Les non-dits de la campagne : passage dans arrêt sur images.

En 2008, j’étais passé dans arrêt sur images, qui m’avait valu d’être qualifié de Man in Black, valet stipendié du grand capital. Quatre ans plus tard, j’attends toujours mon premier chèque du grand capital; mais j’ai été invité de nouveau dans l’émission, avec cette fois-ci Liem Hoang-Ngoc et Olivier Delamarche, financier et chroniqueur sur BFM. Vous pouvez aller voir l’émission (il faut être abonné) en suivant ce lien. Si vous n’êtes pas abonné, cela le mérite amplement (pour cette émission comme pour d’autres). Quelques liens autour de l’émission (j’en ajouterai d’autres au gré de l’inspiration) :

Je me suis trouvé pris en sandwich entre deux logiques. A ma gauche, Hoang-Ngoc, membre du parti socialiste, plutôt à son aile gauche; Delamarche, dont les vidéos font les délices des catastrophistes, très sceptique sur l’avenir, à ma droite. Le premier considère que la politique, la politique économique notamment, dispose d’un pouvoir considérable; le second, qu’elle n’en a aucun.

De mon côté, je suis assez sceptique lorsque Hoang-Ngoc considère possible de relancer la demande globale dans l’économie européenne; quand bien même ce serait possible, je doute que ce soit suffisant. De l’autre côté, j’ai trouvé Delamarche, qui nous annonce un défaut généralisé et l’explosion de la zone euro. Ce second scénario est évitable mais nécessite une grande créativité institutionnelle en Europe. Une garantie conjointe des dettes publiques des pays membres de la zone euro, une politique expansionniste de la banque centrale européenne, un système bancaire unifié : voilà la seule solution pour la survie de la zone euro. La seule façon de la rendre possible est un moindre pouvoir discrétionnaire des gouvernements nationaux. Et pour cela, il va falloir être créatif institutionnellement, comme le notait Dani Rodrik. Il va peut-être s’avérer que c’est impossible, que la zone euro est intenable. Dans ce cas, il faudra des gens créatifs pour organiser une sortie ordonnée de l’euro.

Sur la mesure du “coût de la présidence Sarkozy”, j’ai abordé le sujet dans cette chronique libé.

Sur le “bonneteau de la dette”, un rappel: une dette est une créance. Pour une personne endettée, il y a une autre personne qui détient un actif. la zone euro n’est pas “globalement endettée”. Il y a des agents trop endettés qui veulent réduire leurs dépenses, qui sont trop nombreux, ce qui fait que le taux d’intérêt d’équilibre est négatif. Il y a des solutions à cela : voir ce post (dont j’ai parlé dans l’émission) de Krugman et son dernier livre.

Sur le vrai problème qui est la croissance future, s’habituer à un rythme de croissance faible, voir cette chronique libé et celle-là.

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Alexandre Delaigue

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5 Commentaires

  1. Si les économistes ne montrent pas ostensiblement un front uni en public sur les questions principales, n’y a t-il pas un risque que personne ne les prennent au sérieux? Ne vaut-il pas mieux laissez les détails de côté lorsque vous passez ainsi à plusieurs à la télé?

  2. "une dette est une créance"
    OK, mais au delà des conventions comptables, une créance n’est un actif que dans la mesure où le débiteur pourra honorer les engagements que représente cette créance. Sinon, ce n’est qu’une illusion.

  3. Je n’ai pas vu l’émission mais si vous avez réussi à supporter Delamarche plus de trois minutes vous avez droit à toute mon admiration. Lorsqu’il sévit sur BFM, tout ceux qui ne pensent pas comme lui sont d’une façon ou d’une autre traités de nuls. J’espère qu’il a été correct avec vous. Si "arrêt sur image" ne l’invite pas trop souvent, il se pourrait que je m’abonne.

  4. Je pense aussi qu’à long terme nous devons envisager une croissance faible, voire nulle ou négative, ne serait-ce qu’en raison de l’épuisement des ressources naturelles non renouvelables et de la surexploitation des autres.

    Cependant je crois que le cas de la France est particulier.

    En effet notre pays dispose d’un important réservoir de croissance qui n’existe pas, ou pas au même degré, chez nos voisins : la résorption de la pénurie de logements. Il suffirait d’abolir les normes d’urbanisme malthusiennes (hauteurs limites de construction, coefficients maximaux d’occupation des sols, sites inconstructibles, classés…) pour créer un boom spectaculaire de la construction, et donc de l’emploi et des salaires.

    Notre croissance serait aussi spectaculaire que celle d’un pays qui retrouve la paix après avoir été dévasté par la guerre et qui se lance dans la reconstruction : trente huit ans de normes d’urbanisme malthusiennes ont creusé une pénurie de logements aussi grave que si notre pays avait été bombardé par un ennemi sans pitié.

    Dans un deuxième temps l’effondrement des loyers permis par la résorption de la pénurie dégagerait un tel gain de pouvoir d’achat pour les ménages, notamment les jeunes, que la croissance en serait prolongée encore quelques années.

  5. Emission intéressante et éclairante… Entre l’enthousiasme un peu naïf d’un Hoang-Ngoc et le cynisme absolu d’un Delamarche, je vous ai trouvé très pondéré et pédagogue.
    Il n’empêche que, malgré l’aversion qu’il me suscite, les thèses de Delamarche ne sont pas loin d’être les plus convaincantes 🙁

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