Hausse des prix : seconde brève

En exclusivité nationale, le blog d’Econoclaste vous révèle le nom du responsable de la hausse du prix du lait. La presse unanime, les associations de consommateurs, la classe politique française, qui se déchaînent en rodomontades, ont besoin d’identifier le coupable, qu’ils ont visiblement du mal à trouver, puisqu’aucun n’évoque son nom. Pourtant, il n’y a pas à chercher bien loin. Cliquez sur la suite pour connaître ce dangereux sabordeur du pouvoir d’achat des français. Le coupable est…

… Michel Barnier, ministre français de l’agriculture.

Soyons juste, il a de nombreux complices, tous ensemble pour maintenir le mécanisme des quotas laitiers dans l’Union Européenne, et pour limiter au maximum toute hausse de ces quotas, qui permettrait d’élever la production, afin que les prix baissent. Les détails par ici. Il n’y aurait pas de meilleur moment, alors que le prix du lait flambe, pour supprimer ce système imbécile qui empêche les régions productrices de lait les plus performantes de l’Union Européenne d’augmenter leur production. Mais non. Pour supprimer ce système, il faudra attendre… 2015. Même pour augmenter d’un minuscule 2% le volume actuel des quotas, la France freine actuellement au maximum pour que cela attende le moment ou elle aura la présidence tournante de l’UE, histoire de bloquer définitivement toute réforme.

Alors qu’il y aurait des réformes évidentes. Si l’on veut soutenir la production laitière dans certaines régions ou elle est moins rentable et ou les producteurs subiraient des difficultés en cas de suppression des quotas (au hasard la Savoie, région d’origine du ministre, mais c’est sûrement une coincidence), il suffirait de créer des mécanismes de soutien aux produits de qualité, attachés à une région spécifique. Mais non. Cette soi-disant politique "intégrée", qui n’a pour résultat que de pénaliser les agriculteurs normands et bretons pour favoriser l’élevage alpin, et d’appauvrir tout le monde au passage, sera  défendue bec et ongles par nos dirigeants. Honte sur eux. Honte sur les associations de consommateurs, aveuglées par leur idéologie, qui refusent de voir ce qui pourtant crève les yeux. Honte sur les journalistes qui reprennent l’antienne des méchants distributeurs sans faire le moindre effort d’investigation. Honte sur les défenseurs de l’Europe qui sont prêts à défendre les pires bêtises, pourvu qu’elles soient estampillées "Union Européenne".

Mais quand, enfin, va-t-on supprimer la PAC?

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Alexandre Delaigue

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23 Commentaires

  1. Je cite un de mes clients, éleveur laitier : "je veux pas remplir des papiers, je veux pas des primes, je veux qu’on me paie mon lait comme on paie un travail bien fait."
    C’est sans doute du "touchant naturalisme économique" mais ça me fait plaisir 🙂

  2. Bravo pour la photo avec ‘Union Européenne’ 😉

    L’article de The Economist de la semaine dernière est en effet effarant. Rien que de savoir qu’en France tous les quotas ne sont pas utilisés faute de flexibilité dans leur distribution, ça met en rogne!

    À noter que M. Barnier a donné ce matin (25/02) une interview à M. Elkabbach sur Europe1. Je dois dire que j’avais rarement entendu autant d’âneries en si peu de temps. Pour sa défense, M. Barnier a reçu le concours de M. Lemétayer président de la FNSEA.
    http://www.europe1.fr/player/pla...
    Cela m’a semblé être un condensé… Dommage qu’il y ait un creux de 5min sur Sarko et son langage fleuri, Barnier me semblait parti sur des bases imbattables.

  3. Il y aurait un article extraordinairement similaire à faire concernant la position française défendue devant l’europe sur la politique viticole commune et notamment, son opposition à toute évolution du régime des droits de plantation avant 2014.

  4. Mais à quoi sert donc cette PAC si elle cause tant de problème à l’économie française et, j’imagine, européenne ? Dans quel but ont été instauré les quotas de lait par exemple ? Ces buts sont-ils atteints ?

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Les quotas laitiers ont été instaurés… Pour corriger les effets des subventions laitières, qui conduisaient à la suproduction. Le problème classique de l’économie administrée, qui cherche sans arrêt à réguler la production de façon aveugle.

  5. La réforme de la PAC reviendra à un suicide politique pour la majorité qui l’acceptera. Comme vous le soulignez, cela sera pourtant nécessaire…

  6. À longueur d’antenne, de blogs journaleux (pas le vôtre donc), de colonne de quotidiens bien informés, on nous serine et matraque que si le prix du pain (ça change du lait ; je vous dis pas le prix du pain au lait) augmente, c’est que le prix du blé augmente à cause de la croissance de la demande internationale. Pour moi, la Chine, c’est loin. En revanche, la France (pays producteur de céréales, sissi), j’y habite. Or, d’après l’ONIGC, les stocks français de céréales (blés, maïs, orge) augmentent (http://www.onigc.fr/pdf/FR/ca020... ; syndicat professionnel des céréaliers que l’on ne peut soupçonner de ne pas vouloir augmenter leurs "richesses"). Si j’ai bien compris la sacro-sainte loi du marché, s’il y a des stocks, c’est que l’offre est supérieure à la demande et que stocker coûte cher. Alors, pourquoi les prix augmentent, mmhh ? (à part l’effet papillon et une analyse simpliste et donc erronée de ma part, je ne vois pas d’explication).

    PS : merci pour tout ce que vous écrivez ; même si ce n’est pas simple à comprendre, ça fait du bien…

  7. vous avez parlé de "…l’aveuglement idéologique des associatiosn de consommateurs…"
    renseignez-vous sur la première d’entres elles et vous verrez que votre cliché ne tient pas. A moins que vous pensiez à un aveuglement libéral mais vu le contexte je ne pense pas. Ces assocs sont les fers de lance de la wallmartisation de l’économie en france, pour le meilleur et parfois pour le pire.

  8. La PAC à ses débuts a eu des effets positifs : en assurant un prix de vente garanti aux agriculteurs, elle a permis la modernisation des agricultures européennes, en premier lieu l’agriculture française, qui avait un potentiel énorme mais de grandes difficultés structurelles (très petites exploitations, forte population rurale, faible motorisation).

    Instauré en 62, la PAC a, dès la fin des années 60, commencé à provoquer des excédents. Et l’on s’est mis à stocker, puis à détruire de la production. Les premiers quotas sur le lait, instaurés en raison de cette surproduction, datent de 1984.

    L’on ne peut pas réformer la PAC en Europe parce que la France y est trop attachée. Et en France, le lobby agricole est extrêmement puissant. C’est paradoxal, vu le poids actuel des agriculteurs dans la population active (moins de 4%). Mais il faut se rappeler de l’importance énorme des paysans dans la construction de la république française : jusqu’à l’après-guerre, on ne pouvait gagner une élection sans les paysans. Et après, la FNSEA a pris le relais. D’où le ruralisme affiché de nos élites politiques, au moins jusqu’à Chirac.

    Maintenant, la PAC est injuste : 80% des aides vont à 20% des agriculteurs, les plus productifs, ceux qui pourraient vendre au prix du marché et n’en ont donc pas besoin. Par ailleurs, la bienveillance des pouvoirs publics est telle que, c’est admis dans tous les pays européens, quand une aide européenne a été touchée indûment, l’on est tenu de rembourser… sauf si l’on est agriculteur!
    La FNSEA est l’un des lobbys les plus puissants en France. Supprimer ou réformer la PAC, c’est illusoire.
    Par ailleurs, c’est la seule politique commune en Europe. Symboliquement, c’est bien d’en avoir une, ça fait paraître l’Europe moins hostile et plus utile.

  9. Ah oui ? Honte d abord sur l economiste qui se contente d une seule source, d une objectivité indepassable concernant la PAC 🙁

    Les faits réels s il ne sont pas forcement glorieux pour la PAC sont sensiblement différents de cette présentation faussée.
    La réalité est que la production française actuelle est inférieure aux quotas ! Les producteurs français ont abandonnés en masse la filière car la baisse des prix jamais répercutée aux consommateurs rendaient la filière non rentable.
    La CEE pourrait d ici 2 mois augmenter les quota de 2% si Barnier qui est reellement coupable de quelquechose ne bloquait pas de peur que cela profite à d autres en Europe. Et les quotas seront remis à plat cet été, esperons que les agriculteurs auront suffisamment de recul pour decider de se réinvestir dans le domaine.

    Bref la situation actuelle est un cas classique de cycle surproduction – baisse des prix – sous-investissement – baisse de production – sous-production – montée des prix que des quota et des subventions intelligentes et maîtrisées pourrait au contraire améliorer.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    La production française est inférieure aux quotas nationaux… Parce que les régions qui peuvent augmenter leur production n’en ont pas assez, et celles à qui il en reste ne peuvent pas augmenter leur production. Vous ne faites que rappeler l’inanité d’un système visant à “réguler la production” qui ne fait qu’amplifier les fluctuations de marché, d’un système qui prétend “intégrer la filière” en Europe mais qui ne fait que renforcer les égoismes nationaux. Franchement, votre commentaire ne fait qu’ajouter de l’eau à un moulin déjà bien chargé…

  10. Ca ne me pose pas un problème que mon commentaire doivent charger encore la PAC, j’apprécie très peu la PAC, l’important pour moi est que l’argumentation soit étayé.

    La question de savoir si les quota sont remplis ou non, et pourquoi ils ne le sont pas si c’est le cas, est essentielle, "The economist" n’en parle pas.

    Les modalités de révision des quota sont essentielles, "The economist" fait semblant de croire que tout est totalement figé jusqu’en 2015.

    Pour "The economist" la condamnation étant connue d’avance, il n’est pas nécessaire de se donner la peine de vérifier les éléments à charges.
    Un procureur qui procède ainsi risque peu de voir ses arguments retenus par un tribunal sérieux

    Vous pouvez citer des références pour démontrer que le problème est vraiment une mauvais répartition par région des quotas ?

    Si la source du problème (cf le monde ci-dessous) est bien la baisse de 10% du prix payé par les industriels entre 2003 et 2006 en même temps que les prix des céréales augmentaient, ça s’applique à toutes les régions :
    http://www.lemonde.fr/economie/a...

    "Relancer la production laitière en France risque de prendre plusieurs années" : Sans les quota, les capacité de production deviendraient miraculeusement plus souples ?

    A mon avis, il y a un problème dans la structure de production laitière en France, trop de petits producteurs incapables de s’adapter aux variations du marché, comme c’est indirectement reconnu dans les echos ici :
    http://www.lesechos.fr/info/agro...

    Et à la fin le coupable est probablement bel et bien la PAC qui a protégé les petits producteurs et empêché que le secteur se concentre pour devenir plus efficace, contrairement au Pays-Bas et au Danemark.

    Encore que. Pourquoi les Pays-Bas et le Danemark y sont-ils arrivés puisqu’eux aussi étaient sous le régime de la PAC ?
    Le facteur essentiel ne serait-il pas l’insanité des décision *française* plus que l’existence de la PAC ?
    Vous citez les égoismes nationaux (ici surtout l’égoïsme français), ils sautent aux yeux dans la gestion de la PAC, mais vous croyez qu’ils disparaîtraient avec elle ?
    Croyez-vous vraiment que la France prendrait de meilleures décisions agricoles sans la PAC vu que c’est elle qui a eu le poids décisif dans toute celles prises dans le cadre de la PAC ?

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Vous avez raison de souligner que le problème tient à la répartition nationale des quotas, décidée par la France; mais elle se fait elle-même dans le cadre des quotas, lui-même inadapté. Au passage, vous citez les évolutions de prix passées, mais elles-mêmes sont liées aux quotas et à leur répartition; en somme, on en revient au même point, par un biais différent. Et oui, les quotas tendent à rendre les capacités de production moins souples. Et oui aussi, la France n’a pas attendu la PAC pour avoir des politiques agricoles absurdes. Mais le problème de la PAC comme système intégré, c’est précisément d’encourager le statu quo et les mauvaises politiques nationales, d’empêcher les pressions pour leur modification. Combien de temps tiendrait une France seule à subventionner son agriculture de cette façon, dans une Europe ne le faisant pas?

  11. La PAC à l’origine ,avait pour but d’assurer l’auto-suffisance alimentaire de l’Europe,la guerre était encore proche dans les esprits et les estomacs…. De là ,le système des subventions,couplé à la "préférence" communautaire
    débouchant sur les quotas pour éviter les excédents.Comme toutes les assurances,les primes sont chères, surtout quand le danger s’éloigne, et que les prix du marché mondial sont bas.
    La situation actuelle ,même si elle ne peut s’analyser comme un état de pénurie,nous ramène aux principes fondateurs,et le maintien d’une agriculture puissante(le problème des quotas n’est pas physique ,mais juridique donc réglable) justifie à postériori les "sacrifices" consentis par les contribuables depuis 45 ans.

  12. Si vous voulez commencer à vous plonger dans les mécanismes des quotas laitiers, vous allez vous amuser.
    Le système est une augmentation maximale de 2% par an de la production nationale. Mais dans la réalité, c’est une augmentation de 2% par an aux producteurs. chaque producteur déclaré (car il faut bien occuper une administration pléthorique) reçoit un quota laitier annuel. On empêche donc les producteurs de produire librement. Ce système des 2% va très loin car c’est une obligation avec des pénalités importantes à clé si ce n’est pas respectée.

    Mais le plus fort dans l’histoire est le système de transfert des quotas laitiers. Parce que malgré l’augmentation du prix du lait, le métier d’agriculteur producteur de lait est très dur et souvent les petites exploitations y renoncent pour des produits plus faciles à cultiver et plus rentable (oui oui il y a plus rentable que le lait en ce moment). Donc certains quotas de production ne sont pas remplis. Il y a donc un droit à produire qui devient disponible. Pour organiser le transfert, il y a des chambres départementales (je ne me rappelle plus du nom exact) qui répartissent les quotas disponibles mais seulement dans le même département et en priorité pour les petites exploitations (favoriser les petites exploitations c’est maintenir un nombre élevé d’agriculteurs face à une possible concentration des exploitations comme au Danemark et comme ce sont des responsables syndicats qui dirigent la fameuse commission, c’est favorisé un nombre élevé d’adhérents au syndicat). MAis le souci de cette répartition départementale, c’est que lorsqu’un producteur de lait arrête, c’est souvent que la région ne s’y prete pas (rendement trop faible, climat difficile pour les vaches…) ou que le sol est plus propice à d’autres cutures. Donc bien souvent, les quotas ne peuvent pas être redistribuer surtout que tout est fait pour empêcher les grandes exploitations de les récupérer (pour le motif cité au-dessus) et donc de produire plus en faisant des économies d’échelle.

    Le fameux résultat est que la France a énormément de mal à atteindre son quota laitier ces dernières années, quand nos partenaires européens les dépassent et payent des amendes à l’UE.
    La position de la France dans la négo européenne marque d’ailleurs cette position avc le refus d’ouverture des quotas laitiers pour faire face à une pénurie.
    Parce que c’est de cela qu’il s’agit. Il y a eu ces dernières années un déficit de production de 3 milliards de litres de lait sur un marché de 20 milliards. Cela a fait flamber les cours car on est sur un marché de matières premières donc beaucoup plus sensible au volume de production dans la formation des prix.

  13. Je ne suis pas du tout d’accord avec votre analyse sur les quotas laitiers, pour les raisons suivantes :

    Depuis la mise en place des quotas en 1984, les prix des produits laitiers, en monnaie 2007, on baissé de 32% à la production et de 26% à la consommation ; c’est un des rares secteurs agricoles où il y a une répercussion pour le consommateur de la baisse des prix à la production. A titre de comparaison, sur la même période 1984-2007, et pour l’ensemble des produits agricoles et alimentaires, la baisse des prix à la production a été de 30% et celle des prix à la consommation de … 7% ! Un autre exemple en viande bovine (sans quotas) : production = -42% ; consommation = +6%
    Sources : SCEES et INSEE

    La fédération des producteurs de lait du Québec a montré que les prix du lait à la consommation au Canada (avec quotas) a augmenté de +7% entre 1995 et 2006 : aux Etats-Unis (sans quotas) sur la même période = +12%

    Il n’y décidément pas de corrélation entre contingentement et évolution des prix à la consommation.

    Autre chose pour l’Europe : avec la baisse du prix garanti du lait entre 2004 et 2006 (en partie compensée par une aide directe découplée, qui peux donc être perçue sans continuer à produire du lait), la production laitière a baissé car les prix à la production ont baissé. Donc si on s’amuse à baisser encore les prix à la production, rien ne garantira que le consommateur en profite (au contraire en cas de pénurie).

    Sur la gestion des quotas, le lien au foncier permet d’assurer une production équilibrée sur la majeure partie des territoires, ce qui limite l’exode rural depuis les zones difficiles (montagnes), et empêche d’importants dégâts environnementaux liés à une forte concentration (que vous appelez de vos voeux).

    NB : les prix de gros des produits industriels (beurre et poudre) sont revenus à leur niveau de 2006, avant la flambée de 2007. Et les prix à la consommation ne rebaissent pas, c’est là qu’est le problème : la concentration de l’industrie laitière (Danone+Nestlé+Lactalis), et non le système des quotas.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Ce que vous expliquez, c’est que les quotas ne sont pas les seuls déterminants des prix, ce qui est évidemment exact; il n’en résulte pas que les quotas n’ont pas d’influence, à la fois sur la structure du secteur, et sur sa capacité à réagir aux fluctuations de demande. J’ajouterai que les comparaisons entre Canada et USA sont dépourvues de sens étant donné le poids des politiques agricoles américaines, qui n’ont rien à envier aux aberrations européennes. Quant à la production “équilibrée” sur le territoire, en vertu de quel critère définissez-vous l’équilibre? La réponse gouvernementale française, c’est que l’équilibre consiste à produire du lait partout, quitte à ce qu’on n’en produise pas assez là ou il est possible d’élever la production, et que des quotas soient inutilisés. En quoi est-ce “équilibré”? Encore une fois, si l’on veut soutenir l’élevage et la production laitière en montagne, un système de quotas est une solution très insatisfaisante. Ensuite, oui, il y a un problème de concurrence dans la distribution en France, on en a largement parlé ici. Mais il résulte d’exactement la même logique que celle qui préside aux quotas : un mélange de clientélisme et d’économie planifiée.

  14. Ce que je trouve dommage c’est que vous auriez pu aborder ce sujet sous l’angle de la théorie des choix publics (problème du syndicalisme agricole), de celui de l’organisation industrielle (problème de la concentration de la filière aval) et que vous négligiez la question des externalités positives ou négatives de l’agriculture (problème du soutien à la production à la marge intensive ou ou à la marge extensive).

    Merci à Franck d’aborder ces questions de façon un peu plus nuancée.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Je revendique le droit de faire des billets énervés et pas élaborés, surtout lorsque je sais que je peux compter sur d’excellents commentateurs pour enrichir la discussion sur le sujet 🙂

  15. La PAC n’est ce pas 10 milliards d’euros de subvention par an, accordés par l’Europe a la France?

  16. Non, la comparaison USA/Canada n’est pas dépourvue de sens dans le secteur laitier : les prix à la production aux USA fluctuent beaucoup car ils ne sont pas encadrés : si les hausses se répercutent bien à la consommation, c’est moins vrai pour les baisses, ce qui fait que les prix à la consommation augmentent plus que lorsque le prix est encadré comme au Canada.

    En France, les quotas sont liés au foncier. Mais des souplesses existent : des départements perdant de la production reversent les quotas laitiers libérés dans une réserve nationale, qui réalloue ensuite ces références dans des département à fort besoin (en privilégiant l’installation de jeunes, ce qui est un autre avantage des quotas). Les laiteries ont également mis en place des systèmes régionaux ou interrégionaux de "mutualisation", qui permet de transférer des quotas morts entre entreprises. Voilà pour les souplesses du système, géré avec un certain pragmatisme, non ?

    Reste que le lien au foncier est déterminant pour éviter la déprise dans certaines zones et la concentration dans d’autres. Mais comme les économistes ne savent pas calculer les externalités positives du système pour les comparer avec les négatives (rentes de situation, pas de porte…), elles n’existent pas, ce qui est un peu court pour analyser le système des quotas.

    Et je maintiens : les quotas ne sont pas néfastes pour les consommateurs, bien au contraire. Mais vous avez raison qu’il faut piloter le système (adéquation offre/demande), et personnellement je préfère 100 fois que cela soit administré (oh ! Le gros mot) plutôt que confié à la main invisible des marchés (financiers), dont on voit tous les jours les dégâts.

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Magnifique : “les économistes” ne savent pas calculer les externalités positives, mais le ministère de l’agriculture, lui, sait. Le fait brutal, c’est que ce système fonctionne si bien qu’en période de pénurie, les quotas ne sont pas tous utilisés. La preuve indiscutable de la supériorité de l’administration sur le mécanisme de marché. C’est vrai, l’économie administrée, cela marche si bien… http://www.jourdan.ens.fr/piketty/fichiers/presse/Liberation050198.htm

  17. @ Merlin,

    Si, c’est 10 milliards d’euros par an pour la France, et plus de 25 milliards pour l’UE 27 (0,4% du PIB), si on ne compte que les aides directes aux agriculteurs. Objectivement, pour un système qui assure l’approvisionnement alimentaire sécurisé en quantité et en qualité de 62 millions de français, ce n’est pas énorme. A titre de comparaison, les assurances logement et voiture représentent une dépense de 19 milliards d’euros par an.

    La plupart des aides directes ont été mises en place pour compenser partiellement la baisse des prix garantis entreprise depuis 1992 (et qui n’a pas profité aux consommateurs) : les agriculteurs ne les demandaient pas, et c’est une dépense dont on aurait pû se passer. Exemple : en 2003 (accords de Luxembourg), la Commission UE décide de baisser les prix garantis des produits laitiers de 20% entre 2004 et 2006, et de compenser cette baisse par une aide de 35 euros/tonne, ce qui a coûté 2 milliards d’euros au budget européen. Comme les prix à la consommation ont moins baissé que ceux à la production (pour la première fois depuis 20 ans), ce sont l’industrie et la distribution qui en ont profité.

    Je me permets de citer l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique), pas spécialement un club de gauchistes altermondialistes, qui écrivait dans son rapport « se nourrir demain, perspectives à long terme du secteur agro-alimentaire », publié en 1998 :

    « Il est à craindre non seulement que les structures oligopolistiques de distribution et de transformation conduisent à des abus de pouvoir sur les marchés, mais aussi que les transformateurs et les distributeurs se taillent la part du lion dans la répartition des avantages de toute réforme à venir dans le secteur agricole. »

    Réponse de Alexandre Delaigue
    Tout ce que vous indiquez, c’est un système qui passe son temps à chercher à réparer les conséquences de la réparation précédente; on fait des quotas pour compenser l’effet des subventions, puis on “impose” des baisses de prix sans effet, mais “compensées”… Tout cela, pour rien. Pour un “approvisionnement alimentaire” , comme si l’agriculture était vouée à disparaître sans système de prix et de quantités administrés. C’est à se demander comment on fait pour avoir un approvisionnement sécurisé en savon, en mousse à raser, en bref, en tout ces produits dont nous sommes inondés sans ces mécanismes administrés et coûteux, et pour lesquels, étrangement, il n’y a jamais de problème. Mais soyez tranquille : grâce à nos dirigeants si intelligents, nous n’aurons jamais le malheur d’avoir une agriculture performante et non subventionnée, comme ces idiots de Néo-Zélandais.

  18. @ AD,

    Houlà ! Les quotas seraient donc un mécanisme stalinien de Corée du Nord ? Système administré = communisme ? La réalité est bien plus nuancée, du genre économie mixte : le système bancaire est administré (il faudrait qu’il le soit plus, voire nationalisé comme chez ces bolchéviks britanniques qui ont mis la main sur la Northern Rock ;-)) ; aux USA, la fourniture d’électricité est administrée (ou ré-administrée comme en Californie, la main invisible s’étant emmêlée les doigts) ; en Europe, la concurrence est administrée (demandez à Microsoft) ; etc…

    http://www.alternatives-economiq...

    Donc ce n’est pas la peine de hurler au bolchévisme dès que l’on prononce le mot "administré".

    Sinon, sur la "libéralisation" de l’agriculture (suicidaire selon moi), un papier intéressant, avec plein de références.

    francoise.gerard@cirad.fr/gerard_ecoru.pdf” title=”http://agents.cirad.fr/pjjimg/francoise.gerard@cirad.fr/gerard_ecoru.pdf” rel=”nofollow”>agents.cirad.fr/pjjimg/fr…

  19. La necessite d’obtenir l’unanimite pour modifier les traites europeens aggrave le probleme en figeant les mauvaises decisions. Est-ce que la politique agricole fait partie des domaines de competence de la CE ou les decisions pourront etre prises a la majorite qualifiee apres la mise en oeuvre du nouveau traite?

  20. Je cite euro92 (voir lien ci-dessus) :

    "L’apparent échec de ces deux privatisations vient en fait de ce que, dans les deux cas, la libéralisation n’a pas été poussée jusqu’au bout. Les pouvoirs publics se sont arrêtés en chemin"

    C’est un peu court non voire trop facile mais c’est vrai qu’euro92 est un think tank libéral donc forcément objectif (autant que "Libéral" qd il tape sur la PPE) ?

    On pourrait tout autant se dire que ce serait encore pire si la libéralisation du rail anglais ou de l’électricité californienne avait été complète.

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