Si la masterisation ne passe pas, on garde les IUFM et leurs “formateurs”. Ça fait réfléchir. Une troisième voie ?
- Dysfonctionnements - 21 décembre 2024
- Sur le passeport vaccinal - 18 mai 2021
- Laissez le temps de travail en paix - 19 mai 2020
- Élinor Ostrom, le Covid-19 et le déconfinement - 16 mai 2020
- Ne tuons pas l’enseignement à distance. Optimisons-le - 15 mai 2020
- Quelques commentaires sur les évaluations à l’arrache des systèmes de santé en pleine épidémie - 9 mai 2020
- Du bon usage du supposé dilemme santé vs économie - 9 mai 2020
- Le problème avec la courbe. Édition Covid-19 - 4 mai 2020
- Reprise d’activité - 21 avril 2020
- Problème corrigé sur les notes de lecture - 6 février 2020
Cruel dilemme probablement (je n’ai pas connu l’iufm donc je me garderai d’être trop affirmatif) mais c’est le même problème que pour la réforme du statut des enseignants-chercheurs : rejeter le décret, ça veut dire garder un système où les profs sont sous-payés, n’ont pas d’autres incitations à faire de la recherche que leur conscience professionnelle mais non pas non plus d’incitation à faire des cours de qualité (hormis leur conscience professionnelle encore) et encore moins de s’embêter avec des responsabilités pédagogiques et administratives (hormis la conscience… enfin vous m’avez compris).
Ce qui est embêtant dans cette "mastérisation" c’est :
1) la précipitation et la confusion dans laquelle elle se fait : les universités ne savent pas ce qu’il faut mettre dans les maquettes pour la rentrée 2009 (!) et les étudiants qui sont sur la période de transition ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés ;
2) il faudra m’expliquer ce qu’un titulaire d’un master enseignement fera s’il n’a pas son concours (ce qui sera le cas de la majorité). C’est bien gentil de vouloir accroître les qualifications et les compétences des enseignants (on attend toujours la revalorisation salariale d’ailleurs…), à condition qu’elles leur servent à quelque chose. Autrement, c’est un nouvel exemple de mauvaise allocation des ressources… à moins que l’objectif du gouvernement ne soit à terme de supprimer les concours et le statut même d’enseignant fonctionnaire titulaire.
Donc, dilemme, effectivement.
@ C.H. concernant le second point je rajouterai aussi que pour ceux-là le ministère va se retrouver avec une main d’oeuvre qualifié mais non diplomée donc utilisable pour faire des "ajustements". Le tout à un coup bien moindre que ces "hordes de tzr qui foutent rien de rien"… C’est tellement cynique que c’en est presque beau.
"Une troisième voie ?"
Recrutement des enseignants par les mairies, service inter-communaux, whatever sur exigence minimale de diplome et salaire convenu.
L’état devient une agence de placement de personnel chargée de se démerder à refourguer ceux qu’il a recruté aux établissements qui en voudront.
On peut faire plus compliqué, éventuellement.
Pas tout à fait d’accord (je suis MDC maths, vois aussi un peu ce qui se passe en sciences physiques) :
1) "la précipitation et la confusion" : oh combien d’accord.
2) "il faudra m’expliquer ce qu’un titulaire d’un master enseignement fera s’il n’a pas son concours" : la réforme, sur ce point, ne crée pas de problème nouveau. Que font, aujourd’hui, les étudiants(nombreux) qui échouent au capes ? J’ajoute que dans les deux matières que je connais un peu, la grosse part des étudiants passe déjà un M1 avant de tenter le capes, donc du point de vue du mnmobre d’années au compteur, la réforme ne changera rien, non en théorie, mais en pratique.
En revanche, on pourrait (c’est ce qui se prépare chez nous) essayer d’inciter les étudiants du futur M2 enseignement à diversifier légèrement leurs intérêts, à aller suivre un module de maths plus numériques, ou plus appliquées … histoire d’avoir vu autre chose et de pouvoir utiliser leur compétence autrement, en cas d’échec au concours d’enseignement. Cela reste peu, mais va dans le bon sens.
Par ailleurs, pour moi, le problème numéro UN de cette réforme est l’abandon de l’année de stage : une année où le futur enseignant, libéré de la préparation du concours, qu’il vient d’obtenir, enseigne en pleine responsabilité, mais à temps partiel, et est encadré sur place par un enseignant plus expérimenté. Après des années d’études sur des bancs de fac, cette année de sas et de préparation au métier, de découverte de ce qu’est une classe, est indispensable. Je ne comprends pas comment l’idée de son abandon a pu germer le quart de la moitié d’une seconde comme une éventualité, dans un cerveau un tout petit peu raisonnable, au ministère. Si j’étais moi-même devenu prof de lycée, je n’aurais pas voulu être largué directement dans l’arène après mes études. J’ignore ce qu’aurait été le résultat. Pourtant, c’est bien ce que le ministère veut imposer.
Allons, allons, Stéphane, n’as-tu pas entendu parler de cet Iufm mystérieux, où les cours seraient utiles et les formateurs compétents ? Je sais que certains disent que c’est une légende urbaine…
(plus sérieusement, j’ai, pour ma part, eu de bons cours en Iufm… une minorité, mais bon…)
@ Charles : "dans un cerveau un tout petit peu raisonnable, au ministère" : une autre légende urbaine…
La troisième voie, s’il en existe une, consisterait peut-être à se poser la question du point de vue de l’usager du service d’enseignement.
Par exemple, et tant pis pour la provocation, tant que l’état aura la lâcheté de ne pas remplacer les enseignants incapables par des enseignants capables, mieux vaut que les enseignants incapables soient affectés en IUFM à exposer toutes les dérives et toutes les horreurs auxquelles risquent de succomber au cours de sa carrière l’enseignant qui sacralise son métier pour rester poli. Mais il doit y avoir d’autres façons de voir les choses : le problème reste cependant entier : puisque dans leur ensemble les enseignants refusent de risquer d’être moins payés s’ils étaient considérés comme inutiles que s’ils sont utiles, comment faire en sorte que les enseignants inutiles ne deviennent pas nuisibles ? Les IUFMs sont à mon avis l’un des meilleurs systèmes possibles : infliger aux futurs enseignants l’exemple du pire puisque de toute façon, on ne sait sans doute pas ce qu’est le meilleur.
Oh, oui ! Une troisième voie ! Pas de recrutement par concours (je viens de louper une dissert’, c’est pas mon jour). Pas de statut. En échange, une nette revalorisation des salaires, et la possibilité d’avoir une formation payée pour pouvoir faire autre chose un jour.
@C.H.
"il faudra m’expliquer ce qu’un titulaire d’un master enseignement fera s’il n’a pas son concours"
Il contribuera à constituer un magnifique réservoir de vacataires dont les syndicats pourront plus malaisément mettre en doute la compétence; réservoir rendu nécessaire par la réduction des postes aux concours.
@Charles:
des ministres ont eu des idées encore plus tordues: envoyer les lauréats des concours effectuer un service à temps complet (sans tutorat d’aucune sorte) dans les classes pendant un an, avant de les former en IUFM par la suite. Logique, non?
Je ne peux que plussoir à la remarque d’Elias. Cette réforme a deux objectifs :
1- supprimer les IUFM.
2- flexibiliser la fonction publique enseignante.
Les plus cyniques pensent qu’elle fournira un vaste vivier de vacataires, qui lentement remplacera les titulaire. Les moins cyniques espèrent quelque chose s’approchant de la fonction publique territoriale.
Dans tous les cas, c’est pour l’instant du grand n’importe quoi. On ne sait rien des éléments les plus fondamentaux pour organiser une formation de qualité :
1-on ne sait pas combien de temps durera le stage professionalisant. Il semblerait que l’on se dirige vers une situation où il aura lieu en Master 2, parallèlement avec le concours… ce qui laisse rêveur. Le calendrier serait du genre : de septembre à janvier préparation en 3 mois du concours. Puis 6 semaines de stages (ou peut être moins) (au passage, quel prof acceptera de lacher sa classe pendant 6 semaines, à un débutant ?)
2-on ne sait rien du contenu précis du concours réformé. Il semblerait que le ministère veuille créer une nouvelle épreuve de connaissance du système éducatif… dont le coeff serait énorme. Il semblerait que l’oral ait de plus gros coeff que l’écrit.
etc. etc. Mais de tout cela on ne sait rien.
Bref du pur Sarkozisme : une réforme qui mêle idéologie à l’état brut (avoir la peau des IUFM), mâtinée de libéralisme fiscal (virer des fonctionnaires et les précariser) dans une précipitation totale, avec des textes incroyablement ficelés parce qu’écrits en douce par des hauts fonctionnaires serviles et pressés et divulguée le plus tard possible, pour des raisons tactiques, si tard qu’il est impossible aux acteurs concernés, par concertation, de rendre un tout petit plus réaliste le délire, et trop tard pour que l’on puisse la mettre (ou du moins ce qui peut l’être) en œuvre, d’un point de vue strictement pratique.
La question que je me pose, et cela s’applique également a la formation en médecine par exemple, c’est celle de l’utilité des concours et du niveau de diplôme des enseignants.
Pour avoir fréquente L’EN en tant que Maitre-Aux. du temps de ma folle jeunesse (et quel souvenir!), il me semble que le boulot d’enseignant mérite que l’on s’attache un peu plus aux motivations et qualités des postulants plutôt qu’a un quelconque niveau académique.
J’aurais pensé qu’un système de formation/évaluation continue débutant niveau instit. avec parcours de carrière personnalisé, salaire, promotion, etc. et non fonctionnarisé serait plus efficace.
Merlin : il y a une célèbre réponse à une question plus générale que celle que vous posez.
Il était une fois, à la Commission Européenne, des fonctionnaires qui constataient que la construction du marché commun semblait entravée par des règlementations invariablement très différentes des mêmes professions dans la plupart des états membres de l’union : juges, policiers, soignants, enseignants, etc. .
En vue d’harmoniser tout ça, l’on commanda une grande étude pour étudier, pour certaines professions protégées partout, mais de manière différente, dans l’union européenne, quelle était la règlementation la plus efficace, c’est à dire, celle qui permettait la meilleure pratique de la part des professionnels de la profession protégée.
Et que croyez-vous qu’il arriva ? L’on ne parvint pas à trouver de différences significatives entre la qualité des services fournis par les professionnels des professions protégées de tel ou tel état européen.
L’on en déduisit qu’il suffisait que les professionnels de chaque pays soient reconnus chez leurs voisins et que peu importait la manière exacte dont ils étaient sélectionnés. Et, depuis, à Bruxelles, on en rit pis que pendre à chaque prise de position publique de telle ou telle corporation nationale assise sur le fond de commerce de sa profession protégée.
Au risque de passer pour une vieille réac : il y a bien, au moins pour le primaire, l’ancienne voie, celle des Ecoles Normales. Mais il est peu probable qu’un gouvernement en paie le prix (politique – horresco, le retour au passé – ou économique : c’est que c’est quand même bien pratique de ne pas payer les petits stagiaires…)
Désolé Passant mais je ne comprends pas.
Pour moi l’EN était un cauchemar en tant qu’institution a coté de ses pompes, et de plus je n’avais aucun plaisir, patience, talent pour m’adresser aux enfants et autres ados dont certains avaient d’ailleurs mon age d’où le choc culturel. J’avais d’ailleurs trouvé que les bons élèves n’avaient pas besoin de bons profs; les branleurs et les défavorisés si. Et je culpabilisais.
J’ai donc changé d’orientation vers ce pour quoi j’étais prédestiné: faire de l’argent dans un milieu hyper motivé et hyper compétitif.
J’ai l’impression que beaucoup s’orientent sans en avoir les qualités "humaines" mais en ayant la capacité "académique".
Je me demande simplement si c’est le bon système pour recruter un certains nombre de professions. On peut voir partout les dégâts du recrutement de sur-diplômés sans adéquation avec ce qu’ils vont devoir faire tous les jours de leur vie.
Comme je me fous d’être un vieux réac’ je dois dire que je suis sur la ligne Emmeline.
Je dirais même plus, je suis pour des droits substantiel d’entrée a l’Université avec l’extension du système appliqué si je ne me trompe aux futurs inspecteurs des impôts, pour tous ceux qui sont prêts a passer 8 ou 10 ans dans le service public: professeurs, magistrats, toubibs, etc.
Surtout avec la retraite a 70 ans qui me parait s’annoncer a brève échéance.
Vous disiez :
"La question que je me pose, et cela s’applique également a la formation en médecine par exemple, c’est celle de l’utilité des concours et du niveau de diplôme des enseignants. "
Je voulais juste souligner que la réponse à cette question était connue.