Discussions autour de l’effet de serre

(Ou Les Inuites viendront-ils boire des bières avec nous quand ils n’auront plus de glaçons à mettre dans leur Casanis ?)

Alors que le protocole de Kyoto est en application par ses pays signataires depuis un an, deux idées semblent aujourd’hui faire pour ainsi dire consensus : premièrement, le réchauffement de la planète a lieu, les émissions humaines de gaz à effet de serre y contribuent de façon significative; et il va avoir des conséquences importantes, même si leur ampleur exacte est inconnue. Deuxièmement, une certaine dose d’intervention est nécessaire pour limiter, autant que possible, ce phénomène et ses conséquences. Au delà de ces points de consensus, néanmoins, beaucoup reste en suspens. Quels moyens d’action employer? L e protocole de Kyoto est-il un bon moyen de lutter contre l’effet de serre? L’effet de serre doit-il être une priorité, ou y a-t-il des problèmes plus urgents, comme l’ont affirmé les auteurs du Consensus de Copenhague? Le cybercafé des sports a ouvert son zinc et ses fûts de bière pour accueillir Alexandre Delaigue, d’Econoclaste, et Antoine Belgodere, d’Optimum, pour discuter de ce sujet.

Econoclaste-AD : Il me semble qu’un point de départ possible sur un sujet aussi vaste que l’effet de serre pourrait être ce récent article de Brad de Long dans project syndicate, dans lequel il fait un bilan assez noir de la situation des politiques environnementales vis à vis de l’effet de serre. Selon lui, nous sommes dans une décennie perdue, par conjonction du protocole de Kyoto et de l’aveuglement de la politique américaine. Le protocole de Kyoto ne fonctionnera pas, parce qu’il fait trop peu et trop à la fois. Trop peu, parce qu’il exclut les pays en voie de développement, comme la Chine ou l’Inde, des contraintes, alors même que les pays en développement seront responsables de la moitié des émissions de gaz à effet de serre d’ici une cinquantaine d’années. Et trop, parce que du coup, il fait supporter l’essentiel de la charge sur les pays développés maintenant, et qui plus est, en imposant des réductions très fortes tout de suite, alors que de ces réductions n’auront qu’un effet minime sur le réchauffement de la planète. On peut y ajouter un élément : les principaux pays amenés à souffrir de l’effet de serre seront les pays en voie de développement, ceux qui sont situés en zone côtière (comme le Bangla Desh) ou ceux d’Afrique sub-saharienne (voir cet article de Schelling). Enfin, il a pour effet pervers d’encourager les mauvaises politiques économiques : le seul pays qui pourra vendre des permis de pollution est la Russie, uniquement du fait des avanies économiques des années 90; Les autres pays signataires sont bien partis à la fois pour payer très cher, et pour ne pas atteindre leurs objectifs. Les économistes ont soutenu le mécanisme des permis de pollution plutôt que celui de réglementations univoques, pour devoir constater maintenant que ceux-ci ont des effets pervers.
Dans ces conditions, il y avait une opportunité à proposer d’autres mécanismes, quitte à sortir du protocole de Kyoto, mais en donnant l’exemple de politiques plus efficaces, comme une taxe sur les émissions de carbone (donc, une taxation des carburants) jointe à un soutien massif à des technologies économes en carbone, qui permettraient à terme aux pays pauvres de se développer en suivant une trajectoire technologique moins polluante que celle qu’ils ont adopté jusqu’à présent. Au lieu de cela, l’administration Bush a nié le problème du réchauffement, voir l’a amplifié, en voyant comme “solution” aux problèmes énergétiques le fait de pomper encore un peu plus de pétrole.
Le résultat, c’est un débat absurde, dans lequel la dénonciation rituelle des américains remplace toute réflexion sérieuse sur les effets réels du protocole de Kyoto. Pendant que les uns s’attachent à un protocole mal fagoté qu’ils ne respecteront pas, d’autres font la politique de l’autruche. Quels mécanismes faudra-t-il mettre en place après Kyoto? Sinon, un peu de sucre dans votre verveine?

Optimum-AB : (c’est sympa dans le coin !) Voilà une bonne entrée en matière. Nul besoin de s’interroger sur l’opportunité de sortir de Kyoto pour proposer d’autres mécanismes, puisque Kyoto est un gros CDD qui prendra fin en 2012. 6 ans pour se mettre d’accord sur un nouveau texte et le faire ratifier, c’est en fait assez court, surtout si l’on souhaite intégrer la Chine, l’Inde et le Brésil à la fête.

Dans la recherche des mécanismes à mettre en oeuvre, il faut avoir en tête, notamment, les deux éléments suivants : 1) le climat est un bien public global, et 2) l’effet de serre est produit par des ressources non renouvelables (gaz, charbon, pétrole), sujettes à une tarification de rente.

Si le problème était interne à un pays, le monopole de la violence légitime aurait intérêt à demander à son ministère de la planification centrale de calculer la quantité optimale de pollution, puis il répartirait cette quantité sous forme de permis d’émission entre les pollueurs du pays. Les pollueurs qui ne respecteraient pas le quota seraient facilement contrôlables par la justice locale. Le problème de l’effet de serre, c’est qu’il est un bien public qui dépasse les frontières. Les efforts faits par un pays pour diminuer ses émissions n’ont qu’un faible impact sur les dommages subis par ce pays. Une attitude d’équilibre, au sens de Nash, consisterait, pour un pays, à bénéficier des efforts des autres sans y contribuer soit même. Ce qui remplace l’Etat, dans les relations internationales, ce sont les traités et accords. Mais leur pouvoir de contrainte est bien moindre. Pour qu’un nouvel accord fonctionne, il faut non seulement que les pays signataires aient intérêt à signer, mais également qu’ils aient intérêt à respecter leur accord. A ce titre, il paraît utile d’éviter des bourdes comme celle de Kyoto qui consiste à faire subir à un pays particulier (en l’occurrence les USA) l’essentiel du coût de la politique de réduction. Ca peut poser un problème éthique, de formuler les choses d e cette façon, dans la mesure où il semble que le pays qui est à la fois le plus riche et le plus gros pollueur devrait faire le plus d’efforts. Et pourtant, dans l’espèce d’état de nature hobbesien qu’est le monde des accords internationaux, ces considérations sont de peu d’utilité pratique.

Le problème de la rente est moins connu et plus pernicieux. Le prix des énergies fossiles intègre une part importante de rente de rareté. De ce fait, tant que ce prix reste supérieur au coût marginal d’extraction et de raffinement, il est très sensible aux fluctuations de la demande. Donc, si un groupe de pays qui coopèrent met en place une politique visant à contracter la demande, cela entraînera vraisemblablement une baisse du prix pour les pays qui ne coopèrent pas (soit en droit, soit en fait). Cette baisse des prix pourrait bien avoir pour conséquence d’inciter les autres pays à polluer davantage, rendant inutiles les efforts des premiers. De la même manière, une anticipation par l’OPEP d’une hausse des taxes dans l’avenir pourrait bien la conduire à baisser ses prix aujourd’hui. (voir, pour ceux qui ne sont pas rebutés par l’économie mathématique, cette note (pdf) d’André Grimaud de Toulouse, qui commente un article de Schou non accessible aux non abonnés à Science Direct)

De ce point de vue, l’option qui passe par la recherche dans les énergies propres apparaît comme un « second best » intéressant. Là aussi, il y a un phénomène de passager clandestin. Mais un accord entre un certain nombre de pays pour investir massivement dans la recherche sur le renouvelable est probablement plus facile à tenir, et surtout, les résultats de cette recherche permettraient d’obtenir plus facilement des efforts de tous les pays, dans la mesure où ils rendraient ces efforts moins coûteux.

Econoclaste -AD : Le problème, c’est de trouver un mécanisme qui permette à la fois de réduire les émissions, d’inciter à la recherche de technologies. Sur ce plan, je ne suis pas forcément aussi pessimiste sur la nature “hobbesienne” et menée par les intérêts nationaux des relations internationales. Etre celui qui pollue, qui trahit un engagement, peut avoir des conséquences : la réputation et les engagements pris ont une valeur dans ce domaine, tout comme les symboles. Plutôt qu’un arrangement entre pays, avec tous les inconvénients que cela produit, il me semble que deux directions pourraient être prises : celle du développement d’une taxe sur le carbone dans les pays développés, manifestant leur engagement à lutter concrètement contre l’effet de serre; ensuite, la technologie économe pourrait venir spontanément des incitations des entreprises et des individus, quitte à faire l’objet de subventions dans le même temps : mais si la taxe est fixée à un niveau satisfaisant, une subvention serait inutile.
Parce qu’il me semble qu’un autre aspect qui ne fonctionne pas dans les techniques du protocole de Kyoto – et c’est un comble, tant les économistes ont poussé à la roue pour que cela soit mis en place – c’est le principe des permis de pollution. La question n’est pas de critiquer l’outil en soi (son principe a été expliqué dans un sympathique blog), mais de constater que l’ensemble est peu approprié au problème. Si le carbone est un problème, il est légitime que plus un pays produit de carbone, plus il paie. Avec Kyoto, consistant à choisir une date arbitraire (1990) de référence, et à imposer à tous les pays des objectifs de réduction de pollution par rapport à cette référence, quitte à acheter des permis aux pays qui dépassent leur quota, on atteint vraiment un système contre-productif. Contre-productif parce que les pays qui polluent peu paient beaucoup (il leur est difficile de réduire leur pollution), à l’inverse de ceux qui polluent fortement; La charge est tempérée par la possibilité d’acheter et de vendre des quotas, mais cette possibilité d’achat et de vente a un effet pernicieux, qui est d’encourager les pays dont les politiques économiques sont mauvaises et dont la croissance est faible à continuer (voir l’exemple de la Russie, incitée à conserver son système économique et énergétique inefficient par le fait qu’en pratique, celui-ci lui permet de vendre des permis).
Donc je pense que la taxe, s’appliquant dans les pays développés, est la meilleure solution, à la fois pour réduire les émissions et pour faire émerger des technologies économes. Ensuite, il y a un mécanisme de coopération international qui pourrait fonctionner pour à la fois coordonner les efforts, et éventuellement mener un effort concerté envers les pays en voie de développement pour les aider à adopter des technologies économes, c’est le modèle de l’OTAN. Car après tout, le système de l’OTAN, avec un leadership affirmé, ne fonctionne pas si mal; certaines recherches montrent que la coopération en matière de défense n’a pas trop provoqué d’effet de free riding (je reconnais que ces recherches sont assez contestables, néanmoins, l’alliance de l’OTAN a infiniment mieux fonctionné que beaucoup d’autres mécanismes de coopération internationale).
Mais un tel mécanisme requiert une intervention importante des USA, qui pour l’instant ne coopèrent pas à la réduction de l’effet de serre. Ce qui maintient le mauvais système de Kyoto faute d’autre chose. Mais tout cela pourrait changer; après tout, l’idée d’une taxation accrue du carburant commence, là bas, à faire son chemin, essentiellement sur la base de la volonté de réduire la dépendance vis à vis du Moyen-Orient. Et les gouvernements changent, les mentalités aussi. En attendant, et paradoxalement, ce sont les prix élevés du pétrole qui contribuent le plus à la lutte contre l’effet de serre dans les pays riches.

Optimum AB : Ah mais… je ne demande qu’à être optimiste moi ! Cela dit… faisons le point. A côté du pays qui ne s’est finalement engagé à rien, il y a des pays qui ne vont pas respecter leurs engagements, et des pays qui vont les respecter, mais il faut voir comment. Du côté de ceux qui ne vont pas respecter leur part du contrat, prenons l’Espagne et l’Irlande. Ces deux pays ont connu des succès en matière de croissance, qui ressemblent fort à un rattrapage Solowien. Les négociateurs de Kyoto, sentant venir le coup et ne voulant pas leur imposer un objectif de dépollution qui fasse obstacle à ce rattrapage, leur ont accordé un objectif très large, puisqu’il s’agissait d’augmenter leurs émissions respectivement de 15% et 13% par rapport à leur niveau de 1990. Autrement dit, là où la plupart des pays se sont engagés à réduire leurs émissions, eux se sont engagés à ne pas trop les augmenter. Le problème est qu’en 2000, ces pays en étaient déjà à +32% et +24%. Soyez sincère, quand vous pensez à l’Espagne et à l’Irlande, l’image qui vous vient spontanément en tête, c’est celle de deux Etats infréquentables qui ne font rien pour respecter leurs engagements en matière de développement durable, ou celle de deux succès économiques des années 90 – 2000 ? Inversez la question en pensant à la France ou à l’Allemagne : pensez vous qu’un seul de leurs dirigeants actuels ou récents aurait refusé un ou deux points de croissance en plus pour respecter Kyoto ? D’autres pays respecteront probablement leurs engagement en utilisant, entre autre, les mécanismes de développement propres, une fumisterie qui consiste à alléger la contrainte d’émission en contrepartie d’aides au développement des pays pauvres, si cette aide est à base d’énergie propre. On touche là une des questions soulevées par le consensus de Copenhague, que vous évoquiez. Kyoto ou pas, les pays de l’annexe B fournissent de toute façon une aide aux PVD. Ils seront certainement incité à donner un contenu plus écologique à cette aide. Mais du coup, l’aide en elle-même ne sera-t-elle pas moins efficace du point de vue premier qui est celui de la réduction de la pauvreté ? Les éoliennes, c’est très bien, mais si, pour une somme donnée, on peut fournir moins d’électricité aux villages reculés en Afrique avec un parc éolien qu’avec de l’énergie fossile, est-on sûr que ce soit une bonne chose d’opter pour le renouvelable dans ce cas ? Autre subterfuge, si je puis dire, des pays vertueux : ils vont tenter de comptabiliser l’effet de l’afforestation et de la reforestation, qui ont pour vertu de séquestrer le carbone dans les arbres en croissance (encore que des découvertes récentes mettent en cause cette idée). C’est très bien l’afforestation, mais c’est d’une efficacité limitée, puisqu’une fois qu’une forêt est arrivée à maturité, elle devient neutre en carbone : le carbone émis par ses arbres qui pourrissent est tout juste absorbé par les jeunes arbres qui les remplacent. Du coup, tant que les forêt pousse,  les émissions nettes du pays (émissions brutes – séquestrations) sont stabilisées, mais ça ne passe pas par le recours à un système productif plus propre. L’intérêt à long terme est donc limité, même si, bien sûr, il serait bête de ne pas le faire. Ce qui est gênant, c’est que ça puisse servir à masquer la faiblesse des efforts pour rendre plus propre le système productif…

Econoclaste AD : Vous êtes finalement bien négatif, là! Tout ce que vous mettez en évidence, ce sont des défauts inhérents au protocole de Kyoto. Il serait dommage de déduire de ce protocole que la seule alternative existante est entre croissance économique et réduction des émissions de carbone. Le but du jeu, c’est au contraire d’orienter la croissance économique vers un système économe en carbone. Si on crée dans un pays une taxe sur les émissions de carbone, à fiscalité totale inchangée (donc en réduisant d’autres taxes) l’effet négatif sur la croissance devient nettement plus tolérable (après tout, les prix élevés du pétrole actuellement ne sont pas si nuisibles que cela pour la croissance), et vous sortez de l’alternative. Le tout en créant des incitations pour réduire les émissions. Il n’y a même pas besoin de coordination internationale pour faire cela. C’est le problème lorsqu’on adopte un grand plan, avec des critères administratifs négociés, genre “objectifs de réduction”. C’est le problème classique de la planification : dès lors qu’une variable synthétique est utilisée pour évaluer une performance, les actions des agents lui font perdre toute pertinence. Si on sort de cette logique des objectifs pour chercher des solutions pragmatiques, on peut espérer atteindre des résultats. Ne faut-il pas plutôt se demander ce qui peut être fait que décréter a priori et sur la base d’un programme mal fait que rien ne peut être fait?

Optimum AB : C’est vrai, c’est la verveine qui a un peu trop infusé, ça me monte à la tête…  il me semble qu’il y a des choses efficaces à faire, et j’en vois deux en particulier :

La première rejoint ce que vous disiez sur l’innovation. Je suis d’avis que de gros appels d’offre pour équiper les bâtiments publics en matériel énergétiquement propre peut, au-delà de l’effet direct de ces investissements, accélérer la dynamique de la recherche sur les énergies renouvelables, créer des économies d’échelle et du learning by doing. Le problème sera réglé quand l’utilisation des énergies non polluantes sera aussi rentable que celle des énergies fossiles dans un grand nombre de domaines. On peut faire un parallèle avec cette tarte à la crème que sont les commandes publiques de l’armée américaine, et leur impact technologique.

Econoclaste AD : C’est effectivement un point important. Vous allez dire que je suis monomaniaque mais un système de taxes peut aussi jouer un rôle pour inciter aussi les agents privés à chercher à s’équiper de matériel énergétiquement plus efficient.

Optimum AB : Je suis d’accord avec ça, à condition que cette taxe ne soit pas trop compensée par diverses aides aux taxis, aux routiers et autres utilisateurs de chaudières au mazout.

Econoclaste AD : Et la seconde chose à faire?

Optimum AB : La seconde consiste à commencer enfin à considérer que la lutte contre les conséquences du réchauffement climatique sont sur le même plan que la lutte contre ses causes. Pour atténuer les drames humains liés aux déplacements de population massifs probables au Bangladesh, il est aussi pertinent de diminuer les émissions de carbone pour retarder l’échéance que de commencer à construire des villes nouvelles pour que les populations concernées puissent se reloger progressivement. J’ignore pourquoi la question de l’adaptation  au changement climatique est à ce point négligée dans le débat public.

Econoclaste AD : Vous avez tout à fait raison de souligner cela. Après tout, supposons que le réchauffement soit un phénomène entièrement naturel, par exemple provoqué par l’activité solaire : l’action s’orienterait vers la gestion des conséquences. Ceci d’autant plus qu’elles sont importantes, mais que c’est un domaine ou il est possible de faire des choses, parce que les conséquences du réchauffement sont progressives, et pas immédiates, comme dans le cas d’un tremblement de terre. Il est donc possible de faire de la prévention…

Optimum AB : …encore qu’il faille être conscient des limites de cette possibilité : un respect du protocole de Kyoto, USA inclus, ne déplacerait que de quelques années vers la droite (environ 5 années) la courbe présentant l’évolution dans le temps des températures (voir les différents scénarios de l’IPCC)…

Econoclaste AD : Mais c’est un problème presque philosophique : dès lors que le problème est d’origine humaine, il faut corriger la cause, même si c’est moins efficace que de corriger les effets négatifs. C’est un problème récurrent dans ce débat, il est très chargé en jugements de valeurs à côté desquels les problèmes concrets passent au second plan. Dans le protocole de Kyoto il y a l’idée de faire quelque chose tout de suite et tous ensemble, parce que c’est bien par principe d’agir ensemble, sans se demander si c’est efficace. Que nous sommes punis pour nos péchés, que nous devons donc faire pénitence (réduire sa croissance).
Alors qu’en réalité, je me demande s’il y a besoin de lutter contre les émissions de façon collective, si ce n’est pas au bout du compte contre-productif : au contraire, la lutte contre les conséquences du réchauffement impliquera probablement, elle, un certain degré de coordination internationale, et constitue un meilleur candidat pour des actions concertées.

Optimum AB : En tout état de cause, pour ne pas sombrer dans le défaitisme, il faut dire qu’il y a vraisemblablement davantage à gagner qu’à perde à continuer les négociations en vue d’un accord, ne serait-ce que parce que les risques sont bien minces d’aboutir à un accord qui aille trop loin dans les objectifs de baisse des émissions. Quitte à sembler cynique, j’oserais presque penser qu’il vaudrait mieux, quand les premiers drames climatiques médiatiques se produiront, que la communauté internationale puisse se prévaloir d’une action volontariste et ambitieuse plutôt que de se voir accuser d’inaction et d’indifférence. Même si l’action en question n’aura, en fait, pas servi à grand chose.

Pour finir, j’ajouterai qu’il est un phénomène que j’ai bien du mal à évaluer, c’est l’effet que pourrait avoir une « attitude citoyenne » sur les émissions polluantes. Dans un cadre de théorie des jeux très basique, à priori, les joueurs n’ont aucune incitation à avoir, vis-à-vis de la pollution, un comportement socialement optimal. Je ne crois d’ailleurs absolument pas que la solution au problème du réchauffement climatique passe par de développement de la conscience écologique des hommes. Par contre, il n’est pas impossible que la simple médiatisation du problème puisse induire une certaine évolution des comportements, ne serait-ce que du point de vue du chauffage ou de la clim’ et des moyens de transports. Les publicitaires qui vantent les vertus écologiques de tel ou tel modèle d’automobile ont-ils, d’ailleurs, des motifs philanthropes ? Après tout, comme qui dirait, on peut bien trouver des fondations microéconomiques au paradoxe du vote

Cela dit, on cause, on cause, mais l’heure tourne, et regardez un peu dans quel état est SM, affalé sur le comptoir… Ohé ! SM ! Tu dors ?

Econoclaste SM (émergeant) : Hum ! Euh… j’ajouterai que l’effet de serre, je suis contre… sauf s’il n’est pas trop chaud.