Petite revue d’articles

– Un intéressant point de vue de Fareed Zakaria dans Newsweek, à propos de la nomination de Wolfowitz à la tête de la Banque Mondiale, qui aborde le sujet sous un regard original : il y voit un moyen de faire la pédagogie de l’Amérique conservatrice en matière de développement. Le point de vue conservateur en matière de développement est en effet outrageusement simpliste : l’aide internationale est inutile, les pays pauvres sont simplement mal gouvernés et corrompus, seules des réformes de libéralisation des amarchés peuvent réussir. Zakaria considère que lorsqu’une vedette de la pensée conservatrice comme Wolfowitz sera en contact avec la réalité et la complexité des problèmes de développement, sa conversion au réalisme serait à même de changer cette opinion. A noter sinon qu’un blog recueille l’ensemble des informations sur le changement de président à la Banque Mondiale. L’ambiance y serait, paraît-il, celle d’un enterrement.

– Dans le Libération d’aujourd’hui, un portrait de l’économiste américain Gary Becker. Becker est un personnage inclassable, considéré comme un génie pour les uns, comme un fumiste par d’autres. Ses idée, en tout cas, constituent une forme de radicalisme utilitariste très méconnue en France; et certaines de ses idées iconoclastes (notamment en matière d’immigration) sont intéressantes. L’un de ses livres a été chroniqué ici; son blog (coécrit avec Richard Posner) est accessible à cette adresse. Le sujet de la semaine : l’échec de la guerre à la drogue.

– Enfin, dans le dernier New Yorker, un article de James Surowiecki consacré aux frasques des grands dirigeants d’entreprises américaines, notant que ce sont toujours des sommités locales unaniment appréciées, ayant construit leur entreprise à partir de rien, qui ont causé les plus grands scandales récents de maquillage des comptes. L’explication avancée : l’hubris, le fait que des individus qui ne reçoivent que compliments et admiration finissent par perdre tout contact avec la réalité. A l’appui de cela, Surowiecki note diverses études montrant que le fait qu’un PDG d’entreprise soit nommé “manager de l’année” ou fasse de nombreuses couvertures de magazines spécialisés ou généraux, qu’il écrive un livre sur ses performances de dirigeant (ce qui est idiot : les meilleures recommandations en matière de leadership ont déjà été rédigées), en bref, que les signes de célébrité et d’admiration prodigués envers un PDG, prédisent pour les années suivantes des performances piteuses.
Mais est-ce vraiment l’hubris, la perte de contact avec la réalité, qui explique ces décadences rapides d’entreprises dirigées par des gens admirés unanimement? C’est possible, si l’on croit que c’est la performance du dirigeant qui détermine celle de l’entreprise qu’il mène. Est-ce vraiment le cas? Si ce n’est pas le cas, et que la performance des entreprises est indépendante des qualités de leur PDG, il est possible de trouver une explication bien plus simple, qui est le retour à la moyenne. Mathématiquement, pour qu’une moyenne soit une moyenne, il faut que les grandes performances soit accompagnées de performances faibles. De la même façon qu’il est impossible que TOUS les conducteurs conduisent mieux que la moyenne des conducteurs, si les performances des entreprises sont aléatoires, toute performance exceptionnelle a de bonnes chances d’être suivie d’une performance médiocre.

Alexandre Delaigue

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