Arnaud Montebourg a écrit dans sa lettre à François et Martine la chose suivante :
“Il sera nécessaire d’interdire par la loi la spéculation dans l’activité bancaire avec l’épargne des Français.”
Je suis noyé dans l’incompréhension la plus totale. Car, s’il précise au dessus l’exigence de séparer banque de détail et banque d’investissement, on se demande bien ce que feront les banques d’investissement si on leur interdit de spéculer avec l’épargne des Français. J’imagine qu’elles spéculeront avec l’épargne des étrangers. Néanmoins, je crains fort que les sites de paris sportifs en ligne ne voient alors un afflux massifs de clients dont l’origine ne fera guère de doutes…
Non, vraiment, je ne comprends pas cette phrase. Vous pouvez vérifier, je ne sors pas les propos de leur contexte, cette proposition est indépendante du reste.
EDIT : en relisant, je me rends compte qu’Arnaud Montebourg veut distinguer “banques de dépôts” et “banques d’affaires” (ce qui n’est pas, en toute rigueur, la même chose que “banque d’investissement” même si on les confond souvent). L’explication est donc peut-être que la spéculation serait interdite à toute banque.
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L’explication est pourtant simple : la spéculation c’est mal, tandis que des investissements de long terme, surtout dans des actifs réels (des bonnes grosses usines sidérurgiques et pétrochimiques comme on devrait en avoir plus en France), ça c’est bien. Donc on interdit la première activité et on encourage la deuxième, et tout va mieux. Il faut vraiment être un économiste borné pour ne pas voir la différence.
J’ai l’impression que placer le mot "spéculation" et tirer à boulet rouge dessus en tous contextes c’est une manière pour pas mal de gens de porter une critique facile et démago… Surtout en ces temps peu glorieux.
Réponse de Stéphane Ménia
OK. Mais cette phrase a bien un sens tout de même, non ? Et je sais pas lequel.
Question d’un non-économiste, toujours surpris par le côté "naturel" de la spéculation en économie : une banque d’investissement n’est-elle pas destinée à investir plutôt que spéculer ?
Il n’y a pas de différence entre les deux ?
Réponse de Stéphane Ménia
Tiens, votre commentaire a été anticipé par Alexandre. Il me disait que pour beaucoup de gens quand on achète une obligation publique, c’est un investissement (dans les écoles, les routes, etc.) et que quand on la vend c’est de la spéculation. Le but d’un investissement, c’est le rendement. le but de la spéculation, c’est… le rendement. Vous pouvez ajouter des tas de motifs au milieu (ne pas investir dans les entreprises qui produisent des armes), vous aurez du mal à supprimer le motif de rendement. Vous m’excuserez de ne pas écrire dix pages pour vous répondre. Mais disons que si vous arrivez à distinguer très clairement, de façon systématique, précise et incontestable ce qui consiste à mobiliser du capital dans un but purement spéculatif (au sens de Kaldor – voir la définition dans notre lexique) et le reste (voir la définition d’investissement), chapeau. Bref, pour reprendre l’exemple des activités de marché des banques, séparer l’investissement de la spéculation pourrait nous amener à des choses assez amusantes. C’est toute la difficulté.
Il serait aussi amusant de demander à Sieur de Montebourg ce qu’il entend par "Spéculation", non ?
Réponse de Stéphane Ménia
Ben non, on peut pas lui demander tant de trucs en même temps…
ça me semble limpide : interdire aux professionnels protégés faisant profession de gérer l’épargne des français de jouer en bourse avec l’argent des déposants.
Rien ne leur interdisant de jouer avec le leur, et donc, d’assumer leurs pertes sans piocher dans les poches des déposants.
D’une manière plus générale, je n’ai toujours pas compris en quoi le fait de disposer d’une licence pour collecter l’épargne justifiait qu’on soit qualifié pour investir.
Réponse de Stéphane Ménia
Si vous séparez les banque de dépôts des autres banques, la question ne se pose plus. La seule épargne placée dans les banques autres que de dépôts sera jouée. D’où ma question.
J’ai toujours cru qu’une banque d’investissement (Investment bank) etait peu ou prou la meme chose qu’une banque d’affaires. Quelle serait la difference? Differenciez vous Investment bank de merchant bank, a l’ancienne?
Réponse de Stéphane Ménia
La distinction serait banque d’affaires = organisation des opérations de fusions et acquisitions et banque d’investissement = investissment sur les marchés. En général, je m’en tiens à ça, mais dans le langage courant, on ne distingue pas souvent les deux. Ah ben, voilà, j’ai trouvé un texte qui en cause ici.
Le problème n’est pas tant qu’il faille les séparer : le problème est qu’on se demande vraiment par quel lobbying tordu on a pu en arriver à inviter les banques à employer l’argent des épargnants pour des opérations aussi spéculatives que le financement d’états notoirement corrompus comme la Grèce, la Bulgarie ou la Roumanie.
La problème est ici politique : pas réellement économique.
Comme les coms 1, 2 et 4 : je pense que "spéculation" signifie à peu près la même chose que "vilaines choses pas belles". Et que cette phrase aurait un sens si on savait ce que Montebourg entend par spéculation.
Après, peut-être qu’il entend par là interdire les placements sur les marchés. Vus les échanges des débats, j’imagine qu’ils seraient capables de suggérer que les banques auraient le droit de prêter aux PME mais pas aux entreprises cotées en bourse, ou un truc du genre.
Si vous essayez de trouver autre chose que de la démagogie dans les propos de campagne des candidats, vous êtes mal parti…
Ce qui est terrifiant, c’est de penser que s’ils étaient élus rois comme ils le demandent, ils seraient capables de vouloir appliquer leurs déclarations. Heureusement dans le cas de Montebourg, le risque est faible (pour cette fois…)
Glass-Steagall Act
Réponse de Stéphane Ménia
Désolé, mais la réponse à la question n’est pas dans le Glass-Steagall Act. Aucune disposition de cette réglementation n’a jamais indiqué que les banques d’investissement ne pouvaient pas spéculer avec l’épargne des nationaux ou résidents. Seules les banques de dépôts avaient interdiction de se livrer à ce genre d’opérations. Pour ceux qui ne connaissent pas le GSA, une fiche Wikipédia est ici.
J’entendais avant-hier l’ex-président du CA de Dexia, Jean-Luc de Haene, déclarer tranquillement que quand Mariani avait pris son poste d’administrateur délégué, il avait examiné les comptes et se serait exclamé : "ce n’est pas un holding bancaire, c’est un hedge fund !". Peut-être, mais que faisaient les administrateurs ???
Peut être que seuls les opérations sur les commodities sont considérés comme de la spéculation
Comme ça on résout en même temps la faim dans le monde et le pb des matières premières qui font perdre de la compétitivité aux glorieuses entreprises françaises………
Rappelons qques principes de base communément admis: une banque de financement et d’investissement (corporate and investment banking) fait a la fois
* des prets aux entreprises (financement),
* du conseil (banque d’aff)
* des activites de marche (sales and trading / capital markets).
La part qui nous interesse ici car potentiellement speculative est la derniere.
Il faut la voir sous deux angles:
1. la banque comme investisseur
2. la banque comme intermediaire
1. Le probleme simple: "investir" c’est speculer, il n’y a aucune difference de nature.
Donc oui le "proprietary trading" ou "principal investment" c’est une activite de hedge fund: les banques (qque soit leur nationalite) jouent avec l’argent des depots (mais ca commence a etre interdit aux USA avec les reglementations Dodd Frank / Volcker, alors que nos banques europeennes continuent a se gaver et/ou perdre leur chemise).
2. Le probleme complexe: pour agir comme intermediaire (par exemple entre deux fonds de gestion (asset managers) on est oblige de speculer un peu. Une banque qui veut offrir des prix competitifs est obligee de faire des achats en gros, de les mettre en stock, puis de les vendre au detail (c’est le meme principe que chez carrefour). Le probleme c’est que si on achete en gros sans savoir encore a qui et quand on va vendre (market making), on est de facto en train d’investir et donc de speculer…
Et je ne parle meme pas des produits derives que l’on offre aux clients pour les aider a reduire leur risque (ex: oil hedging qui est une assurance contre la hausse du kerozene pour les compagnies aeriennes), qui creent naturellement des positions speculatives…
Bref, a part en ayant un systeme dans lequel il n’y a que des banques de depot/financement d’une part et des courtiers de bourse (broker dealers) d’autre part, il est dur d’empecher les banques de speculer, car c’est une necessite de leur metier…
Une banque c’est un commercant qui au lieu d’acheter des containers en chine achete de l’argent et des titres!
Réponse de Stéphane Ménia
Vous posez clairement le problème.
Peut-être Arnaud Montebourg a-t-il simplement voulu dire que les banques qui spéculent avec l’argent des épargnants ne pourront plus compter sur le contribuable pour éponger les pertes, sauver les clients, repêcher les traders…
Ce serait un arrêt de mort pour la plupart des institutions qui se livrent à cette activité, et elles n’hésiteront pas à prétendre qu’elles doivent fermer parce que l’État leur a interdit de travailler. Pour elles cela reviendra d’ailleurs objectivement au même.
De même que les agriculteurs dont les exploitations ne sont pas rentables racontent que l’État leur interdit de gagner leur vie en travaillant à chaque fois qu’il fait mine de leur refuser les subventions qu’ils réclament.
Vu de l’extérieur, cette manière de présenter les choses peut sembler tendancieuse, mais du point de vue politique, elle montre bien l’enjeu concret des arbitrages rendus.
"épargne des Français" => banque de dépôts "spéculation dans l’activité bancaire" => banque d’investissement
Avec le Glass-Steagall Act on interdit que les deux est lieu dans la même banque. cqfd
Je pense tout simplement que quand il parle d’épargne il entends "épargne liquide" (thésaurisation) et non "épargne d’investissement".
C’est peut être pas hyper rigoureux mais ce n’est pas non plus un cours d’économie et je me demande si vous ne faite pas un peu exprès de ne pas comprendre, par hasard?
Réponse de Stéphane Ménia
OK, je vois ce que vous voulez dire. Mais cela suppose que l’épargne est ce que vous appelez épargne liquide (disons M2 sans les billets, les pièces et quelques autres actifs moins liquides que le reste). Or, l’épargne, c’est ce qui n’est pas consommé, ce qui est bien bien plus large. Les raccourcis pratiques et pédagogiques, on en rencontre tous les jours et il n’y a pas de quoi s’insurger, je suis d’accord. Mais là, si c’est le cas dans l’argumentaire de Montebourg, c’est bien plus ennuyeux. Donc, non, je me posais réellement la question. Si j’avais par exemple voulu écrire le truc de Montebourg dans cette interprétation, j’aurais dit “l’argent des Français sur leurs comptes courants et leurs livret A”. Ou dans le genre. Approximatif, mais nettement moins ambigu.
Investissement:quelquechose sur l’avenir, durable.
Speculation:on sait pas ce qu’on achete et on s’en fout ca sera vendu dans la microseconde.
On me demanderai mon avis que j’empecherais de vendre sans avoir acheter d’abord…(et que les effets de leviers serait soumis a un credit digne d’un credit a la conso) et que j’interdirai de vendre un truc moins de 3 jours apres l’avoir achete.
Je ne pense pas que ca reduirais de temps que ca la liquidite de l’economie ‘reele’, pas contre les acheteurs/vendeurs de vent en serait bien limité..
C’est curieux, moi qui achète des actions, autant que possible, pour le long terme, j’ai toujours considéré cette activité comme essentiellement spéculative. Parce qu’il faut arrêter de croire qu’on se rémunère avec les dividendes (quand il y en a).
Cela dit, quand on revend au plus haut après avoir acheté au plus bas, on ne spécule pas, non, quelle horreur : on prend ses bénéfices (oui, le cas échéant, aussi, ses pertes). Faut pas confondre.
Réponse de Stéphane Ménia
Je ne suis pas sûr d’avoir compris si on dit la même chose ou pas. Du coup, ça m’a donné une idée de billet. D’ici quelques jours, au max.
Bon j’aime bien votre blog, c’est pour ça que je le lis. Mais vos indignations face a nos déclarations de politiciens me fatiguent.
Binh oui un politicien ne s’adresse pas aux 2% de la population qui maîtrise un peu le sujet, il s’adresse a 100% des électeurs. Alors forcement, c’est une suite de déclaration démago, démago, démago et accessoirement contradictoire et stupide… Ce qui ne veut pas dire que l’auteur est stupide, il se met au niveau qu’il pense être de son électorat.
Alors arrêtez de perdre votre temps a enfoncer des portes ouvertes et à vous émouvoir qu’un gosse de 10 ans s’enorgeuille d’avoir marqué 12 buts d’un match à 4-2.
Réponse de Stéphane Ménia
Je vois pas où je me suis indigné. Je ne comprends pas, c’est tout. Et, pour suivre votre raisonnement, c’est pas parce qu’il y a 98% qui ne comprennent pas les choses précises qu’il faut plonger les 2% dans l’obscurité sans éclairer les 98%. Et sinon, au fait, cette lettre, elle s’adressait à qui déjà ? Bref, votre conseil, ben…
Je me souviens dans Titeuf, il y a un gag dans lequel il cherche des mots de cul dans le dictionnaire, comme "spéculer".
Parfois j’ai l’impression qu’il sait mieux que les hommes politiques ce que signifie ce mot.
Je pense très franchement qu’il s’est simplement trompé : dire "l’épargne des Français", c’est presque un tic de langage dans sa situation de politicien de gauche. Il faut parler des Français, du fait que les banques les exploitent, etc. A mon avis, il ne faut pas chercher plus loin. Ce type de petite contradiction logique est très répandu parmi les politiciens, même à l’écrit.
La definition de la speculation est simple: Si vous faites monter les prix, vous speculez. Si vous les faites baisser, c’est la loi de l’offre et de la demande.
Il y a des exceptions: pour les producteurs de porc, fruits et legumes, par exemple c’est l’inverse.
c’est pourtant simple : – une banque de dépôt travaille avec l’argent de ses clients, les liquidités servant à prêter à ces mêmes clients, donc non cotée en bourse….ça ne rapporte pas grand’chose, mais qui a dit qu’une banque devait faire des profits faramineux ?
– une banque d’affaires travaille avec l’argent de ses actionnaires….qui assument les risques
simpliste ? peut-être……
Eh bien justement non, Gilberto, ils n’assument pas les risques, il suffit de voir ce qui s’est passé en 2008.
Ce que Montebourg a voulu dire, même si ce n’est pas très rigoureusement dit, à peu près tout le monde l’aura compris, à part les érudits il semble.
En gros, qu’on arrête ce système scélérat où les profits sont privatisés et les pertes pour le contribuable.