Alexandre a signalé une étude montrant une baisse du pouvoir d’achat des enseignants depuis 1982, étude largement reprise maintenant par les journaux (Le Monde allant jusqu’à parler de “paupérisation” ; ce qui, évidemment, par la vigueur du vocabulaire, fait partir sur des bases mouvantes). Peut-être est-il bon de préciser un élément, primordial, de la démonstration ?
Dire qu’un individu a vu son pouvoir d’achat baisser de 20% sur 20 ans, c’est dire, en simplifiant (sur un exemple pris au hasard pour les profs…), qu’alors qu’il pouvait partir en vacances 30 jours par an il y a vingt ans, il ne peut plus partir que 24 jours aujourd’hui. Mes collègues qui enseignaient il y a 20 ans déjà, peuvent globalement toujours partir autant en vacances. On en déduirait que l’étude en question est bien étrange. En réalité, et même si ce qui suit va sembler trivial à bon nombre de lecteurs (notamment parce que ce point est très clairement mentionné), il n’y a rien d’étrange. J’insiste, donc, ce billet ne s’adresse qu’à ceux qui ne comprennent pas qu’on puisse parler de baisse de pouvoir d’achat pour des gens qui ont vu croître leur revenu au dessus du taux d’inflation.
Contrairement à un salarié du privé, un enseignant (assimilé à un cadre) ne négocie pas d’augmentations de salaire au cours de sa carrière. L’avantage de la situation est que même le dernier des incompétents verra son traitement croître “à l’ancienneté” (il existe des rythmes de progression plus rapide, mais qui peuvent se traduire par des écarts d’environ 500€ en fin de carrière ; on saluera la puissance de l’incitation…). Il est normalement à l’abri des accidents de carrière qui peuvent se traduire par une baisse du salaire, non seulement réel, mais aussi nominal (à ce sujet, il n’est pas anodin de signaler qu’un nombre non négligeable d’enseignants – 80 000 paraît-il, dont moi – vont subir une baisse de leur salaire nominal dès la rentrée 2007. Là aussi, les media en parlent.) Le côté déplaisant est qu’il ne peut espérer des revenus exceptionnels. C’est ainsi que les choses fonctionnent, pour le meilleur et pour le pire. C’est un débat à sans cesse réouvrir en économie de l’éducation.
Un enseignant est payé sur la base d’un échelon, qui correspond à un indice. Chaque point d’indice à une valeur monétaire. Lorsqu’il passe un échelon, il se voit attribuer un certain nombre de points en plus, convertis en supplément de traitement. Dès lors, à partir du moment où le passage d’échelon représente une somme assez importante compte tenu de l’inflation, son pouvoir d’achat augmente, même si la valeur du point d’indice reste la même. Globalement, c’est ce qui s’est passé. Pour être franc, je n’ai pas vérifié ce point (oui, je sais, ce n’est pas sérieux, bon…), mais il me semble que c’est le cas (peut-être que le texte l’étude de référence le mentionne, mais je ne l’ai lue qu’en diagonale. Oui, je sais, ça fait beaucoup de légèreté, mais ce n’est pas gênant). Quoi qu’il en soit, cette évolution à l’avancement n’inclut pas une indexation des traitements sur le niveau des prix. Cette indexation s’opère normalement par la revalorisation de la valeur du point. C’est précisément là dessus que Gary-Bobo et ses coauteurs se sont arrêtés pour évaluer la perte de pouvoir d’achat des enseignants. En d’autres termes, si un enseignant avait vu son avancement stoppé en 1982, son pouvoir d’achat aujourd’hui serait amputé de 20%.
La morale de cette histoire est très simple : on peut tout à fait contester la progression automatique des traitements des enseignants, il reste que leurs traitements ont été indexés négativement sur l’inflation depuis plus de vint ans.
Post Scriptum: j’ai pris l’initiative de rédiger ce texte après avoir lu le billet de mon camarade Verel de Lieu Commun. Ses analyses sont toujours très mesurées. Celle-ci, dans un sens, ne déroge pas. Néanmoins, elle me semble exprimer à mots couverts une exaspération, face à ce qui pourrait être compris comme une complainte pro domo (les auteurs de l’étude ne sont-ils pas enseignants ?). La réalité est différente (en tout cas, c’est différemment que je veux la comprendre). Cette étude n’est qu’un élément de réflexion sur l’évolution des rémunérations des enseignants. Elle n’a pas vocation à gommer les autres termes du débat, mais à simplement y prendre la place qu’elle mérite. Je vous saurais gré, dans vos commentaires, de rester dans l’esprit appaisé que j’ai souhaité donner à ce texte.
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Pour bien saisir la gravité du problème, il faut comparer l’évolution du pouvoir d’achat des enseignants et des autres salariés. Sur la période 1981 – 2005, le pouvoir d’achat du salaire net annuel a baissé de 20 % pour les premiers et augmenté de 16 % pour les seconds.
Il faudrait aussi prendre en compte l’évolution du temps de travail. Les profs travaillent plus — eg, les réunions se sont multipliées, ce que l’indemnité de suivi et d’orientation (900 euros / an pour un certifié à mi-carrière) ne suffit pas à compenser. Les autres salariés travaillent quant à eux 15 % moins longtemps en 2005 qu’en 1981 (5ème semaine, 35 heures). L’un dans l’autre, le salaire relatif des enseignants du econdaire s’est effondré de 42 % depuis 1981 ! et avec lui, le statut relatif des enseignants…
Plus là-dessus :
antisophiste.blogspot.com…
C’est gentil de dire que mes analyses sont habituellement très mesurées car il est probable qu’ici je me sois laissé un peu emporté (le titre du Monde y a contribué!). Clairement, ma réaction spontanée a été "ce n’est pas possible" et de chercher l’erreur. Celle que je pensais avoir trouvé n’existait pas. Le fait d’avoir acheté le Monde à 16 h45 et publié l’article a 18 h 15 (parce que j’étais coincé ansuite) explique sans l’excuser ma précipitation. J’avais pourtant eu le temps de voir que l’étude avait été relue par plusieurs personnes dont B Belloc, donc pas lancée n’importe comment.
La différence entre l’évolution des salaires et le coût par élève reste pour moi inexpliquée (mais c’est peut être une question d’heures!)
Je reste toujours surpris du résultat présenté, surtout sur une si longue période.
Concernant le coût des élèves, il y a eu dans la période une explosion des coûts de fonctionnement, liés par exemple à l’informatisation, mais surtout à la multiplications des normes de sécurités, qui imposent une maintenance coûteuse, et des expertises qui ne le sont pas moins.
Antisophiste : “Pour bien saisir la gravité du problème, il faut comparer l’évolution du pouvoir d’achat des enseignants et des autres salariés. Sur la période 1981 – 2005, le pouvoir d’achat du salaire net annuel a baissé de 20 % pour les premiers et augmenté de 16 % pour les seconds.”
Attention, sauf erreur de ma part, les 16% incluent les progressions de carrière et l’indexation. Or, les – 20 % sont uniquement la désindexation pour les profs. Quoi qu’il en soit, je crois que dans l’imaginaire collectif, vos +16 % n’ont aucune valeur, à cause du poids du chômage dans les esprits qui, pour bien des gens, rend absurde l’idée de progression du pouvoir d’achat et place les fonctionnaires dans une situation de privilégiés. Au fond, je ne crois pas qu’il soit possible de débattre sereinement de ces questions, compte tenu de la vie politique française actuelle. C’est d’ailleurs un constat assez dramatique, car il justifie en grande partie une démarche corporatiste. Si les syndicats tendent à faire valoir l’idée qu’un bon système scolaire, c’est un système qui se préoccupe des enseignants avant tout, c’est aussi parce qu’accepter de remettre les choses à plat à l’initiative du ministère c’est exposer les enseignants (et le système dans son ensemble) à des changements tout sauf pareto-optimaux. Faisant partie de ceux qui depuis des années pensent qu’il faut envisager des changements dans notre statut, j’en reviens progressivement quand je vois ce que sont les premiers jalons. Il n’y a pas de volonté d’accroître la productivité (oh, le vilain mot !), au bénéfice de tous (des élèves mieux formés, des enseignants plus motivés et, pourquoi pas, mieux payés), il y a une volonté univoque d’économiser de l’argent. Bon, il y a beaucoup à dire sur le sujet…
Vous oubliez plusieurs éléments :
* votre analyse est juste, évidemment, ça saute aux yeux de tous les enseignants.
Mais le raisonnement des syndicats est plus subtil : à compétences et travail égaux, un enseignant débutant gagne 20 % de moins aujourd’hui qu’il y a 20 ans. Idem pour les collègues en fin de carrière.
Cela traduirait une « paupérisation » du métier, puisque dans la société, à niveau d’étude égal, mieux vaut être ingénieur que prof agrégé.
* Ceci dit, ce raisonnement est aussi spécieux que celui que vous dénoncez : tout le monde sait bien qu’il est infiniment moins glorieux d’être prof aujourd’hui qu’il y a 20, 30 ou 50 ans. Du fait de la démocratisation massive de l’enseignement, le métier d’enseignant est devenu commun. Dans les faits, il est accessible à des gens dont la formation n’est plus aussi exceptionnel : il y a 20 ans, avoir sa licence était plus rare qu’aujourd’hui, dans une proportion supérieure à 20%.
Ce que je veux dire, c’est qu’hier, un prof agrégé pouvait fièrement comparer son statut, sa rénumération et sa formation à celui d’un médecin ou d’un ingénieur. C’est beaucoup moins justifié aujourd’hui.
* et puis il y a un oubli de taille : les heures sups. Afin de pallier à l’irrégularité des effectifs, les établissements ont pris l’habitude d’utiliser largement les heures sup. Cela augmente la rénumération des profs d’autant, et croyez-moi, le résultat sur la fiche de paye n’est pas négligeable !
* Enfin, sans insister lourdement : quelle fraction de son salaire un salarié du privé donnerait-il pour avoir la sécurité de l’emploi et autant de vacances qu’un prof ? 20 % ? En tout cas, pas loin…
* la hausse des dépenses d’encadrement par élèves dans les collèges et lycées et dû pour la plus grande part à la diminution de la population étudiante (alors que le nombre d’enseignants diminue évidemment beaucoup plus lentement).
Pour vous donner mon impression générale : effectivement, le métier d’enseignant s’est vulgarisé/ Mais bon, vu qu’il y en a 600 000 environ, franchement, où est la suprise ?
Et oui, le salaire d’un enseignant n’a rien de bien enviable, vu son niveau d’étude. Ceci dit, à tout prendre, il reste encore tout à fait dans « les prix du marché », pour prendre une métaphore immobilière.
L’intégration du Glissement Vieillesse Technicité (GVT) dans le calcul de la revalorisation des traitements des fonctionnaires a été un axe de réforme majeur des politiques de rémunérations de la fonction publique.
Jusqu’en 82, il y avait :
– une politique d’indexation automatique de l’indice de référence sur la hausse des salaires du privé
– ET le GVT qui assurait mécaniquement une augmentation de 2 à 3% du salaire.
De ce fait, les salaires augmentaient beaucoup plus vite dans le public que dans le privé. Et il était nécessaire – dans un contexte de restriction budgétaire – de réformer cette double indexation.
Le choix qui a été fait dans la fonction publique et cohérent avec les choix de société fait par ailleurs. Il a consisté à sanctuariser les avantages des personnes déjà en place et donc à faire porter l’effort d’ajustement sur les nouveaux entrants.
A ce titre, l’analyse publiée est biaisée. Elle parle des professeurs en fin de carrière, mais aurait aussi bien pu parler des professeurs en début de carrière. Le fait est que les conditions de rémunérations (et de travail) proposées ne sont pas un obstacle au recrutement des professeurs.
Sur le fond, un professeur en fin de carrière fait grosso-modo le même travail qu’un débutant. Il est « anormal » d’un point de vu économique, qu’il soit rémunéré entre 70 et 90 % de plus qu’un jeune.
Henri : “les conditions de rémunérations (et de travail) proposées ne sont pas un obstacle au recrutement des professeurs.”
C’est bien vrai. Il faudra analyser cette question précisément, disons dans 15 ans.
“Sur le fond, un professeur en fin de carrière fait grosso-modo le même travail qu’un débutant. Il est « anormal » d’un point de vu économique, qu’il soit rémunéré entre 70 et 90 % de plus qu’un jeune.”
Ca, c’est typiquement le genre de formules à l’emporte-pièce qui ne mangent pas de pain, ne reposent sur rien que l’opinion de celui qui les formule, font abstraction d’éléments fondamentaux pour juger des faits et rendent tout débat économiquement fondé impossible. D’ailleurs, j’attends avec curiosité les réponses qui vont revenir. Elles démontreront ce que je vens d’écrire. Et comme je me sens d’humeur taquine, je ne censurerai aucun commentaire, aussi crétin soit-il. Allez, c’est happy hour…
Henri : la rémunération en dessous de la productivité en début de carrière et au-dessus de la productivité en fin de carrière a montré ses qualités dans certains modèles de rémunération en asymétrie d’information. L’idée de base est que lorsque vous ne pouvez pas vraiment controller tout ce que fait votre salarié, l’inciter à être loyale en décallant sa rémunration vers une période ultérieure n’est pas forcément stupide. Le risque pour lui de se faire prendre en train de ne pas faire tous les efforts est plus élevé.
@William, je suis entièrement d’accord avec vous de façon générale. Dans le cas particulier de la fonction publique, personne (ou presque) ne se fait prendre.
@SM, je suis désolé que ma réponse vous ait blessée. Ce n’était pas mon intention. En 82, le gouvernement (et les syndicats) avait deux approches :
– Supprimer (ou réduire fortement) le GVT
– Supprimer l’indexation des revenus des fonctionnaires.
La deuxième a été choisi parce qu’il est plus facile de se mettre d’accord sur le dos de personnes qui ne participent pas « encore ». Le même mécanisme a été mis en place pour les dockers, les fonctionnaires municipaux, les salariés de France telecom etc…
William : je vous sais gré de placer ça. Mais, comme vous pouvez le constater dans la réponse d’Henri, il est hélas difficile de se faire entendre sur ce registre. Il va bien falloir que je me mette à rédiger des textes fournis sur des choses comme ça.
Henri : vous ne me blessez pas ! Ce n’est même pas sur ce que vous rappelez que je m’exaspère. C’est sur la remarque au sujet de la progression des salaires. Si les choses étaient simples, on le saurait. Or, d’une part, il y a des éléments économiques pour justifier cette progression des salaires sur le cycle de vie. D’autre part, comme William le mentionne implicitement, l’asymétrie d’information est très forte pour un certain nombre de métiers de la fonction publique. Et je ne crois pas trop m’avancer en disant que pour les enseignants, c’est particulièrement vrai. On est ici, comme dans d’autres administrations et même d’autres métiers du secteur privé, dans une situation où déduire l’effort des résultats est complexe. Certains se servent de cette caractéristique pour tirer au flanc, d’autres pour refuser une évaluation au mérite dont ils craignent, non pas qu’on les démasque en train de buller, mais qu’elle ne soit pas juste. Les expériences d’autres pays, dont les Etats Unis, montrent sur ce point qu’il faut se garder de conclure trop vite. Et, si vous voulez mon avis, il est que si le ministère voulait faire avancer les choses, il ne ferait pas l’économie d’une mise en place de dispositifs d’incitations basés sur une mesure des performances. Prudemment, rigoureusement et en y mettant les moyens nécessaires. Hélas, ce n’est pas prêt d’arriver pour diverses raisons. Bref, dans le cadre actuel, c’est-à-dire en regard du statut de fonctionnaire, la tendance des rémunérations en fonction de l’âge, aussi absurde pourrait-elle paraître dans un monde idéal, ne peut être balayée d’un revers de la main. J’ajoute, à la marge, que c’est tout de même une pratique qui déborde des adminsitrations publiques… Mais ce n’est pas mon propos.
Dans beaucoup de métiers, et je ne vois pas pourquoi cela serait très différent chez les professeurs, la différence d’efficacité entre un débutant et un expérimenté est assez forte, mais elle varie ensuite peu au delà de 5 à 8 ans d’expérience. On observe même qu’une partie de ceux qui font le même métier dans le même environnement pendant 15 ou 20 ans se sclérosent. Dans cet esprit, il serait judiceux de demander aux professeurs du secondaire de changer d’établissement (dans l’idéal de passer de collège au Lycée et réciproquement) tous les dix ans (c’est une recommandation du rapport Quintreau pour l’ensemble des métiers)
L’ancienneté est un moyen assez fruste mais d’une grande simplicité pour mesurer l’évolution des compétences, ce qui fait qu’il a été beaucoup utilisé. Le privé s’en détourne progressivement parce que la vitesse d’évolution des techniques et des organisations fait qu’une personne de 35 ans est souvent plus performante qu’une autre de 55 ans et parce que les salariés n’imaginant plus de faire toute leur carrière dans la même entreprise n’acceptent plus le deal d’être sous payé en début de carrière en sachant qu’ils seront sur payés en fin de carrière.
@Verel,"On observe même qu’une partie de ceux qui font le même métier dans le même environnement pendant 15 ou 20 ans se sclérosent. Dans cet esprit, il serait judicieux de demander aux professeurs du secondaire de changer d’établissement (dans l’idéal de passer de collège au Lycée et réciproquement) tous les dix ans"
Je ne conteste pas le risque de sclérose, mais le remède proposé me paraît du plus pur style technocratique.
D’abord, à quel genre de "demande" pensez vous? s’agit-il d’imposer ou d’inciter? Dans ce dernier cas se pose le problème du coût : s’il s’agit de faire passer un professeur d’un collège de ZEP à un lycée de centre ville, il n’est pas nécessaire de lui demander de changer, il s’en charge très bien tout seul, mais s’il s’agit d’obtenir le mouvement inverse par voie d’incitation financière, il va falloir y mettre le prix, êtes vous sur que le jeu en vaille la chandelle? Cette question se poserait d’ailleurs aussi dans le cas d’un mouvement imposé : quelque sclérosé qu’il soit le vieil agrégé de math n’est il pas plus efficace face à ses élèves de terminale qu’en stage de remise en question forcé face à des collégiens de ZEP.
Puisque c’est "Happy Hour", je me risque.
Pourquoi ne pas autoriser les établissements scolaires à recruter librement leurs enseignants, et autoriser l’enseignant à négocier modalités de service et salaire avec son chef d’établissement devenu employeur ?
(remplacer chef d’établissement par maire, recteur, préfet au besoin qu’importe)
Je tiens à faires quelques remarques
Statut cadre:
Les enseignants se considèrent à tort comme des cadres voir cadres sup, intellectuellement peut-être … mais concrètement non.
En rentrant dans une entreprise avec une licence, vous ne serez pas cadre.
Le niveau de recrutement d’un certifié est Bac+3 (licence), d’un agrégé Bac+4 et certains PLP sont recrutés à Bac+2. Bien sûr certains passent le concours avec des diplômes largement supérieurs aux prérequis.
Et tous ces gens seraient cadres … bien voyons.
Dans le privé, si vous répondez à une annonce de secrétaire à bac +2, même si vous avez une Bac+5 vous serez payé à bac+2 et vous ne vous considéreriez pas cadre.
Le salaire à l’ancienneté:
C’est un aberration économique. Dans le privé c’est la même chose. En gros , la loi interdit de baisser le salaire. Une personne peut devenir moins efficace. Elle doit alors être payées moins.
Mais tout le monde préfère le confort d’un salaire détaché des performances.
Je mets 4 heures pour faire une tâche, mon collègue 8 heures. au bout 4 heures … et bien je n’arrête pas de travail je m’attèle à une autre tâche pour les 4 heures restantes. Mon chef voit bien que je suis plus efficace que mon collègue … j’aurai sûrement une petite augmentation par rapport à lui , allez +10%, mais jamais je serai payé le double , bien qu’abbattant un boulot double.
En toute logique, les gens devraient être payés à la tâche.
Les grades enseignants:
Je pense également que les différents grades d’enseignants ne sont pas assez … comment dire … différents. A la fois en niveau de recrutement , en salaire, et selon les tâches occupées.
Le fait que des agrégés enseignent en collège, des certifiés en prépa … ne participe pas à une vraie discrimination des grades et par là de la carrière. Un certtifé au 2/3 de sa carrière gagne beaucoup plus qu’un agrégé débutant …
Un certifié enseigant en terminale, voulant progresser … peut passer agrégé et enseigner en 6ème, pour quelques euros de plus, c’est stupide.
Donc :
Un concours à Bac pour les professeurs des écoles, n’enseingnant que dans le 1er degré à 1000€/mois
Un à bac +3 pour les certifiés et PLP en collège et LP à 1500€
Un à Bac +5 pour les agrégés en Lycée à 2500€
un à bac +8 pour les MDC et PU en Fac. à
Avec de réelles possibilités de promotions.
Albert est content.
@Albert : Quelques remarques sur vos remarques :
– je n’ai jamais parlé de “statut” cadre, j’ai simplement dit “assimilé”. Je ne vais pas faire une analyse institutionnelle ou de syntaxe sur le concept de cadre. Mais, s’il est fort exact que les enseignants ne sont pas des cadres (ils n’encadrent personne hiérarchiquement), il faut noter que les profs étant agents de catégorie A de la fonction publique, le terme, quoiqu’inapproprié, ne semble pas si abusif. Puisque vous parlez de diplômes, je m’interroge sur le statut à donner aux “cadres maison”, dont le nombre est certes en déclin, mais qui ont parfois Bac – 3. Ensuite, les cas de recrutement à bac + 2 sont, à ce jour (mais je pense que ça augmentera dans le futur – voir mon texte du 25 janvier), très limités, à des disciplines où les diplômes supérieurs manquent. Bref, cette discussion sur la question de cadre est stérile, d’autant que la nomenclature des PCS a tranché depuis longtemps en retenant le vocable de “Cadres et professions intellectuelles supérieures”. Et devinez qui sont les professions intellectuels supérieures ? Après, que vous estimiez cette fréquentation nomenclaturale insultante pour les cadres, c’est votre droit le plus strict. Mais que l’usage retienne du coup que prof = cadre ne devrait pas indigner plus que cela.
– En ce qui concerne la rémunération, vous avez une vision très étriquée de la question. En réalité, parler d’aberration économique est une réelle aberration. Vous devriez consulter certaines théories du marché du travail, pas franchement antilibérales, qui présentent les fondements économiques de mécanismes d’assurance et autres optimisation de la productivité par le lissage des revenus sur le long terme.
– La phrase “en toute logique les gens devraient être payés à la tâche” relève d’une profonde ignorance de ce qu’est la production. Même d’un point de vue strictement technico-économique, il y a des tâches, des secteurs, des métiers qui se prêtent plus que d’autres à des rémunérations à la tâche ou à un mélange de fixité et de rendement. Mais c’est loin d’être le cas de tous. Je mets votre présomption sur le compte d’un biais cognitif à rattacher à votre domaine d’activité. Sinon, c’est que vous avez trop lu de BD sur l’économie de marché.
– Sur la question de la rémunération à l’ancienneté, j’en parlerai bientôt.
– Entièrement d’accord avec vous sur le décalage persistant et néfaste entre grade et niveau d’enseignement. C’est extrêment désincitatif. Sur le terrain, il faut cependant savoir que ces incongruités ont plus tendance à se réduire que l’inverse. La belle époque des certifiés intrigants (et d’une incompétence à la hauteur de leurs intrigues) qui se constituaient des services complets en BTS pendant que les agrégés, plus jeunes en général, se farcissaient les classes inférieures est plutôt révolue, par l’action des chefs d’établissement et des inspecteurs. Je crois me souvenir qu’on doit à Allègre d’avoir fait passer des instructions en ce sens. Et, globalement, je crois pouvoir dire qu’elles sont bien suivies dans ce cas.
– Sur les grades, concours et rémunérations, c’est marrant, mais moi, question cohérence et efficacité pures, j’aurais simplement supprimé l’agrégation. Bon, vous pouvez vous faire vos petits projets chiffrés, c’est sûr. Mais une chose est certaine, je ne confierais pas volontiers ma gamine de moins de 10 ans à un bonhomme payé 1 000 € par mois pour assurer son éducation scolaire et sa sécurité, pour le même prix…