Cela n’intéresse probablement personne, mais je suis en train de chercher à acheter un appartement à Rennes. Comme tous les acheteurs, je suis frappé à la fois par le niveau des prix et par leur évolution récente, une hausse vertigineuse. La semaine dernière, on m’a proposé de dépasser la barre (certes psychologique) des 300 000 €, pour un appartement certes fort bien placé et aménagé, mais quand même. Pour payer ce genre de prix d’achat, avec un apport réduit, cela implique de rembourser environ 1500 € par mois pendant 25 ans; 1500 €, c’est le salaire médian français, et la perspective de le payer chaque mois pour un logement ne faisant même pas 80m² a quelque chose d’effarant.
La ville de Rennes n’a rien d’exceptionnel : on trouve ce genre de prix de vente dans l’essentiel des grandes villes françaises, voire, souvent, beaucoup plus (j’imagine que les lecteurs parisiens de ce blog doivent éclater de rire en lisant qu’on peut trouver que 4000€ le m² est un prix prohibitif). Les prix immobiliers eux-mêmes ne sont pas isolés : De nombreux actifs ont connu, depuis une dizaine d’années, une hausse spectaculaire. Les records de prix de vente d’oeuvres d’art ont été régulièrement battus dans la période; le prix des terres agricoles a augmenté, celui des actions et obligations aussi.
Et il semble que ce mouvement de hausse soit sur le point de s’inverser; la seule question étant, avec quelle ampleur, et avec quelles conséquences. Nouriel Roubini a récemment décrit un scénario de chute de grande ampleur des marchés d’actifs, provoquant par contagion un effondrement systémique des marchés financiers, et la disparition de mille milliards de dollars de valeur. Le FMI réduit ses estimations de croissance pour l’année à venir. Les métaphores historiques fleurissent : les plus ignorants invoquent les années 30, àd’autres suggèrent les années 70, voire peut-être le début des années 90, avec une prédilection pour la longue crise japonaise qui s’est ensuivie. Tout le monde en tout cas, communie dans l’idée que cela va être très grave.
Et effectivement, les épisodes de récession ne sont pas des moments agréables. Le chômage augmente, des entreprises font faillite, les revenus stagnent, les frustrations s’accroissent, les égoismes se durcissent, les lois deviennent plus dures vis à vis des plus faibles; B. Friedman a bien décrit cela dans "the moral consequences of economic growth". L’absence de croissance a toute une série de conséquences fâcheuses sur la société, qui ne s’arrêtent pas aux effets économiques.
Sans négliger les conséquences négatives d’une récession, il faut quand même les relativiser. Les budgets des Etats, les systèmes de protection sociale, les instruments de politique monétaire (surtout depuis que l’on sait à peu près comment fonctionne cette dernière) sont autant d’amortisseurs de ces conséquences. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que dans nos économies modernes et diversifiées, les récessions ne touchent pas tous les secteurs d’activité; on estime qu’entre 70 et 80% des activités continuent de croître, même en période de récession. Surtout, les perceptions comptent beaucoup dans l’appréciation des conséquences d’une récession. Tout le monde continue de considérer la crise de 73 comme un terrifiant cauchemar, alors qu’elle n’a pas empêché l’économie française de croître à un rythme supérieur à 3% durant toutes les années 70; bien peu de gens évoquent la crise de 1993, dont les conséquences ont été autrement plus virulentes.
Une récession, par ailleurs, présente quelques aspects positifs. En période d’expansion, il est impossible de faire la différence entre les entreprises efficaces, et celles dont les dirigeants se contentent de prendre trop de risques et d’avoir de la chance; la récession permet de distinguer les bons des mauvais (cela vaut aussi pour les dirigeants politiques). Les difficultés poussent les entreprises à devenir plus productives, ce qui est la seule source de prospérité à long terme; il est même possible de considérer que la volatilité de la croissance, dans les pays développés, est au total une bonne chose pour la croissance à long terme en permettant d’acquérir plus de connaissances, même si le sujet est controversé. En exerçant une pression sur les budgets publics, elles limitent les capacités des gouvernements à faire des "réformes", ce qui est une très bonne chose dans les pays dirigés par un personnel politique peu compétent.
Il faut aussi nuancer l’impact des pertes financières indiquées. 1000 milliards de dollars peuvent sembler un chiffre impressionnant, mais il s’agit de pertes liées au changement d’évaluation d’actifs existants. Lorsque le gouvernement américain dépense 1000 milliards de dollars pour la guerre en Irak, il s’agit d’authentiques pertes : l’argent en question a été perdu, dépensé en munitions tirées, en matériels détruits, en ressources humaines gaspillées, qui auraient pu servir plus utilement ailleurs; c’est autant qui ne sera pas consommé sous forme de biens et services utiles.
Il n’en est pas de même pour les actifs, comme l’immobilier : un appartement reste un appartement, qu’il soit vendu 150 000 € ou 300 000€. La rentabilité d’une action dépend des perspectives de l’entreprise, sa technologie, la qualité de son personnel, qui ne sont pas modifiées par les fluctuations au jour le jour des indices boursiers. Une période de hausse soutenue des prix immobiliers peut avoir un avantage indirect, en incitant les promoteurs et les constructeurs à accroître le stock de logements existants; mais cela ne vaut que si, finalement, leur comportement aboutit finalement à une baisse des prix. Actuellement, contrairement aux idées reçues véhiculées par une presse avide de clichés misérabilistes, le problème aux Etats-Unis n’est pas celui de gens contraints de quitter leur logement faute de pouvoir payer leur emprunt et transformés en SDF; il s’agit simplement de gens qui constatent qu’ils n’ont aucun intérêt à rester propriétaires d’une maison qui vaut 250 000, pour laquelle ils doivent payer une dette de 300 000. Il est préférable pour leur situation financière de se mettre en faillite, de renoncer à leur dette et à leur actif, pour se déplacer dans la maison d’à côté, vendue à un prix inférieur. Certes, au passage, les institutions financières qui leur ont prêté se retrouvent avec une créance insuffisamment supportée par des actifs, ce sont elles qui subissent les pertes; mais il y a une certaine justice à voir ces institutions, qui ont poussé leurs clients à emprunter de façon trop importante, devoir supporter le prix de leurs actes.
Comme le rappelle John Kay, les fluctuations des prix des actifs, mobiliers et immobiliers, ont avant tout des conséquences distributives. Lorsque le prix des logements monte, cela bénéficie à ceux qui sont déjà propriétaires du leur, et pénalise ceux qui souhaitent en acquérir un. La hausse du prix des actifs financiers avantage ceux qui les détiennent déjà, au détriment de ceux qui veulent se constituer un patrimoine. En somme, la hausse de l’immobilier avantage les ménages vieux et riches, au détriment des ménages jeunes des classes moyennes. Comme la valeur des actifs immobiliers représente trois fois celle du revenu national annuel, cela signifie qu’une hausse de 10% des prix immobiliers est équivalente à une redistribution de 30% du revenu national des jeunes vers les vieux; à côté de montants de ce genre, les réformes des systèmes de retraite dont on nous fait tout un foin ne sont que des queues de cerise. Il n’est pas étonnant qu’un Louis Chauvel ait vu dans l’évolution des prix immobiliers la principale source du déclassement générationnel subi par les jeunes ménages des classes moyennes.
Si les récessions posent des problèmes, il ne faut pas oublier que les expansions ne sont pas toujours sources de bienfaits de façon univoque. L’expansion des dernières années, assise sur la hausse du prix des actifs plus que sur celle de la productivité, a bénéficié aux détenteurs d’actifs de façon disproportionnée, et creusé les inégalités de patrimoine. Un effondrement des prix de l’immobilier et des actifs financiers, à la suite de ce qui s’est passé aux USA, constituerait une redistribution significative des riches et des vieux vers les jeunes et les classes moyennes qui déplorent l’affaiblissement de leur pouvoir d’achat face aux dépenses liées aux acquisitions immobilières. Il y a beaucoup de raisons de penser que cela serait une bonne chose.
Pour toute une série de raisons bien analysées par l’économie comportementale, les prix de l’immobilier ont du mal à baisser; ceux qui ont payé cher rechignent à subir une perte nominale en revendant leur logement moins cher qu’ils ne l’ont payé. C’est ce qui fait la spécificité des crises immobilières, qui ont tendance à durer longtemps, le temps que les prix des logements, sous l’effet de l’inflation, finissent par retrouver leur valeur normale en termes historiques. C’est en partie ce qui fait que beaucoup d’économistes s’inquiètent des conséquences d’un effondrement immobilier sur la conjoncture.
Mais ce n’est pas seulement cela. Les économistes que l’on voit commenter la conjoncture ont souvent des intérêts proches de ceux des institutions financières, qui bien souvent, les emploient, et qui sont les principales à subir les conséquences de la chute du prix des actifs; l’effet générationnel fait aussi bien souvent qu’ils appartiennent plus souvent aux classes sociales relativement âgées et aisées qui ont à perdre à la chute du prix des actifs. Derrière l’inquiétude de ceux qui nous annoncent des catastrophes et souhaitent que l’Etat intervienne, il y a un peu d’intérêt de classe inconscient.
Pour ma part, mon intérêt de classe est clair : je suis en train de chercher à acquérir des actifs, notamment immobiliers, et j’ai tout à gagner à la baisse de leur prix. Même si la chute de l’immobilier provoque une récession, j’ai beaucoup plus à y gagner qu’à y perdre. Et ce n’est pas toujours le cas, mais je crois bien que dans les circonstances actuelles, mon intérêt personnel coincide assez largement avec celui des classes moyennes de la société française. Je ne suis pas comme la famille Harford , je peux attendre un peu que les prix baissent. Je crois que je ne vais pas acheter cet appartement à 300 000 € tout de suite.
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Et voila. Chaque fois que je lis un article sur ce blog je regrette de ne pas venir plus souvent car pour un béotien en économie comme moi, c’est l’occasion de m’instruire, d’apprendre et de comprendre.
Merci donc
"les institutions financières qui leur ont prêté se retrouvent avec une créance insuffisamment supportée par des actifs, ce sont elles qui subissent les pertes;"
Si j’ai bien compris cet exemple, vous parlez de la crise "subprime" des USA et de toutes ces "dépréciations d’actifs" dont on entend parler en cette période de résultats ?
Réponse de Alexandre Delaigue
Oui, c’est de cela qu’il s’agit.
Je me pose à ce sujet depuis fort longtemps une question : que vaut, selon les économistes, la théorie selon laquelle les cours des biens rivaux (parmi lesquels, à quelques approximations près, l’immobilier de résidence principale) évoluent à long terme dans les mêmes proportions que la masse monétaire ?
Sinon, de votre point de vue, l’objectif même de la création de l’Euro n’était-il pas d’imposer aux puissances publiques des limites à leur possibilité de recours à l’endettement de sorte à rassurer les marchés financiers de l’époque, de sorte à ce que l’épargne ait encore confiance en les emprunts publics ? Y a-t-il une limite à l’endettement public autre que la confiance des prêteurs, comme, par exemple, le caractère de moins en moins supportable des conséquences de l’inflation de la masse monétaire, comme par exemple, la hausse du cours des biens rivaux, comme, par exemple, l’immobilier de résidence principale dans les pays développés ?
(NB: à mon avis, ceux, assez nombreux qui entrèrent (ou plutôt, se présentèrent aux portes..) sur le marché du travail dans les années 1992-1993 se souviennent fort bien de ce qu’était la crise de l’époque)
Réponse de Alexandre Delaigue
Si l’on en croit Shiller, sur le long terme, le prix de l’immobilier reste en gros constant en termes réels. Pour la création de l’euro, je ne pense pas que la question de la confiance dans la dette publique ait été un point central; ça l’était plus au moment de la libéralisation des marchés financiers. Et non, je ne pense pas que ce que vous évoquez « limite » la dette publique.
Quel serait l’impact d’une récession sur la dette de l’Etat ? Et inversement, quel rôle joue la dette de l’Etat sur l’impact d’une récession ?
Réponse de Alexandre Delaigue
Première question : l’augmenter. deuxième question : le réduire.
Bon, je vais poser une question bète :
en quoi les prix du marché de l’art peuvent-ils se comparer à ceux du marché immobilier ? J’aurais tendance à penser que l’art, en tant que produit d’achat (pas en tant qu’amateur qui va dans des musées ou des galeries sans acheter…heureusement) est un marché de niche : finalement, assez peu achètent de l’art. On a en France quelques gros collectionneurs, et des gens qui sont passionnés et qui achètent en partie pour soutenir les artistes.
Mais l’art n’est pas forcément un bon produit de placement : volatile, peu fiable, à la côte incertaine ; c’est du moyen terme incertain.
(Ceci est valable pour les gens qui achètent de l’art d’artistes vivants, qui ne font pas forcément les records du marché…et ceux qui font ces records sont …allez, une vingtaine dans le monde ?)
Réponse de Alexandre Delaigue
C’est un actif beaucoup plus volatil que l’immobilier, mais c’est un actif quand même. Et il y a quelques points communs : l’immobilier « positionnel » (les logements de prestige dans les centres des villes) tend a évoluer comme les prix de l’art, parce que les deux réagissent aux gains patrimoniaux en haut de l’échelle des revenus.
J’ai lu qqpart que la chute de l’immo en France pourrait être de 17% d’ici 2010 (je n’ai plus la source de cette prévision).
Ca me semble plausible. Vous avez raison d’attendre.
2010 : investir ds l’immo !
Réponse de Alexandre Delaigue
L’une des choses les plus sûres que l’on puisse dire en matière d’immobilier, c’est que les prévisions doivent être prises avec beaucoup de pincettes. Une baisse est plausible, mais pas certaine.
Je partage tout à fait cette analyse et j’attends avec impatience une redistribution des cartes.
L’éclatement de la bulle immobilière va faire mal, très mal mais un mal nécessaire.
Consultez les courbes de Friggit pour avoir une idée de l’envolée délirantes des prix de l’immobilier.
Un retour à la "normale" suppose une correction de 30 à 50% des prix actuels …
On ne peut jamais se satisfaire de la baisse d’actif, qu’on soit riche ou pas, possedant ou accédant. La baisse d’actif, signifie aussi moins de rentrée d’argent dans les caisses de l’état, moins de redistribution donc, augmentation des déficits, car il faut bien emprunter ce qu’on a pas "récupéré" par l’impot. Sans compter que ceux qui ont vraiment de l’argent, n’ont rien à faire que ça monte ou que ça baisse: on peut jouer dans les 2 sens (au moins pour la Bourse).
Alors oui, l’immobilier est trop cher. Oui, il va baisser (voir aussi mon article là: gigi75.over-blog.com/arti…
Mais la redistribution se fait aussi par le crédit ! En effet, ce sont les "riches" (via les assurances vies en Euro par exemple, ou les obligations) qui prêtent aux accédant. Et si les actifs des "riches" baissent, nul ne doute que le crédit va se restrindre, et ceux qui en patiront seront les accédants, et non ceux qui sont déjà en place.
Vous voyez, l’intérêt de tous n’est pas la baisse, mais la hausse.
gigi75.over-blog.com
Réponse de Alexandre Delaigue
Mon dieu. Vous pensez vraiment que la hausse des actifs est une bonne chose parce qu’elle fait que les gens paient plus d’impôts?Et je maintiens que dans mon cas, et dans celui de beaucoup de gens, la baisse des actifs est une excellente chose. Cf l’article de John Kay, quand le marché a la bonté de m’offrir l’opportunité d’acheter de bonnes choses pour un prix faible, je suis content, comme Warren Buffet. Enfin, si globalement le prix des actifs n’a pas d’importance, ses conséquences redistributives sont très claires.
krugman.blogs.nytimes.com…
…et de quelle façon ce rapport a-t-il évolué en France…?
Réponse de Alexandre Delaigue
Je n’ai pas d’études sous la main. Mais a priori, l’immobilier a augmenté plus en France qu’aux USA, et les loyers y ont plutôt moins augmenté. Concluez vous même.
Malheureusement, la crainte d’une récession et celle (justifiée ou non) d’une crise systémique probable n’ont pas pour seul effet de faire diminuer les valeurs d’actifs. Elle fait aussi que les investisseurs disposant de liquidités se ruent sur les matières premières, ce qui a pour effet de tirer les prix des biens de consommation vers le haut et relancer l’inflation ; tout est au plus haut : métaux, pétrole, gaz, produits agricoles. La classe moyenne va morfler de toute façon, ce qu’elle ne paiera pas dans les mensualités de crédit immobilier, les produits manufacturés ou dans les loyers sera aspiré ailleurs.
PS /de source sure la plupart des AI se gardent une marge de négociation de 20 à 30%
Pourquoi l’inflation du prix des actifs n’est jamais interprétée comme un signe dangereux pour l’économie. On ne se concentre uniquement que sur l’inflation des produits et biens de consommations.
certes l’augmentation des prix de l’immobilier incite les promoteurs à construire et provoque une effet richesse chez les propriétaires.
Mais :
– cet effet richesse pour les mono-propriétaires (propriétaires que de leur seul logement) est totalement artificiel (si ils déménagent leur plus-value sera absorbée par l’achat d’un autre actif cher -en perdant au passage les droits de mutations et les frais d’agence soit une perte de 11% compensée certes bien souvent par l’effet de levier);
– les promoteurs sont plus sensibles au foncier disponible et son prix mise à disposition par les collectivités locales dans un marché où la demande reste trés importante et les prix fluctuent peu. (la volatilité des actifs non cotés est faible surtout quand les propriétaires de ces actifs ont une part importante de leur patrimoine dans le même panier…, ceci explique aussi pourquoi la bourse est aujourd’hui moins cher que le private equity).
Au lieu de se concentrer sur des incitations fiscales qui ne font que renchérir le prix de ces mêmes actifs immobiliers sans améliorer l’offre utile (les régimes de défiscalisations immobilières ont surtout permis des constructions de résidences secondaires -LMP, LMNP- qui ne satisfont donc pas les besoins primaires des gens, et qui augmentent le stock de lit "froid" alors que nous sommes en cruel manque de "lit chaud", il faudrait peut être que les pouvoirs publics se concentrent sur :
– l’incitation à la construction (foncier disponible, autorisation de construire des tours!!!);
– et si ce n’est pas possible (car nos chers électeurs veulent que leur campagne reste verte et que les villes gardent leur cachet haussmanien)de mettre en place des politiques qui visent à baisser le taux de vacance des actifs.
Par exemple, renchérir la taxe foncière pour les non résidents et baisser la TVA sur les produits hôteliers. Lits "chauds" vs. "lits froids".
Quelque chose que j’aimerai savoir : dans le prix d’un logement, quelle est la part du coût réel (matériaux, main-d’oeuvre, architecte, etc.) et la part due à la spéculation. Sinon, quand je lis que les gens acceptent de payer un logement (trop) cher parceque de toute façon, il continuera à prendre de la valeur; ou bien que des gens qui voient le prix de leur logement augmenter pensent que leur patrimoine augmente; je trouve ça stupide quand il s’agit de ceux qui ont un logement pour l’occuper, non en tirer un bénéfice. Un logement qui augmente en prix, il n’augmente pas en taille et en confort. En fait plus il augmente plus vous devez travailler pour l’aquérir et donc plus votre niveau de vie diminue par ailleurs. En plus si vous le vendez, à priori vous ne pourrez que racheter un autre logement qui lui aussi a augmenté, donc vous ne vous retrouvez pas dans un appartement du double de la taille parceque vous vendez l’autre au double de ce que vous l’avez acheté. Grace à la spéculation sur l’immobilier qui au final ne bénéficie qu’a un petit nombre de gros propriétaires, c’est le niveau de vie de l’ensemble de la population qui diminue. D’ailleurs si je ne m’abuse, certaines banques sont de gros propriétaires immobiliers avec donc la possibilité de restreindre l’offre. Et pendant ce temps les banques peuvent augmenter la demande en facilitant le crédit, et comme elles gagnent de l’argent avec le crédit, elles en gagnent d’autant plus que les prix d’achat augmentent…
Tiens, vous aussi, vous attendez ? Mais quand je vois le nombre de jeunes actifs parisiens autour de moi qui se résolvent à attendre, je me dis qu’une baisse significative du marché n’est pas encore à l’ordre du jour, la moindre petite baisse étant l’occasion pour certains de devenir propriétaires. Donc, si en province, une baisse importante est probable, à Paris, la situation est tout de même plus ardue, vu que l’on est sur un marché hyper reglementé, cf un des anciens billets d’Econoclaste.
@ Emir abel:
Je vous garantis qu’à lire Econoclaste, vos préjugés sur le capitalisme vont rapidement s’effacer….
« Il s’agit simplement de gens qui constatent qu’ils n’ont aucun intérêt à rester propriétaires d’une maison qui vaut 250 000, pour laquelle ils doivent payer une dette de 300 000. Il est préférable pour leur situation financière de se mettre en faillite, de renoncer à leur dette et à leur actif, pour se déplacer dans la maison d’à côté, vendue à un prix inférieur. »
Il est certain que ce phénomène existe. Il ne faut cependant pas en exagérer l’importance. Sauf erreur de ma part, être en faillite personnelle aux USA interdit la possession d’un chéquier ou d’une carte de payement pendant 7 ans. C’est-à-dire perdre des marqueurs essentiels d’appartenance à la classe moyenne. Un tel symbole vaut-il 50 000 $ ?
Un peu comme le « choix » de se mettre en commission de surendettement en France.
Réponse de Alexandre Delaigue
Cela dépend en fait du type de mortgage considéré, et des législations des Etats, il me semble.
Excellent ; et je trouve que la question des "conséquences distributives" est assez systématiquement maltraitée en France. Sarkozy expliquait lors de la campagne qu’il baissait les droits de succession parce que pour lui la richesse des uns n’empêche pas la progression des autres… raisonnement grossier mais auquel personne n’a pu répondre.
Cela dit, existe-il des leviers pour "diriger" le prix du foncier ? Peut on considérer qu’un foncier "accessible", exprimé par un certain ratio des revenus salariaux par ex, constitue un objectif économique important ?
Enfin il me semble que derrière la question actuelle du pouvoir d’achat se cache une question plus large de décrochage entre les salaires et les patrimoines ; pas juste le partage de la VA – toujours sensible en ces périodes d’annonces de résultats du CAC40 – mais aussi les effets de différents marchés.
Réponse de Alexandre Delaigue
Deux choses. Le problème du foncier c’est qu’il y en a de divers types. Dans certaines villes/régions, il n’est pas limité, et le coût d’une maison correspond aux coûts de construction plus un foncier très limité. Dans d’autres villes, il est limité, à la fois par l’espace et par la réglementation, et il tend donc à augmenter, ceci d’autant plus s’il est situé dans une zone « positionnelle » dans laquelle tout le monde veut être. Evidemment, la demande est moins forte dans les premiers que dans les seconds… Et dans les seconds, faut pas se leurrer, les leviers sont un peu limités. Mais on pourrait au moins lever certaines contraintes réglementaires qui pèsent sur l’offre et sur la construction. Evidemment, cela ne plaît pas aux électeurs. Sinon, sur le partage de la VA, je trouve qu’on y apporte une attention excessive. En pratique il bouge très peu, trop peu pour que ce soit significatif ou autre chose que du bruit statistique. La question de la montée de la valeur des patrimoines me semble plus importante pour considérer les inégalités.
henriparien au sujet de "..n’ont aucun intérêt à rester propriétaires…" : sans oublier tout le péril qu’il peut y avoir à généraliser à partir d’expériences personnelles, j’estime contribuer au débat en signalant que même en France, des cas de ce type existent, notamment du côté des propriétaires étrangers le plus souvent inactifs ou retraités des plus belles demeures de cette jolie campagne aux alentours du canal du Midi dans laquelle réside une partie de ma famille. Il est en effet fréquent que ces étrangers aient financé leur acquisition par des techniques de financement rarement utilisées en France et plus communes dans le monde espagnol ou anglo-saxon. Pour tout avouer, quelques entreprenants locaux ont même identifié tout le profit qu’un individu imaginatif et entreprenant pouvait tirer de telles réelles situations dès lors qu’elles deviennent réelles.
On pourra éventuellement à l’occasion d’une promenade sur la N112 au départ de Béziers constater l’importante extension de l’habitant en mobilhome et la prospérité de leur commerce localement.
Bonjour,
Bravo pour ce billet d’excellente tenue, comme toujours. Juste une précision, le patronyme de Warren s’écrit Buffett (réponse au commentaire numéro 8).
@pancho, ci-joint une étude un peu vielle de BNP qui reprend l’analyse de shiller pour la France et la remet un peu en cause.
Attention aux conflits d’intérêts (BNP = banque = vachement dépendante du cycle immobilier).
par contre, ce qui est bizarre c’est que l’évolution du P/E est moins flagrante en France alors que les prix ont plus augmentés ici qu’outre atlantique et que les loyers sont plus encadrés.
economic-research.bnppari…
Bonjour
N’y a t’il pas relation entre l’augmentation vertigineuse de la masse monétaire depuis 2000 (le M3) et le prix des actifs, en particulier immobilier?
De plus, il semblerait que les prix des actifs immobiliers aient atteint leurs maximum depuis 6 mois maintenant. En même temps, l’indice des prix à la consommation commence à augmenter sensiblement. Cette masse monétaire ne serait-elle pas en train de se reporter des actifs vers les produits de consommation courants?
Réponse de Alexandre Delaigue
La hausse des actifs a été poussée en partie par des taux bas, qui provoquent dans le même temps une élévation de M3. Mais M3 est un agrégat un peu trop large pour expliquer une hausse des prix à la consommation.
Vivement la récession!
Il est vrai que vouloir faire des comparaisons avec les crises passées est une erreur. L’histoire ne se répète jamais deux fois. Les conséquences de nos erreurs si.
Je suis enclin à croire les économistes qui expliquent que la seconde guerre mondiale trouve ses origines dans la crise de 29.
Vive la récession !
Votre statut professionnel vous permet de tenir de tels propos. Je ne suis pas sur que ceux qui sont menacés par une baisse de l’activité et les délocalisations soient d’accord avec vous.
Peut être serait t’il plus intéressant de rechercher les causes de la hausse de l’immobilier (toujours pas lu quelque chose sur le sujet à ce jour). Pour avoir travaillé 13 ans dans la banque, on peut anticiper qu’une baisse importante dans l’immobilier aura de lourdes conséquences sur les financements bancaires. Une hausse des taux et une réduction des durées de financement pourraient bien intervenir, pour permettre aux banques de maintenir leurs marges.
Une récession pourrait être le catalyseur qui accélère la restructuration du secteur bancaire. La sidérurgie de demain est là !
@#15, guillermo :
"Cela dit, existe-il des leviers pour "diriger" le prix du foncier ? Peut on considérer qu’un foncier "accessible", exprimé par un certain ratio des revenus salariaux par ex, constitue un objectif économique important ?"
Comme le dit Alexandre, il y a deux leviers principaux qui dirigent le prix du foncier:
1 -> Les réglementations qui étranglent la ressource foncière constructible. Ce sont en générale des réglementation de type "zonage fixe", destinées à protéger artificiellement la valeur des logements existants au détriment des nouveaux entrants sur une commune donnée.
a contrario existent encore, aux USA, au canada, mais aussi dans certaines communes suisses ou lander allemands, des réglementations qui ont pour objet de garantir en permanence un excès de ressource foncière / à la demande de logement. Dans ces endroits, (exemples: Houston, Dallas, Atlanta, Austin,…) les prix du logement montent peu malgré une demande très forte: ces 4 cités font partie des 6 plus grosses croissances démographiques entre 95 et 2005 aux USA.
2 – Bien sur, la demande vigoureuse (pas besoin de développer)
résumé (très simpificateur):
> réglementation "malthusienne" du foncier + demande forte = Foncier constructible cher, voire hors de prix
> réglementation "malthusienne" du foncier + demande très faible = prix plus ou moins raisonnables.
> réglementation souple + demande forte = prix raisonnables
>réglementation souple + demande très faible = prix… Très faibles.
@ Turanil, #12 :
Sachant que sur un marché tel que l’immobilier, aucun "spéculateur" ne peut avoir assez de puissance pour "déclencher une tendance", les phénomènes spéculatifs ne se produisent que lorsque les signaux de hausse sont déjà particulièrement anciens. D’où l’accélération brutale, sans doute, de l’augmentation des prix à aprtir de 2004, mais celle ci avait commencé dès 1997. Bref, les comportements spéculatifs sur l’immobilier restent à mon avis assez marginaux dans la formation de la bulle actuelle, facteur de second ordre. C’est bien la rencontre d’une demande dopée par les taux d’intérêts faibles et d’une réglementation du sol devenue insupportable depuis une vingtaine d’années qui sont à l’origine de l’envolée actuelle du prix du logement.
Plusieurs travaux universitaires anglosaxons détaillent la relation entre réglementation foncière et prix du logement. J’en cite quelques uns ici:
http://www.crisepublique.fr/2008...
Et Econoclaste a déjà évoqué les travaux de E. Glaeser quelque part.
Votre lamentation sur les classes moyennes m’a fait vraiment rire. Après avoir lu Chauvel, les classes moyennes en questions semblent être essentiellement les maîtres de conf dont les parents étaient un peu trop baba cool.
Si je peux me permettre, une grande partie des différences entre les trajectoires personnelles des enfants des "classes moyennes" résultent de choix de vie, qui remontent pour la plupart a une trentaine d’années.
Ces choix sont relativement simples: Quel travail /quelle entreprise, quelle époux/épouse, propriétaire/locataire, consommateur/épargnant.
Par exemple, il y a trente ans lorsque j’ai acheté 60 m2 dans le centre de Paris, mes copains ne rêvaient que d’une grande maison avec jardin dans un trou vert (pour les enfants).
Inutile de faire un dessin, ces enfants des "classes moyennes" après avoir respiré le bon air vont devoir assumer les choix de leurs parents et continuer a habiter a pétaouchnok.
Alors ceux qui se plaignent d’être tombé du mauvais coté de la redistribution ne sont que des gens qui refusent d’assumer les résultats de leurs décisions (je parle toujours des "classes moyennes" pas des "classes sous la moyenne" qui n’ont pas vraiment le choix).
Quand a l’immobilier bien que ma résidence principale semble valoir une fortune, ce n’est jamais que un toit, dont j’ai besoin et dont je continuerais a avoir besoin directement ou par substitution, jusqu’a ce que je me domicilie dans ma résidence secondaire du Pere Lachaise. Il ne s’agit donc que d’une illusion de papier qui si elle etait deux fois moins chere degraderait la valeur de mon patrimoine mais ameliorerait celle de mon cash flow.
Toutes ces valeurs papiers n’ont aucune autre réalité que fiscale.
Réponse de Alexandre Delaigue
Mes choix économiques, il y a trente ans, se faisaient entre lego et playmobil, ce qui n’a eu qu’un impact minime sur ma situation patrimoniale actuelle :-). Je crois que vous sous-estimez l’ampleur et les conséquences de la hausse immobilière et de tous les actifs des 10 dernières années. Quand vous devez acquérir un patrimoine maintenant, vous payez cher, très cher, plus qu’expliqué par les taux d’intérêt, pour quelque chose qui valait 30 à 40% de moins il y a 10 ans.
Monsieur Delaigue, vous avez raison de me reprendre. Ce sont les choix de vos parents dont je voulais parler.
Il y a trente/quarante ans, et plus encore au lendemain de la guerre, tout le monde, a tout le moins toutes les "classes moyennes" ont démarrées sur la même ligne. Les différences sur la ligne d’arrivée aujourd’hui ne dépendent que de choix personnels. J’avoue que l’appel a la redistribution de ceux qui ont fait des choix de vie différents et qui ont "perdus"(?) me porte un peu sur les nerfs.
Le problème de l’immobilier n’est qu’un sous problème du Malthusianisme général qui a permit aux parents des enfants des classes moyennes d’avoir une vie plutôt favorisée/protégées. Il est lié au problème de l’emploi difficile a trouver, des salaires deflationnistes(par exemple l’emploi d’économiste sur votre site est au même niveau de salaire en 2007 que ce que j’offrais a l’embauche d’un Centralien en 1985).
Bon vous n’avez pas eu de chance; mauvaise génération. Il y en a eu d’autres. cela aurait pu être la Guerre (Iere ou IIe), la grippe espagnole, le premier/deuxième choc pétrolier, l’invasion des Mongols, etc. ce n’est que l’immobilier Rennais. Jouez au Loto, les probabilités sont contre vous mais vous n’avez rien a perdre. Ou alors faites comme beaucoup, expatriez vous; le monde sera votre huître.
Vous verrez ce pays est beaucoup plus agréable quand vous êtes un riche retraité.
En tant que locataire, j’espère aussi que la récession fera baisser temporairement les prix immobiliers. Mais tant que les réglementations que vous dénoncez seront là, ces prix resteront surévalués.
Par ailleurs, le yoyo des prix immobiliers a probablement des effets négatifs qui dépassent la simple redistribution. Des milliers d’agences immobilières sont en train de fermer en Espagne, les entreprises de BTP et de décoration ont des difficultés aux US. Or ces industries avaient investi pour répondre à la "fausse demande" provenant de la bulle immobilière. Elles sont en train de se rendre compte qu’une partie de leurs investissements ne correspond pas aux besoins des clients. Une partie de ces investissements est donc perdue. Ils constituent une perte sèche pour l’ensemble de l’économie, indépendamment du fait de savoir qui a gagné et perdu.
Pour faire un parallèle, imaginons que l’on ait construit par erreur deux tunnels sous la Manche. En voyant le trafic passagers, on découvre que la demande ne permet de rentabiliser les deux projets, et que seul un tunnel sera amorti (et encore…).
Quelles que soient les raisons de l’erreur, du capital aura été mal utilisé. Les retraités ayant investi leur épargne dans les tunnels en auront perdu la moitié. Cela serait-il une redistribution des vieux vers les jeunes dont il y aurait lieu de se réjouir? Je crains que non.
Cela dit, une fois que l’erreur est faite, elle ne peut pas être défaite. La récession correspond à la phase où l’on s’en rend compte et où l’on réoriente l’épargne vers des investissements utiles. C’est en effet une bonne nouvelle.