Bienvenue dans la nouvelle Europe

C’est fou ce qui peut se passer en une nuit. Hier soir, à 21h, j’enregistrais pour une radio une évaluation du plan européen à venir. A cette heure, on avait droit au discours délirant sur la lutte contre la “meute de loups” des marchés, la défaite électorale de Merkel en Allemagne, et l’annonce de la constitution d’un fonds de stabilisation de 60 milliards d’euros, parfaitement insuffisant étant donnée l’ampleur des problèmes. Je me suis réveillé ce matin pour constater que contrairement à ce dont j’étais persuadé, les dirigeants européens avaient finalement adopté l’option nucléaire. Je me suis donc senti couvert de pipi. Mais franchement, je ne suis pas mécontent d’avoir eu tort.

Depuis ce matin, la monnaie unique version Maastricht-Amsterdam est morte et enterrée. La clause de “no bailout” interdisant à la zone euro d’aider un pays membre en difficulté financière a été vidée de sa substance à l’aide d’une disposition qui permettait d’apporter une aide d’urgence aux pays “victimes d’une catastrophe naturelle dont ils ne sont pas responsables”. L’indépendance de la BCE n’est plus : elle a mangé son chapeau et va acheter des titres de dettes publiques et privées européennes. Pour les banques européennes, le guichet est ouvert. Le pacte de stabilité a été remplacé par un fonds de garantie géant qui utilisera les meilleures signatures des pays européens pour garantir les dettes des gouvernements trop endettés, à hauteur potentiellement de l’intégralité des besoins de financement des pays en difficulté. Le plan adopté pour la Grèce est étendu à l’ensemble de la zone euro.

Bref, pour faire plaisir à Philippe de Villiers, Mas-trique n’existe plus. Ce qui conduit à deux grandes questions, qui sont d’ailleurs liées : que va-t-on faire ensuite, et cela sera-t-il suffisant?

A la seconde question, il est facile de répondre. C’est trop, trop tard, et pas assez. Je vous conseille vivement sur ce sujet d’aller voir Krugman, Marginal Revolution, Felix Salmon, Crooked Timber, Ryan Avent, entre autres. C’est trop et trop tard, pour les montants mis en jeu. Désormais, les gouvernements en situation financière satisfaisante, ou seulement délicate, garantissent la dette des gouvernements en difficulté. Cela aura un coût : français et allemands paieront leur dette publique plus cher pour que les gouvernements des pays en difficulté paient moins. On va assister à une convergence des taux d’intérêt sur les obligations publiques européennes. Les conséquences politiques de cette harmonisation des budgets seront importantes, lorsque les citoyens des pays concernés constateront qu’ils doivent subir plus d’austérité budgétaire à cause des autres. Ou constateront qu’une fois de plus, on consacre mille milliards de dollars pour sauver les banques (parce que c’est de cela qu’il s’agit; ou plus précisément, le gouvernement sauve les banques qui sauvent le gouvernement qui sauve les banques qui…).

Et ce n’est pas assez parce que cela n’a fait que gagner du temps. Rappelons-le : même si tout se passe bien, dans trois ans, la dette publique totale de la Grèce sera de 150% du PIB. Un défaut grec restera inévitable, et paradoxalement, d’autant plus que les finances publiques seront rétablies. Le Portugal et l’Espagne ont toujours besoin d’une dévaluation réelle significative qui ne pourra être atteinte que par des années d’austérité budgétaire, et des réformes importantes du marché du travail. Les finances des Lander allemands sont toujours dans une situation catastrophique. Ce plan traite un problème de solvabilité comme un problème de liquidité.

Et il lui manque toujours une stratégie macroéconomique pour relancer la croissance en Europe. Il y a néanmoins quelques signes encourageants. Le principal d’entre eux, c’est le fait que la BCE va devoir adopter une politique plus expansionniste, en rachetant des titres. Il y a peu de chances que dans un contexte de plans d’austérité budgétaire, cela soit très inflationniste. Mais au moins, cela réduira les pressions déflationnistes dans la zone, apportant un peu d’oxygène pour les dévaluations réelles nécessaires dans de nombreux pays. Cela aura aussi pour effet indirect de faire baisser l’euro, ce qui toutes choses égales par ailleurs soutiendra l’activité de la zone.

Pour le reste, les chantiers sont énormes. Quoi que l’on puisse lui reprocher, le pacte de stabilité et la clause de no-bailout étaient là pour assurer un minimum de coordination budgétaire dans la zone euro. Ces mécanismes n’ont pas marché. Par quoi va-t-on les remplacer? Les ministres évoquent de nouveaux “mécanismes contraignants” mais lesquels, si les précédents n’ont pas fonctionné et que la menace de laisser tomber les gouvernements en difficulté n’est plus présente? Comment sera géré le fonds de garantie, qui est sous contrôle de la commission européenne, mais qui dépend des votes des parlements nationaux pour disposer de fonds? Dans les pays d’Europe du Sud, il faudra remplacer le compromis social d’avant l’euro – faible collecte d’impôt, recours à l’inflation – par un autre. Ce genre de choses n’est pas facile à mettre en oeuvre.

La zone euro a pris sa morphine : le malade est désormais stable, on a gagné un peu de temps. Combien? On verra. Bienvenue dans la nouvelle Eurozone, dans laquelle tout est à construire.

Alexandre Delaigue

Pour en savoir plus sur moi, cliquez ici.

32 Commentaires

  1. Pourriez pas vous montrer un peu plus optimiste pour une fois? C’est peut être trop, pas assez trop tard et tout, bref pas parfait mais quand même! C’est une bonne nouvelle non? c’est mieux que rien et mieux qu’avant non? En tout cas, pour le profane ca y ressemble… (et puis en plus je suppose que ca emmerde les anti-europes, ce qui n’est pas pour me déplaire)

    Alors j’ai rien compris ou c’est quand même une des meilleurs surprises depuis un certain temps?

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Faut pas poster après une longue journée de travail, ca a un impact sur le ton :-). Vous avez raison, c’est une bonne nouvelle, imprévue dans le bon sens. Ca n’empêche qu’il reste beaucoup à faire.

  2. rassuré de savoir que c’est juste la fatigue 🙂 L’espace d’un moment j’ai vraiment eu peur de n’avoir rien compris encore une fois et de m’être laissé emporter par l’euphorie…

    Et le fait qu’il y ait encore beaucoup à faire me rend aussi optimiste car ca veut dire qu’on va encore avancer. L’Europe repart!

  3. "Les ministres évoquent de nouveaux "mécanismes contraignants" mais lesquels,"

    Juste une gentille demande. Comptez sur la personalité de Sarkozy et Berlusconi pour se soumettre gentiment et sans tricher à toute demande de Bruxelle concernant leur économie respective 🙂

  4. Grèce : Moody’s envisage toujours un “abaissement significatif” de la note.

    L’agence de notation Moody’s estime toujours que l’abaissement de la note de la Grèce devrait “très certainement être significatif” tout en reconnaissant que le plan de secours de l’Union européenne était un “pas en avant”, selon une étude publiée lundi.

    Pour le Portugal, Moody’s juge qu’un abaissement de Aa2 à Aa3 est “probable”, tout en prévenant qu’un passage à A1 “ne peut pas être exclu”.

    (Dépêche AFP)

    Bon, alors, est-ce que la Grèce est sauvée ?

    Est-ce que la Grèce est solvable ?

    Est-ce que le Portugal est solvable ?

    Et, surtout, combien de jours va durer ce répit ?

    Soyons optimistes :

    combien de semaines va durer ce répit ?

    Je ne sais pas.

    On verra bien.

  5. Désolé Florent, mais je trouve au contraire Alexandre d’un optimisme sans bornes. (C’est peut-être aussi le fruit d’une trop longue journée de travail :)) Je vois mal comment cette option nucléaire pourrait laisser beaucoup de survivants…

    Quel était le problème fondamental de l’Union monétaire? : la rupture du lien séminal entre 1)politique monétaire (commune), 2) marchés obligataires (nationaux), 3)politiques budgétaires/fiscales (nationales), rupture causée par la faillite morale du Pacte de Stabilité.

    Les marchés obligataires européens ont été fusionnés de fait hier soir quand chaque pays de l’eurozone est devenu garant de ses voisins. Quel intérêt de prêter à l’Allemagne à 1.5% quand je peux prêter à 6% à la Grèce avec la garantie de l’Allemagne? Cette occasion d’arbitrage assure la convergence des taux.

    Tout ca serait bien beau, et laisserait un peu d’espoir, si les politiques budgétaires des naitons pouvaient être uniformisées d’en haut. Mais le fédéralisme européen est et restera une utopie. La BCE n’a aucune prise là-dessus, on parle donc vraiment d’un gouvernement économique de l’Union. Est-ce qu’on imagine sérieusement des experts allemands et belges de Francfort interdire à la Grèce d’organiser les jeux olympiques? demander une réforme du code du travail espagnol? du système de retraites francais? Restons sérieux… Concernant la coopération entre les nations je dois rejoindre totalement le commentaire de jacques en #3, en ajoutant que ces attitudes ont été constantes quels que soient les dirigeants…

    Plusieurs issues à tout ca:
    1) le marché se rend compte de la supercherie et on revient rapidement à la situation de la semaine dernière: retour à la case départ et restructuration immédiate de la dette grecque. On crève l’abscès en évitant l’aléa moral.

    2)Le rallye boursier alimenté par la planche à billets continue un moment, les taux obligataires convergent… Tot ou tard, 6 mois, 1 an plus tard, on revient à la case départ. Car la situation grecque est mathématiquement insoluble. Il faudrait à la fois une austérité ‘spartiate’ et une croissance à la chinoise pour éviter un défaut dans les années à venir.

    Le risque de cette 2ème option, sans même lancer un débat économique, c’est le backlash politique. 55% des Francais avaient voté contre un traité européen essentiellement sur un terrain symbolique (l’ouverture du marché du travail et autres points de contention étaient déjà en vigueur depuis le traité d’Amsterdam, seule la ‘Constitution’ était nouvelle). Quel sera ce pourcentage quand le portefeuille du citoyen lambda sera durement touché?
    L’euroscepticisme deviendra rapidement ‘mainstream’ et des démagos de tout poil essaieront d’en profiter… Mais pourra-t-on vraiment les blamer au vu de ce triste spectacle: socialisation des dettes de la minorité, récompensense des mauvais investissements et du court-termisme…

  6. Ainsi, les PIGS auraient besoin d’une "dévalution réelle" pour sortir du pétrin ? Je comprends l’idée, mais ne suis pas sûr que l’expression "dévaluation réelle" aide à comprendre ce qui se passe. Cela fait penser à une opération de politique macroéconomique, mise en oeuvre par les autorités, mais qui ne toucherait pas directement la vie des gens. C’est très abstrait.

    En réalité, il s’agit potentiellement d’un changement profond dans la redistribution par l’Etat-providence, ce que l’on désigne parfois sous le terme de "nouveau compromis social" (sic). Certains doivent être taxés moins, et d’autres recevoir moins. C’est très concret.

    La cause du changement est que les prélèvements et leur redistribution sous forme de rentes sont modifiés : entre les exportateurs et importateurs, entre créanciers et débiteurs, actifs et retraités, contribuables et fonctionnaires, etc. La mise en oeuvre se fait via la politique monétaire, la fiscalité, en changeant les modalités de départ à la retraite, etc.

    La "dévaluation réelle" telle que je la comprends n’est qu’un effet parmi d’autres de ces changements. Mais l’effet général, c’est que divers rentiers politiques voient leur revenu diminuer, tandis que les vrais producteurs voient leur revenu augmenter. C’est une revanche de l’économie sur la politique (et non l’inverse!).

    Je doute que ce soit le cas avec le plan européen qui vient d’être annoncé. Plus probablement, il permettra de gagner du temps, en ne faisant que des ajustements à la marge dans notre "compromis social" que personne n’a envie de changer. De plus, à moyen terme, il crée un aléa moral et des incitations supplémentaires pour faire de la redistribution. Cela n’augure rien de bon.

  7. Quelque part, ça me gêne cette perte d’indépendance de la BCE. Je pense que c’était une réelle force pour l’euro (après tout chacun savait qui était son champ de compétence) et que ça allait appeller immanquablement à la cosntitution d’une gouvernance économique européenne. Ben non …
    Ma crainte est que les volontés d’assainissement ne tiennent pas sur la durée, que l’Europe et de nombreux pays fragilisés manquent de personnel politique avec assez de persévérance, de charisme et de pédagogie.
    La période des fonds structurels déversés sans contrôle est peut être finie. Pas de chance pour les suivants.

  8. Le grand changement est que l’euro va ainsi devenir une monnaie de réserve internationale, et supplanter le dollar dans ce rôle. Les USA auront peut-être plus de mal à se financer, car nous aussi maintenant nous savons fabriquer du papier.

  9. Ron Sowell, quelques questions. Parce que c’est cool de nous jouer les Cassandres et de dire que la solution n’est pas parfaite (et moi aussi je peux le faire vu qu’avec la montée des eaux, la Grèce, l’Italie, la hollande, le Portugal, l’Espagne… il n’en restera pas grand chose mais là n’est pas la question)

    Donc, voilà, pour une fois, je trouve que pour grogner il faudrait pas dire "on est tous foutu" mais dire "il aurait fallu faire ca" et là c’est pas ce que j’entends… Et Non! Sortir la Grèce ou l’Allemagne de l’Euro et flinguer l’UE en même temps n’est pas une alternative acceptable.

    Du coup, je vais rester positif et trouver que même si tout cela est loin d’être parfait j’ai pas entendu de meilleure solution jusqu’à présent.

    En prime je trouve qu’on vient de trouver comment rendre les G8/20 productif. Il suffit de leurs poser un problème clair et de leur donner une deadline ferme (avec l’option "deadline qui porte vraiment bien son nom" du genre "soyez prévenu que si vous ne réussissez pas à trouver une solution on vendra vos organes aux enchères pour rembourser les couts du sommet" 😉 )

  10. Est-ce que ça ne pose pas un problème que les gouvernements agissent par rapport aux "marchés", et pas par rapport au peuple ?

    Et qu’est-ce que ce nouvel épisode nous dit du système économique capitaliste dans lequel nous vivons ?

  11. La raison pour laquelle le plan semble traiter non pas un problème de solvabilité mais un problème de liquidité, c’est que justement le problème de solvabilité était en train de générer un problème de liquidité (tout comme la révélation de l’insolvabilité de Lehman avait créé un problème de liquidité). La BCE venait de faire une série de vidéo-conférences avec toutes les banques importantes afin d’évaluer la situation.

    Et résoudre le problème de liquidité, ca allège les taux imposés à la Grece, et ca allège donc quelque peu le problème de solvabilité.

    Pour le reste, il est sur qu’aucun plan de sauvetage ne peut guérir l’euro de son handicap, l’impossibilité de dévaluer.

    D’autre part, de même que le taux de change ne peut être ajusté à chaque partie de l’eurozone, on ne peut ajuster le taux directeur au niveau adéquat à chaque région. Aurait-on mis un taux plus élevé durant la décennie écoulée afin de calmer les bulles et l’endettement privé dans les PIIGS, on aurait vraisemblablementplanté la croissance des autres pays de l’euro.
    On ne connait pas de meilleure recette pour éviter les "booms and busts" que de piloter très finement le taux d’intérêt. Un taux qui serait fixé une fois pour toutes, c’est la garantie de "booms&busts" perpétuels. On aura le même genre de problème à chaque fois que le taux de la BCE diffère de celui adapté aux conditions locales. S’il était faisable d’avoir une croissance stable avec ce taux "allogène", il aurait logiquement du être possible d’y parvenir à l’époque où le taux n’était pas piloté.
    A mon avis les Etats Unis ont le même problème (bien des Etats n’ont eu aucune bulle immobilière), mais en version très allégée par la mobilité inter-Etats des travailleurs.

  12. Je résume (qu’on m’arrête si je me trompe):

    Les gouvernants européens viennent de prendre une décision visant essentiellement à rassurer les marchés en disant "Regardez tout ce qu’on est capable de mobiliser en cas de difficulté", décision qui semble-il a atteint son objectif, lorsqu’on l’on voit comment les taux grecs se sont brusquement détendus et comment l’euphorie boursière a fait décoller le CAC. Et après on me dira que marchés et agences de notation sont rationnels et que des taux élevés sont significatifs de pays en réelless difficultés.

    Des clous, oui! Les marchés agissent largement sur la base du feeling et de comportements moutonniers indexés sur des informations imparfaites qui lui sont communiqué, informations que les Etats livrent parfois eux-mêmes (en prenant une "prime de risque" sur les prêts grecs, la France ne montre-elle pas sa défiance en la capacité de remboursement de ce pays?)

    QUESTIONS:
    -Pourquoi ne pas avoir fait réécheloner la dette grecque? Pourquoi emprunter sur les marchés à des taux élevés, pourquoi la BCE n’a pas directement prêté à la Grèce à 1%, voire à taux zéro?
    -En quoi ce "plan de secours mobilisable" est une avancée? Ne s’agit-il pas en définitive de "creuser des trous pour en reboucher d’autres?" (Malakine)
    En quoi d’ailleurs cela est-il une moindre garantie de quoi que ce soit vis-à-vis des marchés, qui, lorsqu’ils passent en mode "foldingue" (Lordon), sont à peu près aussi stable qu’Eddy Barclays dans ses amours? (ils vont bien finir par s’aperçevoir du surendettement généralisé de tous les pays industrialisés)

    Ces bricolages de survie qui ne sont accompagnés d’aucune mesure sérieuse (à part l’austérité budgétaire généralisée, qui va surtout frapper les pauvres) concernant la règlementation de la spéculation boursière (à quand, l’arrêt de la cotation en continu?) n’augurent rien de bon pour la suite, et illustrent surtout la capitulation du politique face au financier.

  13. Le cout d’une sortie de l’euro pour un pays est tel que l’on peut espérer que personne ne le prendra. Les mesures de rigueur qui devront suivre seraient plus importantes que celles prises par la Grèce aujourd’hui. On peut espérer que cela rend obligatoire pour tous les gouvernements le retour à la réalité, c’est à dire à des des niveaux de dépense publiques plus raisonnables.
    Cela prendra du temps et c’est à ce temps long que nous devons revenir, pas à celui des marchés.
    L’Europe, ses gouvernements et ses populations doivent montrer qu’il y a une claire volonté de tenir bon. Pourquoi pas une initiative citoyenne de préférence communautaire: Partez en vacances en Europe, achetez européen, développez vous et innovez en Europe. De toute façon cela deviendra inévitable compte tenu du nombre de chômeurs dans la zone. Si rien n’est fait, nous serons le tiers monde de demain.

  14. Je retiendrai dans les déclarations des hommes politiques que la question de l’harmonisation à l’échelle de la zone Euro ne concernait que la discipline budgètaire. Dans cette nouvelle grande gouvernance Européenne, rien sur des règles fiscales et sociales communes (c’est dire le soi-disant grand pas en avant).
    Donc des pays qui partagent la même monnaie vont continuer à se faire une concurrence fiscale et sociale pour attirer les entreprises sur leur sol ou pour prendre des parts marché aux depens de ses partenaires. Après on s’étonnera que les budgets nationaux sont déficitaires et que la croissance est poussive.
    Il n’y a pas que les banquiers qui sortent gagnants de cette grande nationalisation des dettes, il y a aussi toutes les entreprises qui vont continuer à mettre les Etats en concurrence pour toujours plus d’exonérations diverses et variées. J’ai besoin de tes infrastructures, de ta main d’oeuvre bien formée et bien soignée mais je veux rien payer.
    C’est ça la zone Euro aujourd’hui.

  15. Moi je ne suis pas aussi optimiste pour les "faibles risques d’inflation", lorsqu’on libère l’assouplissement quantitatit, com. planche à billet.

    Un post pour justifier cette opinion serait du plus instructif

  16. "Moi je ne suis pas aussi optimiste pour les "faibles risques d’inflation", lorsqu’on libère l’assouplissement quantitatit, com. planche à billet."

    L’inflation n’est pas déterminée par la planche à billet.
    L’inflation est déterminée par la demande agrégée.
    Evidemment, l’accélération de la planche à billet booste la demande agrégée. Mais elle n’est pas le seul facteur. La demande dépend aussi des anticipations. En l’occurence elles sont toutes déflationnistes. Plus exactement: elles seraient toutes déflationnistes si l’on n’avait pas boosté la planche à billet, justement.
    Evidemment, il faut piloter finement ladite planche, suivre la ligne de crête qui sépare le gouffre de la spirale déflationiste et le gouffre de la spirale inflationniste.
    En 2004, Helicoper Ben a prétendu "Je peux le faire".
    En 2006, on lui a dit "chiche!"
    Pour le moment, il n’a pas encore chuté.

    Reste à savoir si le bidule européen se montrera aussi agile…

    En soi, ce n’est pas une méthode plus mauvaise que de piloter le taux directeur. C’est une méthode "non conventionnelle" qui remplace le pilotage du taux lorsqu’on ne peut baisser le taux en dessous de zero.

    Si l’on veut y chercher un risque, il est dans le manque de recul: on peut démontrer théoriquement que la méthode est valable; on peut constater qu’elle fonctionne depuis Octobre 2008; mais on ne peut pas s’appuyer sur une très longue expérience et affirmer donc qu’elle serait parfaitement débuguée.

  17. Le plus significatif est l’ouverture de facilités de crédit offertes par la Réserve Fédérale US, la Banque du Canada et l’Australie je crois…Un support en dollar pour l’euro, c’est pas mal, mais il est vrai que la baisse de l’Euro n’arrange pas les USA pour exporter… Pour le reste la seule solution pour la Grèce est le défaut avec des bons du trésor qui vaudront au max 30 % de leur valeur….Une dévaluation compétitive, oui mais il faudra sortir de l’euro et pourquoi pas ce sera moins cher que d’esayer de rembourser une dette trop importante…les banques francaises et allemandes en prendront plein la figure. Voir ce tableau intéressant du NYT

    http://www.nytimes.com/interacti...

    ou l’on peut voir que l’Italie doit 550 milliards de $ à…la France ce qui représente 20 % du PIB francais et le reste est à l’avenant.

    Il va bien falloir un moment donné savoir jusqu’a quand on va sauver les banques.

    Ne vivant plus en France depuis longtemps il était assez drôle ou tragique de voir les pantalonnades des dirigeants européens mais le plus pitoyable a été une fois de plus, Talonette 1er qui comme Pasqua qui voulait terroriser les terroristes veut lui terroriser les spéculateurs……

  18. "Le grand changement est que l’euro va ainsi devenir une monnaie de réserve internationale, et supplanter le dollar dans ce rôle. Les USA auront peut-être plus de mal à se financer, car nous aussi maintenant nous savons fabriquer du papier."

    All, je vous trouve bien optimiste.

    Une monnaie de réserve est une monnaie en laquelle tout un chacun a une totale confiance à assumer sa signature, y compris contre l’opinion des électeurs.

    Autrement dit, une monnaie de réserve exige un gouvernement capable de mettre fin sans états d’âmes à tous les engagements entre les citoyens et l’état autres que ceux financiers, y compris envers les citoyens étrangers et contre les nationaux eux-mêmes.

    Or, j’avoue douter que les citoyens européens dans leur ensemble sont prêts à participer au petit jeu de rôles auxquels consentent depuis un siècle les américains en se clamant les champions du vrai capitalisme, tout en faisant en douce tout autre chose, mais avec talent (la chose qui manque en Europe : prendre des postules crédibles de champion du capitalisme impitoyable, celui qui osera mettre au caniveau ses propres citoyens plutôt que renier sa signature au bas d’une reconnaissance de dette).

    à moins bien entendu d’imaginer un revenu d’existence universel pour tous les citoyens, comme il en existe un aux USA (en l’occurrence, la prison)

  19. Merci come d’habitude pour ce billet. J’ai une (double) question, si vous avez le temps. La BCE s’autorise désormais à acheter de la dette d’Etat sur le marché secondaire. Cela va lui faire perdre de son indépendance, dites-vous. Pourquoi ?

    Et j’ai lu ailleurs que cette même décision fera perdre leurs billes aux spéculateurs : parce que la valeur des titres pariant sur le défaut grec va s’effondrer, ou est-ce plus compliqué ? Je ne vois pas ce que cette mesure a de décisif sur ce point, par rapport au paquet de toutes les autres.

    Merci quoi qu’il en soit de votre attention.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Elle perd son indépendance parce qu’elle est obligée par les dirigeants politiques de le faire… Sinon, cela veut dire que désormais, vendre de la dette grecque à découvert pour la racheter une fois qu’elle a baissé ne peut plus marcher : il y aura toujours des acheteurs pour soutenir les cours.

  20. Retour à la crise des années 30 ? plusconscient.net/retour-…
    Année: 2010
    Durée: 1 H 05′ 46”
    Bande-son du débat télévisé en direct "C dans l’air" du 7 mai 2010. Alors que les dirigeants européens sont réunis à Bruxelles pour tenter de secourir l’euro et que les bourses dévissent, Michel Godet, économiste, François Lenglet, rédacteur en chef économie et les journalistes Philip Turle et Agnès-Catherine Poirier débattent en direct de la situation. François Lenglet maintient ce qu’il avait annoncé en 2007 déjà au moment de la crise des subprimes: nous assistons à la deuxième phase de la crise, laquelle nous conduit à une répétition de la crise des années 30. Toutefois, contrairement à cette époque, les gouvernements se parlent, ce qui favorise un règlement par la concertation et écarte de mauvais souvenirs …Au terme de ce débat, la conclusion qui s’impose est que le moment de "siffler la fin de la récréation" pour la France est arrivé. Résultat: nous entrons dans le début d’une nouvelle ère, celle de la rigueur.

  21. La dette grecque est devenue la dette européenne et ont ne fait que ce transmettre la dette sans créer de richesse. Toutes les monnaies sont spéculatives et peuvent donc être attaquées.
    La spéculation est nécessaire pour les marchés (spéculation utile ou intellectuelle) pas toujours prédateur. Il est utile que les monnaies fluctuent, mais pas trop vif. (Sinon on n’a pas le temps de s’adapter). Le problème s’est que les spéculateurs décident. Ils s’attaquent aux différentes monnaies, c’est comme cela qu’elle se fait de l’argent. Beaucoup sont inutiles. C’est pourquoi l’idée d’une taxation financière. Ce n’est pas pour défendre le gouvernement grec, mais le patrimoine de l’église orthodoxe et l’élite ne paye pas d’impôt, délocalise leur patrimoine dans les paradis fiscaux. C’est indécent de sanctionner le peuple grec. Les namb bens n’était pas régulé. Pour tout le monde a tiré profit (banque, contribuable…).
    Avoir une banque centrale européenne qui prête a 1% aux banques et celle-ci prête a 4 % au contribuable. Le mot de rigueur est mal vue par les dirigeants politiques

  22. Aubry: "une autre politique économique s’impose"
    AFP ]

    La première secrétaire du PS, Martine Aubry, a estimé mercredi que la "stagnation" de l’économie française au premier trimestre 2010 montre que la France n’est pas "sortie de la crise", qu’elle "n’en prend pas le chemin" et qu’"une autre politique économique s’impose".Selon elle, "l’annonce de la baisse aveugle des dépenses sociales ne fera qu’aggraver cette situation en ponctionnant du pouvoir d’achat au détriment de la consommation" qui "montre des signes de grande faiblesse".
    "Face à cette réalité, nous demandons une politique d’assainissement juste et efficace des comptes publics", affirme la numéro un du PS qui réclame "la suppression, ou au moins suspension, des dépenses fiscales inutiles décidées au cours des dernières années qui vident les caisses de l’Etat sans soutenir l’activité économique". Parmi ces mesures, elle cite notamment "le bouclier fiscal, l’exonération des droits de succession sur les hauts patrimoines, la défiscalisation des heures supplémentaires, les niches fiscales sur les hauts revenus et les patrimoines".
    Mme Aubry réitère la nécessite d’"un soutien à la consommation et à l’investissement".

  23. Bonjour,
    Il me semble a moi que nous avons fait un grand pas vers l’éclatement sinon de l’UE, tout au moins de la zone Euro.

    La raison m’en parait évidente, a savoir que au moment ou les système intra-etatique de solidarité vont être soumis a rude épreuve avec un risque non négligeable d’explosion, j’ai du mal a voir comment un système inter-étatique de solidarité pourra fonctionner sans révolte des contribuables "contributeurs".

    Il va déjà pas être facile de reformer sérieusement les retraites (même régime pour tout le monde, age de départ 63 ou 65 ans – comme en Scandinavie pourtant), l’organisation de l’État et des régions avec ce mille feuille incompréhensible et couteux d’institution de toutes sortes et de lobbies locaux, etc.ne serait ce que parce que les gens ne semblent pas comprendre que "prendre au riche" ou "emprunter encore pour soutenir la consommation" sont arrivés au bout du rouleau, alors payer pour garantir la dette Grecque, Portugese, etc. dont tout le monde sait qu’elle subira un haircut de 30 a 50% c’est pas fait.

    La Suisse a de beaux jours devant elle.

  24. Grèce : "comité de crise" après des "annulations massives" de touristes.

    Le gouvernement grec a annoncé jeudi la création d’un "comité de crise" face aux "annulations massives de réservations" touristiques dans le pays, l’Association des hôteliers d’Athènes (AHA) évoquant près de 20.000 nuits d’hôtels annulées dans la capitale et ses environs.

    "Après les annulations massives de réservations, un comité de crise piloté par l’Organisme grec du tourisme a été mis en place", a annoncé un porte-parole du gouvernement à la presse, estimant le coût de ces annulations à "des dizaines de millions d’euros".

    Près de 20.000 nuits d’hôtel ont été annulées depuis les violences qui ont fait trois morts en marge des manifestations du 5 mai contre le plan de rigueur du gouvernement et "ce chiffre continue d’augmenter", avait auparavant affirmé à l’AFP le directeur de l’AHA, Loukas Douvas.

  25. Merci beaucoup pour votre réponse. Sur le premier point, je vous avais mal compris. Je croyais que le fait, pour la BCE, de s’autoriser l’achat d’emprunts d’Etat sur le marché secondaire, la rendrait plus dépendante des Etats.

  26. Très bon billets ainsi que de bonnes réactions dans les commentaires… Il faudrait que Sarkozette ajoute ce blog dans ses flux rss…

  27. Bonjour

    Je viens juste de lire vos deux papiers ("l’imbécile chasse aux spéculateurs" et "bienvenue dans la nouvelle Europe")
    Je partage votre aversion pour les mécanismes de bouc émissaire mais j’ai quand même quelques questions à vous poser
    1- on imagine que ce sont des donneurs d’ordre puissants qui sont à l’origine des variations brutales des cours de la bourse; qui sont ces "acteurs" et, point important, comment sont-ils rémunérés ?
    2- la situation de la Grèce est d’autres pays d’Europe du Sud n’est pas nouvelle; cela n’a pas empêché la bourse de grimper de 10 % entre janvier et fin avril. Durant cette période, les "spéculateurs" étaient-ils à ce point mal informés qu’ils ignoraient que la Grèce ne pourrait pas honorer son échéance du mois de mai ?
    Ou s’ils étaient informés, pourquoi ont-ils ignoré à l’époque cette information ?
    3- à lire votre article sur la chasse aux spéculateurs, on a l’impression que les mécanismes financiers jouent leur rôle de garde fou et ramènent les états irresponsables face à leurs responsabilités : pensez vous sincèrement que le système financier international ne doit pas être réformé ? S’il doit l’être comment ? (indiquez moi une biblio sur ce thème, merci.

    Sincèrement

  28. Je suis assez d’accord avec la conclusion : une bonne dose de morphine pour le malade. On prolonge un peu l’agonie du système en mutualisant le risque. Une demi-bonne nouvelle, la possibilité pour la BCE de racheter des titres de dettes des pays de l’union mais uniquement sur le marché secondaire.
    Pour le reste de bien mauvaises nouvelles, on conditionne l’aide au tour de vis imposé aux peuples européens. Cette rigueur a-t-elle une chance d’assainir les finances publiques ? J’en doute. Le seul vrai médicament : la croissance. Quelqu’un a-t-il entendu parler d’une quelconque stratégie pour retrouver en Europe un niveau décent de croissance ? Pourquoi ne pas monétiser la dette ? Pourquoi accepter une concurrence déloyale qui détruit nos économies ? Pourquoi détruire un idéal de coopération européenne au travers de la défense de cette monnaie unique vouée à l’éclatement ? Pourquoi ne pas mettre au centre du débat les déséquilibres des balances commerciales ?
    Et le plus inquiétant dans tout ça : la commission en profite pour proposer de contrôler les budgets des états avant qu’ils ne soient votés par les parlements nationaux. Il semble plus facile d’enlever le pouvoir aux élus que le droit de vote aux électeurs. Nos lendemains seront-ils démocratiques ?

  29. Je me demandais enfait comment une politique budgétaire d’austérité pourrait mener à une dévaluation réelle significative?(d’un point de vue vraiment technique). Et en quoi l’inflation serait bonne pour la Grèce par exemple?

  30. Bravo pour l’article et encore merci pour les liens, mais j’ai encore une petite question: Pourquoi l’option nucléaire n’est pas une solution sur le moyen terme, une inflation maitrisée ne permet-elle pas d’eviter le suicide que représente l’austérité?
    Est-il possible que l’orthodoxie aveugle les économistes?

Commentaires fermés.