Le marronnier de septembre

Chaque année, le mois de septembre est celui d’évènements récurrents : le dernier tiers provisionnel, les inondations dans le Gard, la rentrée des classes… Mais c’est aussi celui d’un suspens insoutenable : Qui va gagner cette année le prix Nobel d’Economie?

 

La blogosphère économique commence, comme chaque année, à s’agiter et à formuler des pronostics. Marginal Revolution fournit la liste de 5 noms du Guardian: Robert Barro, Jagdish Bhagwati, Eugene Fama, Paul Krugman et Paul Romer, en espérant que s’y ajoutent ceux de Gordon Tullock et Thomas Schelling. Mahalanobis donne la liste des lauréats de Thomson Scientific : Eugene Fama et Kenneth French, Robert Barro, Paul Romer. Selon lui, le prix de l’année devrait aller soit à la théorie de la croissance (ce qui justifierait Romer) soit à la finance (d’où Fama et French).

Mon avis personnel : Cela fait deux années de suite que des matheux et autres économètres emportent le prix. Ce serait donc l’année idéale pour des anciens (En la matière, ma préférence irait à W. Baumol ou T. Schelling, et E.S Phelbs a ses chances) ou des domaines de recherche nouveaux : en théorie du commerce international, il faudrait ajouter au très médiatique Krugman, J. Bhagwati mais surtout Avinash Dixit; en théorie de la croissance, Paul Romer est un bon candidat quoique peut-être encore un peu jeune.

Nous n’éviterons pas non plus (peut-être même dès les commentaires de ce post) la polémique habituelle sur le prix Nobel d’Economie “qui n’est pas un vrai prix Nobel” car l’argent vient de la banque centrale de Suède et non de la fondation Nobel (alors que les lauréats, comme pour les autres prix sauf celui de la paix, sont déterminés par l’académie royale de Suède et que la banque de suède n’a aucun pouvoir d’influence), car l’économie “n’est pas une science” (il est bien connu que le Nobel est un critère de scientificité, et que la littérature et la paix sont des sciences, contrairement aux mathématiques et à la biologie), que le prix récompense chaque année des gros méchants ultralibéraux.

EDIT : le prix d’économie sera décerné le 10 octobre; ne manquez pas sur le site de la fondation Nobel un petit jeu très amusant sur la théorie du commerce international.

Alexandre Delaigue

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14 Commentaires

  1. Le candidat Romer créerait surement une petite polémique. Comme on le rappelait il y a quelques temps, il est en retraite et a finalement publié peu de papiers. On pourra fort justement m’objecter le cas de Nash. Mais je doute que la portée des travaux de Romer soit aussi puissante que celle des concepts de Nash. Antoine faisait remarquer en outre que conceptuellement, ses travaux ne sont pas extraordinairement créatifs. Ce que je veux bien reconnaître jusqu’à un certain point (Belgo, lui, il le massacre presque :o) ).
    Ce qui ramène finalement à ta remarque sur son âge : si ce qu’il a pondu est destiné à marquer longtemps la discipline, alors il est peut-être plus raisonnable d’attendre de voir. D’un autre côté, on peut lui accorder sans doute la relance des travaux en théories de la croissance. Ce qui est énorme. Mais est-ce suffisant pour un Nobel (au rabais à cause que c’est la Banque de Suède etc. etc.).

    A part ça, la grande question est : Barro va-t-il encore jouer l’éternel postulant ? J’avoue que je commence à penser qu’il est tombé dans un trou spatio-temporel dont il ne sortira pas. Pour quoi lui donner le prix ? Croissance ? Sur l’aspect théorique, non. Sur l’aspect empirique, c’est vrai qu’il a pas mal remodelé l’optique des séries à traiter. Mais est-ce qu’on peut vraiment lui attribuer autre chose que d’avoir donné des directions ? Sur les questions de politique économique qu’il a pu traiter, il y a eu Lucas, Kydland et Prescott. Difficile d’imaginer qu’on lui accorde le prix pour ça. Certes, il reste dans ce domaine l’équivalence ricardienne. Mais, bon… un peu léger pour justifier le prix, non ?
    Quant à Krugman, il vaut mieux que ça arrive vite, sinon, tout le monde aura oublié sa contribution à la théorie du commerce international et ne se souviendra plus que de ses éditos dans la presse grand public… Ce qui, on en conviendra, aura du mal à justifier le prix. Moi, je vois bien le truc que Bhagwati ou Dixit le lui souffle…
    Enfin, c’est pire que le mercato ces histoire de Nobel :o)

  2. Un Nobel pour Romer serait surtout pour la théorie de la croissance en général. Le seul autre qui pourrait l’avoir sur le domaine serait Lucas, qui a déjà obtenu le prix. Sinon, non seulement c’est pire que le mercato, mais les marchés de pronostics ne seront pas ouverts cette année, ce qui va nous laisser dans le flou intégral jusqu’au dernier moment!

  3. Tharkûn : J’ai l’honneur de vous annoncer que nous vous décernons le "prix 2005 en mémoire de Grand Troll 1er".
    Concrètement, ça vous donne le droit de voir disparaître votre commentaire et une invitation à aller jouer ailleurs, puisque visiblement on a rien à se dire.

  4. > Antoine Belgodere
    Au temps pour moi, je n’avais lu que les paragraphes apparaissant sur la page d’accueil du site et les commentaires, zappant de ce fait la fin de l’article.
    > Econoclaste-SM
    Vous m’en voyez très honoré, sisi. Et ne m’en voulez pas pour cette pique qui s’est finalement révélée calamiteuse pour son auteur^^.

  5. Pourquoi "ex aequo"? Mon post était plus long et plus fouillé. En plus, Tharkûn s’est excusé, ce qui devrait l’éliminer automatiquement.

  6. Aghion va pas etre content si Romer obtient le Nobel tout seul pour la théorie de la croissance. Selon moi, le modèle de croissance endogène de Aghion est plus séduisant que celui de Romer mais trop difficile à manipuler. Ce qui fait que le modèle de Romer est quasi toujours utilisé dans les papiers sur la croissance endogène. Du coup, on oublierai presque la contribution d’Aghion sur le sujet.

  7. Sauf erreur de ma part, Aghion est plutôt bien trop jeune pour le Nobel (Oups… j’ai rien dit, né en 1956 – donc, juste un peu trop jeune). Par ailleurs, il est venu dans la mêlée après Romer.
    Mais au fait, vous, vous oubliez Howitt ! :o)

  8. Vous avez raison, Romer était le premier et il a inspiré tout le monde, il est donc le contributeur majeur de la croissance endogène (quoi qu’on pense de ses travaux). Toutefois, en ce qui concerne le pronostic, un rapide coup d’oeil aux prix passés montre que le jury essaie de primer des domaines variés de la sciences économique d’année en année (comme le fait remarquer Alexandre Delaigues). L’an dernier ayant déjà été pour la Macro, et comme Business Cycle et Croissance ne sont pas très éloignés, je pencherai pour un auteur dans un autre domaine (mais je n’ai pas établi de fréquences des disciplines, ni calculés de probas de transition d’une discipline à l’autre).

  9. Yves : "Romer était le premier et il a inspiré tout le monde"

    Il y a eu Arrow, avant, quand même. Il a fait un modèle de learning-by-doing qui était dans la même veine que Romer 86, bien avant.

    Pour le marronier :
    AD a raison, ils font un petit tour des différents thèmes de recherche. Cette année, ils vont primer un économiste de l’Environnement. Ca va tomber sur…
    Tahvonen ! "pour sa contribution à la compréhension des liens entre croissance économique et environnement"
    Dommage qu’il ait la même tête que houellebecq:
    http://www.metla.fi/pp/OTah/inde...

    Si vous avez besoin de connaître l’avenir, consultez-moi.
    Bon. je vais peut être aller dormir, ça ira mieux demain.

  10. Antoine :
    OK pour Arrow. Mais :
    1 – trop tard, il l’a déjà eu
    2 – tu prends aussi Ramsey et Uzawa puisqu’on y est
    3 – dans la logique où Romer serait récompensé pour un nouvel élan donné à la théorie de la croissance, ta remarque est caduque.
    4 – tu n’aimes pas Romer, on le sait. Maintenant, tu arrêtes la persécution !

    Eh, au fait, tu fais mieux que nous dans le genre grosse flemme (bloguesque) en ce moment :o)

  11. 1 oui
    2 Non : c’est pas de la croissance endogène
    3 tu chipottes
    4 détrompe toi, j’aime beaucoup. La seule chose qui m’agace un peu, c’est l’idée qu’il a débarqué de nulle part, au millieu des années 80, et qu’il a tout inventé en partant de rien. J’aimerais avoir le centième de son talent. Mais je préfèrerais le millième de celui de Arrow, par exemple.

    5 Flemme blogesque = stakhanovisme thésard 🙁
    (c’est vrai que c’est plus sympa de bloguer, mais le jour où ma directrice de thèse tombe sur mon blog, pour peu que je m’y montre un peu prolifique, elle risque d’être tentée de me trancher la carotide, avec un couteau mal aiguisé pour que ça prenne beaucoup de temps. En même temps, elle n’aurait pas tort. J’ai commencé administrativement il y a deux ans, il est peut être temps que je commence à me pencher sur la question)

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