Eric Besson est donc secrétaire d’Etat à la prospective et à l’évaluation des politiques publiques.
Add : Il semble que certains lisent mal ce que j’ai écrit : je ne souhaite pas que le Parlement ou des offices parlementaires évaluent les politiques publiques.
De deux choses l’une. Soit ce secrétariat d’Etat a pour but de mettre en place des institutions d’évaluation des politiques publiques dignes de ce nom (type agences indépendantes). Dans ce cas, je vois bien son utilité, mais pourrais tout aussi bien m’interroger sur la nécessité de mettre en place une instance ministérielle pour concrétiser le projet (il me semble, s’il faut exclure l’administration de Bercy d’un tel dessein, que nous nous préparons à élire des députés, qui me semblent aptes à faire ce genre de choses). Disons que je pencherais pour la première réaction, moyennant l’acceptation de l’idée que le message symbolique véhiculé par l’officialisation d’un intérêt pour l’évaluation des politiques publiques vaut la création d’un secrétariat d’Etat. Soit, c’est ledit secrétariat qui devra réaliser l’évaluation des politiques publiques. Dans ce cas, inutile de vous dire que les querelles sur l’évaluation sont loin de se pacifier.
“Ne serait-ce pas la personne d’Eric Besson qui le conduit à écrire une telle chose ?” se demande le lecteur rusé (Oui, je vous connais bien bande de pervers à clavier…). Eh bien, évacuons le problème. Non, je ne tiens pas Eric Besson en grande estime, car j’ai horreur de supporter, en dépit de mes efforts pour l’éviter, la psychotérapie imposée aux lecteurs ou téléspectateurs par un personnage public français capable d’évoquer la cinquième colonne américaine au sujet d’un adversaire politique. Je ne goûte guère non plus les retournements de veste et autres pleurnicheries de rédemption instantanée (y compris celles faites dans l’intérêt supérieur de la nation, qui n’en a pas tant besoin que cela). Donc, non, ne comptez pas sur moi pour valider la fin de la psychanalyse de Monsieur Besson (du reste, il l’attendait de l’Elysée, plus que de vous ou moi). Mais, venons-en plus précisément à la question : si Besson avait été nommé au secrétariat d’Etat à la pêche aux moules moules moules, je n’en aurais pas dit mot et me serais interrogé de la même façon sur le secrétariat d’Etat à la prospective et à l’évaluation des politiques publiques. Ce qui vous aurait évité ce paragraphe. Bon, voilà, c’est fait. Evitez les commentaires sur ce sujet, je n’ai plus rien à dire ou en lire et d’autres blogs ont longuement discuté de cela. Je ne publierai pas. Place à l’évaluation des politiques publiques. Et j’espère que Besson saura faire ce qu’il faut.
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N’est-ce pas feu la nouvelle dénomination de l’ancien ministère du Plan
?
@ SM : supposer que nos députés ont la compétence pour évaluer des politiques publiques, c’est se méprendre : le rôle d’une administration c’est d’apporter la compétence que les élus du peuple n’ont pas (et ainsi assurer que tous soient éligibles, sans devoir présenter de diplôme en gestion..)
Les élus du peuple sont des décideurs, qui mènent une politique conforme à leurs principes, rarement des sommités dans leur domaine.
Vous m’avez mal compris : je ne leur donnais comme tâche que de mettre en place les instances adaptées à une évaluation des politiques publiques. Ce ne serait pas la première fois. S’ils ne sont pas capables de faire cela, alors inutile d’aller voter aux législatives. Je n’ai aucun doute sur leur capacité à le faire. Le travail parlementaire peut être de grande qualité.
Il est difficile d’être à la fois juge et partie. Comment peut-on à la fois être dans le gouvernement et l’évaluer? N’y avait-il pas autrefois un organisme, le Cerc, dissout par Balladur, qui jouait ce rôle?
Sur l’évaluation des pol.publiques
Il y a déjà deux offices parlementaires à vocation "évaluative" si je me souviens bien. Leur impact sur la conduite des politiques publiques est égal à la force du vent dans une cloche sous vide.
J’attends évidemment des miracles de Besson dans son secrétariat. Que 1001 commissions d’évaluation fleurissent. C’est amusant, la droite avait argué du nombre trop élevé de commissions pour supprimer celles sur les orgues. C’était peu avant la création du Conseil d’Analyse Sociale pour caser Luc Ferry.
Il y a une large littérature sur l’évaluation des politiques publiques en France, et les efforts de l’État à ce sujet y occupent toujours une grande place, en fin de conclusion.
Evaluer les politiques publiques… C’était l’une des fonctions de l’ancien commissariat général du Plan, retirée à son successeur – le Centre d’analyse stratégique : un signe sans doute de la priorité accordée à l’évaluation, en ces temps de stratégie et prospective.
(Je vous renvoie à cette page absolument comique : http://www.evaluation.gouv.fr … le portail de l’évaluation qui référence des organismes tous disparus depuis !)
Aucune agence ne prend donc aujourd’hui en charge cette fonction, mais de multiples bidules : mission d’évaluation et de contrôle (MEC) rattachée au Parlement; le Conseil national de l’évaluation (en mort clinique, sauf erreur) ; les corps de contrôle interministériels (inspection des finances, inspection de l’administration) et ministériels (inspection des affaires sociales, etc) voire des directions (DARES à l’Emploi, DEP à l’Ed. Nat.). – Et puis la Cour des comptes, quand même…
De ce point de vue, un ministère, instance rattachée à l’exécutif, pour évaluer les politiques publiques, c’est-à-dire les politiques gouvernementales, c’est original : on aurait pu penser à faire comme ailleurs (offices parlementaires) ou poursuivre dans une spécificité nationale pour une fois pas mauvaise (un évaluateur indépendant du gouvernement comme du parlement: la Cour des comptes).
Bravo pour ce billet et bravo aux commentateurs. Oui, de toute évidence,
c’est au législateur d’évaluer (et de faire évaluer pour son compte). Ni Bercy, ni
les secrétaires d’Etat n’ont rien à y faire.
Si le législateur y a renoncé, à plusieurs reprises depuis 15 ans, et si Bercy a
emporté le morceau – en étiquetant "evaluation" une usine à gaz d’indicateurs
d’activité, copiée-collée de ce qui a le plus mal marché ailleurs – eh bien que
voulons-nous, c’est la Vème.
Je précise pour la nième fois que pour moi, ce n’est pas au législateur d’évaluer, mais d’organiser l’évaluation par une ou des instances indépendantes.
@ FrédéricLN : la vision que vous vous faîtes de la LOLF est caricaturale… Non seulement, je ne suis pas sûr que vous soyez aller voir ailleurs ce qui a "le plus mal marché" mais en outre, juger de la réussite de cette réforme après une année effective de mise en oeuvre et compte tenu des traditions – tout à fait étrangères à une logique de performance, de justification au premier euro, etc. – ça me semble léger.
@ tous autres (dont SM) : l’évaluation au Parlement ou l’évaluation par une instance indépendante ?
Ce que l’peut dire c’est que, nos moeurs étant ce qu’elles sont, si on met le Parlement dans la boucle on n’aura jamais d’évaluation indépendante : si l’instance parlementaire finale (= celle qui s’approprie / rend public le rapport) est trustée par la majorité au pouvoir, les conclusions critiques ne passeront pas, sauf lorsqu’elles mettent en cause la majorité précédente – en forçant à peine le trait.
Si l’instance est paritaire (majorité / opposition, et pas seulement Sénat / AN), on n’arrivera qu’à des solutions édulcorées dès lors que le sujet ne sera pas purement technique mais revêtira un enjeu politique
L’avantage que je vois à un évaluateur indépendant de l’exécutif et du PArlement, c’est 1/ il écrit ce qu’il veut 2/ il est seul responsable de la diffusion de ce qu’il écrit. Pensez-vous vraiment qu’une instance parlementaire aurait sorti le récent rapport de la Cour des comptes sur les oeuvres sociales d’EDF/GDF ?
Je suggère exactement dans mon billet le recours à une agence indépendante. Mais pour la créer, un travail parlementaire me semble adapté. En tout cas, plus que la création d’un secrétariat d’Etat.
L’U.E. ne consacre-t-elle pas déjà beaucoup d’énergie à évaluer les politiques publiques des états-membres de l’U.E. ? Les parlementaires (et le gouvernement) pourraient déjà essayer de savoir ce qui est déjà fait, de manière effectivement indépendante avant de s’imaginer à même de faire mieux que ce qui existe déjà.
Pour le coup, je doute que ce soit à l’UE d’évaluer seule les politiques publiques. Politiquement, c’est risqué. Techniquement, ce n’est pas forcément l’idéal, non plus. Mais il faut bien reconnaître que si un pays est incapable de s’organiser pour le faire, c’est toujours mieux que rien. Enfin, pour répondre à la question, telle quelle : je ne vois pas trop d’évaluations des politiques publiques menées par l’UE. A ma connaissance, c’est surtout une production de statistiques générales ou sectorielles.
N’est-ce pas le travail de la cour des comptes ?
Il me semble qu’elle est assez indépendante. Même si je suis très réservé sur les cours des comptes régionales.
La cour des comptes est plus orientée vers l’utilisation de l’argent public, plus que sur l’évaluation de la pertinence des politiques publiques. C’est un peu différent. Or, c’est de cela dont nous avons besoin.
Ce dont on a besoin, ce sont des institutions independantes, credibles et competentes (http://www.ecopublix.eu/2007/04/...
Independantes, cela suppose qu’elles ne peuvent venir ni de ministeres, ni du premier ministre, ni de l’Elysee, ni meme du Parlement.
Credibles cela veut dire qu’il faut qu’elles soient non militantes, non engagee politiquement, non liees a des syndicats ou groupe de pression politique ou economique.
Competentes signifie qu’elles doivent etre a la fois proche des chercheurs/universitaires et en meme temps un peu loin d’eux (bonne connaissance des lois, de l’administration et de la communication avec la presse).
Avec ces criteres en tete, j’ai tendance a penser que c’est la demande qui va faire naitre l’offre: il faut que les administrations demandent des evaluations independantes et les institutions adequates vont emerger; ce seront des instituts lies au monde universitaire mais avec une vocation d’expertise des politiques publiques (genre OFCE, Cepremap etc…); les instituts trop engages ne seront pas credibles et une saine emulation (concurrence) devrait faire que l’on puisse confronter les resultats des differentes evaluations.
Pour reprendre la proposition de SM, il faut que le parlement mette en place les conditions de financement de ces evaluations, l’acces aux donnees administratives, etc. Mais rien ne sera possible si en face, on a des instituts qui ont des interets partisans en tete… Au final, je crois que l’on ne cherche pas UNE institution independante, mais de nombreux instituts dont on puisse confronter les resultats.
Dans la mesure où il est vain d’espérer un organisme qui détienne toutes les expertises à temps plein, je suis d’accord avec cette façon de voir les choses. Je conçois volontiers l’agence comme une unité de coordination, de contrôle et de communication.
Un "simple" laboratoire de recherche d’une quelconque université ne pourrait-il pas se donner mission de devenir un de ces oiseaux rares que décrit Petitsuix (#10)
@ l’auteur (suite #6) "pour moi, ce n’est pas au législateur d’évaluer, mais
d’organiser l’évaluation par une ou des instances indépendantes."
Et pour moi, il y a contradiction entre "organiser" et "indépendantes". Pour
moi, ces instances doivent dépendre du législateur, comme le GAO américain.
Ce qui n’interdit pas à d’autres d’évaluer les politiques qui les concernent ;
mais le législateur doit prendre les moyens de s’informer (pour légiférer et
pour contrôler l’exécutif).
Suite commentaire #7 : je vous recommande les exposés présentés à la
journée d’études de la Société Française de l’Évaluation sur le thème "LOLF et
évaluation".
http://www.evaluation.francophon...
(mais je ne retrouve pas les originaux en ligne, probablement retirés du site,
il y a un bon de commande sur le même sujet là :
http://www.sfe.asso.fr/fr/public... )