Ce soir sur RFI (Edité après l’émission)

Je participe ce soir, à 19h15, au débat du jour sur Radio France Internationale, sur le thème suivant : Faut-il vraiment sauver la PAC? Ma réponse est bien connue

Edit : quelques remarques vis à vis des commentaires et des points non abordés.

– Sur la question de la contribution au revenu agricole. Lorsque Bill Gates entre dans un bar, le revenu moyen des clients du bar augmente considérablement, et la contribution de Bill Gates à ce revenu moyen est énorme. Est-ce que pour autant les autres clients du bar voient leur revenu personnel augmenter? Dès lors que la PAC est concentrée sur quelques secteurs et les plus grandes exploitations, sa contribution au revenu moyen des agriculteurs est grande, sans pour autant que sa contribution au revenu des individus soit si forte que cela.

N’oublions pas non plus que cette contribution est dissoute par les modifications de prix des intrants et des produits qu’elle entraîne. Une aide versée à un agriculteur élève son revenu : mais une aide versée à tous augmente le prix des intrants, réduisant l’effet initial. C’est pour cela que la contribution réelle au revenu (une fois ces effets de hausse des intrants déduits) est beaucoup plus faible que le montant budgétaire des aides.

– Je regrette de n’avoir pas pu évoquer la question environnementale; il y a largement de quoi dire là dessus.

– Autre aspect, que SM avait abordé il y a quelques temps, celui de la situation des agriculteurs. La PAC a correspondu à la plus grande période de diminution de la population agricole en France jamais vue. En cause, au moins en partie, la très grande difficulté de la vie et du métier d’agriculteur. Les agriculteurs vieillissent, leurs descendants ne reprennent pas les exploitations, le taux de célibat et de suicides est extrèmement élevé dans la profession… En contrepartie de cela, la PAC impose aux agriculteurs un degré démentiel de pression bureaucratique (les fameux “300 points de contrôle” cités par Mme Lambert…); les conséquences d’un problème sanitaire sont dramatiques. La PAC donne l’impression de citadins qui paient pour avoir la paix avec le monde agricole, et ne surtout pas regarder la très dure réalité de ce métier. Entre les documents cités par JCK sur le Canada, l’effet de la suppression des subventions en Nouvelle Zélande, la qualité de vie des agriculteurs semble parfois améliorée par la suppression des politiques agricoles.

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Alexandre Delaigue

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13 Commentaires

  1. > Faut-il vraiment sauver la PAC?

    Bien sur qu’il faut sauver le Pack. Sans ce soutien indispensable, le marché français risque de subir une importante pénétration en provenance d’Amérique du Sud.

    Je pense principalement aux torreaux argentins. Je sais bien qu’ils passent déjà une bonne partie de l’année à fouler les pelouses européennes mais c’est pas une raison pour les laisser venir menacer les produits locaux.

    La concurrence je suis pour mais seulement si on gagne.

    Ne pas confondre, les piliers de la PAC
    http://www.ain.pref.gouv.fr/ddaf...
    et les piliers du Pack
    fr.wikipedia.org/wiki/Pil…

  2. Je ne parviens pas à ouvrir dans votre billet d’aujourd’hui le 2ème lien hypertexte du billet auquel vous renvoyez ("le précédent post")…

    Exact, ça date de l’ancienne mouture du blog. Voilà le bon lien, je vais corriger le post.

  3. Votre billet est une pure merveille, je n’avais jamais encore lu d’analyse aussi détaillée.

    Originellement, la PAC n’était elle pas conçue pour accompagner la rationalisation agricole Française et l’exode rural? Un quid pro quo pour l’ouverture du marché national aux produits teutons?

    Depuis son seul mérite est de subventionner de manière inégalitaire, certes, mais bien commode politiquement les agriculteurs français d’un montant qui est je pense de 10 Milliards par an. Etre privé de ce montant risque de poser un problème politique grave, non?

  4. Durant les vacances j’ai laissé passer un article de Libé dans lequel l’auteur souligné, qu’en moyenne, le revenu des agriculteurs français été composé à 77% de subventions.

    Auriez-vous des études sur ce sujet?

  5. J’ai rigolé au "Il est économiste, faut le comprendre". Vous auriez pu lui renvoyer l’argument 😉

  6. Quelque chose me dit que Mr Delaigue n’a absolument aucune chance d’être nommé un jour ministre de l’agriculture :-))

    (Bravo pour la qualité de l’argumentaire, ceci dit, tant sur le fond que sur la concision et l’efficacité de la forme)

  7. J’espère que tu as bossé depuis 2005 car cela faisait longtemps que je n’avais pas lu quelque chose d’aussi maladroit, partisan, et malhonnête que le lien que tu proposes (ta réponse, qui j’espère est mal connue).
    Rapidement:
    – la PAC a changé fondamentalement trois fois depuis son instauration, il n’y a guère que son budget qui est stable ou à peu près. Le fonctionnement (mal) décrit est celui qui prévalait à l’origine de la PAC.
    – PAC=47% du budget européen soit 50 Milliards. ouf, un chiffre clé trouvé dans "interview choc"? PIB européen 13450 milliards de dollars, soit environ 16000 milliards d’euros. Dépenses des ménages européens en alimentation: 10% de leur budget. PIB n’est pas égal à dépenses car il se crée de l’argent, mais mettons 10000 milliards * 10%=1000 milliards de dépenses d’alimentation pour les européens. Maintenant causons en de ces 50 milliards:5% des dépenses européennes pour l’alimentation. C’est colossal?
    – peché dans l’article: "faible contribution au revenu agricole". De peanuts effectivement à 75% avec une médiane probablement de l’ordre de 40%. Mais faible, bien sûr…
    – pas un mot sur la maîtrise de la production et l’intérêt d’une politique d’incitation à produire tel ou tel produit, dans un objectif de sécurité alimentaire.
    et des tas d’autres choses méchantes à dire. Bref j’écouterai france culture et pas RFI ce soir.

  8. C’est drôle vous fustigez les fonctionnaires européens, car "ils ne sont pas au contact de la réalité" (ce qui n’est pas faux), mais vos propos montrent que vous ne connaissez pas la réalité agricole. L’agriculteur ne peux pas choisir de changer sa production du jour au lendemain, cela va de l’année pour le céréalier à une dizaine d’années aux aboriculteurs.

    A noter également, une erreur dans votre billet de 2005, "Elle consiste à garantir sur les marchés européens des prix supérieurs à ceux qui prévaudraient spontanément." la PAC depuis 1992, a tendu à compenser progressivement par prime directe au céréalier, le fait qu’il n’y avait plus de prix garanti.

    Si l’augmentation des prix agricoles continue comme ça, il n’y aura plus besoin de prime pour financer l’agriculture française, il faudra penser à taxer la production 😉

    Je sais bien qu’un agriculteur ne peut pas changer de production du jour au lendemain. Ce que je voulais faire remarquer, c’est qu’avec la PAC les ajustements subissent un délai supplémentaire, le temps que les règlementations suivent. Prenez l’exemple du lait : actuellement les producteurs ne peuvent pas augmenter suffisamment la production pour suivre la demande, parce qu’ils doivent attendre que les quotas laitiers soient ajustés. Sinon, clairement, le post de 2005 traitait un peu trop de la pac d’avant les réformes, et pas assez de celle d’après.

  9. dklik : "la PAC a changé fondamentalement trois fois depuis son instauration, il n’y a guère que son budget qui est stable ou à peu près. Le fonctionnement (mal) décrit est celui qui prévalait à l’origine de la PAC."

    La technique de base de toute administration consiste à savoir remettre en question ses méthodes d’administration avant que l’analyse en révèle les faiblesses et partis-pris, mais aussi, de bien veiller à conserver les moyens administrés, voire, si possible, de les augmenter.

    Telle est d’ailleurs la motivation de toute "réforme" : réussir un cliquet sur les moyens (et hurler à l’ultra-libéralisme dans le cas contraire) mais accepter de se remettre entièrement en question sur les méthodes, du moment qu’elles n’imposent pas de parti-pris sur les résultats (partage du grisbi).

    Je ne sais rien de la PAC, mais je constate cependant que, et ce, seulement depuis 2005, l’agriculture emploie plus de fonctionnaires et de mètres carrés que le notoiremebnt glouton MINEFI, et a d’ailleurs eu la chance de s’être fait refaire à neuf ses locaux. Réformons, réformons, il en restera toujours quelque chose…

  10. "la qualité de vie des agriculteurs semble parfois améliorée par la suppression des politiques agricoles."

    Ayant comme seconde source de revenus la propriété d’une toute petite exploitation viticole en zone de production de vins de pays (beaucoup moins règlementée, inspectée et "conseillée" que les vins labellisés) dans laquelle je suis seul à travailler, je puis vous affirmer que l’exercice de cette seconde profession n’est guère possible que par l’absence de subventions, assortie de la légèreté de la règlementation applicable (pensez-donc, je ne traite qu’avec trois administrations différentes (MSA, services de la viticulture et SAFER), ce qui est ma foi bien peu !). Même ainsi, si je n’étais pas adhérent d’une coopérative de producteurs, les taches administratives pour lesquelles les paysans sont, je l’avoue, peu productifs, me ruineraient certainement le moral et me coûteraient sans doute beaucoup de temps.

  11. "En contrepartie de cela, la PAC impose aux agriculteurs un degré démentiel de pression bureaucratique (les fameux "300 points de contrôle" cités par Mme Lambert…);"

    Entre exploitants hélas concernés même lorsqu’on est pas subventionnés, et même lorsqu’on exporte 100% de sa production hors UE, il est d’usage de considérer que la pression bureaucratique, notamment sur la traçabilité, est une logique protectionniste (les étrangers ne parviendront jamais à mettre en place d’eux-mêmes le flot continu de procédures contrôle et qualité inventé par les bureaucrates déchaînés tous les ans).

    La difficulté consiste donc à mettre en place, généralement à l’échelle de la communauté de producteurs, des moyens de faire bonne figure face à ces obligations sans que ça ne coûte trop, sachant que, à l’exception de ce qui relève du phytosanitaire, les inspecteurs en charge de l’inspection et la vérification de la mise en oeuvre des procédures ne sont généralement dupes de rien.

    Renseignez-vous par exemple sur la directive "bien-être animal" qui suggère le terrassement des pâtures destinés à assurer aux animaux dominants des troupeaux une situation de surplomb destinée à réduire leur stress. Evidemment, en NZ, ils en rigolent, mais après, on peut leur dire qu’on ne veut pas de leur viande en europe parce qu’ils maltraitent leurs animaux. La protection des animaux, de la nature et de l’écologie en générales, causes au demeurant fort sympathiques à mes yeux, sont très souvent instrumentalisées par les administrations et les élus écologistes au service de causes relevant à mes yeux bien plus du protectionnisme économique ordinaire et du gâchis organisé d’argent public .

    Je comprends par contre que l’exploitant solitaire, confronté à la rudesse de la correspondance administrative et aux bons conseils d’un syndicat ayant toujours plaidé pour une industrialisation de l’agriculture finisse par avoir des idées noires.

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