L’intelligence au pouvoir

Le ministre de la relance a des ambitions élevées. Jugez plutôt : Le plan de relance de 26 milliards d’euros doit permettre de créer 150 000 emplois en 2009 et avoir 100 milliards d’impact économique en deux ans. Quand l’État engage un euro, il veut entraîner trois euros, si l’on croit les propos du ministre. On passera charitablement sur le fait que 26 est désormais un tiers de 100 (les fractions, c’est compliqué) pour se demander quelle arithmétique permettrait de satisfaire des ambitions pareilles.

On peut supposer que le ministre fait référence à l’effet multiplicateur keynésien. Dans cette perspective, en situation de sous-emploi, un euro de dépense publique supplémentaire, produit des effets en cascade donnant lieu à un effet sur la demande globale supérieur à la somme initialement engagée. La formule permettant de le calculer est la suivante :

1/(1-c(1-t)+m)

Dans laquelle c est la propension marginale à consommer (la part de revenu supplémentaire que les ménages consacrent à la consommation), t le taux marginal d’imposition, et m la propension marginale à importer (la fraction d’un revenu supplémentaire consacrée à acheter des produits importés, qui réduisent l’effet de la hausse de la demande sur la demande interne). Si l’on veut que cet effet multiplicateur soit égal à trois, il faut donc que :

1-c(1-t)+m=1/3, ce qui peut être ramené à :

c(1-t)-m = 2/3

Or en France, les importations représentent 1/3 du PIB. cela conduirait, en supposant que la propension marginale à importer est égale à la propension moyenne, à m=1/3. L’équation précédente devient donc :

c(1-t)=1

Le taux de prélèvements obligatoires est en France légèrement inférieur à 50%. En posant t=0.5, nous obtenons alors :

c=2

Rappelons que c représente la fraction de tout revenu supplémentaire consacré à la consommation. Il faut donc, pour atteindre l’objectif du ministre, qu’à chaque fois qu’ils reçoivent un euro de revenu, les français dépensent deux euros. Il va donc falloir sacrément cibler le plan de relance : vous êtes un panier percé, à découvert chronique, interdit bancaire? Le ministère de la relance va sans doute bientôt avoir un chèque à vous faire…

Il faut être logique : si le gouvernement, par la grâce du talent de son ministre de la relance, disposait de la capacité de générer 3 euros pour chaque euro de dépense publique supplémentaire, on se demande pourquoi il se limiterait à 26 malheureux milliards d’euros. Pourquoi ne pas dépenser, tant qu’on y est, 50, ou 100 milliards d’euros? Pourquoi ne pas l’avoir fait avant, d’ailleurs, au lieu de faire une loi TEPA qui ne sert à rien? Décidément, on nous cache tout.

Aux Etats-Unis, un Bernie Madoff dirigeait un fonds d’investissement bidon; en France, il serait ministre depuis bien longtemps.

Alexandre Delaigue

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3 Commentaires

  1. Dans cette même rubrique, qu’on n’oublie pas celle-là, made in the so-called grand argentier français :

    —————-
    Dépêche Reuters du 6/1/09, 16 h 28

    http://www.lemonde.fr/web/eco/de...

    (…)
    La ministre de l’Economie, Christine Lagarde, a fait part mardi d’indications "favorables" pour la consommation en décembre et pendant les premiers jours de soldes anticipés dans l’Est de la France.

    "On a des soldes qui semblent bien se présenter", a-t-elle dit mardi au micro de Europe 1, soulignant que la fraîcheur des températures constitue "une aubaine".

    "Quand il fait 12 degrés, on n’a pas forcément envie de craquer pour un manteau. S’il fait moins 3, on se dit que le manteau, ça vaut la peine", a-t-elle ajouté.
    —————-

    Moi, j’ai rien à ajouter.

  2. * GBBO: Grouillot de base du bas de l’organigramme.
    Je suis nul en économie, vu que je suis ingénieur électronicien en retraite. J’essaie juste de comprendre.

    Et j’ai cru comprendre qu’en économie, la psychologie des foules comptait autant que les mathématiques.
    Alors pourquoi se battre sur des formules ? Vu les perspectives économiques et les menaces sur l’emploi, y a t-il vraiment beaucoup de français, qui étant susceptible de recevoir 1 Eu sont prêt à en dépenser 2 ? Et est-ce que les propos et le comportement de nos ministres vont les y inciter ?
    Je crains que non.

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