Le mythe de l’obsolescence programmée

Arte a récemment diffusé un documentaire intitulé “prêt à jeter”, consacré à l’obsolescence programmée. Le documentaire a apparemment eu un grand succès public, et la critique l’a unanimement recommandé (Telerama-Le Monde-Le Figaro). Vous pouvez visionner le documentaire en vod en suivant ce lien, et pouvez (pour l’instant) le trouver sur youtube.

Comme il m’avait été recommandé par diverses personnes, je l’ai visionné. Ce documentaire est hélas d’une nullité intégrale. Parfois hilarant de bêtise, parfois nauséabond de complotisme, en tout cas, jamais informatif.

“L’obsolescence programmée” est l’idée selon laquelle si les produits que vous achetez se dégradent rapidement (contrairement aux bons vieux produits inusables de nos grands-parents), ce n’est pas un hasard : c’est une machination ourdie par les entreprises industrielles, qui ont trouvé là un moyen de nous obliger à racheter régulièrement leurs produits. C’est une de ces idées qui tient une bonne place dans la conscience populaire, mais qui ne convainc guère les économistes, pour plusieurs raisons.

La première, c’est que l’idée du “c’était mieux avant, tout était solide, maintenant on ne fait plus que des produits de mauvaise qualité qui s’usent vite” est tellement intemporelle qu’on se demande bien quel a été cet âge d’or durant lequel on faisait des produits durables. (à l’époque de ma grand-mère bien entendu : sauf qu’à son époque, elle disait aussi que les produits de sa grand-mère étaient plus solides). Il y a là un biais de perception, le “biais de survie” : vous avez peut-être déjà vu un frigo des années 50 en état de fonctionnement (j’en connais un, pour ma part); vous n’avez certainement jamais vu les dizaines de milliers de frigos des années 50 qui sont tombés en panne et ont terminé à la décharge. Nous avons par ailleurs tendance à idéaliser le passé : je suis par exemple toujours très étonné par les fanatiques qui me racontent, des trémolos dans la voix, à quel point la 2CV Citroen était une voiture “increvable”. Dans celle de mes parents, il fallait changer les plaquettes de frein tous les 10 000 km, le pot d’échappement tous les 20 000, et elle était tellement attaquée par la corrosion (au bout de deux ans) que dès qu’il pleuvait, on avait le pantalon inondé par une eau noirâtre et gluante. Je préfère de très loin les voitures actuelles et leurs pannes d’électronique récurrentes.

Mais il n’y a pas que ces biais de survie et d’idéalisation du passé. Si les économistes sont sceptiques vis à vis de l’obsolescence programmée, c’est que cette stratégie apparemment subtile n’a en réalité aucun sens. Prenons un exemple utilisé dans le documentaire, celui des collants féminins qui filent très vite, au point qu’il faut les changer toutes les deux semaines. Si un collant coûte 4€ et dure deux semaines, à l’issue desquelles les clientes en rachètent un, elles montrent à l’entreprise qu’elles sont disposées à dépenser 104€ par an en collants. Or, fabriquer un collant très solide coûte peut-être un peu plus cher à l’entreprise, mais certainement pas autant que de fabriquer 26 collants vendus 104 euros. Elle pourrait donc réaliser un profit largement supérieur, en vendant par exemple un collant garanti un an (avec remplacement gratuit s’il se file entretemps, pour rassurer les clientes) pour une centaine d’euros.

Bien sûr les choses ne sont pas si simples, et en pratique, beaucoup des produits que nous achetons ne sont pas particulièrement durables. Il peut y avoir deux raisons à cela. La première tient aux contraintes de la production. La durabilité est une qualité désirable; mais il y a d’autres, nombreuses qualités désirables, comme un faible coût de production, ou des caractéristiques spécifiques. Pour rester sur l’exemple des collants, on a supposé au dessus que faire un collant de durée de vie d’un an ne coûte pas cher. Ce n’est pas certain : si faire 26 collants durant deux semaines coûte au total moins cher qu’un seul collant durant un an, alors, il est préférable de fabriquer les produits moins durables – et les consommatrices soucieuses de leur pouvoir d’achat pourront préférer ceux-ci. Si pour que les collants soient durables, il faut qu’ils aient l’apparence de bas de contention, je connais beaucoup de femmes qui préféreront d’autres modèles moins solides.

Un fer à vapeur sous pression est moins durable que le vénérable fer en fonte qui ornait la cuisinière de mon arrière-grand mère; faire passer de la vapeur sous pression dans des pièces métalliques provoque une usure bien plus rapide. Il est aussi nettement plus pratique à utiliser. Une poele recouverte de téflon est moins durable qu’une casserole en cuivre massif; elle est aussi moins coûteuse, et bien plus commode. Comme nous sommes des enfants gâtés par la société de consommation, nous voudrions que tout soit à la fois durable, esthétique, pratique, et peu cher. A la fin du 19ième siècle, les marines européennes avaient cherché à produire des bâtiments de guerre à la fois rapides, dotés d’une énorme puissance de feu, et d’un gros blindage. Mais qui dit blindage et armements dit poids élevé, ce qui nuit à la manoeuvrabilité et à la vitesse. Tout problème d’ingéniérie nécessite d’optimiser entre différentes qualités incompatibles. Bien souvent, la réparabilité ou la durabilité passent au second plan, derrière d’autres qualités, comme le prix. Produire en grande série standardisée permet de réduire considérablement les coûts; réparer est un artisanat qui coûte très cher, parce que dans nos pays développés le travail coûte cher.

A côté de produits peu durables, il est également possible de trouver des produits très durables, mais chers. Un costume sur mesure fait chez un tailleur sera plus beau, conçu avec des tissus de bien meilleure qualité que le bas de gamme que vous trouverez dans le premier magasin venu: il sera aussi beaucoup plus cher. Certaines marques ont fait de la durée de vie élevée leur principal argument commercial (briquets Zippo garantis à vie, piles Duracell et leur lapin qui dure longtemps, voitures japonaises ou coréennes garanties 5 ans, chaussures Church qui durent toute une vie…) ce qui montre que faire des produits à longue durée de vie n’est certainement pas rédhibitoire pour les profits, bien au contraire. Simplement, la durée de vie n’est pas l’unique qualité désirable dans un produit.

Et cette optimisation entre des qualités concurrentes rencontre les aspirations, elles-mêmes variées, des consommateurs. Une observation modérée de mes semblables de sexe féminin m’a ainsi permis de constater que nombre d’entre elles changent très régulièrement de tenue vestimentaire, et qu’elles semblent y attacher beaucoup d’importance. Dès lors, il ne me semble pas absurde d’envisager qu’elles préfèrent acheter 26 paires de collants dans l’année – ce qui permet d’en avoir des différentes – plutôt que de porter toujours les mêmes à longueur d’année. Ce sont peut-être des dindes écervelées qui ont le cerveau lavé par la presse féminine et les diktats de la mode; plus probablement, elles font de leur tenue vestimentaire une façon de manifester leur goût et leur charme.

Et c’est la seconde raison qui explique pourquoi les produits ne sont pas toujours très durables; soumis au choix entre des produits durables et des produits rapidement obsolètes, nous avons souvent tendance à préférer les seconds. Nous aimons la variété et la nouveauté. Consommer n’est pas seulement satisfaire un besoin utilitaire; c’est aussi une source de satisfaction, de démonstration de diverses qualités personnelles à notre entourage. On peut qualifier ces sentiments de frivoles, se moquer de ces gens qui vont se ruer sur un Ipad 2 dont ils n’ont rien à faire; mais constater aussi que les sociétés qui ont voulu substituer à ces caractéristiques humaines la stricte austérité (ha, le col Mao pour tout le monde) n’étaient pas particulièrement respectueuses des libertés, ou de la vie humaine. Et noter que jamais personne ne vous a obligé à acheter quoi que ce soit. Il y a évidemment une pression sociale; et parce que le marché ne peut pas toujours satisfaire tout le monde, nous sommes obligés parfois de nous conformer aux modes de consommation de la majorité, à contrecœur.

Comme vous le voyez, il y aurait largement de quoi nourrir un excellent documentaire, instructif, autour de la question de la durée de vie des produits. Hélas, vous ne trouverez strictement rien de tout cela dans le documentaire d’Arte.

Le documentaire commence par un vieux canard qui ressort à intervalles réguliers : les ampoules électriques. Dans les années 20, un cartel entre producteurs d’ampoules aurait cyniquement établi une entente pour réduire la durée de vie des ampoules électriques à 1000 heures de fonctionnement, alors qu’auparavant, il n’était pas rare de fabriquer des ampoules de durée de vie largement supérieure. Un cartel, voilà qui éveille tout de suite l’attention de l’économiste. Comment fonctionnait-il? Comment empêchait-ils ses membres d’adopter un comportement opportuniste (par exemple, en vendant des ampoules de plus longue durée que les autres, ou des ampoules moins chères)? Le documentaire est muet sur cette question. Tout au plus est-il question d’amendes pour les membres fautifs et de “partage de technologies”. Et d’interminables minutes sur un bâtiment public au fin fond des USA dans lequel une ampoule brille sans discontinuer depuis un siècle, d’une lueur un peu pâlotte, mais qui fait l’admiration des habitants qui organisent des fêtes anniversaire de l’ampoule (on se distrait comme on peut).

Un commentateur chez Aliocha permet de trouver la clé du mystère. Concevoir une ampoule électrique est un problème d’optimisation entre diverses qualités : la luminosité, la consommation, la durée de vie, la couleur. On pourrait ajouter qu’il y a de nombreux problèmes de standardisation : les culots d’ampoule doivent être identiques pour pouvoir passer d’une marque à l’autre; les couleurs doivent être identiques (un lustre avec des ampoules de luminosité différente est très laid et inconfortable, comme chacun peut le constater depuis que le Grenelle de l’environnement nous impose des ampoules à basse consommation qui n’éclairent pas), etc. Il n’est donc pas absurde que les entreprises du secteur aient coopéré pour établir des normes.

Mais comme on le sait depuis Adam Smith, des gens du même métier se rencontrent rarement sans que cela ne se termine par une conversation sur les moyens d’augmenter les prix; et le cartel en question, en plus d’établir des normes, a aussi réparti les zones géographiques entre producteurs, afin de s’assurer à chacun de confortables rentes de monopoles. Le cartel en question a donc fait l’objet de sanctions des autorités antitrust; on peut noter que si le rapport sanctionne les accords sur les prix, il montre que la durée de vie de 1000 heures est un compromis technique entre diverses qualités, et pas une tentative pour escroquer les consommateurs. Une information que bien entendu, le documentaire n’évoque pas.

Poussant vers les années 30, le documentaire nous fait le portrait d’un américain, Bernard London, présenté comme le “père spirituel” de l’obsolescence programmée, pour avoir écrit un pamphlet en 1932 intitulé “sortir de la crise par l’obsolescence programmée“. La lecture de ce document, en fait, n’indique rien sur l’opportunité d’une stratégie des entreprises pour inciter les consommateurs à remplacer leurs produits; la préconisation de l’auteur est celle d’une vaste prime à la casse obligatoire, portant sur tous les produits manufacturés, l’Etat rachetant de façon obligatoire tous les produits à partir d’une certaine durée prévue à l’avance. Une idée économique stupide, mais dans le désarroi provoqué par la déflation et 25% de chômeurs en 1932, celles-ci étaient légion. Alors qu’un quart de la population américaine ne parvenait pas à se nourrir, le gouvernement américain payait les fermiers pour qu’ils abattent leurs troupeaux de vaches, afin de faire remonter le prix du lait. Nous savons aujourd’hui qu’il suffisait de sortir de l’étalon-or et d’appliquer une politique monétaire non-suicidaire pour se sortir de la crise; à l’époque, on ne le savait pas, et on assistait au grand concours des idées farfelues. Nous n’avons pas tellement changé, mais nous avons moins d’excuses.

Surtout, après de longues minutes à interviewer la fille de l’associé du Bernard London en question, le documentaire nous explique que ses brillantes idées n’ont jamais été appliquées, ce qui conduit à se demander pourquoi diable on nous en a parlé. Surtout, pourquoi le documentaire insiste aussi lourdement sur le fait que Bernard London était juif, pour conclure mystérieusement sur “nous ne saurons jamais s’il voulait aider les gens ou simplement faire du profit”. C’est vrai, quoi, les juifs, ils ont toujours des arrière-pensées; Et puis, une bonne théorie du complot qui n’a pas son juif de service ne sera jamais totalement satisfaisante. (22ème à la 25ème minute).

Poursuivant dans les années 50, le documentaire nous montre les débuts de la société de consommation, plaçant l’obsolescence programmée au coeur du système. Il montre une école de design dans laquelle on explique aux étudiants que les produits n’ont pas forcément vocation à être durables (ce qui, si vous avez lu ce qui précède, tombe sous le sens : c’est le métier de designer que de concevoir des produits qui optimisent les différentes caractéristiques) pour s’indigner de ce comportement “non éthique”. Les designers sont opposés aux ingénieurs, que l’on présente comme scandalisés parce qu’on les obligeait à concevoir des produits moins durables que ce qu’ils auraient pu faire.

Ce passage m’a irrésistiblement rappelé cette phrase de J.M. Folz, ancien PDG de Peugeot, qui a déclaré un jour “qu’il y a trois façons de se ruiner : le jeu, les femmes et les ingénieurs. Les deux premières sont les plus agréables, la troisième est la plus sûre”. Il entendait par là que ce que les ingénieurs aiment concevoir n’est pas toujours ce que les clients désirent, et qu’à trop suivre les ingénieurs, on finit par faire des produits hors de prix et qui n’intéressent pas les clients (ayant dirigé Citroen, il savait de quoi il parlait). Etant donnée la mentalité des ingénieurs dans les années 50, il est fort probable qu’ils n’ont pas apprécié de perdre une partie de leur pouvoir dans les grandes entreprises industrielles au profit des services de design et de marketing, et regretté de ne plus pouvoir fabriquer ce qui leur plaisait. Il est certain que tout le monde, consommateurs et entreprises, y a gagné.

C’est vers la 45ème minute que le reportage nous offre son plus beau moment surréaliste. C’est qu’il y avait une alternative à la consommation jetable caractéristique de nos sociétés modernes; elle se trouvait derrière le rideau de fer. Là bas, on trouvait des ingénieurs soucieux de produire de la qualité, des produits éternels. Une entreprise d’électricité est-allemande avait même conçu une ampoule électrique de bien plus longue durée que ce que l’on trouvait à l’Ouest; dans le bloc communiste, on produisait pour durer. J’ai eu du mal à réprimer mon hilarité, me souvenant des multiples blagues de la RDA, dont les habitants ne manquaient pas de moquer la piètre qualité de leur production nationale (vous savez comment doubler la valeur de revente d’une trabant? En faisant le plein). Je me souviens aussi que la meilleure façon de faire pleurer un habitant des pays de l’Est, à l’époque, était de lui faire visiter un supermarché occidental (expérience vécue). Etrangement d’ailleurs, lorsque le rideau de fer est tombé, la première chose que les allemands de l’Est ont faite a été de se ruer sur les biens de consommation fabriqués à l’Ouest; l’horrible société consumériste leur semblait manifestement plus attrayante que leurs propres produits. Quant aux usines Est-Allemandes, elles étaient tellement efficaces qu’elles ont toutes dû fermer. Le documentaire suggère à demi-mot que les industriels de l’Ouest ont voulu se débarrasser de ces compétiteurs redoutables, peu au fait du grand complot pour obliger les consommateurs à acheter sans cesse.

A ce stade, on se demande s’il faut rire ou pleurer face à ce spectacle lamentable. Le reportage se termine sur les problèmes de durée de vie des premiers Ipods, dont la batterie (impossible à changer) avait fâcheusement tendance à tomber en rade au bout de 18 mois de fonctionnement. Là encore, aucune autre explication qu’un sinistre complot pour exploiter le consommateur n’est fournie. Il est fort possible qu’Apple ait négligé la durée de vie au profit du design et de contraintes de fabrication; ils sont coutumiers du fait, mais les acheteurs de produits Apple semblent vouloir obstinément acheter leurs produits hors de prix, mais tellement jolis. Le principal plaignant, après qu’une avocate lui ait fait bénéficier d’un système judiciaire américain toujours prêt à faire payer des indemnités par les grandes entreprises pour tout et n’importe quoi, ne s’est d’ailleurs pas privé de se racheter un Macbook à 2000 dollars par la suite (son cerveau ayant été probablement lavé pour qu’il ne voie pas les ordinateurs portables concurrents, vendus deux fois moins cher et avec des batteries amovibles).

Le fil rouge du reportage se termine – un espagnol ayant essayé, très difficilement, de réparer son imprimante à jet d’encre parce qu’il ne voulait pas en changer, suivant les conseils des vendeurs lui suggérant plutôt d’en acheter une neuve pour une trentaine d’euros. Sa situation est mise en abîme avec celle du Ghana, qui reçoit par containers entiers du matériel informatique jeté dans les pays développés. Le documentaire insiste lourdement sur le parallèle entre ces africains sages qui ne gaspillent pas, par opposition à ces occidentaux gaspilleurs qui mettent leur matériel à la poubelle à la moindre occasion. Là encore, l’explication économique est simple. Comme le montre l’exemple de l’espagnol essayant de réparer son imprimante, réparer certains matériels consomme énormément de temps; au Ghana, récupérer des choses utilisables dans le matériel informatique jeté prend aussi énormément de temps de travail, occupant des familles entières sur des décharges. cela ne représente aucune sagesse africaine particulière; dans nos pays développés, les produits fabriqués en grande série ne coûtent pas cher, parce que nous disposons d’un immense capital productif; par contre, le travail est très cher. La situation est inverse dans les pays en développement. Résultat? Chez nous il est bien moins coûteux de racheter du matériel neuf que de consacrer du temps de travail à le réparer. Au Ghana, le travail est abondant et ne coûte (et ne rapporte) presque rien. Le documentaire se garde bien de demander à ces gens qui passent leurs journées à farfouiller dans des ordures quelle existence ils préféreraient : la réponse n’aurait pas cadré avec le ton général.

A la fin de ce document manipulateur, complotiste, qui n’explique rien, on se demande comment on en arrive à réaliser une chose pareille. L’explication est en filigrane dans le document, qui nous montre avec des trémolos dans la voix off des conférences sur la décroissance, et qui donne la part belle à Serge Latouche, le grand prêtre du mouvement. On comprend alors que nous ne sommes pas face à une entreprise d’information, mais à une entreprise de morale, selon le concept défini par le sociologue Howard Becker. Le but du documentaire n’est pas d’informer, mais de convertir les mécréants. C’est ce qui conduit la réalisatrice à nous vanter les collants indestructibles, sans une seconde confronter son propre comportement de consommatrice à son discours.

Ce qui est plus étonnant, c’est de voir l’unanimité de la critique journalistique et des responsables d’Arte, qui ont gobé sans sourciller et applaudi à un documentaire qui est une énorme faute professionnelle. De journalistes, de documentaristes, on attend qu’ils nous informent de la façon la plus intègre possible. Que l’objectivité absolue soit impossible à atteindre, soit; mais elle est le standard d’éthique professionnelle qui devrait guider ceux qui nous informent. A préférer les entreprises de morale aux entreprises d’information, il est à craindre que la profession journalistique soit en bonne voie d’obsolescence programmée.

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Alexandre Delaigue

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5 Commentaires

  1. Votre démonstration est intéressante mais assez différente de mon ressenti et expérience personnelle.
    Je mettrai de coté la piètre qualité du reportage, si on devait discrédité un sujet sur le seul principe qu’un journaliste en a parlé n’importe comment…

    Par contre je me souviendrai toujours de ce cours de prépa (filière PTSI-PT, la plus technologique des quatres) où nous regardions un plan de machine à laver, avec des ajustements serrés et du traitement thermique sur les parties supportant les plus grands efforts, du fait du balourd de ces machines.
    Le prof, à la fin de l’analyse, nous a annoncé que le plan datait d’il y a 20-30ans (je ne me souviens plus exactement) et qu’aujourd’hui nous n’en ferions pas autant : les usinages nécessaires à des ajustements si serrés coutent chers, et ajouta aussi, qu’en chine, on ne s’encombre plus des traitement thermiques (et pour avoir eu de nombreux amis ayant travaillé là bas, ça ne m’étonne guère). Et que bien évidemment, tout ça coûte moins cher à produire (ce qui n’est pas forcément un mal ceci dit, je vous remercie d’ailleurs au passage de perpétuer l’idée qu’un ingénieur est idiot et ne sait pas se préoccuper des réalités du marché).

    Le problème se situe dans le fait… que ces machines à laver n’ont pas vraiment baissé de prix en fait. Par contre si vous regardez les gains des actionnaires… on a une petite idée d’où est passé la différence. Même si, imbéciles d’ingénieurs que nous sommes, nous ne comprenons rien aux affaires de mains invisibles et des arcanes compliquées de la finance.

    De plus, on peut même aller plus loin, comme la pression des actionnaires sur certaines entreprise comme l’automobile qui exigeaient 5% de rendement en plus par année. Les premières années on optimise la technique, ensuite on la dégrade, puis après on dégrade la masse salariale et les conditions de travail. Là encore, je ne parle pas via les média ou autre, juste un ensemble de retours, de comparaison diverses, depuis que je suis tout petit.

    Là où vous avez raison, c’est que le consommateur est le responsable. C’est vrai. Après, il est évidement qu’on ne fait rien pour l’aider. Surtout pas. Pourtant un indice de réparation et de recyclage serai aisément calculable et ne nécessiterai pas beaucoup d’effort à être affiché. N’importe quel ingénieur sait aussi que si on ne met pas les ajustements et les traitements thermiques nécessaires au bon fonctionnement (calculés selon des formules bien définies), on diminue la durée de vie. Prenez donc la formule pour dimensionner les roulements à billes par exemple, la durée de vie (cycles) y est une constante.
    Ce n’est pas une inconnue. Et c’est la réalité de tout ingénieurs.

    Là où l’obsolescence programmée existe, c’est qu’on le cache au consommateur. Il n’a aucuns moyen de savoir si la machine à laver qui coute deux fois plus cher durera plus de deux fois plus longtemps. Pourtant, à la conception on le sait parfaitement.

    Une législation pourrait imposer l’affichage de ce genre d’informations. Tout comme le coût carbone par exemple. Et permettrai au consommateur de réellement choisir entre payer plus cher pour du durable ou non. Et là, vous pourriez crier à la fumisterie. Mais pour moi, ce n’est pas encore le cas aujourd’hui.
    Aujourd’hui on fait de la conception de merde en la présentant comme le top du top, et le consommateur n’a aucuns moyen de se défendre. Et vous ne me ferez pas croire que c’est pour son bien.

  2. Cet article est intéressant à plus d’un titre, mais me fait sourire par son côté hyperbolique et emporté (mention spéciale au “Ce documentaire est […] parfois nauséabond de complotisme” : j’ai bien ri). Répondre à une presse en pleine dérive sur le même ton n’est pas l’idéal, je pense.
    Bref, merci quand même pour cet article qui remet pas mal de choses en place !

  3. bonjour,
    je me permet d’apporter une modeste contribution à cet article. dans le domaine médical, l’obsolescence programmée ça existe et c’est même voulu…..par les patients! je m’explique : une aiguille d’aujourd’hui est très fine, donc “pique” mieux et on la jette ensuite pour des raisons évidentes de stérilité. Il y a 50 ou 60 ans, on avait des aiguilles plus grosses, qu’on pouvait éventuellement re-stériliser. on voit par là que le produit jetable est plus efficace que le produit durable. et dans la médecine des exemples comme ceux-là sont légions…..à méditer pour les tenants du “c’était mieux avant”.

  4. Bonjour,

    Ce message est un peu en retard par rapport à la date de parution de votre article, cependant mes concernes sont actuelle.

    Je travaille dans un syndicat de traitement des déchets, nous travaillons sur la réduction des déchets et un de ces volets et de promouvoir la réparation en lieu et place du jetable.

    J’ai eu l’occasion de regarder le documentaire “prêt à jeter”, qui a le mérite de nous faire réfléchir à la question. Voulant utiliser ce documentaire pour parler de ce sujet avec des lycéens, j’ai décidé de creuser un peu la question et de trouver des avis sur le documentaire.

    Votre critique est ressorti régulièrement dans ma recherche et c’est donc avec intérêt que je l’ai lu. Vos opinions peuvent me convaincre d’autre beaucoup moins.

    Mon problème et le suivant, je ne trouve pas forcement d’autre documentaire sur le sujet “obsolescence programmé” ou pas, qui pourrait être utilisé à des fins pédagogiques.

    Certes votre article va me permet d’avoir des éléments pour faire prendre du recul au élèves par rapport au documentaire. Mais si vous connaissez des documentaires plus approprié je vous serai reconnaissance de me venir en aide.

    Cordialement,

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