La PPE n’est pas un outil démagogique destiné à relancer la demande

On m’a signalé un billet sur Koz’toujours, dont le contenu mérite quelques commentaires, tant il heurte l’économiste qui erre en moi. Il est question de prime pour l’emploi. Dans ce billet, Liberal avance que Nicolas Sarkozy n’a pas été élu pour augmenter le pouvoir d’achat et qu’il est injuste de faire aujourd’hui comme si cela avait été son thème de campagne. Après une longue démonstration, il parle d’une prise de position de Piketty concernant de la pertinence d’une augmentation de la PPE, en regard du paquet fiscal. Liberal écrit :

"On a bien l’incontournable Thomas Piketty qui nous propose une idée pas du tout démago. Donner de l’argent aux pauvres en le prenant aux riches (ou aux patrons, ou aux deux, il n’est pas très clair sur le sujet). Il est malin Piketty, il a calculé qu’il y avait plus de pauvres que de riches et de patrons ; sa démarche est donc électoralement gagnante. Bon, généralement, ce genre de relance par la consommation profite surtout aux producteurs étrangers. Mais ce n’est pas très grave, personne ne pleurera sur les patrons.


L’inconvénient de cette sortie est qu’elle est fausse et partiale.

1 – la PPE n’est pas un outil de relance de la consommation, donc pas un instrument de politique de la demande. C’est un dispositif  de stimulation de l’offre de travail. Ce qui n’a rien à voir et relève clairement de politiques structurelles du marché du travail. Elle consiste à considérer que verser un complément de salaire à des individus qui sont incités à rester dans l’inactivité, en raison de l’existence simultanée d’aides sociales et de salaires faibles, est une mesure globalement favorable aux finances publiques, à l’emploi, à la production et, seulement a posteriori, à la demande. Il s’agit de combattre ce que l’on appelle "trappes à pauvreté", un enchaînement de mauvaises incitations conduisant à préférer l’inactivité. On est ici clairement dans la logique que défendait le président de la république pendant la campagne : pour accroître le pouvoir d’achat, il faut d’abord travailler et créer des richesses. Les bénéfices attendus de la PPE sont bel et bien à comprendre en regard des coûts du chômage pour la société. Faut-il rappeler les faits suivants ?  Les Etats Unis et la Grande Bretagne  ont depuis longtemps déjà adopté des dispositifs de ce genre, qui ont la particularité d’être plus ciblés et plus  généreux pour leurs bénéficiaires que la PPE en France. De ce point de vue, la proposition de Piketty va dans un sens déjà maintes fois évoqué par les économistes français : l’idée est bonne, mais elle n’est pas poussée assez loin dans sa logique. La force du dispositif dans les pays cités, c’est précisément de s’adresser massivement aux plus pauvres. Milton Friedman, gauchiste de renom, est un des penseurs qui a parmi les premiers avancé le principe d’un impôt négatif, c’est-à-dire une réduction de l’imposition des salariés  ayant de faibles salaires, quitte à leur verser un chèque.  Il semble singulier de s’en prendre à un conseiller du P.S. pour formuler ce genre de proposition, en lui reprochant de venir faire la cour aux pauvres.

2 –  Considérer  que la PPE mise en regard  du paquet fiscal est une façon de prendre l’argent aux riches pour le donner aux pauvres est  une  vision assez intéressante de la  politique fiscale. Le problème n’est pas de savoir qui prend à qui. Il est de savoir comment l’Etat peut, par le biais de l’impôt, améliorer l’efficacité de l’économie française. Il n’est pas question de solidarité, mais de bonne utilisation d’un outil de politique économique. Que pensez vous de cette thèse ? En réduisant les impôts des riches, on stimule l’investissement et l’offre de travail des plus productifs, ce qui a pour conséquence d’accroître l’activité et finit par profiter aux pauvres. Non, ne me le dites pas, je m’en moque. Elle est  vraie.  Maintenant, que pensez vous de la thèse suivante ? En appliquant un  impôt négatif, on permet la réduction du nombre de chômeurs et de bénéficiaires des minima sociaux, ce qui, ceteris paribus, réduit les dépenses sociales et permet une baisse des impôts, en même temps qu’une hausse de l’activité dans des secteurs fort utilisateurs de main d’oeuvre peu qualifiée. Vraie ? Fausse ? Oui, évidemment, elle est vraie. Les deux sont donc vraies ? Oui. En principe, du moins. Piketty a largement critiqué dans ses recherches l’existence d’un effet Laffer suffisamment marqué pour justifier des politiques de réduction massive des impôts sur les hauts revenus (la première thèse). C’est pourquoi il n’aime pas trop cette théorie. On ne peut guère lui en vouloir. Un économiste qui ne défend pas ses propres travaux, c’est rare. Ce qui ne veut pas dire que ses résultats sont irréfutables, mais ne justifie pas qu’on le lui reproche. Quant à la seconde, les évaluations des dispositifs américain (EITC) et britanniques (working families tax credit), par exemple, montre un effet significatif sur l’emploi de certaines catégories particulièrement concernées par les trappes à pauvreté (mères célibataires, couples avec enfants où aucun des parents ne travaillent). Est-ce que cela signifie qu’il faut préférer la seconde politique à la première, en tout temps et tout lieu ? Assurément, non. Et en France, aujourd’hui ? Force est de constater qu’on peut s’interroger sur le sens du paquet fiscal, dont, je le rappelle, il ne profite pas qu’aux "riches" (y entendre, les 1% plus riches), mais aussi aux salariés à plein temps, travaillant dans des entreprises ou administrations proposant des heures supplémentaires à leurs salariés. A quoi cela servira-t-il ? Je ne referai pas le débat sur le sujet. Tout ce qu’on peut dire, c’est que son effet positif sur la croissance, l’emploi et les comptes publics n’est pas franchement évident. Nous attendrons les études du secrétariat d’Etat à l’évaluation des politiques publiques pour savoir si le gouvernement a eu raison.

3 – Une relance qui profite aux producteurs étrangers est-elle une mauvaise relance ? On remarquera d’abord que la différence entre une prime pour l’emploi et des heures sup à effet d’aubaine ne fait pas trop de différence, à ceci près que la seconde mesure est une authentique mesure de relance par la demande, par le biais de l’impôt plutôt que de la dépense, ce qui est d’ailleurs communément connu pour ne pas être le top dans l’orthodoxie keynésienne. Bref. On sent poindre l’argument du déficit commercial… Mais, hum, pour ne pas faire que renvoyer aux récentes et nombreuses sorties d’Alexandre sur le sujet, je vais poser une question simple pour appréhender le sujet sous un autre angle encore : un pauvre qui s’achète un ordinateur coréen avec sa prime pour l’emploi, ça ne sert vraiment à rien aux patrons français ?

4 – Enfin, pour faire un peu dans la légèreté, le billet qui me fait réagir ici me laisse sceptique sur sa première partie. Quel est le sens à donner à l’affirmation selon laquelle le pouvoir d’achat n’était pas important pour la campagne du président de la république ? J’ai relevé dans le projet de Nicolas Sarkozy et dans un de ses tracts deux passages : le premier ici en page 7 du premier et là dans le second, captures d’écran visiblement mal lisible sans zoomer…). Je ne sais pas si ces engagements avaient ou non de l’importance. En revanche, déployer autant d’énergie à essayer de montrer qu’au mieux ils n’existaient pas et, au pire, n’avaient pas d’importance, me laisse dubitatif.

18 Commentaires

  1. Merci de réexpliquer tout ça, c’est vrai que Liberal m’avait un peu embrouillé sur ce coup-là.

    En revanche, la première partie de son billet me paraît pertinente. Effectivement, Sarko a fait une campagne sur la valeur travail, pas sur le pouvoir d’achat (et le tract mis en lien le confirme. Je dis "le tract", parce que le second lien mène chez moi vers la page d’accueil d’econoclaste, qui devient ainsi un tract de campagne de Sarkozy. Essayez-vous de nous dire quelque chose?).

    Il y avait bien la promesse faite aux vieux, dont le non-respect était invoqué au départ comme cause de la baisse des sondages; insensiblement, on est passé à la description une déception généralisée de tout un chacun sur le pouvoir d’achat, en référence à une campagne imaginaire.

    Liberal étant favorable à Sarkozy, il est fort naturel que ça le turlupine.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Dans le projet, il y a écrit « je veux être le président du pouvoir d’achat » et quelques autres formules du même genre. Franchement, qu’il ait été élu là dessus ou non, peu m’importe. Mais je trouve assez excellent de passer du temps à écrire que ce n’était pas son problème, alors que c’est mentionné dans son projet et redéveloppé dans un tract thématique. Juste un extrait qui est drôle : « les salaires sont trop bas dans notre pays. je demanderai aux entreprises de faire un effort ». Je crois qu’il y a de la mauvaise foi à nier, là où relativiser serait bien plus crédible. Une défense acceptable aurait consisté à insister sur la fin du texte, qui laisse entendre que ce n’est pas une distribution au guichet. Mais là, ça pose deux problèmes. Le premier, c’est que les mesures prises laissent, assez logiquement, sur leur faim des gens qui ont pensé qu’il ferait ce qu’il faut en deux coups de cuillers à pot pour leur permettre de retrouver du boulot et faire des tas d’heures sup. L’autre problème, c’est qu’il a quand même ouvert le guichet pour un nombre non négligeable de gens (dont moi et d’autres plus fortunés). Quand vous arrivez à la caisse et qu’on vous indique qu’elle est fermée, ça énerve. Mais bon, au fond, je le redis, ce n’est pas si grave.

  2. Oui, j’avais aussi trouvé le billet de Liberal très "facile" sur l’argumentaire de Sarkozy, mais merci de détailler aussi le point sur Piketty et la prime pour l’emploi

  3. FC: Que Sarkozy ait prétendu qu’il faille travailler plus pour gagner plus est son choix.

    Sauf qu’avec deux sous de cette jugeotte sans laquelle nulle création de richesse par le travail n’est possible, l’électeur sait très bien que ce n’est pas en travaillant plus qu’on gagne plus.

    Je suppose donc que l’électeur retiendra donc essentiellement l’objectif à atteindre, qui relève effectivement du champs d’action du premier d’entre eux, plutôt que la méthode à suivre pour l’obtenir, qui relève plutôt des citoyens.

  4. Je ne peux croire que tu ne veuilles pas comprendre le billet de Liberal. Il ne dit pas que l’augmentation du pouvoir d’achat n’était pas un élément de la campagne. Il dit seulement que la campagne ne s’est pas faite précisément dessus.

    Et qu’en l’occurrence, "augmenter le pouvoir d’achat" n’est pas un élément flottant, dtéaché de toute considération de moyen. Et que le moyen, c’était le travail. Gagner plus, oui, mais comment ? En travaillant plus. Comme il le souligne, il est significatif que l’on se croit obligé (voir, à titre d’exemple, l’article d’Espérandieu) d’occulter "travailler plus".

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Le problème du billet de liberal ne réside pas là, mais dans la présentation d’une alternative entre « augmenter les revenus par le travail » (chez NS) et « augmenter les revenus par la redistribution » (à gauche) et qu’il s’appuie sur la différence entre TEPA et PPE pour justifier cette différence. Or comme l’indique SM, c’est une fausse différence. TEPA vise à réduire les taux marginaux d’imposition sur les heures supplémentaires; la PPE vise à réduire les taux marginaux d’imposition pour les bas revenus, qui se trouvent être ceux qui subissent les plus fortes désincitations fiscales au travail (cf post de Gu si Fang plus loin). A objectif identique (inciter les gens à travailler plus, en réduisant les taux marginaux d’imposition) la vraie question entre PPE et TEPA est de savoir lequel des deux est le plus efficace. Et malgré ses défauts, il se trouve que la PPE est probablement plus efficace que la détaxation des heures sup. Parce que TEPA est noyée dans les effets d’aubaine, et joue faiblement sur une grande quantité de gens qui ne subissent pas de très fortes désincitations au travail, contrairement à la PPE, qui (augmentée) jouerait fortement en se focalisant sur des gens subissant actuellement de très fortes désincitations au travail. Mais : – La PPE touche uniquement les 10% de bas revenus, qui ne sont pas une clientèle électorale intéressante; – La PPE ne permet pas de dire « on supprime de fait les 35 heures » (en oubliant que le principal problème des 35h, c’est le merdier administratif, et que Tepa en rajoute une couche juste au moment ou les entreprises s’étaient faites aux 35h) – La PPE a été mise en place par la gauche, et tout ce qui vient de la gauche, c’est mal. En somme, le choix de TEPA plutôt que la PPE ne traduit pas une volonté d’accroître les revenus par le travail qui serait la spécificité N. Sarkozy; ce choix traduit des options électoralistes et idéologiques, au détriment de l’efficacité et de l’objectif « gagner plus en travaillant plus ».

  5. Finalement ne serait ce pas l’erreur majeure de NS ?

    Il a fait campagne sur 2 axes. L’insécurité et l’économie. Plus exactement la relance de la croissance et l’augmentation du pouvoir d’achat. NS allait redresser la France !

    L’insécurité n’est pas l’objet de ce blog, même si ce sujet risque de marquer la France pour longtemps.

    Pour ce qui est de l’économie, NS et ses conseillers ont de mon point de vu commis une erreur majeure. Ils n’ont pas anticipé la crise des Subprimes. Rappelons nous, que l’un des thèmes défendu par NS était l’endettement des ménages. Il s’agissait de développer le crédit à la consommation et de soutenir les prêts pour l’acquisition dans l’immobilier. Malheureusement pour lui, son modèle s’est effondrer depuis. Exit donc l’endettement pour relancer la croissance et le pouvoir d’achat.

    Son absence de programme devient alors criante. Annoncer que l’on va réformer ne fait pas une politique et réalise encore moins l’adhésion des français. Car, le problème est bien là. NS est à l’image de Chirac, une machine à gagner les élections, mais incapable de gouverner.
    Les seules mesures prises sont soit clientélistes, soit la conséquence des évolutions naturelles de la société française.
    La réforme des régimes spéciaux de retraites est naturelle. NS n’a fait qu’appliquer ce que beaucoup disaient, à savoir payer les bénéficiaires actuels pour clore le chapitre.

    NS n’a aucune vision pour la France. Il est obligé des gesticuler et d’annoncer n’importe quoi sur n’importe quel sujet pour donner le change et exister.

    Pour paraphraser Emmanuel Todd, nous avons élu l’un des deux candidats du vide. L’avenir risque d’être malheureusement bien sombre.

  6. Je ne sais pas si la PPE est un"dispositif de stimulation de l’offre de travai" mais sur le terrain ,loin de la théorie économique les choses se passent ainsi: La première année de mise en place de la PPE,elle a répondu globalement à son but, assurer un complément de ressources aux salariés mal payés avec encouragement à revenir sur le marchè du travail pour les "hésitants".
    La deuxième année,on s’organise…les patrons demandent à leurs expert-comptables des simulations en intégrant dans les salaires proposés le montant de la PPE,qui devient paradoxalement un frein à la hausse des salaires qui stagnent, même si "au global"les revenus augmentent. Mais cette augmentation n’est pas prélevée sur les profits, mais financée par les contribuables, dont la trés grande majorité ne sont ni bénéficiaires de la PPE, ni patrons.
    De l’autre côté, on n’est pas en reste, des salariés "bidonnent" le montant des heures travaillées pour bénéficier de la PPE ou la majorer, ainsi que le montant du salaire (parfois fictif) pour rester non-imposable.
    Les services fiscaux commencent à s’émouvoir de cette situation car dans certains quartiers la proportion de fraudes atteint 70%.La remise en cause de ces "irrégularités" n’est pas souvent effectuée, car s’agissant d’une population "fragile" et les enjeux individuels minimes, le reversement de la prime indue difficile. La mensualisation de la PPE où les bénéficiaires perçoivent par avance leur future prime n’arrange rien ,celle -çi devient un complément de salaire attendu, qui entre en compte pour les crédits à la consommation ,alors qu’elle devait être simplement une étape entre le chômage et la reprise d’une activité à plein-temps.
    On promet bien du plaisir au gouvernement qui déciderait de revenir sur ce nouvel "avantage acquis".Bientôt l’ISF et la PPE seront les nouvelles vaches sacrées des programmes électoraux..intouchables.

  7. Je suis d’accord avec votre presentation de l’impot negatif friedmanien. A ce sujet, on peut lire le petit livre Economie des inegalites de Piketty. Deux chiffres tires du livre (de memoire) permettent d’eclairer le debat :

    1) Le taux moyen d’imposition d’un pauvre en France est de 45%, et 55% pour un riche. Vous vous attendiez a plus d’ecart? Eh ben non.

    2) Le taux marginal d’imposition frise les 85% pour un tres pauvre. C’est a dire qu’en trouvant un travail et en augmentant ses revenus de 100 euros, il en rend 85 en allocations diverses et en garde 15 pour lui. Tres motivant…

    D’ou l’extreme importance d’eliminer les trappes a pauvrete. L’impot negatif est un moyen de le faire, mais je crois que la version francaise (PPE) est assez mal ficelee. Je ne connais pas les details.

  8. L’argument de Liberal portait sur la tonalité générale et la couverture médiatique, pas sur le contenu analytique du programme. Tout le monde s’accorde par exemple pour dire que la campagne 2007 a très peu porté sur le chômage, contrairement aux précédentes. C’est pourtant le point 3 du programme de l’UMP. Un programme, c’est comme la Bible, on y trouve tout et son contraire.

    "La France a besoin d’une Recherche performante dans tous les domaines scientifiques et techniques pour assurer sa prospérité, son indépendance, son rayonnement et pour relever les défis de notre temps."

    C’est extrait du programme du… FN. Vous reconnaîtrez, je pense, que la campagne de Le Pen n’a pas été particulièrement marquée par cette thématique…

    Après, l’analyse que vous faites est précisément celle qu’on aimerait lire dans les journaux, à la place de "ouah, les Français y sont trop dégoûtés, on leur avait promis des sous et ils attendent toujours".

  9. @FC: l’argument, c’est donc de dire que le pouvoir d’achat n’etait pas l’element le plus important, seulement un des des elements ? Mais les media ne pretendent pas non plus que c’est la dessus seulement qu’il a ete elu. Puis il a en a parle depuis son election, on trouve des editoriaux sur le pouvoir d’achat sur le site sarkozy.fr. Donc l’argument, c’est de dire que oui, il est le president du pouvoir d’achat, mais que c’etait pas dans la campagne, meme si c’etait dans son programme ?

    A moins d’etre militant dans un parti, je vois pas ce qui peut pousser quelqu’un a aller aussi loin dans le pinaillage.

  10. Ou avez trouve que le WFTC en Grande Bretagne est une bonne invention ?

    Ca coute une fortune a administrer, la fraude est enorme, et le governement se plante et paye trop regulierement (et ce sont des erreurs portant sur des millions de personnes).

    Pendant ce temps le seuil d’imposition n’a quasiment pas bouge, et donc plus de gens doivent payer des impots par effet mecanique.

    Je suis desole, mais un systeme ou vous devez demander a l’etat de vous rendre ce qu’il vous a pris en impots au depart ne me semble pas tres intelligent.

    Ca colle tres bien par contre a l’ideologie de gauche en general, qui est de vouloir rendre les gens dependants de l’etat.

    Brown est assez fort pour ce genre de choses, par exemple son annonce de la baisse d’une tranche d’impot de 22% a 20%. En meme temps qu’il supprimait la tranche de 10%….

    Pour des exemples de competence economique, je pense vraiment que Brown est un tres mauvais exemple.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Cahuc et Zylberberg, par exemple. Ce que vous décrivez n’est pas une tare du WTFC et de l’impôt négatif en général, mais de son design. Quant à dire que c’est une mesure de gauche, ça me fait songer que vous avez du adorer le billet de Liberal. Ce que vous dites est aussi faux, pour ne pas être plus présidentiel dans mes propos.

  11. "Ca colle tres bien par contre a l’ideologie de gauche en general, qui est de vouloir rendre les gens dependants de l’etat."

    Pour être tout à fait juste, Pascal ne dit pas que c’est une mesure de gauche, mais que ça "colle très bien à l’idéologie de gauche", pour la raison qu’il propose ensuite.

    Je ne dis pas ça pour pinailler, mais parce que je suis toujours un peu troublé par cet argument: si une économie de marché peut très bien s’accommoder, théoriquement, de niveaux de prélèvements obligatoires totalement différents, des Etats-Unis aux pays scandinaves, est-ce qu’il n’y a pas un fond de vrai dans cette idée de dépendance à l’Etat?

    En fait ma question est: au-delà de l’aspect "propos de comptoir", existe-t-il des travaux sérieux sur la question des implications du niveau de "mutualisation" d’une économie en matière de rapport à l’Etat, à l’entreprise, à la responsabilité individuelle?

    Réponse de Stéphane Ménia
    Le choix est simple : soit vous supprimez toute protection sociale, avec ce qu’elle induit comme désincitation au travail, soit vous adoptez des dispositifs de ce genre, sachant qu’il y a autant de formules de revenu minimum garanti que de gouvernement prêts à mettre ce genre de principe en place. C’est effectivement une question qui peut se poser. Je suppose sans crainte que la réponse de nombreuses personnes collera fort bien à l’idéologie de droite. En tout cas, ce que j’aurai appris aujourd’hui, c’est que Milton Friedman était de gauche. Merci à tous ceux qui m’ont donné l’illumination.

  12. Evacuons d’abord votre conclusion qui porte sur le sujet principal de mon billet. Je vous ferais la même réponse qu’à mes deux contradicteurs préférés sur koztoujours :

    « Je suis sûr que sur les centaines d’heures de discours, débats, meetings etc… de Sarkozy pendant les presque 12 mois de campagne, vous allez pouvoir me trouver plein de cas où il a parlé du pouvoir d’achat. Je vous sais l’un comme l’autre assez intelligents pour savoir que ça ne démonte pas mon argument : le pouvoir d’achat n’a pas été un sujet essentiel dans la campagne et Sarkozy a plus insisté sur le travail. »

    Venons en maintenant à la PPE.

    Vous avez raison d’écrire qu’elle est un dispositif de stimulation de l’offre de travail. Mais elle est aussi un outil de stimulation du pouvoir d’achat. Piketty en fait d’ailleurs un des thèmes de son papier qui commence par « A défaut de résultats sur sa politique du pouvoir d’achat, notre imaginatif Président nous propose donc une politique de civilisation… ». Dans la suite, il explique que la PPE peut s’assimiler à une réduction de la TVA, ce qu’il présente comme une bonne façon d’améliorer le pouvoir d’achat.

    Au fond, exonération des heures sup et doublement de la PPE ont certaines similitudes. Les deux ont à peu près le même coût budgétaire (5 milliards) et les deux recherchent le même objectif : augmenter le travail puis stimuler le pouvoir d’achat. Une fois ceci posé, les deux mesures sont très différentes dans leur logique.

    Ainsi que vous l’expliquez bien, la PPE vise à stimuler l’offre de travail. Elle part du principe qu’une des causes du chômage est le fait que les chômeurs ne gagnent pas assez à prendre un job. Plusieurs études ont montré l’efficacité de tels dispositifs au UK et en Amérique du Nord. Mais je ne pense pas qu’elles soient transposables ici car, à la différence de ces pays, la France a un salaire minimal (relativement) élevé et surtout un taux d’emploi très faible.

    De son coté, l’exonération des heures sup vise à stimuler la demande de travail. Comme j’ai pu l’écrire chez Koz (http://www.koztoujours.fr/?p=366... elle s’assimile à une réduction du coût du travail profilée de manière à compenser les effets des 35h. En rendant l’utilisation du travail plus rentable, elle veut traiter une autre cause du chômage : le fait qu’il n’y a pas assez de jobs.

    Au bout du compte, il faut répondre à la question suivante : « Généralement, les gens restent-ils au chômage parce que les jobs qu’ils trouvent ne sont pas assez bien ? Ou parce qu’ils ne trouvent tout simplement pas de job ? ». Il est vraisemblable que dans les pays libéraux (UK, US, Canada) la première réponse soit la bonne. Piketty semble penser que c’est également le cas en France. Je ne suis pas de cet avis.

    Accessoirement, la PPE qui est sensée raboter les effets de bord qui causent les trappes à pauvreté ne fait que translater le problème. Ainsi que le dit Gu Si Fang, le taux d’imposition marginal des très pauvres est extrêmement élevé. Avec la PPE, on gagne à trouver un job au SMIC, mais quasiment rien à être augmenté au-delà. On retrouve là les effets pervers des lois Fillon de réduction de charges sur les bas salaires. Au bout du compte, tout le monde est smicard. A contrario, l’exonération des heures sup étant indépendante du niveau de rémunération, elle perd en redistribution mais corrige cet effet pervers.

    Ensuite la PPE me dérange d’un point de vue moral parce qu’elle est payée par l’Etat et non par l’employeur. Je pense qu’il est essentiel pour la dignité des gens que la plus grande partie possible de leur rémunération émane de ceux qui profitent de leur travail (patrons, clients). A cet égard, la PPE est comme la PAC. Elle s’additionne à tous les autres dispositifs d’aides, subventions, allocations aux critères d’attribution complexes, opaques et changeants qui contribuent à rendre la rémunération des gens arbitraire, imprévisible, incontrôlable.

    Enfin, d’un point de vue politique, la PPE est un chèque direct, de 100%, immédiat, sans conditions quand l’exonération des heures sup passe par l’employeur et doit être partagée avec lui, repose sur une augmentation des heures travaillées et au fond suppose que l’activité de l’employeur soit bonne. Sur le moyen terme, ça revient à peu près au même. Si l’employeur ne va pas bien, il n’y aura pas d’augmentation de salaire ou d’embauche. L’incidence fiscale marche dans les deux sens http://www.ecopublix.eu/2007/09/... Mais c’est infiniment plus démago.

    Enfin, sur l’aspect compétitivité, j’ai lu les billets d’Alexandre sur le déficit extérieur et j’aurais plein de choses à en dire mais ce n’est pas vraiment le sujet. Oui, le déficit commercial est un indicateur composite qui doit être utilisé avec prudence. So what ?

    Il n’en reste pas moins qu’il y a des entreprises qui emploient des gens en France et d’autres qui en emploient à l’étranger. Toutes ces entreprises sont en compétition entre elles. Notre système social pénalise les premières et pas les autres. Il fonctionne dans les faits comme un droit de douane négatif. Je préfère l’exonération des heures sup qui allège un peu ces charges à la PPE qui n’y touche pas.

    En conclusion, comparée à l’exonération des heures sup, la PPE est inefficace, perverse, démagogique et nuisible à la compétitivité. Elle cumule les mauvais cotés de la droite (stigmatiser les chômeurs) et de la gauche (les placer en situation de dépendance). Son seul avantage est sa capacité de redistribution.

  13. "à la différence de ces pays, la France a un salaire minimal (relativement) élevé et surtout un taux d’emploi très faible."

    Le salaire minimum anglais est plus élevé qu’en France

    "elle s’assimile à une réduction du coût du travail profilée de manière à compenser les effets des 35h."

    25Md d’exonérations suffisent non?

    "En rendant l’utilisation du travail plus rentable, elle veut traiter une autre cause du chômage : le fait qu’il n’y a pas assez de jobs."

    300 000 offres non pourvu par ans

    "Ensuite la PPE me dérange d’un point de vue moral parce qu’elle est payée par l’Etat et non par l’employeur."

    Moralement doit-on être payé en fonction de ses besoins ou du chiffre qu’on produit? Certains emplois sont pas assez productif pour générer un salaire intéressant, c’est pas un drame d’aider un peu plutôt que de laisser des gens au chômage.

    "la PPE est un chèque direct, de 100%, immédiat, sans conditions"

    De la paperasse en moins…

    "Notre système social pénalise les premières et pas les autres."

    Nos principaux concurrents sont aussi des pays à haut cout de la main d’œuvre, et des pays avec encore plus d’impôts et des salaires plus élevé ont des meilleurs performances, c’est con…

    la PPE est
    inefficace = faux
    perverse= pas pire que le RMI
    démagogique= TPE c’est que pour les insiders
    nuisible à la compétitivité= pas plus couteuse que le chômage et permet d’occuper des emplois délaissés
    Elle cumule les mauvais cotés de la droite: obliger à bosser pour gagner
    et de la gauche: donner de l’argent au pauvre ^^

  14. La PPE est une idée de gauche >> pouahh !
    La détaxe des heures sup’ une idée de droite >> y a bon!

    Voilà en gros comment on peut résumer "Libéral".
    En fait "Libéral" a un gros biais idéologique.

    L’analyse d’AD est plus fouillée et moins connotée idéologiquement parlant que celle de "Libéral".

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