lectures estivales

La pile estivale de livres est bien fournie (voilà ce qui se passe quand on glande trop longtemps, après, on a des lectures en retard). Si la lecture de la feuille de chou de votre lieu de vacances vous déprime, voici quelques alternatives plausibles (les commentaires seront mis à jour au fur et à mesure de mon avancée dans les lectures).

Les réformes ratées du président Sarkozy, de Cahuc et Zylberberg : pas encore commencé.

Les stratégies absurdes : comment faire pire en croyant faire mieux : livre très agréable, sur un sujet important. A partir d’études économiques, d’anecdotes, d’études de cas, l’auteure, Maya Beauvallet (spécialisée sur les questions d’incitations) montre comment la mise en place de systèmes d’incitations à la performance quantitatifs peut conduire à l’exact opposé des objectifs poursuivi. La loi des conséquences inattendues, la loi de Goodhart, et parfois les aphorismes des shadoks, viennent à l’esprit en lisant ce livre. On pourra lui reprocher d’être parfois un peu répétitif, une fois qu’on en a compris l’idée générale. Mais ce livre vous fera comprendre plein de problèmes très concrets et souvent négligés, et accessoirement, vous fournira une mine de sujets de conversation originaux le soir à l’apéro.

Le grand trucage : comment le gouvernement manipule les statistiques est d’un genre plus austère. Rédigé par un collectif de fonctionnaires de la statistique publique, sous le nom de plume de Lorraine Data, ce livre est une collection de 7 essais montrant la façon dont le débat public est biaisé depuis une dizaine d’années, par la façon dont le gouvernement manipule les statistiques, utilise des chiffres non pertinents, casse les thermomètres, pour donner l’illusion de son efficacité, et pour jeter le discrédit sur les statisticiens qui s’obstinent à vouloir essayer de décrire les choses comme elles sont – on sent la rancoeur de fonctionnaires globalement intègres et servant de boucs émissaires dans ce livre. Très précieux pour comprendre les débats récents (pouvoir d’achat, délinquance, chômage, immigration, entre autres).

Against the gods : the remarkable history of risk : cela fait longtemps que je devais lire ce bouquin, qui ne déçoit pas, en racontant l’histoire parallèle de la finance et des probabilités et la façon dont ces connaissances ont changé la société. Un classique, parfois pas forcément très clair (il vaut mieux avoir quelques notions de base pour suivre certaines explications).

The myth of the rational voter est dans ma pile de livres à lire depuis sa sortie. C’est temps de le lire.

The myth of the rational market : j’ai eu envie d’acheter ce bouquin après avoir écouté le podcast qui lui est consacré sur econtalk. Pas encore commencé.

Create your own economy de T. Cowen est tout simplement excellent. Il embrasse la culture, l’art, l’internet, l’autisme, dans un panorama remarquable, à la fois clair et qui donne à réflechir sur l’évolution du monde. Un must-read absolu.

Fool’s Gold de Gillian Tett : je suis en train de le lire. Ce livre explique la crise financière en montrant comment sont apparus les dérivés de crédit, à partir du portrait de l’équipe de J.P Morgan qui a créé une bonne part de ces produits. Pour l’instant (un tiers du bouquin) c’est remarquable. Malgré un style journalistique un peu exaspérant parfois, l’auteur (qui travaille de longue date au Financial Times) montre que pour vraiment comprendre ce qui s’est passé dans les banques, rien ne vaut un diplôme de sociologie. Chaudement recommandé, l’un des meilleurs livres sur la crise financière pour l’instant.

J’ai quelques autres livres dans la pile, mais ce sera pour plus tard.

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Alexandre Delaigue

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26 Commentaires

  1. Merci pour cette liste. J’attends avec impatience le livre de T.Cowen. Cahuc est passé à la radio récemment pour parler de son livre, mais je n’ai pas le lien sous la main. On peut faire d’autres suggestions?

    Prisoner of the state : journal secret de Zhao Ziyang (déjà signalé dans le forum)

    Good money, de George Selgin. C’est de l’histoire et de l’économie, sur un épisode jusque là peu étudié de production de monnaies privées en Angleterre. Pour devenir incollable sur la loi de Gresham et ses conséquences pratiques!
    gigapedia.com/items/34635…

    A qui le tour?

  2. Concernant le second livre, le robot d’Amazon fait bien les choses puisqu’il propose avec celui-ci l’ouvrage de Christian Morel, qui me semble être une référence en ce qui concerne les décisions absurdes. Ce n’est pas de l’économie, mais on voit vite ce que les catastrophes monumentales que des groupes de gens intellectuellement parfaitement compétents sont capables de faire. On comprend vite que l’économie ne doit pas être à l’écart du mouvement.

  3. Voilà 15 minutes d’interview de Cahuc sur BFM, à propos du livre "Les réformes ratées de Sarkozy" :

    http://www.touslespodcasts.com/a...

    Son message est en gros : dans le meilleur des cas, les mesures qui ont été prises depuis 2 ans ont apporté très peu d’améliorations; dans le pire des cas, elles constituent un recul par rapport à la situation antérieure (p.ex. régimes spéciaux SNCF, etc.).

  4. Ah, tiens, le Cahuc et Zylberberg, je l’avais carrément oublié. C’est injuste. Les auteurs auraient mérité une attention plus soutenue de notre part. Je vais me le procurer. Ensuite, on fera la course pour la note de lecture 😉

  5. Cherchant un livre sur la crise, j’ai lu celui de Jacques Attali, que j’ai trouvé complètement plat. Est-ce que vous pourriez nous indiquer, sur ce sujet, les livres qui vous semblent intéressants. Est-ce que le livre d’Aglietta est mieux ?

    Merci d’avance !

  6. Sur des quantités de gens censé (ou pas?), et sur l’influence des moeurs sur les grandes catastrophes il y a aussi The March of folly de l’historienne barbara tuchman. Folly being defined as "the pursuit by governments of policies contrary to their own interests". Ou l’on voit que la premiére guerre mondiale, n’eusse été un amiral prussien fan de u boot, était (presque) bien terminée, ce qui aurait évité (peut etre) la seconde etc.

    http://www.amazon.com/March-Foll...

  7. "ce livre […]vous fournira une mine de sujets de conversation originaux le soir à l’apéro."
    Le problème, lorsqu’on commence à avoir un peu trop de blogueurs dans ses fréquentations d’apéro, c’est qu’on a un peu tous les mêmes anecdotes.

  8. Moi, je dévore toutes les publications de CEPREMAP…C’est excitant, tellement bien écrit que…

  9. Deux "hasards" de lecture qui se lisent comme un roman:

    Le monde des mafias de Jean François Gayraud, Odile Jacob (existe en édition de poche!). Un quasi-polar économique remarquable bourré d’informations et assis sur une série de réflexions théoriques fort intéressante.

    Lombard Street de Walter Bagehot, Petite Bibliothèque Payot, ouvrage toujours cité comme "Le classique des classiques" quand on parle de monnaie, de banques centrales, de finances et de crise financière, mais peu lu (la preuve…), et qui vient d’être réédité en français avec une excellente préface d’Olivier Feiertag.

    Bonne lecture.

  10. Vous n’avez pas de problème de pouvoir d’achat apparemment. En achetant tous ces livres j’aurais l’impression de retirer le pain de la bouche de mes enfants.

    Vous etes en outre bien généreux avec le "Grand trucage". L’ayant feuilleté a la FNAC je suis tombé (p35/36) sur une référence a l’étude de C. Landais comme preuve absolue que l’INSEE camoufle le véritable niveau des inégalités en France.

    Landais est surement un doctorant respectable mais son papier me semble souffrir de défauts méthodologiques évidents que son directeur d’étude aurait pu relever, a moins que ce ne soit bien sur une oeuvre de sociologie au sens de JF Revel: "Une démonstration ou de glissement sémantique en glissement sémantique on abouti a ce que l’on veut démontrer."

    Réponse de Stéphane Ménia
    “En achetant tous ces livres j’aurais l’impression de retirer le pain de la bouche de mes enfants.” Personnellement, c’est la réflexion que je me suis faite récemment. Du coup, j’ai décidé de m’acheter une voiture italienne dont le prix doit couvrir de nombreuses années de lecture… Je pourrai la léguer à ma fille à ses 18 ans !

  11. Monseiur Stéphane,

    La voiture Italienne, c’est différent, il s’agit d’un investissement.

    Si vous la choisissez suffisamment chère (vous pouvez même vous endetter c’est pour la bonne cause), avec un badge commencant par F ou L, mais ni Fiat, ni Lancia, elle prendra de la valeur avec l’âge et votre fille fera partie de ces privilégiés auxquels leurs parents auront laissé autre chose que des dettes et des factures de points de retraite a payer.

    Elle pourra même la revendre pour payer ses impôts et un café crème avec la monnaie.

    Finalement tous les économistes n’ont pas un coeur de pierre.

    Réponse de Stéphane Ménia
    “La voiture Italienne, c’est différent, il s’agit d’un investissement.” Tu m’étonnes… Un vrai aimant à gonzesses. Quand je pense que pendant des années j’ai utilisé mes livres !

  12. "Vous n’avez pas de problème de pouvoir d’achat apparemment. En achetant tous ces livres j’aurais l’impression de retirer le pain de la bouche de mes enfants".

    Wahou ! dans le genre réflexion débile celle-là est pas mal. Voyez-vous, mon cher merlin, la lecture c’est aussi une forme d’investissement en capital… comment dire… culturel. C’est aussi le genre de choses que l’on peut léguer à ses enfants au travers de leur éducation, histoire qu’ils ne soient pas trop crétins, qu’ils pensent par eux-mêmes. Des choses importantes non ? Finalement, ce n’est peut être pas les économistes qui pensent le plus au blé…

    Bon sur ce, je retourne sur ma plage.

  13. Mon cher CH,

    A mon avis les céréaliers arrivent en tete de ceux qui pensent le plus au blé.

    Pour le reste vous avez raison la plage est le meilleur endroit pour se bronzer l’esprit au premier degré. Mais clairement ce n’est pas sans risques.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Franchement, je ne sais pas ce que CH se bronze, mais moi c’est pas l’esprit. Ma lecture de plage préférée, c’est le Poulpe. Ça laisse au reste du cerveau le temps de consacrer son énergie à capter les rayons du soleil de façon optimale. Mais oui, je sais, je pourrais aussi lire Gala ou la Cote, ça libère encore plus de temps de cerveau disponible. En même temps, surout pour la Cote, ce n’est pas sans risques pour sa vie. Parce que, finalement, quand on revient au taf, ce qui compte, c’est bien l’allure de superstar qu’on exhibe, bien plus que les analyses de l’évolution des indices star. Le pire, c’est que c’est même le cas à l’éduc…

  14. Merci pour ces suggestions. J’ajouterai "Sexe, drogue… et économie : Pas de sujet tabou pour les économistes !" ( 3.ly/jwW ), pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu 😉

    Merlin, je suis également grand consommateur de livres (si j’ose dire), et il est vrai que cela représente un budget non négligeable. Cependant, plusieurs solutions s’offrent à vous pour réduire la facture:
    – acheter d’occasion
    – prêter et emprunter à ses amis
    – consulter sa bibliothèque municipale
    J’espère que vous pourrez trouver les ouvrages qui vous intéressent sans vider votre bourse.

    Réponse de Stéphane Ménia
    “J’espère que vous pourrez trouver les ouvrages qui vous intéressent sans vider votre bourse.” J’allais oser le pluriel, mais oh, mince, ce n’est pas la ligne éditoriale (jusqu’à preuve du contraire…). A part ça, content de voir un autre lecteur heureux. Vous avez eu vos chapitres bonus ?

  15. Puisque stéphane a occupé l’espace de réponse, quelques éléments ici :

    – C’est vrai, les bouquins, c’est un budget… Mais bon, hériter d’un paquet de bouquins, ça a aussi son charme.

    – Sur le fond du "grand trucage" : les auteurs se bornent à constater que pour mesurer l’évolution du pouvoir d’achat, il faut un indice des prix et l’évolution des revenus. De ce fait, si les inégalités évoluent, le pouvoir d’achat aussi. Ils utilisent Landais pour constater que l’insee mesure assez mal l’évolution des inégalités (ce qui est vrai, c’est la plaie à faire) et que cela peut avoir des conséquences. Enfin, ce livre, comme souvent, est à considérer comme élément utile du débat public, ni plus ni moins.

    – Le bouquin de Cahuc et Zylberberg est très agréable à lire, et intéressant.

    – the myth of the rational voter est une excellente surprise de lecture, bien mieux que ce que je ne pensais.

  16. M. Alexandre merci pour ces commentaires.

    Je me demandais simplement si vous payez pour tous ces ouvrages ou si vous recevez des copies gratuites en tant que critique littéraire apprécié.

    Mon point sur le "Grand Trucage" était que Landais ne démontre rien du tout et que par conséquent s’y référer me donnait des doutes sur la qualité du reste du bouquin. Tout le monde me semble t il connait les limites des statistiques.

    Il me semble de plus que la mesure des inégalités, que je qualifierais de "statique", telle qu’elle est faites habituellement est généralement sans intérêt – il est difficile de s’enflammer pour un coefficient de Gini de 0,32 au lieu de 0,28 ou un P1/P9 de 3,4 au lieu de 3,00; mais je suis un utilitariste non réformé.

    J’aimerais par contre voir une étude honnête sur les inégalités de destin que je relierais instinctivement aux inégalités de statut et de capital "social" et qui me semble plus pertinentes. Je ne vois que des ouvrages de sociologues en la matière (Beaud et Pialoux par exemple) mais aucune étude d’économiste; si vous pouviez en indiquer?.

    Réponse de Stéphane Ménia
    Puisque j’ai occupé l’espace de réponse, je continue sur un point. On reçoit des bouquins. Mais si ça représente 5% de nos lectures c’est le bout du monde (et je pense que c’est surestimé). Donc, oui, il y a des dépenses de bouquins au dessus de la moyenne. Dans le cas d’Alexandre, c’est même dans le plus haut quartile (et c’est sous-estimé). Mais un conseil : la prochaine fois que vous voulez poser une question, n’en posez pas une autre. On a tellement de bouquins gratos à lire, que c’est une perte de temps. Sur le Cahuc et Zylberberg, je devrais m’y coller dans pas longtemps pour la chronique. Intéressant est bien le mot.

  17. Sur le passage sur les inégalités qui fait polémique dans le grand truquage. Les auteurs font remarquer que 1) L’Etat a supprimer au début des années 90 l’institut chargé de mesurer les inégalités, 2) La méthodologie utilisée par l”INSEE avait du mal a intégrer l’augmentation des plus hauts revenus dans ses calculs et surtout, cette méthodologie était basée sur le taux horaire dans une société où l’emploi à temps partiel a explosé.
    On peut noter une chose. On est passé d’un discours officiel où on assurait que les inégalités diminuaient en France, à,
    les inégalités sont stables,
    puis récemment à, les inégalités ont augmenté. Ceci pour la même période de référence.

    Je comprends aisément que cette nouvelle configuration en dérange plus d’un. N’oublions pas qu’il existe également une polémique larvée sur la part du travail dans le partage de la VA. Et l’INSEE est encore en première ligne dans cette affaire.

  18. La polémique larvée sur le partage de la VA n’en est pas une, je renvoie,par exemple, a un un long article de Denis Clerc dans UFAL flash 44 du 20/03/2008 ou il démoli l’argumentation d’ATTAC (il suffit de googler). Et au rapport Cotis pour ceux qui ne pensent pas que l’INSEE est a la botte du pouvoir.

    Quand aux inégalités, je ne peux que constater que ce que Landais mesure:l’augmentation relative de salaires de 3000 ménages non identifiés (sur 30 millions) et sur une période de 10 ans, sous réserve de vérification méthodologique, est probablement plus une démonstration du nouveau mode de fonctionnement de "l’ascenseur social", qu’une mesure d’inégalité (i.e. combien de footballeurs, showbiz et traders dans cet échantillon et quel est l’évolution de la cohorte d’une année sur l’autre).

  19. Merlin, vous affirmez que l’étude de Camille Landais est fausse sans l’ombre d’un argument. Pouvez vous nous fournir un lien vers un article qui permette d’émettre une telle critique?

  20. Ayant lu l’article de Landais, je n’y ai vu aucun sophisme particulier: ses conclusions rejoignent celles de Piketty pour une plus longue période; celle de Saez pour les EU, etc.

  21. Sur le livre de Cahuc, voici une critique dénichée sur cette adresse: http://www.entreprise-progres.ne...

    Pour avoir apprécié le bouquin elle me semble pas mal.Surtout, elle évite le catastrophisme ambiant. Nos politiques sont pas au top certes. mais ça avance progressivement.

  22. The myth of rationnal market est vraiment très bon (je suis en train de le lire), par rapport à ce qui s’est déjà écrit sur le sujet (le bouquin de Georges Cooper, les trucs d’Orléan ou de S.Mignot) l’interêt est vraiment l’aspect historique très fouillé, c’est vraiment l’histoire d’une idée…
    Je conseille aussi the "house of card" (plongée inside bear stearns), "panic" (ed par M.Lewis, c’est receuil d’articles de presse publié pendant toutes les crises depuis 1987, qui montre vraiment que rien ne change, jamais), et le dernier Orléans (publication du CEPREMAP) et aussi evidemment le Animal spirit de Shiller et Akerlof.

    P.S Je n’ai pas de voiture italienne, mais les livres me sont payés par ma boîte..

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