L’Europe en plein déni de réalité

Il y a quelque chose de tragique dans ce diagnostic sans concession fait par Barry Eichengreen du “plan de sauvetage” irlandais. Non pas que ce diagnostic critique soit difficile à faire : bonne chance pour trouver un seul économiste sérieux qui lui trouve le moindre intérêt. Les marchés l’ont salué comme il se doit. Les risques de contagion à d’autres pays ne se sont pas réduits. Mais cet échec n’est même pas le plus tragique.

Ce qui est tragique, c’est de voir l’un des meilleurs spécialistes de l’histoire monétaire et financière, partisan de l’euro et du projet européen depuis sa création (et c’est une denrée rare chez les économistes américains) se décrire désespéré par la tournure des évènements. Et évoquer (dans un journal allemand!) l’un des épisodes les plus noirs de l’histoire financière du 20ième siècle, celui des réparations du traité de Versailles (faites vous offrir cela pour votre petit noel, si le sujet vous intéresse). Celles-ci sont à l’origine, excusez du peu, de l’hyperinflation allemande du début des années 20, des difficultés économiques permanentes de la république de Weimar, et in fine de la victoire du nazisme. C’est peut-être un point Godwin, mais cela devrait rappeler que nous avons réussi à recréer le carcan monétaire et financier des années 20; face à cela l’aboulie des dirigeants européens est effrayante.

Le plan de sauvetage de la Grèce illustrait déjà cette tendance à ne pas vouloir régler les problèmes, et à les repousser à plus tard en espérant un miracle. Rappelons que celui-ci revenait à ce que le reste de l’Europe prête à la Grèce de quoi financer ses déficits, le temps qu’elle rétablisse ses finances publiques à grands coups de plan d’austérité. Dans le meilleur des cas, cela signifie que la Grèce se retrouvera dans trois ans avec une dette publique correspondant à 150% de son PIB, imposant de consacrer pratiquement 8% de celui-ci à payer les intérêts de sa dette extérieure (vu les taux auxquels elle emprunte). Une situation politiquement intenable, dans laquelle la Grèce aurait paradoxalement encore plus intérêt à faire défaut sur sa dette publique. Les taux sur la dette grecque, le cours des CDS, témoignent des inquiétudes des prêteurs en la matière.

Dans le cas grec, on pouvait toujours dire que de toute façon, la situation était très mal engagée, qu’il était difficile de faire mieux. Et soyons honnête, l’action du gouvernement grec (et l’adhésion populaire) a été plutôt dans le bon sens. Mais avec l’Irlande, on a atteint un nouveau cap, en réussissant à faire un plan de sauvetage à la fois immoral et inefficace. Le gouvernement irlandais, sous-estimant les difficultés de son secteur bancaire, avait fait deux choses. Premièrement, garantir une partie des actifs bancaires nationaux douteux, en les plaçant dans une structure, un peu comme le gouvernement français l’avait fait avec le crédit lyonnais. Deuxièmement, accorder sa garantie à l’ensemble des dettes des banques irlandaises. Le tout joint à un plan d’austérité drastique, pour préserver la confiance des investisseurs. Sauf que ces efforts d’austérité se sont heurtés à une faillite bancaire qui a dès lors fait monter le déficit public irlandais à 35% du PIB. Des déclarations allemandes indiquant la possibilité d’un défaut partiel des banques irlandaises ont alors précipité la crise en accroissant l’incertitude au plus mauvais moment.

Ce qui est intéressant, et navrant, au passage, est de voir divers europhiles se lancer dans la grande chasse au responsable. Les grecs sont punis, mais ils ont menti! les irlandais sont punis, mais leur croissance n’était assise que sur un impôt sur les sociétés faible et une bulle financière! en attendant “la croissance espagnole était un mirage assis sur l’immobilier”, et sur l’air perpétuel de “les marchés et la finance anglosaxonne n’aiment pas l’euro et veulent le détruire”.

Pour qui se souvient un minimum de l’histoire récente et de la crise asiatique, ce grand jeu de la désignation du méchant n’est pas nouveau. Les pays d’Asie étaient les “dragons” ou les “tigres” dans les métaphores paresseuses des commentateurs. Jusqu’à la crise en Thailande, qui s’expliquait par l’attitude irresponsable des financiers, mais surtout par la corruption endémique de l’économie nationale. L’Indonésie, même topo. La Corée du Sud? On a blâmé le système des chaebols et l’imbrication des banques nationales dans celui-ci. Ce n’est que lorsque la crise a touché Hong Kong, où décidément, aucune de ces explications ne tenait, que l’on a pu trouver autre chose. A l’époque de Voltaire, on faisait un auto-da-fé après un tremblement de terre pour conjurer le mauvais sort; dans le fond, nous n’avons pas tellement changé.

La réaction des dirigeants européens et irlandais était typique : parler d’autre chose. On a beaucoup débattu du taux d’imposition des bénéfices en Irlande; c’est un sujet intéressant, mais totalement à côté de la plaque. Contre toute logique, les dirigeants irlandais expliquaient qu’ils n’avaient pas besoin d’aide et que leurs banques tiendraient. On pouvait espérer que le plan de sauvetage sorte enfin de ce dialogue de sourds; il n’en a rien été. Les irlandais vont subir tout l’impact de l’austérité budgétaire pour que les créanciers des banques irlandaises puissent être intégralement remboursés. L’Europe et le FMI n’ont rien d’autre à offrir à un pays déjà surendetté qu’un peu plus de dette, qui plus est, à un taux prohibitif. Et seulement sur trois ans, parce qu’au delà, la Cour de Karlsruhe considère que ce n’est pas constitutionnel et entre en contradiction avec les traités européens. Ces fameux traités européens qu’il va falloir changer pour maintenir le fonds de stabilisation. C’est tellement simple, de changer les traités européens, avec l’unanimité des pays membres. Souvenez-vous du traité constitutionnel.

Il faut insister sur ce point : le plan irlandais (et le plan grec avant lui) signifie qu’il n’y a qu’une chose sur laquelle la BCE, les gouvernements européens, sont capables de se mettre d’accord : ils n’accepteront pas qu’une grande banque européenne fasse faillite. Et pour cela, ils se battront jusqu’au dernier contribuable et chômeur européen. Eric Cantona vous fait rire? Mais comment croyez-vous que les citoyens européens réagiront quand ils verront ce qu’ils subissent pour que des créanciers, le plus souvent étrangers, s’en sortent sans dommage?

Ce choix a été dicté par deux considérations. La première, c’était d’éviter la contagion; c’est un échec sur toute la ligne, la contagion de la crise se poursuit de plus belle. La seconde, c’est de la simple lâcheté. Si on laissait les banques irlandaises, le gouvernement grec, faire défaut, les pertes seraient concentrées sur les grandes banques européennes, tout particulièrement les françaises et les allemandes. Ce qui impliquerait soit de les laisser s’effondrer (vous avez aimé la chute de Lehman Brothers?) soit, plus probablement, de les recapitaliser. Et donc, d’expliquer à des citoyens excédés qu’il faut encore mettre la main à la poche pour sauver les banques. On peut comprendre que cette perspective n’enchante pas les dirigeants européens. Mais quelle est l’alternative?

Il est effectivement possible que la zone euro s’en sorte sans passer par des défauts et des recapitalisations-nationalisations de banques. Comme le rappelait the economist, cela implique :

– un soutien continu et à grande échelle, aides financières, rachats de titres publics par la BCE, sans inflation ni menaces sur la solvabilité des grands pays européens (France et Allemagne).

– L’adhésion populaire aux plans d’austérité et au fait de voir ses finances publiques de fait contrôlées par Bruxelles et le FMI dans les pays en difficulté.

– des réformes apportant plus de croissance économique (et il faut trouver lesquelles. Quelles réformes voulez-vous faire en Irlande, pays déjà dérégulé et à faible fiscalité?)

– la stabilisation des prix immobiliers en Europe, pas de nouvelle bulle ni de baisse perpétuelle.

– l’adhésion constante de la France et de l’Allemagne, et pas de veto de la cour de Karlsruhe.

Vous avez envie de parier?

Le problème est qu’à force de repousser les échéances et de ne rien vouloir résoudre, on se rapproche des issues les plus radicales. La sortie de pays de la zone euro, de totalement impossible, fait désormais partie des scénarios possibles. Auparavant, celle-ci semblait impossible : un pays qui sortirait subirait une telle fuite de capitaux, des banks runs, que le coût semblait prohibitif par rapport aux éventuels avantages liés à la possibilité de mener une politique monétaire autonome. Mais lorsque la fuite des capitaux et les banks runs se sont déjà produits, c’est différent.

L’alternative, c’est ce que l’on appelle en termes pudiques la restructuration des dettes, seule issue pour éviter à la zone euro le destin de l’Amérique du Sud durant les années 80. Et il faut agir vite, et ne pas faire comme si un réglement immédiat des dettes du secteur privé aujourd’hui était plus facile que des défauts publics dans trois ans. et très probablement, avoir une intégration beaucoup plus forte des budgets publics européens.

Pour les europhiles, il y a là un grand bienfait de la crise : elle permet de mettre les pays européens devant le fait accompli. Pour faire marcher l’euro, il est indispensable d’avoir un degré beaucoup plus grand d’intégration budgétaire, plus d’homogénéité fiscale, de politiques communes, etc. Un exemple de ce genre d’argumentation ici. Sauf que ce raisonnement du fait accompli néglige quelques menus obstacles :

– cela implique d’expliquer aux européens que l’Europe ne fonctionne pas, et que la solution, c’est plus d’Europe. Un raisonnement qui rencontrera sans doute un certain scepticisme.

– Un tel degré d’intégration signifierait que Bruxelles a la possibilité d’imposer des transferts significatifs d’un pays de l’Union à un autre; qu’en contrepartie, l’Europe puisse imposer leurs politiques budgétaires aux Etats. Souvenez-vous de la façon dont s’est passée la réforme des retraites en France, et imaginez qu’elle ait été imposée par Bruxelles. Croyez-vous que sa légitimité en aurait été accrue? Ou imaginez des réformes du marché du travail et des systèmes sociaux en général.

La réalité brutale, c’est que les populations européennes ne sont pas prêtes à ce genre d’évolution, et que le fait de les présenter comme des nécessités imposées par la crise et les marchés financiers ne les rendra pas beaucoup plus populaires. Alors il y a toujours moyen de passer en force, mais la légitimité de l’union Européenne n’y résisterait pas. Il faudra autre chose pour sauver l’Europe que la méthode Coué et la foi du charbonnier.

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Alexandre Delaigue

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25 Commentaires

  1. D’accord avec vous. Tout ce qui est fait consiste à essayer de reporter le problème à plus tard, en espérant qu’il sera plus facile à résoudre à ce moment-là.
    Cela dit, je me demande bien quels pas vers une résolution du problème les dirigeants européens peuvent faire de façon réaliste. Ni eux, ni les opinions publiques ne sont préparés aux solutions généralement exposées!
    Une autre chose qui me frappe, c’est la faiblesse de la couverture de ces événements par la presse française. On risque d’avoir la première faillite d’un état en europe de l’ouest depuis 60 ans, les analyses sont en général assez pauvres et wikileaks fait la une.

  2. Mais pourquoi tout ce chambard ? Après tout, les Européens se doivent de l’argent à eux-mêmes, n’est-ce pas ?

    À force de minimiser le problème de la dette publique, et de tourner en dérision en ceux qui sonnaient l’alarme, vous avez négligé un point important : on sait qui paye l’impôt, mais on ne sait pas qui paiera la dette publique. Il y a aujourd’hui une montagne de fausses créances. On sait qu’elles ne pourront pas être payées, mais on ne sait pas qui doit supporter le haircut. Cette situation encourage la fuite en avant, car chacun connaît l’adage : tant qu’on n’a pas vendu, on n’a pas perdu !

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Je ne me savais pas doté d’un tel pouvoir. Sinon, le ratio de dette publique était à combien en Irlande, avant la crise, déjà?

  3. et faire tounée la planche a billet ce n’est pas auusi une solution ?
    le danger c’est de trop la faire tourner mais si c est limité….

  4. L’affaire me semble très politique et en ce sens, les gouvernements me paraissent trés sensibles à l’opinion publique nationale et internationale ou au moins européenne. Jusqu’à quel point l’important pour les gouvernements est-il de ne pas apparaître comme celui qui mettrait fin à la zone euro ? Cela les empêchent-ils de faire avancer leurs pions tout en poussant certains autres la "faute" ? Je n’ai pas de réponse

  5. Même réaliser des réformes pour générer plus de croissance ne suffirait pas.

    Expliquons pourquoi :

    Imaginons qu’avec l’assentiment populaire, d’importantes réformes porteuses de croissance soient réalisées : le premier réflexe de ceux qui désireraient profiter de l’opportunité pour entreprendre sera de mettre leurs bénéfices hors de portée du fisc de sorte à éviter de perdre ce qu’ils auront gagné à payer des dettes qui ne les concernent en rien.

    Tant qu’il existera des solutions simples et efficaces d’optimisation fiscale, il sera illusoire d’espérer qu’une croissance économique rapide génèrera les rentrées fiscales requises pour rendre la trajectoire des dettes publiques plus soutenable.

    Et à supposer que dans un élan de grande régulation efficace l’europe parvienne à se doter d’une politique fiscale efficace, cela reviendrait à retirer aux entrepreneurs la motivation d’entreprendre. Bien entendu, cela laissera la place à d’autres entrepreneurs, moins talentueux car se contentant d’un moindre retour, pour entreprendre grâce aux réformes.

    A supposer que ces derniers soient bien que peu rémunérés suffisamment talentueux pour parvenir malgré tout à créer des richesses tout en acceptant que le produit de leur travail ne serve qu’à régler des ardoises déjà consommées, se posera un nouveau problème : de tels individus, généreux et talentueux, seront toujours bienvenus dans toute société humaine humaniste.

    Alors, résumons, pour que d’importantes réformes structurelles de libéralisation de l’économie permettent effectivement de rendre la trajectoire des dettes plus soutenable, il faudrait non seulement une certaine harmonisation fiscale à l’échelle planétaire, mais aussi que l’europe devienne une société suffisamment humaniste et généreuse pour inciter ses membres suffisamment talentueux et peu exigeant à se dévouer pour elle plutôt qu’une autre.

    Bref… beaucoup de choses auxquelles le cynique mode de fonctionnement de cette association d’intérêts nationaux qu’est l’Europe ne contribue guère, ne serait-ce que d’un point de vue : l’adhésion des citoyens à un projet social de nos jours exige, à minima, un fonctionnement démocratique, notoirement peu compatible, justement, avec la conduite d’un trop fort endettement.

    Bref…

  6. Ok, donc soit on crache sur les peuples en leur imposant de nouvelles règles iniques, soit on sort de l’euro.

    Vous finirez bien par y arriver à cette conclusion, dans une prochaine crise de lucidité.

  7. @ Alexandre

    Si vous voulez dire que l’indicateur "dette publique / PIB" ne dit pas tout, 100% d’accord. L’Irlande avait une faible dette publique, et des comptes publics magnifiques avant la crise.

    En l’occurrence, la dette publique allemande et française a eu plus d’importance que celle de l’Irlande. Elle rend nos gouvernements dépendants du système bancaire pour financer leur déficit. Lorsque les choses vont mal, les banques sont en position de dire : "Le haircut, ça sera pas pour moi !"

    Première observation : 1) Des gouvernements endettés et déficitaires ne peuvent pas faire la loi dans le système bancaire.

    De même, pour le gouvernement irlandais. Bien que peu endetté, la simple possibilité pour lui de s’endetter pour socialiser les pertes bancaires constituait un aléa moral. Sachant qu’une bulle de crédit comme en Irlande permet d’afficher des comptes publics trompeusement équilibrés, il y a là une dangereuse convergence d’intérêts : "Je te finance et tu garantis mes dettes."

    C’est l’occasion de dire qu’il y a plusieurs façons pour un gouvernement de prendre des engagements sur le futur, et que la dette publique comptable n’est qu’une méthode parmi d’autres. Il y a aussi les engagements sociaux, les garanties, etc.

    Cette tendance générale des gouvernements à prendre des engagements et distribuer des faux droits est un défaut connu de la démocratie représentative.

    Deuxième observation : 2) Nos institutions politiques incitent les gouvernements à être endettés et déficitaires (même en l’absence de guerre, ce qui est nouveau).

    Dans ce contexte, la banque centrale introduit un aléa moral supplémentaire. Elle a, potentiellement, la faculté de racheter les dettes des institutions publiques ou privées (quoi qu’en disent les traités). Pour un "petit pays" le montant des dettes publiques ou privées à racheter n’est pas énorme et la BCE peut le faire sans difficulté. Après tout, elle dispose du pouvoir de prélever un seigneuriage sur la première zone économique mondiale !

    Troisième observation : 3) L’existence d’une banque centrale incite les acteurs publics et privés à s’endetter.

    Je ne veux pas avoir l’air trop critique, même si sur la dette publique, je pense que vous…
    econoclaste.org.free.fr/d…

    Sur la conclusion de l’histoire, nous sommes d’accord. Comme tous les acteurs détiennent une part importante de leur patrimoine sous forme de créances plus ou moins pourries, il devra y avoir y avoir une déflation c’est-à-dire destruction de monnaie de banque – des haircuts ! – et le plus tôt serait le mieux.

    Cdt,
    GSF

  8. Moi ce qui me tue dans l’histoire, c’est que pendant une semaine il y avait sur votre tweeter des messages du genre "Portugal risque de quitter l’euro" et que c’est bien le seul endroit où j’en ai entendu parlé.

  9. "rachats de titres publics par la BCE, sans inflation"

    Un oxymore ! cette politique qui consiste à convertir du papier douteux, sinon toxique, en bon papier (monnaie) se nomme cavalerie. En gros les américains voudraient que la BCE mène la même politique que la Fed. Et un jour où l’autre la somme de l’argent en circulation sera supérieure a tout ce qu’elle peut payer, et nous aurons l’inflation.
    Après tout l’inflation est un bon moyen d’éponger les dettes, mais les dommages collatéraux sont incalculables, comme il est dit en introduction du billet.
    Je pense qu’il est temps de nationaliser les banques en difficulté et d’arrêter de renflouer le passif des banques au frais du contribuable sans toucher à leurs actifs.

  10. A propos d’Irlande et d’Europe, je vous ai envoyé en début de semaine un mail avec une invitation à une émission de radio… vous l’avez reçu ? 🙂

    Antoine

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Heu, non. Via l’adresse du site?

  11. Gu Si Fang
    "Je ne veux pas avoir l’air trop critique, même si sur la dette publique, je pense que vous…"

    Je ne comprends pas non plus comment on peut soutenir que le mode de financement de l’Etat (paiement au comptant par l’impôt, ou bien différé par l’emprunt ou un partenariat public privé) n’a pas d’importance.
    econoclaste.org.free.fr/d…

    En effet, utiliser le paiment différé apporte dépendance aux créanciers, illisibilité des comptes, en bref des incertitudes, conduisant à de l’instabilité et de l’injustice.
    Tandis que le paiement au comptant est tellement plus simple et clair, que je ne vois pas l’intérêt de l’endettement (hors exceptionnel).

  12. @GSF : Pas d’accord sur le fait que l’endettement hors période de guerre est nouveau. L’histoire du royaume de France est une succession de défauts sur la dette, à intervalle régulier. Louis XVI n’a pas voulu faire défaut, la révolution s’en est chargé pour lui.

    Plus généralement sur le sujet de cet article : Le problème de l’Europe reste en réalité un problème de dette publique. En particulier à partir du moment où l’Irlande a décidé de garantir la dette des banques, la dette de celles-ci est devenu une dette publique, et il faudrait réécrire toutes les statistiques de l’Irlande en incluant la dette des banques pour avoir un vrai chiffre de dette publique qui d’un seul coup n’apparaîtrait plus du tout vertueux même avant la crise.

    Or cette dette publique n’est pas vraiment un problème spécifique ni à l’Euro, ni à l’Europe.

    Les US et le Japon ont aussi un endettement public insoutenable, qui n’est pas remis en cause juste parce que les marchés ne souhaitent pas le remettre en cause, tout comme ils se sont abstenus pendant très longtemps de remettre en cause celui de l’Europe.

    Une fois ceci remit en perspective il parait plus difficile de faire à ce point porter la responsabilité de cette mauvaise gestion à l’UE. Sans l’Europe peut-être certains des emprunteurs auraient eu des difficultés à emprunter autant, ce qui les auraient forcés à la sagesse d’un certaine modération, mais est-ce bien sûr ?

    Qui a empéché l’Islande, pourtant hors zone euro, de laisser les engagements de ses banques grandir jusqu’à dépasser de très loin ce que le gouvernement pouvait prendre en charge ?
    Le même gouvernement, sans que la BCE, la commission ne le force à quoi que ce soit, ne s’est-il pas *lui* *aussi* retrouvé *contraint* et *forcé* de prendre en charge cette dette, aussi délirant que soit son niveau par rapport à son budget ?
    Heu, tant qu’on y est, quelqu’un peut-il me rappeler le miracle et l’infini facilitation qu’a produit pour le remboursement de cette dette le fait de n’être pas lié à l’euro et de pouvoir dévaluer la monnaie juqu’au point ultime, juqu’à ce qu’elle ne soit effectivement plus convertible ?

    Aujourd’hui c’est sur l’Europe que souffle la tempête. D’ici à dire que c’est la faute spécifiquement de la nullité de ses organisations, de ses dirigeants, de sa monnaie, de sa banque centrale, que ça ne serait pas arrivé si elle gérait mieux cela, c’est faire peu de cas que la même tempête a déjà ravagé d’autres zones, et qu’on peut prédire qu’elle se rendra ailleurs à la suite.

    PS : Arrêtez de copier sur l’élève Védrine pour augmenter votre vocabulaire. Sur l’internet tout se voit.

  13. Je pense qu’il faut simplement faire preuve de naïveté pour croire en l’avènement d’une Europe fédérale avec une fiscalité et un modèle social unique. Il suffit de regarder la Belgique, où les riches flamands ne veulent plus payer pour les pauvres Wallons, pour en prendre conscience. (Et la Belgique n’a jamais eu la réputation d’être peuplé de citoyens belliqueux.)
    Par contre, il est possible que cette construction Européenne, avec une zone Euro dans laquelle les Etats se livrent une guerre économique sans merci à coup de dumping social et fiscal, ne finisse par répondre aux rêves les plus fous des courants libertariens par nature, hostiles à l’Etat providence. Dans quelle mesure, cette lutte contre le déficits des pays, les mesures d’austérité qui les accompagnent, et les coups de canif répétés dans les droits des salariés, ne préfigurent-ils cet Etat à minima tant désiré par certains ?

  14. @Gribouille
    Ça pourrait en effet être une bonne idée de neutraliser ces États qui se livrent à une guerre économique sans merci.

  15. Alexandre, oui, à l’adresse chez Free. Je l’ai envoyé mardi (j’en transfère une copie).

    Antoine

  16. Ce probleme de dette publique et de dette privée me semble etre une pelote de laine avec un fil qui depasse. Il n’est pas etonnant que personne ne veuille savoir ou tirer sur le fil conduirait.

    Ce qui est sidérant c’est que personne, ni économiste, ni politique, n’a vu quoique ce soit venir alors que la dette bancaire Irlandaise par exemple est équivalente a 10 fois le PIB du pays et investie pratiquement en actif pourris sans aucune diversification.

    En fait l’Irlande, comme l’Islande était plus leveragée qu’un hedge fund. Supprimons donc les bonus des dirigeants Irlandais et Européens et "régulons" les gouvernements.

    Ceci dit en tant que probable prêteur involontaire aux promoteurs Irlandais, permettez moi de vous dire que je ne souhaite pas de coupe de cheveux et je présume que M. Sarkozy le sait et agis en conséquence. L’Irlande paiera!

  17. S’endetter pour financer des dépenses utiles et réfléchies sur le long terme, c’est bien. S’endetter pour faire n’importe quoi avec l’argent, c’est une double connerie. Malheureusement on sait ce qui s’est passé en Europe. Et combien d’autres gâchis pourrions nous citer? La construction européenne mort-vivante, l’appauvrissement des jeunes générations? L’Europe pourrait bien devenir la rust belt du monde.

  18. Belle analyse, qui me semble de plus en plus partagée. Mais les coûts politiques de la fin de l’Eurozone seraient tels que je suppose que les élites dirigeantes européennes feront tout pour éviter cette issue fatale – en sacrifiant les actionnaires et obligataires des banques par exemple… en revenant sur l’erreur initiale en somme.

  19. Lundi 6 décembre 2010 :

    La BCE a indiqué lundi avoir acheté pour 1,965 milliard d’euros d’obligations publiques la semaine dernière, soit le plus fort montant enregistré depuis le début du mois de juillet.

    "Maintenant le marché va attendre de voir ce que la BCE va faire dans les prochains jours. Il faut que la BCE soit présente pour que les écarts ne repartent pas à la hausse", selon Nordine Naam, stratégiste obligataire chez Natixis.

    http://www.boursorama.com/intern...

    Traduction :

    – Plus personne ne veut acheter les obligations pourries du Portugal.

    – Plus personne ne veut acheter les obligations pourries de l’Italie.

    – Plus personne ne veut acheter les obligations pourries de l’Irlande.

    – Plus personne ne veut acheter les obligations pourries de la Grèce.

    – Plus personne ne veut acheter les obligations pourries de l’Espagne.

    – Du coup, c’est ce pauvre Jean-Claude Trichet qui s’y colle : sur les marchés obligataires, il n’y a plus que la BCE qui achète ces obligations pourries.

    – Si la BCE arrêtait d’acheter ces obligations pourries, les taux repartiraient à la hausse.

    – La BCE est devenue une fosse à m….

  20. Bon promis, on vous en veux pas d’avoir cru que la dette n’était pas un problème.

    Moi j’ai bien voulu croire contre tout ce qu’on m’avait appris que Greenspan savait ce qu’il faisait en baissant les taux courts à 1% (et même 0,75%)… j’usqu’en Fev 2008 ou j’ai vendu tous mes titres… ouf.

    Ceux qui on vu la crise venir pour les bonnes raisons sont rares. Ceux qui en on prévu l’ampleur, le sont encore plus.

    Pour parler d’un autre genre d’erreur, je ne sais pas si "Being wrong" en parle, je recommande, la "psychologie des foules" de "Gustave Le Bon" un classique.

  21. @ Merl

    "L’Irlande paiera!"

    Imaginez que l’Irlande ne puisse pas payer, ou la Grèce. Après tout, il peut arriver qu’un emprunteur n’ait aucun moyen de rembourser, quoi qu’on fasse. On en est probablement là pour un certain nombre de gouvernements européens.

    Il n’y a pas de baguette magique. Si vous êtes remboursé, ce sera uniquement grâce à l’aide d’autres contribuables européens, à qui l’on va demander de payer une partie des erreurs des gouvernements surendettés. Pourquoi ? Pourquoi le contribuable français ou allemand devrait-il payer une partie de vos pertes ?

  22. @Gu Si Fang : J’aurais du mettre un smiley.
    Bon expliquons la tentative d’humour : Le terme aboulie est franchement un mot rare, la majorité de ses occurrences sur internet sont pour le définir et non l’utiliser, mais comme par hasard il ressort associé au manque de volonté de l’Europe dans un intervention pas très ancienne de Védrine. Je ne crois pas du tout à une coïncidence.

    Et si quelqu’un tenait à contester, je signale que Védrine utilise aussi l’expression « foi du charbonnier » dans le même texte.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Il y a une fonction “recherche” sur le site qui vous permettra de constater que j’utilise ce terme depuis 2006 sur ce blog. Il y a un autre terme que j’utilise souvent : crétin.

  23. Merci pour la référence. Cependant Stakhanov ne plaidait pas pour une fédération d’Etats européens mais se prononçait plutôt en faveur d’un renforcement du budget européen et d’une harmonisation fiscale (en encadrant les taux de certains impôts par exemple).

    L’idée n’était évidemment de faire de Bruxelles un "Washington" européen mais de renforcer l’uniformisation de la zone euro via des règles sur le niveau des taxes et en finançant massivement le développement des régions les plus démunies.

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