Quelques éléments pour aider à comprendre ce qui s’est produit à la Société Générale. C’est un peu technique, j’ai essayé de faire au plus simple. N’hésitez pas à dire dans les commentaires si ça n’est pas clair.
Que font des traders dans une banque? ils travaillent pour les clients de celle-ci. Une activité consiste tout bêtement à faire du courtage, c’est à dire acheter et vendre des titres et des positions en fonction de ce que ceux-ci demandent, et de récupérer une commission au passage. Il ne s’agit pas d’un métier spéculatif, mais d’une activité assez rentable et sans risques pour la banque : les risques sont pris par le client. Si celui-ci a envie de mettre tout son patrimoine en actions eurotunnel achetées au plus haut, on peut espérer que sa banque lui déconseillera l’opération; mais elle-même ne prend aucun risque.
Les choses deviennent plus compliquées lorsqu’il s’agit pour la banque de fournir à ses clients des produits plus sophistiqués; vous voyez des publicités pour ce genre de produits tous les jours, ou l’on vous garantit des placements avec “les hausses de la bourse, mais pas les baisses” ou des produits d’assurance vie, des fonds communs de placement de risque plus ou moins élevé, etc. Là, il va falloir faire appel à des produits plus sophistiqués.
Prenons l’exemple du “toutes les hausses de la bourse, mais pas les baisses”. Comment votre banque peut-elle vous fournir ce service? Supposons pour simplifier que je place 100 euros dans un tel produit. La banque va alors utiliser ces 100 euros pour acheter un titre de la dette publique, qui rapporte mettons 4% d’intérêts, sans risques. Avec les 4 d’intérêts, elle va acheter ce qu’on appelle une option d’achat sur indice (par exemple le cac 40). Il s’agit d’un contrat qui donne le droit, mais non l’obligation, d’acheter l’indice à un prix donné, d’ici une date donnée. Toujours pour avoir des chiffres simples, supposons qu’avec ces 4 euros d’intérêt, la banque achète une option sur un indice, donnant le droit d’acheter cet indice au prix de 100 d’ici la fin de l’année.
Que se passe-t-il alors? Imaginons que l’indice monte à 120. Alors, la banque dispose du droit de l’acheter à 100, qu’elle exerce; elle le revend instantanément à 120, réalisant une plus value de 20. Dans le même temps, le titre de dette publique acheté initialement arrive à échéance, et la banque reçoit 100. Elle peut donc me donner 120, soit la valeur de mon capital augmenté de la hausse de l’indice boursier.
Mais supposons que la bourse passe entretemps à 80 : n’oublions pas que l’option donne un droit d’achat, mais que la banque peut ne pas l’exercer; en l’occurence, elle ne le fera pas, et les 4 payés initialement sont perdus. Mais le titre de la dette publique, lui, arrive à échéance : la banque reçoit donc 100, elle peut alors me rendre mon capital initial. Vous voyez que cette opération est “couverte” : au pire, quoi qu’il arrive, je vais récupérer mon capital. Si la bourse baisse, au final je gagne moins que si j’avais mis mon argent sur un livret A : mais mon capital est garanti.
Comment la banque gagne-t-elle de l’argent dans cette opération? d’une part, en essayant de payer l’option sur indice à un prix inférieur à 4; en prélevant des frais de gestion; dans l’ensemble, cette opération reste une banale opération de courtage, d’achats et de ventes de titres.
Il est possible de gagner un peu plus, mais en prenant un peu plus de risques. Supposons qu’au lieu du montage ci-dessus, la banque utilise l’intégralité du capital de 100 pour acheter des options; si effectivement les options coûtent 4, elle peut en acheter 25 avec un capital de 100; à partir d’un capital de 100, elle s’engage donc sur une position valant globalement 2500; c’est ce qu’on appelle un effet de levier financier.
Alors, si l’indice boursier monte à 120, avec mes 100 de départ, je peux acheter 25 indices à 100, et les revendre à 120; je réalise dans ce cas un gain de 25×20=500, soit 5 fois la mise initiale. Par contre, ici, ma couverture est beaucoup plus mauvaise : si l’indice boursier baisse, par exemple à 80, je n’exerce pas mon option, et la totalité de mon capital de départ a disparu. Je peux donc réaliser des gains importants, mais aussi perdre tout mon investissement dans l’histoire.
Il y a quelqu’un qui est dans une position plus risquée encore : c’est celui qui a vendu l’option sur indice. Lui a touché un gain de 4 lorsqu’il a vendu l’option; mais si la bourse monte et que l’option est exercée, il devra fournir à l’échéance pour 100 quelque chose qui vaut 120, et donc perdre 20 en ayant reçu 4 initialement; bien entendu, si la bourse baisse, l’option ne sera pas exercée, et il se contentera de gagner 4. Il fait donc face à des pertes potentiellement infinies, et à un gain limité. S’il a accepté de me vendre cette option initialement, c’est qu’il a obtenu sa couverture d’une façon différente, en réalisant simultanément d’autres opérations qui elles sont rentables lorsque la bourse monte; par exemple, il a vendu une option de vente sur l’indice à un autre de ses clients.
Les opérations sur produits dérivés actions (ce qui est en cause dans l’affaire en cours) génèrent au total un gain pour la collectivité en répartissant les risques auprès de ceux qui sont disposés à les prendre. L’investisseur qui achète les hausses de la bourse et pas les baisses obtient la sécurité sur son patrimoine, ce qui est appréciable; la banque qui lui vend le produit touche sa commission; le vendeur de l’option s’arrangera pour réaliser des opérations symétriques qui lui permettront de couvrir ses pertes potentielles sur cette opération-là.
Mais nous avons vu qu’il est possible, moyennant un risque accru, d’obtenir des gains supérieurs. Considérons maintenant le courtier qui vend le produit décrit plus haut (hausse mais pas baisse de la bourse). Il a les moyens de gagner un peu plus sur l’opération, en achetant un peu d’options avec le capital investi (au lieu de tout mettre en titres publics). Par exemple, supposons qu’à partir du même capital initial de 100, il achète pour 80 de titres de dette publique, et utilise les 20 restant pour acheter des options (il en achète donc 5). Si la bourse passe à 120, il a donc à la fin : 83,2 issus de son achat d’obligations publiques (80 + 4%); 5 options rapportant une plus value de 20 chacune, soit 100; au total, il se retrouve avec 183,2 €, et il ne s’est engagé à payer à son client que “la hausse de la bourse”, soit 120; il réalise donc une marge de 63,2 €. Par contre, si la bourse baisse, il doit payer 100 à son client, mais n’a que 83,2; il est donc de sa poche pour le solde, soit 16,8. Notre courtier se trouve donc face à une position risquée, qui peut obliger la banque qui l’emploie à perdre de l’argent.
Et sa banque lui impose des limites strictes à son exposition au risque; et ce risque est calculé par les services de back-office, de contrôle des risques, pour signaler aux courtiers s’ils sont dans les clous imposés par la banque ou non. Supposons par exemple que la banque n’autorise notre courtier qu’à perdre 20 au maximum; alors, l’opération du paragraphe au dessus est acceptable; mais pas l’opération vue plus haut consistant à consacrer la totalité du patrimoine du client à acheter des options. Si par hasard notre courtier le faisait, il faudrait qu’il compense par des opérations symétriques, ce qui lui serait signalé immédiatement par les services de contrôle.
Maintenant, supposez un courtier ambitieux, dans un contexte général haussier à la bourse. Il peut être tenté d’aller au delà des limites de risques que son employeur lui impose; si tout se passe bien, si la bourse continue de monter, il va gagner plus que la moyenne de ses collègues qui respectent les règles, ce qui lui garantira avancement, gloire, et bonus conséquent. Il peut donc être tenté de tromper les dispositifs de surveillance, et de compter sur sa chance. En l’affaire, c’est ce qui s’est passé : apparemment, le courtier avait acheté à terme des indices boursiers pour un volume très élevé (la position représentait potentiellement 50 milliards d’euros); pour couvrir cette opération, il utilisait sa connaissance des moments ou sont réalisés les contrôles et des opérations fictives; il faisait un vrai achat à terme d’un indice, et une fausse vente, ce qui donnait l’impression finale d’une exposition au risque nulle.
Ce qui est invraisemblable, c’est qu’il ait pu le faire avec une telle ampleur. Anecdote personnelle au passage : je connais quelqu’un qui dirige le service back-office d’une division asiatique d’une banque d’affaires américaine. Un soir, l’un des employés du back-office a fait une erreur de comptabilisation, aboutissant à faire apparaître une perte de 10 millions de dollars dans les comptes au lieu du résultat réel de la journée (un gain de quelques centaines de milliers). A 9 heures du soir, le siège New-Yorkais a appelé la personne que je connais à son domicile, et celle-ci est retournée au bureau, pour refaire tous les comptes jusqu’à une heure avancée de la nuit. Nous ne sommes pas face à une activité non surveillée, dans laquelle selon l’imagerie populaire, on laisse agir des individus aux narines remplies de cocaine à leur guise. La vraie question, c’est donc de savoir comment il est possible que les mécanismes de contrôle n’aient pas fonctionné.
Il est fort possible que l’économie ne soit pas trop à même de répondre à cette question, mais que la sociologie des organisations soit plus efficace. Pour cela, il faut savoir que de nombreuses banques françaises ont une organisation assez féodale, avec des castes qui exercent un pouvoir significatif. L’activité de dérivées actions, à la société générale, était à l’origine de la quasi-totalité des bénéfices de la banque; dans de telles conditions, lorsqu’un employé du back-office demande des explications à un trader sur ses opérations, celui-ci peut parfois l’envoyer promener en lui disant “je sais ce que je fais, contente-toi de faire tes comptes”.
Ceci d’autant plus qu’il y a diverses façons de faire du contrôle de risques. La première consiste à disposer d’un back-office avec beaucoup de personnel compétent, composé de gens qui connaissent les produits financiers et sont capables de déceler une opération hors limites; la seconde consiste à faire appel à des comptables, et à faire reposer les opérations de contrôle sur un système d’informations sophistiqué. Dans les banques françaises, les ingénieurs issus des grandes écoles sont la caste située au sommet de la chaîne alimentaire; on a un peu tendance à choisir la seconde solution, et à faire confiance à des systèmes sophistiqués mis en place par ces gens si intelligents, plutôt que sur l’intuition et l’expérience d’un personnel de back-office qui n’a suivi “que” des études universitaires et qui est cantonné à des opérations de comptabilisation. Mais un système, quand on l’a pratiqué longtemps, on finit par savoir comment le contourner : la preuve.
Lorsque les gens très intelligents de la Société Générale ont découvert qu’ils avaient une position d’environ 50 milliards d’euros à l’achat sur les indices boursiers, et que c’était très largement au dessus de leurs limites, aboutissant à une perte potentielle énorme, ils ont agi comme le font tous les gens intelligents et sûrs d’eux : en paniquant. Ils ont donc décidé de liquider la quasi-totalité de cette position en une journée… qui se trouvait être lundi dernier, un jour ou les bourses américaines sont fermées. Or Chicago est une place majeure pour les transactions à terme; sur les marchés ouverts ce jour-là, cet afflux de ventes à terme a donc provoqué une baisse importante.
Mais si le prix à terme des indices boursiers diminue, cela indique que le prix aujourd’hui de ces indices doit baisser : il est donc probable que cette vente massive par la Société Générale ait été le déclencheur, sur un marché dans lequel les opérateurs sont plutôt sensibles aux signes de baisse, de l’effondrement des bourses mondiales, qui est intervenu lundi dernier, amplifiant encore les pertes liées à la liquidation de la position par la Société Générale, et conduisant à la forte baisse de taux par Ben Bernanke le lendemain.
Que va-t-il se passer maintenant? Il faut bien voir que tout ce que la Société Générale a perdu, d’autres l’ont gagné, très probablement les autres banques. Au total donc, cette lourde perte n’a pas d’effet sur le système bancaire dans son ensemble. Par contre, il est possible que la Société Générale se fasse désormais racheter; ses actionnaires vont devoir, au minimum, éponger les pertes suite à une augmentation de capital.
Faut-il modifier la réglementation bancaire? Gizmo défend cette thèse, et je n’irai pas la contester sur ce terrain, je connais le sujet beaucoup moins bien qu’elle. En tous les cas, considérer qu’il faut accroître les contrôles sur les banques est discutable; ce que nous montre cette affaire, c’est que tous les systèmes de contrôle sont contournables. Et dans un système internationalisé, revenir à la séparation banque de dépôts et d’affaires risque surtout de déplacer les activités risquées vers des places moins réglementées.
ADD : via les commentaires chez Gizmo, je découvre ce post, qui apporte des informations complémentaires.
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La lecture de duoandco met en évidence quelques éléments à modifier semble-t-il à votre post au demeurant fort pédagogique. En vrac : il s’agit de futures sur indice et non sur actions (donc une activité moins "noble", moins rentable, moins compliquée), la position a été liquidée en 3 jours et non un seul, la banque n’avait statutairement pas le droit de garder de telles positions, la liquidation était donc un devoir légal et non le fruit de la panique.
Le but du post était de clarifier un peu ce que sont certaines activités de marché et de montrer les rapports entre risques et rendements; là, en l’occurence, il semble que l’individu était un arbitragiste, chargé de jouer sur les petits écarts entre indices à terme et au comptant; donc, une activité différente de celle que j’ai décrit dans le post.
"ils ont agi comme le font tous les gens intelligents et sûrs d’eux : en paniquant.Ils ont donc décidé de liquider la quasi-totalité de cette position en une journée…"
C’est exactement ce qu’il faut faire et sans hesitation quand on a une position non choisie. C’est ce que ferait Goldman Sachs ou n’importe quel pro dans une telle situation. Dans leur cas c’etait absolument imperatif vu la taille des positions qui depassait largement leurs fonds propres. Si le probleme avait ete connu du marche avant qu’ils liquident, la banque serait en faillite.
Ce qui est completement implausible dans cette histoire c’est que la "fraude" ait ete perpetree par une seule personne. Impossible sur des marches organises, reglementes ou les appels de marge se font en temps reel. La, mr Noyer et la SocGen se moquent du monde…Pas fini cette histoire…
Mon problème est le suivant :
– Soit c’est l’affaire d’un trader unique dont on a découvert les agissements d’un coup, et dans ce cas, effectivement, se débarasser rapidement de la position a un sens.
– Soit c’est une position prise en commun qui a mal tourné, mais dans ce cas, je vois mal pourquoi ils auraient eu besoin de s’en débarasser d’un coup, sauf à imaginer qu’ils l’ont prise volontairement pour changer d’avis ensuite, ce qui ne me paraît pas très plausible.
Bref, je ne sais pas quelle version est la plus invraisemblable. Je ne comprends pas non plus pourquoi ils ont voulu fourguer la position un jour de marché fermé et peu liquide, plutôt que se trouver un hedge fund à qui la céder en limitant les pertes.
Une question. Vous dites qu’ils ont "paniqué" en décidant de vendre en un jour (en fait en trois, de lundi à mercredi si la presse ne se trompe pas). Beaucoup disent "ils auraient dû attendre, les pertes auraient été moins grandes s’ils avaient vendu plus tard et plus lentement". Ma question, c’est de savoir si dans une situation pareille, où la banque fait potentiellement face à un risque si énorme, elle a le droit d’attendre. I.e. une fois qu’elle est au courant du problème, ainsi que l’autorité de contrôle des marchés financiers, a-t-elle d’un point de vue réglementaire et légal d’autre choix que de liquider au plus vite possible les avoirs risqués et de rétablir dans les meilleurs délais possibles sa couverture?
Cf ce qu’explique jck : il est possible que la position, sous forme de futures sur indices, soit tellement énorme qu’elle aurait entraîné de très gros appels de marge, révélé l’exposition de la Socgen, et provoqué sa faillite. Mais bon, une position pareille ne se prend pas en un jour, et ne se découvre pas en un jour.
Si cette position a été prise “à plusieurs” décider de la fourguer en catastrophe me paraît surprenant. Si elle a été prise par un seul gus, qu’elle n’ait pas été détectée est aberrant, surtout de la part de la commission bancaire. Bref, c’est incompréhensible dans les deux cas.
Comme d’habitude, pédagogique, intéressant.
Merci
C’est très bien expliqué et merci pour le travail.
Modestes corrections :
*vous parlez des options d’achat (call) mais il y a aussi les options de vente (put) ; dans les deux cas c’est l’acheteur qui décide ou non de "lever" l’option. Mais la plupart du temps ce qui l’intéresse est l’effet de levier, que vous avez bien décrit, qui permet de revendre l’option cotée avant son échéance.
*le vendeur d’options "assure" en quelque sorte la valeur de son portefeuille en transférant le risque à l’acheteur qui, lui, spécule. Sauf si lui même vend des options à découvert, mais dans ce cas gain comme risque sont illimités.
*pour enfler le back-office en faisant de fausses lignes (à mon avis il sera inculpé de faux en écriture et escroquerie) Jérome K. devait avoir besoin des codes d’accès des contrôleurs – leurs droits d’utilisateurs. Ces codes changent régulièrement. Qui les lui a donnés ? Ou bien le grand Jérome a trouvé une méga-faille dans le système.
La faiblesse de votre démonstration réside ici :
"Il peut être tenté d’aller au delà des limites de risques que son employeur lui impose; si tout se passe bien, si la bourse continue de monter, il va gagner plus que la moyenne de ses collègues qui respectent les règles, ce qui lui garantira avancement, gloire, et bonus conséquent."
Comment un employé de banque pourrait il raisonner ainsi ?
Un employé qui s’autorise de "sortir des clous", même pour le plus grand bénéfice de son employeur, DOIT être viré. Il n’est pas fiable. Il est même dangereux.
Je n’ai pas été clair, apparemment. Les banques imposent des limites de risques à leurs traders; à eux ensuite de faire leur maximum dans ces limites. Mais un trader qui, de façon dissimulée, prend plus de risques et a de la chance passera pour un individu plus compétent que ses collègues tant que sa façon de faire n’aura pas été décelée.
Si les banques couvrent des manoeuvres contraires à leurs règles internes quand çà les arrange, elles n’auront jamais ma sympathie quand les mêmes opérations les mettent dans le rouge…
Merci beaucoup de ces explications claires pour les néophytes.
Les questions que tout le monde se pose :
– quel était l’intérêt de ce trader ? quelle était sa motivation ?
– comment réaliser un vrai achat et une FAUSSE vente anullant l’achat dans les livres ? En fait, qu’est ce qu’une fausse vente ?
– si la Direction de la SG a paniqué, pourquoi ? (l’étendue de son exposition est elle suffisante comme motif ?) et cette panique ne démontre t-elle pas une imcompétence très préjudiciable à la SG ?
Voir ci-dessus : sa motivation, c’est de prendre des risques en douce pour passer pour meilleur que les autres s’il a de la chance.
Une fausse vente, c’est créer un compte client fictif; supposez que j’achète du cac 40 à terme, je suis exposé; mais si je l’achète à un client fictif, dans les comptes de la banque, cela ne se voit pas. Bon, sur un marché réglementé, cela paraît énorme que les autorités de marché n’aient rien vu.
Je trouve assez étonnant qu’un courtier puisse prendre de façon routinière des positions spéculatives, c’est-à-dire mélanger des investissements pour le compte de sa banque et pour le compte de ses clients. Si des lecteurs ont la réponse : est-ce le fonctionnement normal d’un front office? La banque n’a-t-elle pas intérêt à mieux séparer les métiers?
Une autre question est de savoir qui a perdu et gagné dans cette affaire. Il semble que ce sont les actionnaires de la SG qui ont le plus perdu, tandis que les conséquences pour les salariés et les clients devraient être limitées. On ne sait pas qui a gagné dans l’histoire. Y a-t-il eu à un moment de cette crise un risque de faillite de la SG entraînant d’autres faillites bancaires, par exemple? Pas évident.
La direction de la banque pouvait-elle prendre son temps afin de solder les positions dans de meilleures conditions? Pas évident non plus. Cela serait revenu à spéculer sur l’évolution des indices, ce qui est justement la pratique interdite reprochée à Kerviel. Et plus on attendait plus le risque de fuite était élevé, ce qui aurait permis aux initiés de profiter de leurs informations. On voit mal un mandataire social ou un administrateur proposer une telle conduite.
En termes d’allocation de fonds propres, la branche "Banque de Financement et d’Investissement" de la SG représente un tiers des fonds propres de la banque pour la moitié du résultat en 2006. BNP-Paribas doit être dans les mêmes ordres de grandeur. En d’autres termes, les activités spéculatives ne représentent pas la quasi-totalité des bénéfices, loin s’en faut. Les grandes banques accordent au contraire une grande importance à la banque de détail qui offre aux actionnaires une rentabilité assez stable.
Cette affaire me fait furieusement penser à Lee Harley Oswald: tellement pratique de tout mettre sur le dos d’un seul homme plutôt que de constater que soit:
1/ le système de contrôle a failli: impossible vus les engagements pris (supérieurs aux fonds propres de la banque!!)
2/ une complicité à plusieurs étages (trading, back office, contrôle interne) qui me semble pas facile à mettre en oeuvre et dont le but ne semble pas sauter aux yeux…
Pour moi, le plus crédible, c’est que la SG a complètement foiré son activité de trading dans des marchés ô combien difficiles et a cherché à mettre en avant un bouc émissaire (JK) dont on nous a déjà tracé le profil psychologique… ben voyons!
Je ne vois pas comment il a pu cacher des investissements de cette taille: officiellement, on nous dit qu’il faisait en sorte de faire croire que ses investissements se compensaient sur deux comptes différents (avec 1 position fictive) mais c’est impossible! S’il y a 2 trades, il doit y avoir deux contreparties (il achète à quelqu’un et vend à quelqu’un)! Cela déclenche des tickets d’iopération comme confirmation des opérations effectuées (tous les ordres passés en bourse sont confirmés par télétransmission) et le back office se serait alerté de ne rien recevoir de la contrepartie dès la 1ère opération!
Si JK achète pour 1 milliard de contrats futures, c’est que l’ordre est passé sur le marché et que quelqu’un les lui a vendus! Comment l’opération peut elle être dénouée s’il n’y a pas de vendeur???
De plus, sur les contrats à terme, il y a chaque soir des appels de marge visant à rendre du cash au "gagnant" (cours de compensation> cours d’achat) et symétriquement à prélever du cash au "perdant" (cours de compensation< cours d’achat): vus les montants engagés, les appels de marge devaient être d’un montant astronomique et c’est impossible que ce soit passé inaperçu même selon la théorie officielle de la SG des comptes qui se compensaient (il y aurait eu des flux très importants sur les 2 comptes qui même s’ils se compensaient auraient alerté le contrôle interne et le back office qui dépouille les opérations!)
Et de toute façon, je ne vois pas comment des opérations fictives auraient pu être matchées puisqu’il n’y avait pas de contrepartie en face qui confirmait qu’un trade avait eu lieu…
Je crois que les journaux qui ont repris telle quelle l’histoire officielle de la SG et ont mis en 1ère page la photo de JK devraient vraiment s’interroger sur le rôle d’un journaliste…
Le subtil revirement d’Elie Cohen me semble très bizarre à moi aussi…
Peut être est ce moins dangereux de faire croire à un trader fou qu’à une vaste incompétence des pontes de la SG… qui pourrait leur faire perdre leur indépendance (et leurs postes) …
J’ai les mêmes doutes (voir plus haut). Mais si c’est une position prise sciemment, je ne comprends pas qu’ils l’aient brusquement fourguée dans les pires conditions de marché possible. Ou alors, ils sont vraiment très, très idiots.
Article très intéressant et très clair.
J’ai juste une remarque à faire sur le débouclage de la position de la SG. Une fois la fraude découverte, qu’elles étaient les options pour la SG ?
– Soit liquider la position et essayer de boucler en urgence un plan pour couvrir les pertes et assurer la communication. C’est ce qui a été fait, avec comme conséquence la baisse très brutale des marchés lundi et mardi, mais aussi le fait que la SG ne fera surement pas faillite dans les mois qui viennent.
– Soit ne rien dire et ne rien faire et attendre des jours meilleurs pour déboucler la position avec comme conséquence l’engagement de la responsabilité des dirigeants, les risques que les jours meilleures arrivent trop tard et la possibilité très réelles d’une faillite de l’entreprise.
– Soit communiquer et attendre pour déboucler la position. Mais dans ce cas, le cours de la SG décrochait mécaniquement d’au moins 25 % (part des pertes versus le capital de la SG), fuite des clients et nécessité à plus ou moins brève échéance d’accorder la garantie de l’état à la SG voir de préparer une nationalisation (cas de Northenrock).
Des trois mauvaises solutions qui s’offraient, il me semble que Bouton a choisit la moins pire.
"revenir à la séparation banque de dépôts et d’affaires risque surtout de déplacer les activités risquées vers des places moins réglementées."
Certes ! Mais en raison de cette double casquette (dépôt + affaire) alors l’Etat (enfin le contribuable) devra toujours régler la note en cas de faillite. Donc les mauvais élèves dans la classe banque ne seront jamais punis: pas de sélection naturelle qui est quand même un peu la base du libéralisme.
Alors où est le vrai risque pour les banques puisque leur faillite est politiquement (voir économiquement et socialement) impossible?
Il me semble que liquider la position était une obligation, pas de la panique et que les marchés avaient déjà commencé a baisser. Garder une position dans ce genre de circonstances c’est de la roulette Russe avec 5 balles.
La conséquence de tout cela est que toute une palanquée de "chefs" va se trouver virée dans les semaines/mois qui viennent, parce que même si l’action de un est possible (dans les conditions décrites par ailleurs), elle suppose que le management n’avait aucune vigilance alors que c’est la base de son boulot. Le succès de SG en equity derivative les a mené a la complaisance (nous sommes les meilleurs avec les meilleurs systèmes et les meilleurs traders) et finalement a fait sa perte (1/3 des profits de la banque). Seul les paranoïaques survivent. Gageons que cette activité n’y survivra pas.
Juste pour donner à ceux qui (comme moi…) se demandent à quoi peuvent ressembler des "contreparties fictives" cet intéressant lien : http://www.usdoj.gov/dag/cftf/ch... (vers l’acte d’accusation devant la justice du Maryland dans l’affaire John Rusnak, (lien connu via la page Wikipedia sur ce monsieur)) qui donne quelques idées de manipulations possibles pour établir ces fausses contreparties en déjouant le back-office (dans le cas de monsieur Rusnak, ça allait jusqu’à envoyer des faux fax d’une entreprise fictive, pour laquelle il avait ouvert une boîte aux lettres à New-York). J’ignore bien sûr si JK a utilisé des méthodes analogues, mais il est manifeste que la contrepartie fictive, c’est jouable…
Alexandre : maintenant que j’ai testé sur un texte long, je peux le dire : l’affichage du texte est trop petit, et l’interligne est trop réduit.
Je n’ai pas trop creusé mais je lis :
body {
font-size: 10px;
font-family: "Verdana", Arial, serif;
}
Je conseille l’écriture suivante :
body { font: small/1.3em verdana, arial, sans-serif; }
Le 1.3em crée un interligne égal à 130% de l’interligne simple.
Assez étrange que (surtout…) après le débacle de la crise des subprimes (été 2007) "certaines banques" n’aient pas instauré une politique de (d’auto-?) surveillance/régulation interne plus rigoureuse…
Le problème des subprimes est de nature différente : ce sont des positions dont on savait qu’elles étaient risquées, mais dont on a sous-estimé la corrélation. Pas sûr qu’il y ait là un problème de règles non respectées.
Je trouve que vous avez l’air bien sûr de vous sur la manière dont vous jugez les actions des dirigeants de la société générale car, comme le font remarquer plusieurs commentaires, il n’est pas certain que la position était tenable, ne serait-ce que d’un point de vue légal.
De la même manière, invoquer "l’intuition" et "l’expérience" contre des "systèmes sophisitiqués" me semble être un argument assez faible qui vous permet surtout de régler des comptes aux écoles d’ingénieurs, sans qu’on comprenne vraiment le fond du raisonnement. Je ne vois pas bien en quoi un "système" serait plus faillible que "l’intuition". Heureusement pour les écoles d’ingénieurs que le fautif désigné aujourd’hui est issu de la fac, que n’auriez vous dit sinon ?
Cela fait des années que j’entends la même chose sur les banques françaises, de sources différentes : féodales, avec des castes issues d’écoles d’ingénieur qui régentent tout, et sont caractérisés par une grande confiance dans leurs propres capacités. Cela fait aussi des années que j’entends parler de la différence entre certaines banques qui continuent de faire une grande part du back-office à la main, avec des effectifs significatifs, et celles qui ont développé des activités de marché sans que les effectifs du contrôle/back office ne suivent, en faisant confiance à des systèmes experts pour compenser.
Alors, quand je vois 1- qu’un système soi-disant “le meilleur de France” a pu être contourné; quand je vois que comme par hasard, on va chercher un lmpiste soi-disant génial alors qu’il est inconcevable qu’il ait pris des positions pareilles, j’ai des soupçons envers la caste, oui. Je crois qu’ils ont été tellement sûrs de leurs système et de leur propre compétence qu’ils se sont mis dans la mouise, et je connais des tas de banques (étrangères) ou ce genre de conneries n’aurait jamais pu se produire.
Leon:
Les contreparties fictives sur les marches de gre a gre [OTC] c’est possible, mais impossible sur les marches a terme ou le reglement des marges est quotidien et en cas de volatilite exceptionnelle peut survenir a n’importe quel moment.
Donc on veut nous faire croire que le trader etait capable non seulement de dissimuler des positions massives mais en plus de faire des transferts de collateral de dizaines voire de centaines de millions d’euros par jour, tous les jours depuis un an sans etre detecte, car les positions liquidees par la socgen ce ne sont pas des positions fictives mais bien des positions reelles qui ont ete financees par du collateral de la socgen ou pire de ses clients.
Si c’est vrai il merite d’etre nomme directeur general du controle des risques a la banque de france, a vie parce que on ne trouvera plus jamais un genie pareil.
Je ne suis pas sur que vos explications soient trés éclairantes. Ce que je sais, c’est que la SG est leader des warrants
fr.biz.yahoo.com/bourse/w…
Les warrants sont de deux types, les put et les call qui sont des options à la vente et à l’achat. Et c’est la banque, ici la SG, qui émet l’option. La règle normale consiste je crois pour la la banque à vendre le même nombre d’options à la vente et à l’achat. Dans ce cas, la banque ne prends aucun risque. C’est le client qui prend le risque, surtout si le client s’engage à vendre des titres qu’il n’a pas. Mais s’il y a fraude, de fausses ventes d’options peuvent enregistrées et la banque prend alors un risque considérable.
Heu, entre nous, moi, c’est votre commentaire que je ne comprends pas du tout…
Merci pour ces explications très pédagogiques & instructives et les divers liens proposés en complément.
Je ne résiste pas au plaisir de citer un extrait d’une intervention de C.Bébéar qui proposait une explication à la crise des subprimes à travers une critique du fonctionnement des banques, explication qui reste valable ici aussi (dans l’esprit tout au moins) il me semble:
"(…) L’agent s’adresse alors à un mathématicien, généralement français, qui va bâtir un produit dit « structuré »… dans lequel une chatte ne retrouverait pas ses petits. Après cette astucieuse construction, on demande à une agence de rating de donner une notation à ce produit. Ladite agence emploie des jeunes gens très sympathiques, parfois même intelligents, mais qui, souvent, ne comprennent rien au « produit structuré » qu’on leur offre (je caricature à peine). (…)"
Le texte complet de son intervention ici :
http://www.fondation-res-publica...
Elie Cohen est administrateur de la SG et c’est à lui qu’on demande son avis qui évolue en quelques heures…
http://www.ir.socgen.com/fr/down...
page 60 du rapport annuel
Troublant, non?
Concernant l’attitude la SG (débouclement en catastrophe immédiat), c’est la procédure normale en cas de dépassement de ratios réglementaires: le contrôle interne (ce ne sont pas des rigolos, voire pour certains de sacrés aigris d’après mon expérience personnelle) exige la remise à niveau immédiate des ratios réglementaires et prudentiels.
Je me demande si ces positions démentielles n’étaient pas acceptées par les plus hauts responsables de la banque qui croyaient peut être que JK allait leur sauver la mise de la débacle des subprimes (soi disant évitée par la SG dixit Bouton en décembre dernier au vu des faibles provisions passées).
Bouton et cie pensaient ils sauver les résultats de la banque en faisant cmme d’habitude confiance à leur département dérivés?
Si cette hypothèse est exacte (impossible à dire pour l’instant), celui qui a perdu le contrôle ne serait pas celui que l’on croit…
Un truc me semble impossible: que JK aie pu cacher ses investissements pharaoniques! La banque était forcément au courant et il n’y a pas 50 raisons qui aient poussé la SG à prendre de tels risques d’où mon hypothèse ci dessus: la SG a t’elle tenté d’effacer cette perte des subprimes par un "coup" sur les dérivés, pôle historiquement réputé d’excellence et très rentable?
Le fait qu’Elie Cohen soit interrogé comme il l’est indique surtout que ceux qui l’interrogent n’ont pas un immense sens critique… Ce qui n’est pas neuf.
Sinon j’avoue avoir du mal avec votre théorie; décider collectivement de jouer tous les capitaux propres de la banque en futures sur indices sans couverture, pour liquider la position à toute vitesse dans les pires conditions ensuite, c’est au delà de l’absurde. Que leurs contrôles prudentiels soient nuls, je veux bien l’admettre; qu’ils fassent de façon concertée un truc pareil, j’ai plus de mal.
@marc #9 : La contrepartie fictive ça sert à passer une option de vente fictive, en symétrique de l’option d’achat réelle que vous avez vraiment passée sur le marché ; ainsi pour le système de suivi de risque vous paraissez équilibré, voire même pour les systèmes d’appel de marge (en interne SG s’entend … c’est l’extérieur qui aurait dû voir que la SG ne tournait pas rond).
Par ailleurs toutes les règles que vous assénez à grands coups de "impossible !" sont les règles théoriques. Dans la vraie vie on peut avoir des comptes de gestion d’arrondis (cas de Leeson), ou des contreparties fictives pour des besoins de tests ou de redressement de saisie (évoquées dans les commentaires du billet de duoandco, dont je vous conseille la lecture), ou des tas d’autres cas d’exception qui sont insuffisamment surveillés.
@jck #17 : Apparemment les positions astronomiques n’ont été prises que depuis le début de l’année. Les positions prises en 2007 étaient de bien moins grande envergure et ont été débouclées en décembre.
Je ne pense pas qu’ils aient agis de façon concertée et que leur intention était de s’exposer autant mais il est impossible que le contrôle ne s’en soit pas aperçu. Der Spiegel affirme que les autorités allemandes avaient prévenu la banque des engagements très importants sur le Dax, ce qui confirmerait bien que la SG était au courant des engagements…
Si on accepte cette hypothèse, les explications ne sont pas légion: soit ils sont tarés à la SG (on peut éliminer ça) soit ils se sont laissés déborder parce qu’ils pensaient qu’ils allaient se refaire (c’est une hypothèse qui ne m’excite pas beaucoup non plus mais je n’en trouve pas d’autre…)
Et puis, chose étrange, le débouclage des opérations a lieu cette semaine mais les pertes sont passées sur l’exercice 2007: comment expliquer ça?
S’il on prend pour acquis que la SG était au courant (hypothèse non officielle et non encore vérifiée), quelle explication possible aux engagements pris?
Lire les commentaires et vos réponses éclaircissent le paysage – merci à tous.
J’ai encore une toute petite question.
Dans la grande multinationale industrielle pour laquelle je travaillais (elle est dans le CAC), à chaque niveau hierarchique correspondait un plafond d’engagement d’argent, que ce soit pour des achats (niveau d’engagement relativement faible d’ailleurs même à un niveau hierarchique élevé) et surtout un plafond d’engagement pour les investissements et pour les garanties données dans les contrats. Niveau là aussi assez bas, quelques millions d’€ au plus. Là on parle d’engagements de 1, 2 ou 3 milliards d’€ qui dans ma multinationale devaient passer OBLIGATOIREMENT par le Comité stratégique et le Comité de Direction générale. Demande d’engagement soumise à une procédure très stricte de controle à plusieurs niveaux et de plusieurs natures. Et je constate qu’un "modeste" cadre dans une grande banque pourrait déjouer le processus ! Est ce vraiment plausible ? Je ne suis pas partisan de la théorie du complot mais quand même ! Le type pouvait il s’engager seul sur 1 milliard sans que la partie vendeuse demande des garanties ? C’est peut etre – sans doute – naïf comme question – mais là franchement mon bon sens est paumé !
Votre argument sur le système automatique sophistiqué me semble bizarre. Ce système automatique pourrait être dans l’absolu meilleur qu’un système "manuel", mais être mis en défaut. Un peu comme avec l’ABS: vous vous sentez plus en sécurité et vous roulez plus vite, jusqu’au moment où l’ABS ne peut plus rien pour vous. Cela n’empêche pas qu’en moyenne, vous ayez moins de problèmes avec les voitures équipée de l’ABS que celles sans.
D’ailleurs, le système "manuel" et "automatique" sont toujours sensibles aux "erreurs humaines". Par exemple, dans le cas de la SG, il suffirait que le "trader fou" ait conservé son login et ses privilèges sur le système de contrôle pour qu’il puisse continuer à agir comme contrôleur. La division en fiefs des services de la banque peut avoir joué un rôle dans la déroute, mais on pourrait aussi dire le contraire: si personne ne passait jamais du contrôle au trading, personne n’aurait entendu parler de ce trader…
Si votre expose est clair et donne une bonne synthese des activites de trading des banques d’investissent, je crains que vous ayez manque la partie qui est liee a la perte colossale:
La majorite de ces banques ne se contentent pas d’avoir des activites de courtage ou de vente de produits structures, mais on aussi devellope des activites de trading en compte propre, c’est a dire des prises de positions soit dans la but de faire un arbitrage, soit directionelle, soit un mix des deux. C’est que faisait Jerome Kerviel (stat arb).
Son travail consistait donc a prendre des positions risquees dans les limites qu’il lui etait autorisees.
@ yogi: "La contrepartie fictive ça sert à passer une option de vente fictive, en symétrique de l’option d’achat réelle que vous avez vraiment passée sur le marché ; ainsi pour le système de suivi de risque vous paraissez équilibré, voire même pour les systèmes d’appel de marge (en interne SG s’entend … c’est l’extérieur qui aurait dû voir que la SG ne tournait pas rond)."
Je comprends bien cette idée mais comment cela pourrait ne pas se voir même en interne?
Pas de confirmation du trade de la contrepartie? JK ne pouvait quand même pas inventer une position dans le système de compensation central puisqu’il ne peut pas y avoir accès? Déjà imaginer qu’il aie pu inventer une contrepartie fictive dans le système de la SG me laisse perplexe (l’opération matcherait comment?)
De plus, Der Spiegel affirme que les autorités allemandes avaient prévenu la banque des engagements très importants sur le Dax, ce qui confirmerait bien que la SG était au courant des engagements…
D’où le fameux "impossible" que j’utilise: quand je traite des contrats futures, j’ai une confirmation du broker qui permet au back office de matcher l’opération. S’il n’y a pas de confirm, le back réagit avant la fin de la journée! JK aurait pu aussi créer des confirmations de trade?? On n’est pas loin de X Files, là…
Pour rebondir sur cet article, le BO dérivé action de la SG avait la tête sous l’eau depuis de nombreux mois. Les contreparties menaçaient de ne plus traiter avec la SG tellement son BO actions était à la rue (pour le coup ils auraient eu tort 🙂 ). Au mois de décembre plusieurs têtes ont sautées car la situation ne s’améliorait pas assez vite.
Le BO était certainement trop débordé pour réaliser efficacement un contrôle des opérations.
Que Jérôme K. ai pu annuler sa pause avec des deals fictifs pourquoi pas. J’utilise les applis FO action de la SG ce qui a été dit est crédible. Mais comment a-t-il pu dissimuler à la compta les appels de marges et les deposits ? Comment ce fait-il que les rapprochements Eco-Compta n’aient rien relevés ?
Là il y a une très grosse faute de la SG ! Il n’y a pas eu d’investissement suffisant dans les activités BO et MO. Ces services n’ont pas pu suivre l’augmentation considérable des volumes. Ils ont été vu comme des activités non rentable, comme l’intendance qui doit suivre. Avec en plus l’état d’esprit que vous avez bien évoqué.
A mon avis c’est le cas dans toutes les banques et pas seulement à la SG. Avec un peu de chance cela servira de leçon à tout le monde.
Une dernière remarque, cet "évènement" valide le modèle Français de la banque universelle. Le Fo de la SG devrait donner un grand merci aux "Ploucs" de la banque de détail.
@marc: Il n’a pas crée des contrepartie fictives, mais il a utilisé des contreparties "inactives" qui étaient restées dans le référentiel de la SG.
Proteos : si c’est le cas alors c’est que la sécurité minimale n’est pas assurée sur le système d’info de SG, ce qui est peu vraissemblable en regard des risques évidents en matière de trade.
Question d’une ignarde : quel est l’avenir de la Société générale ? Le scénario de sauvetage va-t-il être, d’après vous, proche de celui du Crédit lyonnais il y a quelques années ? En d’autres termes, le contribuable va-t-il devoir "mettre la main à la poche" pour "sauver" (d’une manière ou d’une autre) l’un des "fleurons"(??!!)bancaires français ?
Les explications de la SG sont en ligne : media.ft.com/cms/d0ce8f7e…
Et en français : http://www.socgen.com/sg/upload/...
Une petite question que personne ne semble se poser dans cette affaire de la SG. On dénoue l’opération "frauduleuse" sur trois jours courant janvier 2008. Il apparait que la position était bénéficiaire fin 2007 et on impute la perte sur l’exercice 2007? Etrange…….
Bonjour,
ceci n’est pas spécialement une réponse à cet article, mais je n’ai pas trouvé d’adresse générale de contact.
J’ai lu vos «_explications_» sur le nom Éconoclaste. C’est long_! En ce qui concerne l’orthographe et la typographie, vous êtes plutôt au-dessus de la moyenne, avec seulement quelques fautes mineures (répétitives, donc faciles à corriger de votre côté).
Pour ce qui est du contenu, vous m’avez convaincu d’aller voir ailleurs. Ce long développement théorique est bourré de notions inconnues du béotien que je suis. Il se termine sur un usage incorrect, même s’il est répandu, du verbe aboutir : ce verbe est intransitif, il n’a donc pas de forme passive, la forme «_abouti_» est un participe passé, pas un adjectif. Vous parlez de rigueur un peu plus haut, c’est raté. Vous ne pouvez pas y prétendre si vous vous laissez aller à utiliser le langage à la mode.
Deux considérations pratiques dans ce flot abondant_: le prix de la baguette et une affirmation sur le dressage des chiens.
«_Bon, maintenant, c’est comme un chien qui s’appelle Rex. Si on le siffle en lui donnant du "Milou", il ne bronchera pas._»
C’est faux, il répond presque exclusivement au ton employé. Faites l’expérience avec un chien nommé Milou, appelez «_Michel_», «_Machin_», «_Zazou_» sur le même ton, il y a de fortes chances pour qu’il vienne, comme avec à peu près n’importe quel mot de deux syllabes.
Votre Rex ne bronche pas parce qu’il a un nom en une syllabe. Essayez avec Pif ou Paf.
Si vous avez pour l’économie des exemples pratiques du même tonneau, merci bien_!
J’étais venu pour lire des explications sur ce qui s’est passé à la Société Générale. Je sais seulement que je ne sais pas, mais je le savais déjà. Vous n’avez pas réussi non plus à me donner l’impression que vous savez.
«_Il s’agit d’un contrat qui donne le droit, mais non l’obligation, d’acheter l’indice à un prix donné, d’ici une date donnée. Toujours pour avoir des chiffres simples, supposons qu’avec ces 4 euros d’intérêt, la banque achète une option sur un indice, donnant le droit d’acheter cet indice au prix de 100 d’ici la fin de l’année._»
Comment peut-on acheter un indice_? Je comprends qu’une action est un papier qui représente, par exemple, un moteur d’une machine-outil dans une usine. Pour un indice, je ne comprends pas.
Dans cet article-ci :
«_et des opérations fictives; il faisait un vrai achat à terme d’un indice, et une fausse vente, ce qui donnait l’impression finale d’une exposition au risque nulle._»
Je ne comprends pas ce que sont un vrai achat et une fausse vente, et inversement.
Je ne veux pas savoir ce qu’est la guéguerre entre la caste des grandes écoles et les universitaires.
J’irai donc voir ailleurs.
Salutations
Jean-Paul
Nullissime en finance (je suis ingénieur, personne n’est parfait), j’ai visité votre site via FRANCE INTER.
BRAVO : j’ai l’impression d’avoir compris, je vais frimer à la cantine devant les collègues
@Jean-Paul: vos lumineux commentaires sur l’orthographe nous manquent déjà !
Pas de flaming, s’il vous plaît.
@marc
"Elie Cohen est administrateur de la SG et c’est à lui qu’on demande son avis qui évolue en quelques heures…
http://www.ir.socgen.com/fr/down...
page 60 du rapport annuel"
Vous devez vous tromper d’Élie Cohen.
Il y a en effet :
– Élie Cohen, professeur de l’université Paris-Dauphine et administrateur à la SG :
fr.wikipedia.org/wiki/%C3…
– Élie Cohen, directeur de recherche au CNRS et médiatiquement connu :
fr.wikipedia.org/wiki/Eli…
Oups!
Bien joué Thierry, je m’étais fait avoir…
Je trouvais ça énorme qu’un administrateur s’exprime sans que ce ne soit signalé: je préfère que ce ne soit pas le cas…
La question des appels de marge me laisse également perplexe. Certains ont-ils déjà proposé une explication ?
Histoire d’en remettre encore une couche sur les appels de marge, JK aurait donc passé de vrais ordres sur les 2 pattes (achat et vente) et passé les ventes sur des clients fictifs ou inactifs de la banque. Donc, il n’y a pas eu d’ordres fictifs (ils ont bien été transmis au marché et exécutés): cela expliquerait que la chambre de compensation n’aie pas réagi de suite car le compte global SG était à l’équilibre.
Mais comment expliquer que le back office ou le contrôle interne n’aient pas réagi à la présence de transactions sur des comptes inactifs et que les clients qui n’avaient pas passé d’ordre ne se soient pas aperçu des mouvements sur leur compte?
Ces comptes auraient été largement gagnants (vendeurs dans un marché qui baisse) mais pourtant la SG dit avoir débouclé les opérations la semaine dernière en revendant les contrats achetés…
ça m’échappe…
Si j’ai bien compris (mais bon, les informations évoluent, on aura sans doute des clarifications ultérieurement) il y a eu des ordres fictifs qui servaient à faire croire à la banque que les positions étaient couvertes. En gros, pour reprendre jck, à la socgen, vous pouvez prendre d’énormes positions, et la banque paie sans sourciller les appels de marge pourvu que ces positions soient hedgées…
soit il y a bien eu ordres fictifs et ça explique le débouclage des poses et les pertes de la SG soit il n’y a pas eu ordres fictifs et là 2 cas se présentent:
1/ sur les comptes inactifs, les ordres sont annulés et passés sur le compte erreur de la SG qui les rachètent la semaine dernière (le compte erreur gagne de l’argent)
2/ sur les comptes fictifs, les ordres sont annulés égalements et rapatriés au compte erreur et retour au point 1
Si on admet que nous sommes dans le cas où il y a eu des ordres fictifs (non passés par le marché et donc non exécutés),
la question est: comment JK a réussi à faire passer pour vrai dans les comptes des opérations fictives?? Je veux bien que ce soit un génie de l’informatique mais quand même…
Question sans réponse ou alors un truc m’a échappé…
si les ordres sont fictifs les chambres de compensation s’en rendent compte via les appels de marges
si les ordres sont réels alors les gains et les pertes s’annulent
conclusion: il y a bien un gros bug quelque part… et je ne trouve pas l’explication
"Si j’ai bien compris (mais bon, les informations évoluent, on aura sans doute des clarifications ultérieurement) il y a eu des ordres fictifs qui servaient à faire croire à la banque que les positions étaient couvertes. En gros, pour reprendre jck, à la socgen, vous pouvez prendre d’énormes positions, et la banque paie sans sourciller les appels de marge pourvu que ces positions soient hedgées…"
Si c’est fictif, la chambre de compensation ne les voit pas! Donc, elle avertit la SG de l’ampleur de la position, non? Comment la SG peut passer à côté de cette alerte?
Désolé d’insister mais je ne comprends pas ce point… et j’ai l’impression que ça conditionne une bonne partie de la conclusion qu’on puisse tirer de cette affaire.
La SG reçoit l’alerte, demande des explications au trader : celui-ci répond “la position est couverte” à partir d’une opération fictive sur un compte client, et la SG paie l’appel de marge (je répète, c’est ainsi que je le comprends)
Une question: Je pense que les gens de la SG sont intelligents et devaient se douter des consequences d une vente massive de titres un jour de fermeture des bourses americaines. Et si la SG avait simultanement acheté des options sur la baisse des indices pour se refaire sur les subprimes, quels auraient été les gains? Cela passerait il inapercu ?
@ F :
Je portais sur la forme de la page «_Explication_» un jugement plutôt positif.
S’il faut que j’explique ça aussi…
Je suis impressionné par votre exposé liminaire très précis et pédagogique ainsi que par les réactions de vos lecteurs qu’on sent, pour la plupart, comme des gens intelligents et sûr d’eux, prompts à excuser que leurs alter ego, les contrôleurs de la SocGen aient "paniqué" pendant 3 jours avant que Daniel Bouton ne prévienne de la bévue le Gouverneur de la BdF un dimanche après la sortie de la messe ! De qui se moque-t-on ?
En tant que non spécialiste, j’aurais tendance à me fier à un dicton populaire :"quand on veut tuer son chien, on dit qu’il à la galle". Et je prendrais même ce dicton à l’envers : « quand un maître a attrapé la galle dans une relation douteuse, il peut être tenté de tuer son chien pour lui faire porter le chapeau !… » Voir l’annonce de l’AMF d’un probable délit d’initié début janvier par un cadre de la SG !!!
Pour moi il est surtout temps de « Sauver le soldat Kerviel » avant que son cas ne tourne au syndrome « du Masque de Fer » embastillé à vie pour éviter qu’il ne soit reconnu innocent. Cf. la réaction immédiate du ministre du Budget : Kerviel coupable.
marc:
il y a 2 portefeuilles un vrai et un fictif.
Quand il fait une transaction sur le vrai par ex acheter 1 contract dax, il fait l’inverse sur le faux par exemple vendre [en ecriture] un portefeuille fictif representant le dax dans un compte bidon ou inactif. Pour la socgen il est "couvert", c.a.d pas de risque.Il faut payer une marge sur le vrai portefeuille et il ne recoit ni cash-flow ni collateral sur le faux, d’ou l’absurdite de la chose: on n’envoie des milliards en marge sans s’assurer qu’il y a du repondant sur le portefeuille "couvert" mais qui evidemment ne l’est pas.
Tout ca c’est tres dur a gerer pour un seul homme…
Sur le mystère du portefeuille de couverture qui ne rapporte pas de marge, je cite une phrase (que je ne comprends pas -si quelqu’un peut d’ailleurs me l’expliquer) du Financial Times (http://www.ft.com/cms/s/33f4916c... :
"Mr Mustier said there were not always cash exchanges on margin calls, as “if you hedge with a forward, there is no cash exchanged if you cancel it before maturity”."
@marc : Sur les appels de marge, il y a apparemment des deals "forwards" qui sont gérés comme des accords de gré à gré entre banques, hors marché, qui ne déclenchent donc pas d’appels de marge. Ce serait cohérent avec l’histoire de "la grande banque" qui a démenti à la SG être contrepartie, déclenchant toute l’affaire.
"Mais un trader qui, de façon dissimulée, prend plus de risques et a de la chance passera pour un individu plus compétent que ses collègues tant que sa façon de faire n’aura pas été décelée. "
Je pense que ca c’est hors de question, c’est un junior Tradeur, même s’il fait gagner une centaine de millions a la banque il est pas en ligne pour en voir la couleur.
Comment il a fait je pense qu’on commence a le comprendre.
Ce qui est le point le plus curieux c’est pourquoi avoir fait ca ?
Tous les commentaires sont interressants; mais comment pouvez vous imaginer qu’aucun système n’est violable. Je vous rappelle que le système du Pentagone l’a été il y a quelques années.
Oui le système de la SG est réputé pour être le plus sophistiqué, mais il existe toujours une faille quelque part et penser le contraire est utopique. Par contre on peut s’interroger sur ce que je considère comme une erreur c’est à dire de mettre un ancien de back office en Front office
Ah des hypothèses nouvelles et à bonne tête sur le blog de Laurent Guerby guerby.org/blog/index.php…
(et ça répond un peu à la réponse que me faisait jck au commentaire 17) : il se pourrait que justement les contreparties fictives soient des contrats gré à gré, Reste à savoir (je vais poser la question de ce pas sur le blog de Laurent Guerby) quels sont les usages de la profession en matière d’appels de marges pour ces contrats gré à gré ; s’il peut ne pas y en avoir sans que ça ne paraisse monstrueusement invraisemblable, on peut commencer à comprendre le principe de la fraude.
Oui, j’ai lu à plusieurs endroits que les contreparties étaient otc.
Est-ce que les chambres de compensation versent directement les montants des appels de marge aux contreparties bénéficiaires ?