Optimum s’énerve devant les contradictions de S. Royal, qui (comme d’ailleurs récemment N. Sarkozy et D. de Villepin) reprochent à la banque centrale européenne de pratiquer une politique monétaire exagérément restrictive nuisant à la croissance, tout en se plaignant du niveau trop élevé d’une hausse des prix soi-disant “cachée”. Un discours totalement incohérent, comme le rappelait récemment P. Martin : si l’on trouve l’inflation trop élevée dans la zone euro, la seule chose que puisse faire la Banque Centrale Européenne, c’est mener une politique monétaire restrictive, donc élever encore ses taux directeurs; comment réconcilier cela avec une demande de politique monétaire moins restrictive?
Au delà de cette démagogie de bas étage, on pourrait toutefois remarquer que cela fait référence aux interrogations générales sur la politique de la BCE, et l’élaboration d’une politique de change (rappelons que celle-ci est du ressort des Etats de la zone euro) ou d’une politique économique plus coordonnée en Europe. Mais comme l’indique aujourd’hui Jean Pisani-Ferry sur Telos, ce genre de discours de la part des politiques français va exactement dans le sens inverse.
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Vous abordez un problème politique et non economique. Il trouve probablement sa source dans la conception de souveraineté/légitimité démocratique Française.
Personnellement ce que je trouve surprenant c’est que (a) les politiques (qui sont plus intelligents qu’on ne les crédite) ne s’interrogent pas sur les raisons de l’attitude inverse des autres pays afin de revisiter la leur et (b) ne voient pas qu’ils scient la branche sur laquelle ils sont assis. En cherchant systématiquement des boucs emissaires chez nos voisins et dans les institutions qui gèrent notre vie courante, comment peut on creer le climat de confiance necessaire a la coopération?
Je crains que si pour les politiques Français, l’Europe doit être Française ou ne sera pas, elle ne sera simplement pas.
Une lueur d’espoir toutefois, cette génération de politique est la dernière franco-française, leurs successeurs auront une vision du monde plus internationalisée.
J’aimerai prendre (pour une fois) la défense des politiques. Ils ne critiquent pas l’inflation. Ce qu’ils estiment, c’est que l’inflation n’est pas conforme à l’impression des français. Ce qui est une évidence. L’inflation est un chiffre abstrait, chacun d’entre nous a une consommation concrète et nous sommes inégalement frappés par la hausse des prix, selon ce que nous consommons. Ce n’est pas forcément la hausse des prix qui est dénoncée, simplement le fait qu’aucun instrument ne la mesure comme on la ressent (position éminemment critiquable, mais mon commentaire avait pour seul objet d’essayer de mieux cerner le discours politique sur cette question).
Ravi de voir que votre critique est plus argumentée que celle d’Optimum qui sue la haine et le ressentissement contre les médiocres politiciens et les citoyens ignorants…c’est une authentique aspiration technocratique..très années 30…pourquoi pas…
Mais, j’ai une question. Pourquoi dîtes-vous que la politique de change relève des gouvernements ? LA BCE n’a malheureusement pas d’objectif de change mais dans les gouvernements ont-ils les outils d’une politique de change ? Je suis preneur d’un éclairage.
Conseillère de Tribunal Administratif en titre, Ségolène Royal est bien assez bonne juriste pour avoir quand même du mal à ignorer le caractère tout à fait démagogique et irréaliste de ses propos ?
Tout ceci n’est donc que de la politique, mais témoigne effectivement de la volonté des uns ou des autres de s’adresser à telle ou telle partie de l’électorat pour augmenter leurs chances d’accéder effectivement au pouvoir. En l’occurence, à l’évidence, Royal et Villepin savent bien que l’électorat à même de remarquer l’absurdité de leurs propos ne se réfugiera jamais ni dans le vote extrème, ni dans l’abstention.
Oui, ce sujet fait l’objet de grandes manipulations.
De fait, la BCE suit la "règle de Taylor" : l’analyse de sa fonction de réaction aux variations conjoncturelles montre qu’elle se soucie au moins autant de l’état de la croissance que de l’inflation. Le professionnel de l’économie que vous êtes me contredira-t-il?
S’il n’est pas la cause de nos maux économiques (cf l’Allemagne qui exporte malgré sa force et , surtout, il nous a protégé, nous Français, contre plusieurs dévaluations qui auraient été douloureuses), l’euro constitue tout de même un problème : les situations de l’inflation comme de la croissance ne s’homogénéisent absolument pas dans la zone euro. En effet, la libre circulation des capitaux et la monnaie unique n’ont pas transformé la zone euro en "zone monétaire optimale" car la libre circulation des travailleurs (qui permettrait de lisser les différences conjoncturelles : les travailleurs passent d’un pays à l’autre en fonction de la situation des différentes économie) est fortement lacunaire en Europe (par rapport aux Etats-Unis).
On trouve autant d’hétérogénéités conjoncturelles entre les différents Etats fédérés américains qu’entre les pays européens et la politique monétaire de la FED y est pourtant homogène…la grande différence, c’est que les travailleurs circulent facilement d’un Etat à l’autre.
Finalement le gros avantage des USA, de ce point de vue, c’est l’unité linguistique.
L’euro, de ce point de vue, a été un échec : il n’a pas permis d’unifier le marché européen. Je crains que, étant donné la diversité des langues et des cultures européennes, cela soit toujours ainsi.
Son gros avantage (pour nous, Français) est qu’il sert plutôt à nous protéger de notre incurie budgétaire !
Ce que je veux dire, c’est que si la critique du rôle de la BCE est facile et repose souvent sur des arguments fallacieux, il ne faut pas dégager d’un revers de main tout questionnement sur l’euro et les institutions qui président à sa destinée.
La création d’un véritable marché du travail européen est plus que jamais nécessaire. Il faut avancer ! Pour la langue, les réticences françaises à la ratification de l’accord de Londres sont révélatrices de nos incohérences…
Bref : Pisani-Ferry a raison !
Adam S : vous êtes bien optimiste.
Paxa : ouiménon. les remarques s’accompagnent systématiquement de l’idée selon laquelle ce qui est caché, c’est une hausse des prix considérable. Donc que celle-ci est trop forte.
Ratafee : si vous avez des choses à dire à Optimum, n’hésitez pas à les y signaler… Pour répondre à votre question, la politique de change dans l’UEM est l’apanage des gouvernements, pas de la BCE. Si ceux-ci décident d’une politique de change (et si celle-ci n’est pas génératrice d’inflation) la BCE doit suivre. La question, c’est pourquoi n’y a-t-il pas d’entente sur une telle politique? Peut-être parce que, contrairement à ce qu’affirment nos dirigeants démagogues, les économies européennes aujourd’hui assez largement à l’abri du risque de change et que si elles désavantagent certains, les fluctuations des devises en avantagent d’autres.
Passant : la campagne électorale est uniquement menée l’oeil braqué sur des sondages d’opinion et des calculs politiques internes. La réalité n’a pas de prise là dessus.
Carolus : oui et non. Les effets de la mobilité des salariés aux USA ne sont pas aussi grands qu’on tend à le considérer (ceux-ci ne sont pas très mobiles). Et en Europe même, il pourrait y avoir une forte mobilité à l’intérieur des pays. Cela dit, d’accord pour l’essentiel avec vos remarques.
@Ratafee : si vous êtes pas jouasse, nos commentaires vous sont ouverts. Si vous considérez que s’énerver contre (car je n’avais pas l’intention d’élaborer une "critique" dans mon billet, sinon j’aurais effectivement argumenté, mais ça ne me paraissait pas digne d’y passer plus de temps que ça) le populisme, l’ignorance et la mauvaise foi, est une "aspiration technocratique"… Ca fait penser aux gamins qui traitent d’intello le premier de leurs camarades qui fait mine de savoir quelque chose.
Si moi.
"<i>Et en Europe même, il pourrait y avoir une forte mobilité à l’intérieur des pays</i>."
Là n’est pas la question, puisque -d’après ce que j’ai lu- le critère décisif est la mobilité des salariés entre les différents Etats européens, afin de lisser les différences entre des situations conjoncturelles trop hétérogènes pour permettre à la zone euro d’être une ZMO.
Bref, ya du boulot pour unifier les marchés.
Je partage tout à fait votre analyse. Reste alors à savoir si c’est bien prêter quelqu’attention à l’intérêt des générations futures que de soutenir même par simple inaction des politiciens démagogues, dès lors qu’on sait qu’à leurs yeux, rien ne vaut que pour être sacrifié au gré des besoins de caressage d’opinion dans le sens de son poil.
1. Le problème n’est il pas également une absence de transfert financier pour "mutualiser" les risques conjoncturels entre les différents pays.
2.Les politiciens réagissent aux incentifs qu’on leur donne. Autant que je sache les politiciens vertueux (Mendes, Chaban, Barre, Delors) ne sont populaires que dans le souvenir des électeurs pas dans les urnes. Nous avons donc les politiciens que nous méritons.
Il nous reste toutefois l’émigration.
Adam S.: concernant votre point #2, je m’interroge réellement sur la lecture faite par les politiciens des situations sur lesquels ils s’expriment. Je me demande notamment si, bien plus que les politiciens eux-mêmes, ce ne sont pas leurs conseillers qui font une analyse parfaitement erronée des tendances sociales, et donc, d’éventuels "incentives".
Après tout, il me semble que, depuis 1990, aucun stratège n’a jamais pu revendiquer la responsabilité de quelque victoire électorale que ce soit. Ce qui, à mon avis, devrait inciter les politiciens eux-mêmes à s’interroger sur la compétence réelle de leurs proches et conseillers. Qui ne se souvient de ce pauvre DSK piégé à se faire conseiller d’acheter tel disque plutot que tel autre ?