La question et sa réponse

Qu’est-ce qu’une zone monétaire optimale ?

Rédacteur : Stéphane Ménia

Qu’est-ce qu’une zone monétaire ?

On peut définir (notamment en référence à l’euro ou au dollar américain) une zone monétaire comme un ensemble (régions ou pays) qui utilise la même monnaie, dont l’émission est assurée par une banque centrale unique. Mais on peut aussi considérer une zone monétaire comme un ensemble qui adopte un régime de change fixe sans ajustements possibles (pas de dévaluation ou de réévaluation possible).

Pourquoi adopter une monnaie unique ?

L’extension d’une zone monétaire apporte des avantages en rapport avec la fonction d’instrument des échanges de la monnaie. Plus une monnaie couvre un large territoire, plus le coût d’usage de la monnaie est faible car elle permet de réaliser un grand nombre de transactions.

Mais plus une zone est large, plus les conditions économiques des différentes parties la composant risquent d’être différentes. Ce qui pose un problème en termes de politique monétaire, puisqu’il sera de plus en plus difficile de mener une politique monétaire adaptée à des conditions locales diversifiées.

L’importance des types de chocs qui affectent l’économie est fondamentale. Lorsque les déséquilibres rencontrés par certains pays sont différents de ceux d’autres pays de la zone (on parle de chocs asymétriques), une politique monétaire commune aura un effet stabilisant sur les uns, mais déstabilisant sur les autres. En revanche, lorsque les chocs sont identiques (symétriques), la politique monétaire unique pourra les corriger.

Exemple : on raisonne dans le cadre d’une zone monétaire avec deux pays A et B. Imaginons que A soit en situation d’inflation (demande globale excédentaire) et B en situation de chômage (offre globale excédentaire). Une politique monétaire expansive accentuera la surchauffe en A, tout en réduisant le chômage en B. une politique monétaire restrictive aura un effet inverse : accroître le chômage en B et réduire l’inflation en A.

Quels sont les critères d’optimalité d’une zone monétaire ?

Pour que les chocs soient absorbés dans la zone et que chaque pays revienne à un équilibre macroéconomique entre offre et demande globale, il faut que certaines conditions soient réunies. Si ces conditions existent, la zone monétaire est qualifiée de « zone monétaire optimale ». Les économistes ont défini plusieurs critères d’optimalité. Charles Wyplosz et Richard Baldwin résument ces critères de la façon suivante.

La mobilité du travail

Ce critère est dû à Robert Mundell. Dans le cas de deux pays (A et B), on suppose que A produit un bien 1 et B un bien 2. Si un choc de demande occasionne une baisse de la demande pour le bien 1 et une hausse de celle du bien 2, un déséquilibre des échanges apparaît : A est en déficit et du chômage apparaît, B en excédent et l’offre de travail est insuffisante. Si les travailleurs migrent de A vers B, l’équilibre sur les marchés du travail des deux pays se rétablit. Il en va de même en ce qui concerne les échanges extérieurs. La demande du bien 2 augmente en B quand les travailleurs de A y arrivent. Ce qui réduit les exportations de ce bien et rééquilibre la balance courante.

La différenciation des biens

Ce critère a été avancé par Peter Kenen. Si A et B produisent des biens proches et ont une structure productive diversifiée, la plupart des chocs de demande seront symétriques et de faible ampleur. Ils seront symétriques parce que lorsqu’un secteur est touché en A, le même secteur est touché en B. ils seront de faible ampleur, parce qu’une structure de production diversifiée limite l’impact d’un choc sectoriel particulier.

L’ouverture

Pour Ronald Mc Kinnon, des pays très ouverts et qui commercent beaucoup entre eux forment une zone monétaire optimale. L’intensité des échanges et de la concurrence entre les pays de la zone conduit à une harmonisation des prix. Tout changement du prix des biens dans un pays se traduit par une modification rapide des prix dans l’autre pays. Les ajustements se font de la même manière que les deux pays soient en change fixe ou flexible.

Les transferts fiscaux

Peter Kenen développe l’idée qu’un choc de demande négatif asymétrique en A peut être neutralisé si B peut opérer un transfert fiscal en faveur de A. Il soutient la demande en A et limite la surchauffe en B. La situation inverse pouvant être envisagée. Une zone dans laquelle les membres peuvent opérer des transferts budgétaires est une zone monétaire optimale.

Des préférences homogènes.

Dans une zone monétaire optimale, les membres doivent partager la même vision de la façon de répondre à un choc donné. Si, par exemple, les membres ne s’entendent pas sur le couple inflation-chômage optimal, la conduite de la politique monétaire sera perturbée par des conflits.

Une communauté de destin

La politique monétaire commune peut avoir un coût pour certains pays alors qu’elle stabilise d’autres pays. Si les pays qui subissent le coût l’acceptent, au nom d’une solidarité au sein de la zone, alors on est en présence d’une zone monétaire optimale.

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