Souvenez-vous : il n’y a pas si longtemps, dans une galaxie toute proche d’ici, commençait une de ces guerres qui font les délices des économistes : une guerre des standards pour définir celui des DVDs haute définition, entre le HD-DVD promu par Microsoft et Toshiba, et le Blu-Ray, créé par Sony. Il semble que la guerre soit finie, et que Sony l’ait emporté.
La raison de la victoire? Warner a décidé de ne commercialiser ses futurs DVD haute définition que sous format Blu-Ray. Au total, suite à un changement d’avis d’autres studios (qui avaient signé pour le HD-DVD, mais avec une clause leur permettant de changer d’avis suite à la décision de Warner) le Blu-Ray représente désormais 70% des films hollywoodiens. Certes, le HD-DVD était bien parti, en obtenant le soutien de l’industrie qui avait largement contribué au succès du VHS contre le Betamax pour les cassettes video : l’industrie pornographique. Mais dans ce secteur, les ventes ont été décevantes. En raison à la fois de la concurrence du porno gratuit sur internet, mais apparemment aussi du fait que ce genre de spectacle ne se prête guère à la haute définition : parfois, un trop grand luxe de détails semble tuer le charme.
Dans ces conditions, il devient fort peu probable que le HD-DVD puisse s’imposer, et sous réserves de grandes surprises, le Blu-Ray va s’imposer.
Qui sont les gagnants et les perdants? Les perdants sont clairement Microsoft (pour la partie logicielle des lecteurs) et Toshiba, qui ont consenti d’énormes investissements en pure perte. Le gagnant industriel est Sony, qui touchera des royalties sur chaque lecteur vendu, qui va peut-être voir les ventes de la Playstation 3 (dotée d’un lecteur Blu-ray) s’élever. C’est la caractéristique des guerres de standards : le perdant perd tout ce qu’il a mis, le gagnant emporte tout.
Les consommateurs aussi sont gagnants : ils vont enfin pouvoir savoir quel lecteur acheter s’ils veulent voir des films en haute définition. On peut donc s’attendre à une baisse des prix des lecteurs au fur et à mesure que le produit se diffuse.
Cette victoire est-elle vraiment importante? Probablement pas. Il est peu probable que le DVD haute définition conduise au même genre de succès que les lecteurs DVDs, parce qu’il existe déjà des concurrents techniques, comme la vidéo à la demande ou le téléchargement direct de films. En tous les cas, une page supplémentaire vient de s’ajouter à la longue histoire des guerres de standards.
- William Nordhaus, Paul Romer, Nobel d’économie 2018 - 19 octobre 2018
- Arsène Wenger - 21 avril 2018
- Sur classe éco - 11 février 2018
- inégalités salariales - 14 janvier 2018
- Salaire minimum - 18 décembre 2017
- Star wars et la stagnation séculaire - 11 décembre 2017
- Bitcoin! 10 000! 11 000! oh je sais plus quoi! - 4 décembre 2017
- Haro - 26 novembre 2017
- Sur classe éco - 20 novembre 2017
- Les études coûtent-elles assez cher? - 30 octobre 2017
J’ai du mal à comprendre comment vous pouvez écrire que "les consommateurs aussi sont gagnants". Ne voit-on pas dans "la guerre des standards" une illustration de l’idée selon laquelle la concurrence n’est pas toujours bénéfique aux consommateurs.
Les coùts élevés de recherche/développement et de publicité/marketing sont ici multipliés par 2 (voire plus si on considere qu’il faut surenchérir pour gagner la guerre). Selon vous, les seuls perdants sont les entreprises. Si il y avait coopération, les prix ne seraient pas inférieurs? La qualité serait-elle forcément moins bonne car aucune incitation à innover?
Qu’en pensez-vous?
Vous avez raison, j’ai été trop rapide. Ce que je voulais dire c’est que le fait que la guerre des standards se termine bénéficie aux consommateurs : en soi, effectivement, la guerre a plutôt des effets négatifs et conduit à des gaspillages.