De la théorie aux faits – si tu reviens en taxi, j’annule tout

Le projet de déréglementation du marché des taxis est officiellement enterré, au profit d’une "évolution de la profession" (ou un truc comme ça).

Au début, il y eut un livre, écrit par deux économistes, Jacques Delpla et Charles Wypplosz. Ils avaient une idée. En France, pas moyen de réformer les privilièges. Pour réformer, il fallait racheter les rentes. Dans les rentes, on trouvait les licences de taxis. Les taxis étaient insuffisamment nombreux. Dans certains lieux, il fallait lutter pour en trouver un quand on en avait besoin. Pire que ça, on pouvait penser que le monopole que confèrait la rente, réduisait la demande, en raison de prix particulièrement élevés dans certaines villes, les clients potentiels préférant user de solutions alternatives (comme leur propre véhicule, par exemple). Offre réduite, clients contrariés. Les ingrédients d’un dysfonctionnement de la tant honnie économie de marché. A ceci près que c’était la réglementation qui induisait ce dysfonctionnement. La solution était simple. Plutôt que de laisser rationnellement des chauffeurs perdrent leur temps à attendre le client dans des lieux où la rentabilité de la course était avérée, pendant que d’autres attendaient en vain un véhicule ailleurs, il fallait libéraliser le secteur et laisser tout individu le souhaitant s’installer dans la profession. Concurrence oblige, on pouvait s’attendre à une baisse du prix de la course et à une offre plus importante qu’avant. Restait un problème de justice de taille. Les chauffeurs de taxi qui aujourd’hui paradent dans nos rues comme une armée de fonctionnaires aigris, avaient payé leur licence, le droit d’exercer la profession. Et payé cher. Endettés pour certains, ils voyaient cet investissement comme un moyen de finacer leur retraite, la "plaque" étant leur fonds de commerce à eux. Autoriser n’importe qui à se lancer sans licence, c’était ramener de fait la valeur de la licence à zéro. Plus personne ne voudrait payer pour une autorisation dont tout le monde dispose à la naissance. Et c’est rude, convenons-en. Les buralistes avaient déjà souffert de cette situation, eux à qui le gouvernement avait fait un très sale coup en accroissant violemment le prix de leur produit, sans qu’ils n’en touchent les dividendes. Mais dotés de véhicules bien moins gros et globalement moins touchés que leurs amis taxis (oui, le taxi va au tabac acheter ses clopes ; ça crée des liens), ils avaient laissé filer les moins solides d’entre eux, en espérant que la vente de journaux ou de ballons de rouge prendrait le relais.

Ceci, Delpla et Wyplosz en avait conscience. Ils proposèrent donc, compte tenu des bénéfices à attendre de la croissance du marché suite à une libéralisation, de racheter sur fonds publics cette fameuse plaque de la discorde. Opération coûteuse, certes. Mais, quand on sait combien coûte un emploi subventionné ou un chômeur, on se disait que le jeu en valait peut-être la chandelle. En 2007, ils firent (du moins Wyplosz) une allégeance plus ou moins explicite au candidat Sarkozy, qui leur semblait être l’homme de la situation pour conduire les réformes allant dans le sens de ce qu’ils préconisaient. Une fois Nicolas Sarkozy élu, Charles Wyplosz devint un de ses conseillers économiques, aux côtés de quelques autres, qui faisaient beaucoup plus rire. Pendant l’été malto-américain, Nicolas Sarkozy chargea Jacques Attali, un économiste de renom international, de diriger les travaux d’une commission sur la croissance. Dans le même temps, le président mit en place des mesures fiscales qui, de son quasi-aveu ultérieur, vidèrent les caisses. Opportune ou non, l’avenir le dira (et là, je fais le mec nuancé, parce que j’en bénéficie au travers des heures sup. Prochain objectif, bénéficier du bouclier fiscal. €uromillion, je t’implore.), le programme eut un effet immédiat sur les marges de manoeuvre budgétaires.

En septembre donc, Attali prit les rênes de la commission de "libération de la croissance". Je passe les détails sur les péripéties de sa mise en place, par l’auteur invétéré du célèbre manuel d’analyse économique nommé "Anti-économique". Le tour de chauffe médiatique bien amorcé, Attali se tourna, avec beaucoup de regrets, vers les économistes de la commission, les rapports du CAE publiés depuis dix ans et les travaux d’auteurs dont il ne parvint pas à se souvenir l’identité quand il s’agît de rendre hommage à leur travail. Parmi les membres de la commission, Jacques Delpla. Et parmi les propositions, la réforme du marché des taxis, avec comme objectif d’accroître le nombre de plaques en circulation.

Et là, premier saut entre la théorie et les faits. Indemniser les taxis ? Pas question. Caisses vides, on l’a dit. Conséquence : libéraliser la profession ? Pas tout à fait. Mettre en place un système de "licences temporaires" (6 500 environ à Paris) gratuites, non cessibles. L’objectif : avoir le beurre, l’argent du beurre et le reste. Si le nombre de licences permanentes cessibles reste identique, alors le prix de la plaque est préservé. Enfin, faut voir… Comme tout actif, une licence de taxi a pour valeur la somme actualisée des revenus qu’elle engendrera dans le futur. De ce point de vue, la concurrence de nouveaux taxis peut réduire potentiellement la valeur des revenus futurs, soit parce que le nombre de course baisse, soit parce que le prix de la course baisse sous la pression de la concurrence, soit les deux. On pourra rétorquer trois choses. La première, c’est que les licences sont temporaires. Le deuxième argument pourrait être que le prix de la course n’a pas de raison de baisser si les tarifs restent réglementés. La troisième est qu’il ne faut pas oublier que le nombre de courses a de fortes chances de croître. Concernant le caractère temporaire, eh bien, ma foi, si le caractère temporaire est reconduit pendant des années, on comprend que cela ne fasse guère de différence. Car, au fond, le taxi se moque de savoir qui vient le concurrencer. Que Pierre le fasse pendant deux ans, puis Paul deux ans et Jacques encore deux ans ne change rien à l’affaire. Il aura toujours un concurrent de plus qu’il n’avait pas avant. Concernant le deuxième point, c’est bien ce qui est prévu, puisque la commission préconise, en compensation de permettre la répercussion de la hausse du prix de l’essence sur le tarif des courses. Dans un marché où les prix ne sont pas réglementés, nul besoin de ce genre de choses. Enfin, concernant le nombre de courses, eh bien, en effet, si les prix restent fixés, on voit mal comment le volume de transaction augmenterait. Au fond, la tarification réglementée a le même rôle que le système de licence. Mettre les deux ensemble, c’est inciter à s’acheter une Lada. Dans ces conditions, une fois le rationnement actuel sur la demande résorbé, on voit mal pourquoi de nouveaux clients useraient du taxi. Moralité : cette solution de second rang, qui ressemble un peu à l’introduction maladroite d’une forme de contestabilité sur le marché des taxis, un genre de concurrence aux marges, éloigne clairement de l’objectif recherché.

Second saut de la théorie aux faits : les manifestations. Sauf que dans la théorie, on aurait du, rappelons-le, éviter cette étape en parlant aux intérêts bien compris des taxis. Ici, et on ne peut guère leur en vouloir, les taxis n’ont retenu qu’une seule chose : ce ne sera plus comme avant, méfions-nous. Je passe sur les sociétés qui peuvent acheter des plaques en nombre et sous-salarier des chauffeurs. Celles-là savent, en revanche, exactement ce qu’elles font.

Alors, donc, manif partout, menace de boycotter leur parti de coeur (l’UMP) aux élections, les taxis sont entendus en moins de temps qu’il ne le faut pour faire Gare du Nord-Roissy en RER. Et c’est là qu’intervient la dernière étape de la vie d’une idée : la poubelle (Attali parle de mettre au placard son rapport ; ce n’est pas incompatible; voyez ces poubelles de cuisine qui sortent des placards…). Et tout ceci, au nom des principes de rupture sereine et posée du mari de Carla Bruni président de la république. Non, la proposition ne sera pas retenue, il l’a assuré aux taxis. Réaction d’Attali : en fait, on est moins méchant que ça, vous savez. Réaction de Delpla : "Putain, mais c’est pas possible ce pays de merde ! On s’en sortira jamais ! Je me casse en Suisse, rejoindre Charles" (note 1 : Wyplosz travaille à Genève ; note 2 : la vraie réaction, c’est pas ça, mais ça y ressemble. Son vrai point de vue est résumé à la fin de cette dépêche.).

Ce que nous retiendrons probablement de cette histoire, c’est que l’idée de départ a été amputée de ses qualités premières : la simplicité, la lisibilité et le principe de la compensation des réformes à ceux qui en sont les perdants. Et Jacques Delpla de conclure, assez peu sport avec ses anciens camarades de cocktails, du moins le premier d’entre eux : "C’est une condition sine qua non : pour réformer, il faut compenser"(in Le monde). Allez, Jacques, te bile pas, la prochaine fois, on se cogne les notaires bien comme il faut. Moins nombreux et en scooters.

18 Commentaires

  1. Il n’a jamais été écrit que les 15000 taxis parisiens avaient le monopole de leur marché. Mais c’est de facto devenu une réalité. D’où la proposition de Wyplosz et Delpla. Je me demande dans quelle mesure ce genre de tradition ne pourrait pas devenir un vrai droit. Même si il a été "mal acquis".

    On répondra que c’est une voie dangereuse, qui serait un précédent, etc. Mais que se passerait-il si les 15000 taxis devenaient en droit "copropriétaires" du monopole de leur marché? Créer une société (par actions, coopérative, ou autre) détenant le monopole, et dont les taxis seraient initialement actionnaires et licenciés. Un taxi pourrait céder ses actions en conservant sa licence. Pour se représenter ce système on peut faire le parallèle avec les actions Microsoft et la licence Windows. Cela dissocierait la plaque et la rente de monopole.

    Le point-clé est de savoir si cette société tentera d’augmenter sa rente (probable), et si cela l’amènera à augmenter ou diminuer le nombre de plaques (aucune idée). A l’avenir pour dérèglementer le marché des taxis, il "suffirait" de nationaliser la société. Cette mesure ne coûterait donc rien initialement, mais paverait la voie pour une future dérèglementation.

  2. J. Delpla a écrit un petit article dans les Échos hier jeudi sur l’État "capturé par les lobbys" (http://www.lesechos.fr/info/anal... Il y a vraisemblablement une bonne part de vérité dans ce qu’il décrit dans ses premiers paragraphes, au sujet du fonctionnnement des ministères "sectoriels" français.
    À titre d’illustration complémentaire de celle de Delpla, une personne qui travaille au ministère de la Culture depuis de nombreuses années m’expliquait hier soir que, lorsque ce dernier, par l’intermédiaire du Centre national de la cinématographie (CNC), décide de mettre en place un "dispositif" nouveau pour le secteur cinématographique, "il" demande d’abord aux syndicats professionnels concernés s’ils sont d’accord sur le texte envisagé, ce qu’ils en pensent, s’il leur convient. Et mon interlocuteur de m’expliquer que les choses se passent aussi comme le décrit Delpla pour les dispositifs touchant l’industrie du livre, l’industrie musicale, etc., etc., avec, dans certains cas, des "copier-coller" de textes de groupes de pression envoyés au "ministère" qui sont repris mot pour mot dans les textes officiels ultérieurs.
    C’est peut-être le fonctionnement habituel de tout ministère dans le monde… mais Delpla a sans doute raison de s’inquiéter du fait que le "point de vue des consommateurs et des nouveaux entrants potentiels est indûment confondu avec celui des professionnels déjà installés."

  3. Il me semblait que quelques économistes avaient rédigé quelques contributions qui furent mondialement reconnues comme relativement décisives sur la nature exacte du bénéfice créé par l’état régulateur ?

    Réponse de Stéphane Ménia
    Je ne suis pas sûr de comprendre. Précisez de quoi vous parler, on s’entendra peut-être mieux.

  4. BOnjour,

    article passionnant, mais une question me taraude (je ne suis pas économiste, j’aimerais un avis éclairé): si on rachète au prix d’aujourd’hui les licences , est-ce qu’on ne paie pas "trop cher" ? En effet, les taxis susceptibles de partir aujourd’hui à la retraite ont acheté leur licence il y a 20-30 ans, à une époque où ces licences ne valaient pas le "prix de marché" actuel; et ils n’avaient certainement pas motivé leur décision par l’argument "ça me fera un pécule pour ma retraite" (argument cher aux syndicats de taxis).
    Réflexion corrolaire: pour les taxis qui rentrent aujourd’hui dans le système, en achetant une licence, ils ont devant eux un horizon sur lequel la demande va aller en croissant largement. Or, les estimations qu’on entend parlent du prix actuel de la licence rapporté à la demande actuelle en taxis: est-ce correct ?

    Autre question: on parle beaucoup des artisans-taxis, mais en fait il doit y avoir une part très significative des licences qui sont détenues par 2-3 "grosses" entreprises: le problème ne se pose-t-il pas différemment, dans ce cas ?

    Econoclaste, pourrais-tu stp nous éclairer là-dessus ? Merci d’avance,

    Réponse de Stéphane Ménia
    De façon générale, la plaque est un actif. Comme tout actif, son prix peut fluctuer en fonction des conditions du marché sous-jacent (c’est-à-dire les revenus futurs escomptés pour un acquéreur de la plaque, par les courses réalisées) et de la spéculation. Donc, à un moment donné, il y a un prix pour cet actif. Est-il trop élevé ? C’est une question que n’ont pas à se poser ceux qui sont susceptibles d’être indemnisés. Pour en revenir plus précisément à votre question, si on veut qu’il y ait des vendeurs, « perdants » de la réforme de bonne humeur, on doit leur proposer un prix qui leur conviennent. Si vous proposez 50% du prix de marché, peut-être que des taxis au bord de la retraite accepteront, si comme vous le supposez, ils ne comptent pas trop là dessus et craignent éventuellement que les anticipations autour des réformes à venir (en force et sans indemnisation par exemple) font baisser le prix de la plaque. Même ce cas de figure risque d’être rare. Ils ont peut-être programmé après coup le capital que leur donnera la plaque et modulé leur travail et leur épargne des disons dix dernières années sur la valeur actuelle de la plaque. Dans ce cas, ils seront tentés de repousser leur départ en retraite, de tenter de vendre à un plus jeune (si personne ne vend à l’Etat, le prix ne baissera pas, donc autant procéder ainsi) ou de simplement refuser le deal et bloquer les rues avec les autres. En revanche, le taxi de 30 ans qui vient de s’endetter ou de liquider son épargne en payant le prix du marché ne sera pas d’accord, car même s’il escompte un rendement de son activité élevé, vous amputez d’un seul coup son capital investi. Théoriquement, le prix de la plaque intègre déjà une partie des perspecives de croissance du secteur. Mais, pour répondre finalement à votre question sur le ratio utilisé, ça dépend. Si globalement on peut espérer que la hausse de la demande dans un marché moins réglementé aura un effet global positif, pour ce qui est des taxis déjà installés, sans compensation, c’est assez incertain. Et même dans ce cas, on en revient toujours au même problème : eux ont payé la plaque alors que les nouveaux venus ne l’auront pas fait. Pour ce qui est des grosses boîtes, eh bien, pour rester dans l’esprit de la méthode défendue par Delpla et Wyplosz, le raisonnement est que s’ils ne sont pas capables de se mobiliser et que le préjudice subi n’est pas monumental, alors il faut minimiser la compensation. Mais théoriquement, il n’y a pas de raisons. Si ce n’est de constater qu’ils ont profité jusqu’ici d’un énorme pouvoir de marché, mesurable en surprofits conséquents. Aller prouver ça coûterait sûrement beaucoup trop de temps (voire d’argent, mais le temps vaut encore plus dans cette histoire) par rapport au coût du rachat.

  5. Commentaire un peu annexe :

    vous l’avez lu le rapport de la comission attali ?

    qu’en avez vous pensé ?

    on aura droit a des notes dessus dans econoclaste ? 🙂

    voilà c’est tout

    Réponse de Stéphane Ménia
    Il y a un questionnement au sein de l’équipe… Nous sommes parfaitement d’accord pour ne pas savoir quoi faire de ce truc, pour diverses raisons. Donc…

  6. "Ce que nous retiendrons probablement de cette histoire, c’est que l’idée de départ a été amputée de ses qualités premières : la simplicité, la lisibilité et le principe de la compensation des réformes à ceux qui en sont les perdants."

    Sauf que l’état est toujours impécunieux pour ce genre de choses et que de toute façon l’état risque de surpayer les licences lors du rachat.
    Il existait manifestement une autre solution. Peu satisfaisante à long terme, certes, mais qui présentait tout de même certains avantages. Apparemment, il y a une liste d’attente. Il suffisait de la vider d’un coup sans en parler avant. On fait un mailing de masse aux gens sur liste d’attente, avec une licence de taxi à l’intérieur (oui, c’est simplifié). Les taxis gueuleraient, mais les licences juste distribuées serait indiscernables des autres… Impossible de toute façon de les annuler (pas prévu).
    Évidemment, quand ça figure dans un rapport c’est plus gênant et c’est trop tard.
    Le problème avec cette méthode, c’est qu’il faut être au courant du problème (en l’occurrence, il suffisait de lire un bouquin), de savoir comment attribuer une licence de taxi (le gouvernement doit savoir), enfin et surtout avoir la volonté de le faire.

    La question des tarifs est aussi intéressante. Comment faire en tant que client pour savoir qui pratique les tarifs les plus bas (ou un tarif au rapport qualité/prix honorable)? Actuellement, les prix sont écrit petit, il me semble. Il y a donc des risques de hold-up de la part des taxis et/ou de méfiance de la part des clients potentiels… Comment faire hors tarifs régulés?

    Réponse de Stéphane Ménia
    Sur le rachat au dessus du prix : on dispose des prix des licences. Je ne vois pas pourquoi on proposerait plus. L’idée des tarifs dérégulés est comparable à celle que vous avez dans des tas de domaines : dispositions à payer. Je suis surpris qu’on considère cela comme aberrant pour les taxis. Maintenant, on doit aussi s’entendre sur ce qu’on appelle tarifs dérégulés : il s’agit surtout de pouvoir vendre des courses moins cher si on juge que c’est rentable. De ce point de vue, la compensation devient une obligation et le principe des licences gratuites ne se conçoit pas sans elle. La question n’est pas de savoir si un taxi peut arnaquer ses clients (certains le font déjà, de toute façon). Le prix de la course peut s’évaluer très simplement par rapport à ce que font les autres. L’histoire des prix tout petits, c’est un peu tiré par les cheveux quand même. Actuellement, s’ils sont écrits petit, c’est que de toute façon, on sait qu’on va se faire tordre quel que soit le véhicule pris. Pas la peine de le mettre en gros. Le prix du demi n’est pas écrit en gros dans les bars. ca n’empêche pas de la payer à des prix différents, de trouver cela souvent normal et parfois incompréhensible. Mais est-ce qu’il faudrait imposer un prix sur le demi ? Bref, globalement, si les prix commencent à être différent, on trouvera bien un moyen pour le savoir. Quant à votre proposition, eh bien ma foi, une chose est certaine, vous le ferez une fois, pas deux. Moralité : vous ouvrez les vannes à ceux qui sont actuellement dans la liste d’attente et qui se retrouvent gratuitement parmi les rentiers, pour longtemps. Je vais peut-être me mettre sur cette liste !

  7. Désolé, mais quand je vais dans un bar, la plupart du temps, il y a une carte… C’est écrit plus gros que les tarifs des taxis à Paris.
    Je comprends bien qu’on peut toujours se faire arnaquer par un taxi aujourd’hui, puisque le conducteur est par définition maître de son véhicule. La disposition à payer est utilisable, je suis d’accord. Mais ne risque-t-on pas de se retrouver dans la situation des renseignements téléphoniques où malgré la pub, il y aurait moins d’appels aux différents opérateurs qu’à l’ancien 12? (Enfin, comme vous me dites: qui connaît les tarifs des taxis actuellement?)

    Sur ma "proposition", le fait est qu’on ne peut pas recommencer trop souvent. Mais en fait, a-t-on besoin de le faire souvent? S’il s’agit de le faire une fois tous les 10 ou 20 ans après tout… Et cela a un impact sur le prix des licences: si les acheteurs potentiels de licences pensent pouvoir obtenir une licence gratos, ils seront moins disposés à payer; et cela créera une incertitude pour les détenteurs actuels.
    Les taxis pourraient obtenir que l’état ne distribue plus de licences du tout (est-ce légal? Une occasion en or pour faire attaquer la réglementation au tribunal par le pékin moyen, alors que perdre au tribunal arrangerait bien le gouvernement…) ou alors des licences payantes (quel prix d’ailleurs? via des enchères? S’il y a 100 acheteurs par an à 200k€, ça fait déjà 200M€. S’il reste bcp d’acheteurs sur le carreau, je vois mal Bercy résister à l’appel du pognon et ne pas vouloir qu’il y ait + d’acheteurs que ce qui était prévu au départ).

    Vous dites qu’on connaît le prix d’une licence. Mais si l’état propose de racheter au prix du marché, les taxis ont intérêt à bloquer les rues pour obtenir plus: même si le gouvernement retire son projet, ils n’ont rien perdu, le prix des licences sera toujours le même. L’état peut alors annoncer qu’il passera en force en cas de désaccord, mais rien ne dit qu’ils ne pensent pas gagner quand même, un peu comme aujourd’hui.
    L’état se trouve dans la situation d’une OPA: il doit payer une prime pour espérer récupérer les titres sans résistance. En bref, il est obligé de plus ou moins surpayer.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Si l’Etat propose de racheter les licences au prix du marché, il me semble que c’est une menace crédible de passer en force si la négociation n’aboutit pas. Crédible car politiquement, il sera difficile de justifier un mouvement et qu’on peut facilement supposer ce que sera la réaction de nombreux taxis : prendre le fric et conduire sans licence, plutôt que de prendre le risque d’être clairement exproprié. C’est tout l’intérêt d’une libéralisation complète avec compensation : une demande en hausse et des compteurs remis à zéro. Introduire de nouvelles licences, gratuites éventuellement, ne relève pas du tout de la même logique. Il s’agit de dilluer le rendement de la rente en laissant les taxis prisonniers du capital investi que représente leur plaque. Là, beaucoup suivent le mouvement parce qu’a priori, la probabilité de perdre quelques plumes est non négligeable, quand celle de voir leurs revenus augmenter l’est moins. Quant à la proposition de simplement les spolier littéralement, ben… elle ne me semble ni juste, ni très futée politiquement.

  8. juste une remarque en passant, je me souviens tres bien avoir lu, dans un "Challenges"( le magazine hebdo à fond noir) asez recent, (enfin un an ou deux peut etre), un graphique montrant le doublement en quelques années ( 8 ans max, je dirais ) de la valeur de la plaque.

    conclusion perso : c’est comme les proprio de biens immo. quand ca monte , ils se taisent sur leur gain rapide et ralent des impots . et quand ça baisse, ils voudraient un plan marshall et une indemnité . Les actionnaires ont plus de decence.

    deuxieme remarque en passant : quand on prend un taxi, ils semblent tous etre (de pauv’) salariés, et quand on parle du prix des plaques, ils semblent tous etre (de pauv) independants…

    conclusion perso : Quelle belle bande de maquignons …

    Réponse de Stéphane Ménia
    Vous oubliez l’essentiel : beaucoup conduisent comme des porcs, sous prétexte qu’ils travaillent, eux ! Ca m’ennuie beaucoup plus…

  9. Si au lieu d’avoir un Etat qui rachête les rentes, on inversait le mécanisme? Le problème n’est pas que les taxis aient à payer une licence, c’est qu’il se soit créé une bulle autour, analogue par exemple à la bulle immobilière. Il faudrait donc ramener le prix de cette licence à celui d’un véhicule de taxi, par exemple, soit dans les 20000€.

    Moyen simple:
    -> l’Etat peut vendre, au prix du marché, des nouvelles licences, dans les départements et agglomérations où il y a des manques.
    -> les recettes (disons 80%) peuvent être redistribuées à montants égaux entre les propriétaires de licence de l’année précédente.
    -> les 20% restants peuvent servir à la formation, aux couloirs, aux stations, etc.
    -> des mesures fiscales ad’hoc pourront permettre le versement de l’argent redistribué sur un plan de retraite complémentaire.

    Le hic, c’est que si cela est fait brutalement, les "cours de la licence" chuteront, et l’argent amené par les entrants ne suffira pas à rembourser les taxis actuels. Il faudrait donc faire cela progressivement sur 5 à 10 ans. Chaque année, les détenteurs de licence verraient leur valeur baisser, mais recevraient de l’argent, un peu comme une participation au système. De même la demande augmentant progressivement, leur volume d’activité se maintiendrait.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Usine à gaz ?

  10. Surle fait qu’exproprier sans indemniser ne soit pas juste, je suis d’accord, mais ce n’était pas le point. Je me situais plutôt dans le cas d’un gouvernement prêt à beaucoup de choses (sauf payer bien sûr) pour augmenter le nombre de taxis.

    Quant au prix à payer pour les licences:
    – effectivement, les vendeurs pourraient conduire sans licence même en cas d’échec du gouvernement. Mais c’est déjà possible aujourd’hui. Tout le matériel pour être taxi doit être en vente libre dans au moins un pays de l’UE. Pourquoi n’y a-t-il alors pas plus de taxis "illégaux"? Parce que la profession a réussi à obtenir de l’état qu’il défende la licence. Si l’état échoue, il faudra bien qu’il s’engage de nouveau à défendre les licences. Et les vendeurs seront probablement temporairement chômeurs (ou on leur rendra leur licence et on leur reprendra l’argent).
    – il faut donc s’assurer du succès. La menace de spoliation en cas de résistance n’est pas particulièrement méchante. En effet, les taxis auront certainement un certain laps de temps pour se faire rembourser la licence et la rendre. Ce temps peut être mis à profit pour voir qui gagne dans un éventuel conflit. S’ils perdent, eh bien! les perdants iront rendre leur licence pour récupérer l’argent. En attendant, ils pourront bloquer les rues pour avoir plus sans grand risque de perte.
    – il reste donc un moyen principal pour l’état pour éviter ce genre de choses (puisque l’état veut éviter un conflit aussi ‘juste’ soit-il vu: la perception des choses pourrait s’inverser) est bien de payer une prime. La prime en elle-même n’est pas forcément une mauvaise chose, puisque la fin des licences peut rapporter plus que le prix des licences, d’ailleurs, on ne rachèterait rien si ça rapportait moins [encore que ça pose la question du gain de l’état dans l’histoire]. Toutefois, on entre alors dans une zone d’incertitude à propos du prix payé…

    Réponse de Stéphane Ménia
    « Je me situais plutôt dans le cas d’un gouvernement prêt à beaucoup de choses (sauf payer bien sûr) pour augmenter le nombre de taxis. » Vous êtes économiste, ou quoi ? « La menace de spoliation en cas de résistance n’est pas particulièrement méchante. » Ben, quand même, si. Qu’est-ce qui fait que les taxis peuvent aujourd’hui bloquer les rues sans se faire huer de toute part ? Le fait que des tas de gens se disent qu’ils sont un peu eus… Quand une expropriation immobilière est faite, le paiement du prix du marché est généralement considéré comme correct. Là, c’est pareil. On peut facilement envoyer les CRS. Ce que je veux dire par là, c’est que tout comme les cheminots ne dirigent pas le pays, les taxis ne le font pas non plus. Le rapport de force politique ne tient pas à la taille de leurs voitures.

  11. D’accord que le système que je propose peut faire ‘usine à gaz’. Ceci dit il y a beaucoup de choses plus compliqués en France à commencer par les immobilisations ou les crédits d’impots entreprises.

    Variante "light" du système:
    -l’Etat vend des licences supplémentaires (c’est un besoin avéré de toute façon), mais très lentement genre 2,5%-3% du volume existant par an (équivalent du nombre de taxi partant à la retraite)
    – dans un premier temps, les prix des licences arrêtent de monter
    – on ne rembourse plus, mais l’Etat bon prince peut abonder une caisse de retraite.

    Le défaut que je vois, c’est qu’on aura créé un nouveau régime spécial de retraite (mais moins absurde que le système actuel, ou les vieux rançonnent les jeunes en leur promettant que dans 30-40 ans le montant du racket sera encore plus élevé à leur avantage).

    Réponse de Stéphane Ménia
    Pourquoi mettre ça dans un régime de retraite ? Pourquoi les taxis laisseraient faire ? Le temps qui passe est l’ennemi des réformes.

  12. Avez-vous vu avec quelle rapidité le gouvernement a retiré non pas une décision déjà prise , mais une simple proposition suggèrée par le rapport Attali à propos des taxis .

    Impossible à mettre en place . Mon oeil !!!

    N’étant ni économiste ni énarque je sais moi distinguer un chien d’un mouton

    Principale objection des taxis nous avons payé notre licence 200.000 euros !!! Elle vaudra 0 euros !!!

    Sûr qu’elle baissera si on la donne gratuitement aux nouveaux taxis qui arrivent . Mais , si on s’y prenait non pas comme un énarque mais comme quand nous étions au Certificat d’étude Primaire de dans le temps …. et sans solliciter le contribuable en rachetant les licences par l’etat !!!!

    Allez suivez un peu .

    Supposons

    100 Taxis à 200.000 euros la licence.

    Coût global

    100* 200.000 = 20.000.000 euros

    Augmentons le nombre de taxis de 25%

    Soit :125

    Nouveau prix de revient pour chacun ( Il est normal que ceux qui on déjà payé ne soient pas lésés… .)

    20.000.000: 125 =160.000 Euros .

    Vous suivez toujours …

    Les nouveaux entrants empruntent en tout

    160.000*25 =4.000.000 euros .

    Qui serviront à dédommager les premiers entrants .

    Soit à chacun…

    4.000.000 :100 = 40.000 Euros

    Ce qui donne le nouveau prix de la licence . Pour chacun des 125 taxis :

    160.000 Euros !!!

    Et voilà !!! Mais que voulez vous on ne peut pas demander à un économiste ,un énarque ou un politique de faire ce genre de calcul …. Trop compliqué !!!!

    Vos autres arguments messieurs les taxis meilleure circulation taxes parapetrolieres et tout y quanti … Nous en souffrons nous aussi. Qui plus est c’est nous qui payons la course ….

    Mais je me demande si ce qui vous gêne le plus , n’est pas la valeur réelle des plaques que vous vous échangez en sous main ….

    Mais cela c’est une autre histoire !!! …

    …. c’est l’affaire de Mme Lagarde …. Tiens elle porterait bien son nom si elle le faisait vraiment .

  13. C’est la variante big-bang, et c’est aussi possible.
    (juste en régionalisant, car le prix de la licence dépend de la ville).

    J’avais proposé initialement de le faire progressivement car:
    si on créé du jour au lendemain 15000 licences (25% de 60000 taxis), il faudrait voir si on aura vraiment 15000 acheteurs avec 160000€ dispo.
    Mais on peut gérer cela sur plusieurs mois, comme une privatisation habituelle, et recommencer 2 ans plus tard s’il n’y avait pas assez d’acheteurs la1ere fois.

    @SM: Vous faites mine de ne pas voir que leur revente de plaque est fait le plus injuste des régimes de retraite. Si on ne veut pas créer de caisse spéciale, (et si vous etes contre le remboursement), on peut verser toutes les recettes des reventes de licence à la caisse ordinaire du secteur privé. Les taximen auraient des équivalences de points, et devraient coriser "normalement" par la suite.

  14. Savez-vous au moins que l’état se met dans la poche 5% du prix d’achat d’une licence à chaque transaction ?
    Savez-vous qu’un taxi qui roule dans une super belle voiture, il l’a acheté à crédit ? Il la paye tous les mois et doit faire du chiffre pour la rembourser ?
    Savez-vous aussi que les taxis (pas tous) choisissent leur véhicule pour le bien etre de leurs clients ?
    Savez-vous qu’ils payent 46% de charges sur tout ce qu’ils touchent, + le gazole, les assurances exhorbitantes, les frais de téléphone, la cotisation au groupement, et bien sur le crédit licence !

    En gros le CA moyen en France est de 60 000€
    Soit 5000€/mois

    A cela, j’enlève les 46% de charges, il reste 2700€, j’enlève l’assurance il reste 2500€, le gazole (selon les taxis) il reste 1900€, le téléphone reste 1800€ (je suis gentil la), le groupement, reste 1500€ !
    A cela il faut enlever les crédits licence + véhicule soit environ 1500 à 3000€ selon le prix de la licence et du véhicule, l’apport personnel et la durée d’emprunt.

    N’oublions pas qu’il reste au chauffeur, à payer, comme tout un chacun, le loyer (ou crédit immo), la nourriture, les factures EDF GDF, les vetements des enfants et j’en passe !
    Alors oui la licence est chère, oui vous trouvez cela injute, les taxis roulent dans des voitures neuves tout le temps etc…
    Mais les chauffeurs calculent cela comme un investissement, ils n’ont quasimment aucun revenu pendant les années ou ils payent leur plaque (7 à 10 ans) et en bossant 60 à 70 heures/semaine ! Ce qui compte, c’est de pouvoir la revendre un jour et c’est ça qui fait qu’il y a encore des chauffeurs aujourd’hui. Alors SVP, ne parlez pas d’une profession dont vous ignorez tout.

  15. Et j’ajouterai qu’il n’y a pas 60 000 taxis en France mais 46 000, dont 16 000 à Paris ! Et c’est la bas qu’il en manque…?
    De meme vous dites que vous pouvez attendre longtemps un taxi, sachez que lui aussi attend longtemps les clients !
    Et quand vous allez chez le médecin, vous n’attendez pas ? Si, parfois plusieurs heures mais là vous trouvez ça normal, pourquoi ? Parce que lui il a un doctorat ?

  16. Il ne s’agit pas de dire que les taxis sont des profiteurs privilégiés mais simplement de corriger des dysfonctionnements.

    Que préfère le chauffeur de taxi:
    _Avoir un CA de 5000€/mois et payer 2000€/mois d’intérêt pour une licence achetée à crédit?
    _Avoir un CA de 3000€/mois et ne pas payer de licence?

    Que préfère le client:
    _Payer 50€ une course?
    _Payer 30€ une course?

    Beaucoup d’économistes pense que la 2e situation est largement préférable à la 1e. Mais pour passer de la 2e situation à la 1e, il faut indemniser les propriétaires de licences.

    À noter que le livre de Delpla et Wyplosz ne vise pas seulement les taxis mais quasiment toute la population française (y compris des gens ayant un doctorat):
    econo.free.fr/index.php?o…

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