-là qui doit lutter contre ce préjugé.
@Econome
pour ma part je préfèrerais nettement avoir affaire à un médecin qui ait au moins le bagage de maths de la TS (ce qui n’est tout de même pas la mer à boire), surtout à l’heure où la médecine (psychiatrie comprise) devient de plus en plus technique.
Sinon on oublie un point dans le débat : il est très possible de faire des études "littéraires" sans prérequis spécifique (d’où d’ailleurs la popularité de filières comme la psycho ou le droit..)
Par contre rattraper un niveau scientifique de base pour commencer des études de physique, maths sans avoir de bac S c’est quasiment impossible.