Le G20, pas mieux que les G8

Les communiqués issus de sommets internationaux sont toujours écrits en chêne massif, et il ne faut pas trop en attendre. Mais il y a quand même de quoi noter que le communiqué issu du G20 est un modèle du genre. Riche en intentions générales (on n’aura pas échappé à la lutte contre le réchauffement climatique et la pauvreté mondiale…), il ne fait finalement que décrire ce qui est déjà fait, insister rituellement sur la nécessité de “se coordonner” et “de faire participer les pays émergents plus activement dans les institutions internationales” sans décrire le moindre mécanisme qui permettrait d’atteindre ces objectifs. Si l’on se contente d’avoir l’intention de coopérer, sans rien changer aux raisons pour lesquelles la coopération a été insuffisante dans le passé, on n’ira pas très loin. L’ensemble des mesures préconisées (relances budgétaires, normalisation financière et comptable, réformes du FMI et de la Banque Mondiale) est soit déjà en place, soit déjà l’objet de réflexions depuis longtemps : rien dans la déclaration n’indique des moyens d’avancer plus dans ces domaines qu’auparavant.

En somme, les dirigeants du G20 décrivent le monde tel qu’il est, et affirment que promis-juré, ils feront mieux dans l’avenir. Alasdair MacIntyre comparait les annonces grandiloquentes des dirigeants d’organisations aux chamanes des sociétés traditionnelles qui, après des rituels complexes, promettaient de faire pleuvoir. Nos sociétés ne sont finalement pas si modernes que cela.

Voir par ailleurs sur Vox ce qui aurait pu être annoncé par le G20. Voir aussi la réaction – déçue – de Dani Rodrik.

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Alexandre Delaigue

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13 Commentaires

  1. "The authors … identify four priorities for action:

    * Do no harm."

    Peut-on en déduire que les auteurs sont certains de l’innocuité de toutes leurs précédentes propositions ?

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Disons qu’ils sont conscients de ce qu’il y a de mauvaises façons d’appliquer certaines d’entre elles.

  2. Manifestement, l’idée de voir les mesures qu’ils proposent appliquées par les mêmes gouvernements que ceux qui ont jusqu’à présent géré le problème ne les effraie pas.

  3. En fait il y a un grand absent à ce G20. Pas Obhama non, Stiglitz.

    Notre "brillant" prix Nobel 2001 amoureux de Fannie Mae expliquait à sa demande en Mars 2002 combien et pourquoi elle était parfaite et sans risques.

    Le lien original étant cassé depuis quelques jours…
    http://www.sbgo.com/Papers/fmp-v...

    Votre serviteur en a fait une copie depuis le cache de Google (merci Google)
    doc.laissez-faire.eu/stig…

    ——
    So how rare is the scenario in the test? In 1997, former Federal Reserve Chairman Paul Volcker wrote that the possibility of
    default if Fannie Mae met the test was “remote.” To update that analysis, we commissioned Joseph Stiglitz (2001 Nobel Prize
    winner in economics), Jonathan Orszag, and Peter Orszag to examine the likelihood of the risk-based capital scenario. Their econometric analysis found that the probability of the stress test scenario is conservatively one in 500,000 and may be smaller than one in three million. As a result, they find that the risk of a default by these companies, if they hold sufficient capital to meet the stress test, is “effectively zero.”
    ———-
    Le Mari Jaloux Freddi Mac à gardé un prospectus y faisant référence.
    http://www.freddiemac.com/corpor...

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Heu… Quel rapport avec la choucroute? Je laisse vos posts, mais n’abusez pas de ces hors-sujets. Vous avez d’autres endroits (forum) pour poster ce genre de choses.

  4. Hors-sujet sur Stiglitz ? Je ne vois pas du tout le rapport avec le G20, qui est un évènement purement gouvernemental.

    D’autre part les difficultés de Fannie Mae et de l’immobilier américain datent de nettement plus tard que 1997 et 2001.

  5. imho ils en ont déjà promis beaucoup trop !

    Mais peut-on raisonnablement s’attendre à ce que les gouvernements promettent de ne plus mettre leurs sales pattes dans la monnaie et le crédit, ce qui serait la meilleure façon d’éviter le retour des crises ?

  6. Dominique Seux livre une autre vision, moins pessimiste :

    "… il s’est passé quelque chose à Washington qui était encore peu imaginable quelques semaines auparavant. Les vingt puissances économiques de la planète ont élaboré une ébauche de doctrine commune avec des mots moins lénifiants qu’il n’est d’usage dans ce genre d’enceinte. Elles acceptent l’économie de marché, mais reconnaissent que des règles doivent être posées. Elles rejettent sans ambiguïté le protectionnisme, poison des années 1930. Elles agréent à la nécessité d’une surveillance des banques et mettent la pression sur les paradis fiscaux. Enfin, et c’est considérable, le G20 a montré, dans un paysage des puissances bouleversé, des pays développés et émergents parlant d’une même voix.

    Nicolas Sarkozy peut largement revendiquer sa part des premiers pas effectués ce week-end. Son énergie ne sera pas de trop pour maintenir l’élan dans les mois qui viennent."

    Lesechos.fr

    Réponse de Alexandre Delaigue
    On peut voir le verre un peu plein, ou très vide. Le problème de cette déclaration, c’est qu’elle ne contient rien qui la rende crédible, au delà du symbole du “on a parlé tous ensemble”. Sur le protectionnisme par exemple, la déclaration n’empêchera pas le congrès américain de voter un plan d’aide massif aux constructeurs automobiles, ce qui revient à du protectionnisme sous un autre nom. Et rien ne garantit que les négociations de Doha se dérouleront mieux qu’avant. Le reste, c’est quand même ce qui prévaut mondialement depuis des années : le comité de Bâle ne fait rien d’autre que chercher des règles bancaires efficaces par exemple. Si cela n’a pas marché autrefois, cela n’a pas de raison de mieux marcher maintenant. Des annonces concrètes, des mécanismes explicites, préciser pourquoi ce qui n’a pas marché avant marchera mieux, c’est cela qu’on aurait pu espérer. Là, rien de tel.

  7. >"Des annonces concrètes, des mécanismes explicites, préciser pourquoi ce qui n’a pas marché avant marchera mieux, c’est cela qu’on aurait pu espérer. Là, rien de tel. "

    Mais était ce seulement l’objectif de ce 1er sommet ? AD, vous ne vous attendiez tout de même que tout ce beau linge allait dresser une feuille de route précise de nature à régler la crise financière , comme ça en 1 we ?
    Dominique Seux admet lui aussi que l’on peut être déçu du G20 de ce we mais il ne s’agit bien que du 1er , d’autres suivront (le suivant au printemps prochain) qui devraient rentrer plus dans le vif du sujet.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Voir Wyplosz dans telos aujourd’hui sur le sujet. Ce n’est pas pareil de dire “nous nous engageons à ne pas…” et “nous considérons que toute action… de la part d’un pays donnera lieu de la part des autres pays à telle réponse”. L’engagement n’engage que ceux qui le croient. Si l’UE décide d’appliquer en 2009 une quelconque clause de sauvegarde vis à vis d’importations chinoises, il se passe quoi concrètement? Rien. Du coup, cette déclaration du G20 n’est qu’un chiffon de papier.

  8. ce qui me consterne est la position française, uniformiser les règles MONDIALEMENT, visiblement, le législateur français se considère infaillible.

    Cette négation de la nécessité du pluralisme comme source de progrès est vraiment un d’autodafé de tout innovation juridique future.

    Il est clair qu’avec de tels propositions, les erreurs qui seront nécessairement faites (comme elles ont été faite cette fois-ci et avant), aurons nécessairement contraint tous les comportement dans le même sens.

    Conjuguées aux politiques monétaires erronées et aux quelques facteurs qui nous sont encore inconnus, le prochain crack sera pour LE MONDE ENTIER si ce type d’idées absurde est adopté.

  9. D’un autre côté, je ne vois vraiment pas pourquoi s’en faire, puisque le protectionnisme nuit davantage à celui qui s’en sert qu’à qui que ce soit d’autre.

    Certes, la richesse globale progressera plus lentement : mais ne vaut-il pas mieux qu’elle progresse sûrement dans une partie du monde loin du G20 que par à-coups partout ?

  10. Vous n’aimez pas les grandes réunions internationales…

    C’est vrai que la photo à la fin, le communiqué final dont les mots sont soigneusement pesés, et le fait qu’une fois fini chacun fait comme il veut, tout cela a un petit parfum suranné…

    Mais l’objectif de ce genre de réunion, n’est pas de régler les problèmes. S’il y avait une solution simple à la crise actuelle, cela se saurait…. Ce qui serait grave, c’est que justement un communiqué avec des engagements contraignants émerge de ce genre de sommet. Parce que la solution personne ne la connaît et si une stratégie est élaborée en un WE, il y a de bonne chance qu’elle soit mauvaise.

    L’avantage de ce genre de sommet, c’est surtout aux dirigeants et à leurs équipes d’apprendre à ce connaître et de définir les intérêts « vitaux » des parties adverses. Et celui-ci a rempli raisonnablement son rôle.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Peut-être, mais quel est l’intérêt de la chose exactement? En quoi “se connaître et définir les intérêts vitaux des parties adverses” (on se demande comment cela peut se faire en un dîner, mais c’est un autre sujet) présente-t-il un intérêt? De façon sous-jacente il y a l’illusion que les questions économiques peuvent être traitées comme des questions diplomatiques, que les dirigeants des pays ont prise sur ces questions. Cette illusion explose à chacun des sommets de ce type, quand on compare les ambitions et les réalisations, mais cela n’empêche pas de recommencer inlassablement, simplement pour que les dirigeants continuent de fournir l’illusion à leurs concitoyens qu’ils sont importants. Je n’ai rien contre les rituels chamaniques, à condition qu’on les traite comme ce qu’ils sont.

  11. Le G20 comporte aussi un autre problème je pense: c’est son traitement médiatique.

    On parle beaucoup du credit crunch qui serait la cause de la récession qui grignote de plus en plus de terrain dans les divers écrits qu’on peut lire au sujet de la crise. Mais le resserrement du crédit est-il seulement le seul coupable du ralentissement économique?

    Pourquoi personne ne mentionne-t-il l’effet de richesse négatif dû à la plongée des actions en Bourse qui faisait pourtant couler de l’encre lors de la chute des actions en 1987?
    Et, d’un point de vue psychologique, craindre une crise grave ne serait-il pas le moyen de la rendre plus nocive encore (penser la réalité revient à la créer…)?

    Ne vaut-il pas mieux dresser un diagnostic plus complet si non exhaustif avant d’essayer de trouver la panacée et de parler de l’événement à tue-tête pour vendre du papier?

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