Cela pourra sembler surprenant pour un membre du complot Blairiste pour la domination du monde, mais je n’aime pas Tony Blair. Comme beaucoup, j’ai été un temps séduit par sa rhétorique et sa façon de vouloir sortir la politique des impasses partisanes; cela fait partie des sujets sur lesquels j’ai changé d’avis. J’y ai été aidé par Chris Dillow, dont le livre the end of politics : new labour and the folly of managerialism a largement contribué à m’éclairer. En lisant son récent discours prononcé à l’UMP, je suis particulièrement conforté dans cette opinion : Blair ne mérite pas tous les éloges qui lui sont adressés.
La question n’est pas tant celle du bilan économique et social de la Grande Bretagne durant son règne, que tout bon antiblairiste se doit de critiquer sévèrement pour expliquer que tout cela n’est pas bon pour la France, et de toute façon a déjà été appliqué en mieux. C’est que le blairisme est symptomatique d’une évolution déplorable de la politique, qui touche la gauche et la droite en France : le managérialisme, l’idée selon laquelle les problèmes de politique ne sont qu’un problème d’application de la bonne solution par des leaders courageux et dynamiques. Le managérialisme est la négation de la politique, qui est fondée sur la reconnaissance de l’existence de choix indécidables, entre lesquels il faut trancher. Le discours à l’UMP est une telle caricature de prose blairiste qu’il permet d’en illustrer toutes les aberrations et les apories. Mais commençons donc. Je coupe l’entrée en matière et les félicitations à Jean-Pierre Raffarin (sic) pour entrer dans le vif du sujet.
Au mieux, la politique traite du progrès, du changement, de la manière dont nous appréhendons le monde tel qu’il est et tentons d’en faire ce qu’il devrait être. Mais trop souvent, au pire, la politique devient une affaire de traditions politiciennes, d’intérêts personnels, pourrait-on dire, au détriment de la nécessité d’être à l’écoute du progrès.
Voici un exemple de la rhétorique blairiste : Bien, pas Bien. Du côté du bien, il y a le progrès, le changement; du pas bien, les “traditions politiques” et les “intérêts personnels” qui vont au détriment de la “nécessité d’être à l’écoute du progrès”. Oui, le progrès, c’est Bien. Vieux = pas bien, nouveau = bien. Au passage, la négation de la politique est annoncée : la bonne politique, c’est celle qui “traite” du progrès (chez Blair, on ne résoud pas les questions : on les “traite”); la “tradition politicienne” et les “intérêts personnels” c’est le pire de la politique. C’est dommage, parce que c’est la nature même de la politique : dans une société complexe, faite d’intérêts divergents, la politique consiste à trancher entre les différents intérêts. Cela s’appelle un choix, et c’est même pour cela qu’il y a des élections opposant des programmes différents. Si la politique consiste à traiter du progrès, à quoi bon voter?
Les différences entre la gauche et la droite politiques sont réelles et le resteront. Les partis politiques, naturellement issus de fières traditions politiques s’efforcent de refléter et de représenter ces traditions. Et pourtant, aujourd’hui, une chose aussi importante que la distinction traditionnelle entre la gauche et la droite, c’est la différence entre une politique qui se tourne vers l’avenir et une autre qui s’accroche au passé.
Une ligne plus tôt, il fallait oublier les traditions politiques; passons. La distinction importante, c’est la différence entre la politique qui se tourne vers l’avenir et celle qui s’accroche au passé. Sauf qu’il ne s’agit que d’un choix factice : que je sache, aucun politicien ne dispose de machines à remonter dans le temps. La politique ne peut pas, ne s’est jamais, préoccupée de modifier le passé. La question politique, c’est toujours de formuler des choix pour l’avenir. On pourrait penser qu’il s’agit d’un effet de style, mais ce n’est que l’une des formes d’expression d’une idée centrale du blairisme : l’inéluctabilité. Dire que le choix se fait entre le passé et l’avenir, c’est expliquer qu’un ensemble de politiques est inévitable. Le caractère d’inévitabilité est amplifié par la suite :
Demain contre hier. Moins une politique qu’un état d’esprit. Ouverte contre fermée. Ouverte aux possibilités du monde actuel, possibilités qui paraissent venir d’une autre planète que celle de la génération de mon père et prête à accepter les risques autant que les avantages de la mondialisation. Ou fermée et recroquevillée dans l’espoir que si nous nous écartons de ce nouveau monde, il nous laissera tranquille et passera son chemin.
Toujours le manichéisme : demain, ouvert = bien. Hier, fermé = pas bien. Ouvert = possibilités, fermé = recroquevillé, espoir impossible à atteindre.
Ces paroles peuvent paraître très sévères, voire effrayantes.
Vides de sens, surtout… Mais nous arrivons à la seconde grande dimension de tout discours blairiste : après l’inéluctable, voici le changement perpétuel. Jugez plutôt :
Toutefois, réfléchissez un instant à la réalité de la vie moderne et comparez-la à la vie d’il y a dix ans. Pensez technologie, l’ipod, la nouvelle génération de téléphones portables, la télévision par satellite. Rappelez-vous comment vous vivez, travaillez en ligne.
Bien sûr, certains d’entre nous ont eu du mal à s’y faire. Il y a six mois, je n’avais pas encore de téléphone portable. Quand j’habitais à Downing Street, je n’en avais pas. J’ai eu mon premier portable le jour de mon départ et tout de suite j’ai appris à « texter » (sic) car j’avais décidé de m’y mettre immédiatement. J’ai donc envoyé un texto à un ami, mais vu le piteux état de mes connaissances technologiques, je n’ai pas réalisé que mon téléphone ne m’avait pas nommé comme expéditeur du texto. J’ai reçu un texto en réponse : pardon, mais qui êtes-vous ? Je me suis dit : incroyable, j’y étais encore hier et ils m’ont déjà oublié ! Ma fille dit que me voir taper un courrier est la chose la plus pénible qu’elle ait jamais vue. Comme si un éléphant tricotait un pull-over…
Justement, avez-vous vu ce que les enfants savent faire dès le plus jeune âge ? Mes enfants regardent rarement voire jamais un bulletin d’information classique. Mais c’est plus fondamental et plus évocateur que cela. Tous les jours et jusqu’à la fin de leur vie, ils s’attendront à faire leurs propres choix de vie quant à ce qu’ils achètent, à la manière dont ils travaillent et même dans quels pays ils travailleront.
Je ne sais pas vous, mais ce passage ne suscite rien d’autre chez moi qu’une franche hilarité. Regardez le monde moderne, comme il change vite! nous avons des ipods! nous envoyons des textos, et c’est difficile la première fois qu’on essaie! et surtout, nos enfants devront faire leurs propres choix de vie quant à ce qu’ils achètent, à la manière dont ils travaillent et même dans quel pays ils travailleront! Mais c’est incroyable, c’est inédit, c’est sans précédent! j’en tremble encore…
N’y a-t-il pas un paradoxe à dire que la politique, c’est regarder un monde dans lequel les gens ont des ipods et devront choisir ce qu’ils achètent et comment ils travaillent? En quoi la question politique centrale de notre temps serait-elle de “contempler” ce monde? Mes parents ont dû apprendre à se servir de magnétoscopes, et d’appareils à cassette; mes grands-parents ont découvert la télévision et l’automobile (et accessoirement la seconde guerre mondiale). Que signifie ce tas de banalités?
L’impact des technologies va bien plus loin que ce que nous offre le cinéma. Elles transforment l’industrie, des secteurs entiers. Combien parmi les premières entreprises mondiales existaient déjà il y a vingt ans ?
Combien? Toutes. Pour aller vérifier, c’est par ici. On peut le constater souvent : l’inculture de Blair, en matière historique, est proprement phénoménale.
Prenez la génétique par exemple et ses répercussions futures sur les soins de santé. Et je ne parle pas seulement de nouveaux remèdes ou traitements, je parle également de nouvelles méthodes de travail et d’anciennes méthodes devenues obsolètes. Ou de l’impact des tableaux électroniques et de l’Internet sur la manière dont nous enseignons dans les salles de classe et sur la substance des cours. Prenez encore l’impact sur le tourisme de masse et les voyages, pas seulement sur les destinations proposées aux consommateurs, mais sur nos anciennes destinations, autrement dit sur le tourisme traditionnel.
Quel est le sens de tout ceci ? C’est simple, c’est le changement. Du changement, du changement et encore du changement !
Change, change, change. Un auteur anglais a constaté, avec humour, que le New Labour “has an absolute conviction in the newness of the new world of new things”. Sauf qu’il y a un très grand paradoxe dans un discours centré sur le fait que tout change, et qui appuie cela sur trois nouveaux gadgets et quelques banalités. Après tout, si tout change vraiment tout le temps, c’est que dans le fond, rien ne change vraiment. Ce discours pourrait être replacé à toutes les époques, parce qu’à toutes les époques, il y a eu des changements. Il n’y a là rien de très nouveau. A quoi sert alors cette rhétorique du changement?
Elle est la marque de fabrique du managérialisme. Elle sert à transmettre un double message. Premièrement, les managers adorent présenter l’idée que nous vivons dans un monde “turbulent” (voir sur cette question Mintzberg) parce que cela leur permet de donner l’idée qu’eux seuls savent traiter les problèmes contemporains (traiter, pas résoudre : du point de vue managérialiste, traiter un problème est suffisant. S’il n’est pas résolu, c’est 1-parce que le monde change, vous comprenez et 2- l’occasion d’y appliquer un nouveau traitement tout aussi indispensable que le précédent). Surtout, c’est une façon de rendre inéluctables leurs actions, comme des réponses automatiques à une situation causée par l’extérieur, de la même façon qu’un dirigeant d’entreprise justifie un plan de licenciement par la concurrence chinoise.
De façon étonnante, cette attitude est très marxiste-léniniste : la croyance dans un déterminisme économique dans lequel les évolutions économiques dictent les changements sociaux et la politique, et dans le fait que seule une avant-garde éclairée comprend ces lois historiques. La rhétorique du changement permet aussi de ne jamais douter, et de justifier par avance ses propres revirements. en 1983, Blair et Brown étaient élus au parlement britannique sur la base d’un manifeste appelant à de nouvelles nationalisations et à la sortie de l’union européenne : dix ans plus tard, leurs avis étaient exactement opposés. Il n’y a pas de mal à changer d’avis : mais quand on le fait de façon aussi radicale, cela conduit à douter de toutes ses convictions : peut-être que d’autres sont fausses aussi. La rhétorique du changement permet de se dispenser de ce travail d’introspection et de doute.
Dès le moment où vous pensez maîtriser un changement, un autre le remplace. C’est le monde moderne. Finie la production de masse. Finis les emplois pour la vie. Finie la zone de confort, tout au moins pour les entreprises soucieuses de rester à la pointe du marché grand public. Finie la zone de confort pour le secteur public, si toutefois le service public concerné se préoccupe réellement de fournir le meilleur service pour le public.
Finie la production de masse? Parlons-en aux chinois… Finis les emplois pour la vie? le nombre moyen d’emplois exercé par un individu tout au long de sa vie est le même que pour les deux générations précédentes. Finie la zone de confort pour les entreprises? Ah oui? Finie la zone de confort pour le service public s’il se préoccupe vraiment de fournir le meilleur service? A quelle époque, exactement, a-t-on affirmé le contraire?
Et savez-vous ce qui dynamise ce changement ? Un entrepreneur véreux qui veut aplatir la main d’œuvre ? Un politicien démon, avide d’affrontement ? Non, le changement est dynamisé par le peuple, par ses demandes, ses attentes, ses goûts et par sa volonté de saisir les opportunités du monde qui évolue. La conclusion à en tirer pour les politiques de gauche comme de droite est la suivante : dans un monde qui change, malheur à celui qui stagne. Que cela vous plaise ou non, pour réussir, vous devez évoluer avec le monde ou perdre, chuter et devenir un monument et non un mouvement.
tout change, tout change, il faut changer, c’est une question de vie ou de mort!
Changer demande du courage, de l’engagement et surtout d’énormes réserves d’énergie. À cet égard, vous avez de la chance d’avoir Nicolas Sarkozy comme président. Un autre leader dont je tairais le nom m’a dit un jour : Sarkozy, il est très tonic, non ? Je lui ai répondu : non, je ne l’avais pas remarqué… Je viens de vous donner un exemple d’humour anglais, mais il est certain que votre président est très énergétique et dans tous les domaines… L’énergie, la volonté de procéder aux changements nécessaires pour survivre dans un monde de changement est la clé
Et voici une autre tarte à la crème du managérialisme : le leadership. Dans un monde qui change, il faut des leaders “dynamiques”. Des chefs qui bougent. On pourrait penser exactement l’inverse : si après tout le monde devient vraiment plus complexe, cela signifie qu’il faut beaucoup plus de solutions décentralisées : des écoles autonomes pour satisfaire des besoins éducatifs changeants; des entreprises moins hiérarchiques et fondées sur les partenariats entre salariés plutôt que sur le contrôle des propriétaires de capital; une fonction publique plus autonome; Aucune de ces solutions pourtant évidentes n’a jamais eu l’heur de plaire au New Labour. Etrangement, ce qu’il faut, c’est un chef “dynamique”. Vous souvenez-vous de ce que je disais plus haut, sur l’avant-garde éclairée qui guide le peuple?
Mais comment procéder au changement, quelle doit en être la substance, quelles valeurs doivent accompagner ces changements ? Ces aspects-là peuvent faire l’objet de débats vigoureux et devraient faire l’objet de débats vigoureux. Essayer de résister au raz-de-marée que représente la mondialisation, dont la cause génératrice est la technologie, est une entreprise futile, pire, dangereuse parce qu’elle donne aux gens un choix qui n’en est pas un : accueillir la mondialisation à bras ouverts ou la rejeter. Comme le raz-de-marée, elle ne peut pas être rejetée et poursuivra son avance que cela plaise ou non. Faire miroiter la perspective d’en éviter le choc est aller contre nature, c’est comme si vous demandiez au reste des Français d’adorer les Parisiens ! En fait, c’est partout pareil, en Grande-Bretagne, c’est comme si vous demandiez aux nordistes d’aimer les gens de Surrey. La question à se poser, la seule question valable, que vos convictions politiques penchent à droite ou à gauche, est la suivante : Comment s’y préparer ?
Déterminisme historique, absence de choix, nécessité pour les leaders “d’être prêts” : on commence à avoir l’habitude. Maintenant que l’avenir est devenu inéluctable, voyons un peu quelles sont les réponses inévitables.
Autrement dit, nous devons accepter la réalité de la mondialisation, mais nous ne sommes pas obligés d’accepter que nous ne puissions rien faire pour en rendre les conséquences positives ou négatives. C’est faux, parce qu’elle apporte son lot de défis et son lot d’opportunités.
Les défis et les opportunités : on se croirait dans un manuel de management des années 50.
Il faut accueillir les défis avec le sourire, maximiser les opportunités et les maximiser non pas que pour certains ou pour une élite haut placé, mais pour que tout le monde en profite, tous les citoyens, quels que soient leur classe, leurs antécédents, leur race, la couleur de leur peau ou leurs convictions religieuses. Il ne s’agit pas d’abandonner nos valeurs, nos convictions traditionnelles, et avec raison, bien aimées, en matière d’égalité des chances, de solidarité et de liberté.
Qui est contre, au fait?
Il ne s’agit pas d’abandonner le rôle vital des politiques et du gouvernement. Il ne s’agit pas de laisser faire le marché libre régner et nous, le peuple, nous n’y pouvons rien.
La solution est hiérarchique et vient d’en haut : elle ne saurait venir de mécanismes décentralisés.
Non, ce nouveau monde n’exige pas un changement de nos valeurs ou du rôle des politiques. Il exige tout simplement un changement de la manière avec laquelle nous appliquons ces valeurs et assurons l’efficacité de ces politiques au sein du monde moderne.
Entre l’égalité des chances, la solidarité, la liberté, il y a des contradictions, qui constituent l’essence de la politique. Vouloir plus de l’une implique souvent moins de l’autre; mais non, il n’y a pas de conflit entre les valeurs. Il n’y a que l’efficacité : nous touchons là à l’essence du managérialisme. Pas de valeurs concurrentes, seulement ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas. Et comme personne ne veut de ce qui est inefficace… il n’y a pas de choix.
L’avenir ou le passé. L’idéalisme passé sur le réalisme ou sur l’illusion. Les nouvelles valeurs non, mais un nouvel ordre du jour de l’action, oui.
Passé, pas bien. Avenir, bien. “Réalisme”, bien. Action, bien. Nouvelles valeurs? pas bien. comme quoi le “changement” est bien sélectif.
J’irai même plus loin. Moi je suis, comme vous le savez, un politicien de centre gauche. Je crois en une politique progressiste. Aux Etats-Unis, je serai démocrate. Au Royaume-Uni, je suis travailliste. En France, je serai… probablement au gouvernement, non, non, je plaisante ! Je reste avec ma famille politique. Je serai au Parti socialiste, mais aux côtés de ceux qui ont à cœur de le transformer. Surtout, je crois en la justice sociale, dans mon pays, comme une valeur traditionnellement associée à la gauche. Et le plus beau c’est ça : la justice sociale n’est pas moins importante dans ce nouveau monde, au contraire. Pourquoi ? Parce que la nouvelle économie est peut-être modelée par la technologie, mais ce dont elle a le plus besoin c’est d’un capital humain de grande qualité. Donc, si nous constatons des injustices, la privation, la pauvreté, si en conséquence nous ne donnons pas à tous les mêmes opportunités, non seulement nous devons faire un constat d’échec moral mais aussi économique. Aujourd’hui, la prospérité économique et la justice sociale sont enfin partenaires de cet avenir et non opposées l’une à l’autre.
Extraordinaire. Voici donc ce qui est “nouveau” aujourd’hui. Après une autre louche de déterminisme techno-économique, nous apprenons que “la prospérité économique et la justice sociale sont enfin partenaires et non opposées”. Mais cette idée que la prospérité et la justice vont de pair n’est pas nouvelle : elle est depuis toujours l’idée de base de la social-démocratie. Et c’est précisément cette idée qui est au coeur de la crise de la social-démocratie, crise entamée depuis les années 70 : dans le monde réel, il faut choisir. C’est un choix bien connu des économistes, voir notamment le lumineux essai d’Arthur Okun sur ce sujet. Et d’ailleurs, même les génies du new Labour ont dû faire ce choix : lorsqu’ils étaient au pouvoir, la Grande-Bretagne est devenue un pays plus prospère, mais plus inégalitaire. On peut considérer que ce choix était bon, ou pas : il n’empêche que la politique de Blair illustre le fait qu’il fallait choisir, et qu’il l’a fait, tout en s’en défendant.
Et quelle est la substance de cet ordre du jour ? En voici quelques grandes lignes. Premièrement : éducation et non pas réglementation. Pour protéger un salarié de nos jours, nous devons l’éduquer et non pas rendre le marché du travail rigide.
On en parlera au premier ministre britannique qui a multiplié les modes de contrôle sur les individus, réduit les libertés individuelles pour “lutter contre le terrorisme”, et créé un salaire minimum. Là encore, on peut être pour ou contre ces réformes; mais tous illustrent qu’il a fallu trancher entre différentes valeurs.
Deuxièmement : rendre l’Etat providence actif et non passif. Autrement dit, quand une personne doit, indépendamment de sa propre volonté, toucher une allocation, l’objectif doit être de retrouver un emploi et non pas d’alimenter sa dépendance vis-à-vis de cette allocation. Aider fait partie des responsabilités de l’Etat, s’aider soi-même fait partie des responsabilités de chaque individu.
Outre que cela n’a jamais été spécialement une nouveauté, pourquoi donc devrait-on imposer aux individus de trouver un emploi? on pourrait privilégier une protection sociale fondée sur des droits universels, comme une allocation générale, qui donnerait aux gens le choix de vivre leur vie comme ils l’entendent. Mais non, le “progrès” impose que les individus soient soumis à des technostructures.
Troisièmement : l’équilibre entre travail et vie privée est la nouvelle frontière de l’Etat providence. L’aide que nous accordons aux femmes et aux hommes en matière de garde d’enfants, de congés de maternité et de paternité, d’aménagement des horaires de travail, dans notre monde moderne, il s’agit tout autant d’assurer le bon fonctionnement de l’économie que d’assurer le soutien des familles.
Nouvelle frontière de l’état-providence? mais les aides familiales sont dans l’arsenal de la social-démocratie depuis la fin de la seconde guerre mondiale; même avant, elles étaient le fait d’Etats ayant la volonté d’exercer un contrôle sur les individus. Le bon fonctionnement de l’économie et le soutien aux familles? Beveridge lui-même affirmait que le rôle de l’Etat-providence était de “fournir des hommes bons pour le service”.
Quatrièmement : le monde vit à l’heure d’une nouvelle politique industrielle, il ne s’agit pas pour l’Etat d’essayer de diriger les entreprises. Ma propre expérience m’a montrée que les gens d’affaires et pas les fonctionnaires sont les mieux placés pour diriger les affaires.
C’est sans doute pour cela qu’en 2001, Blair a renationalisé Railtrack. Au passage, il n’y a aucune différence entre un dirigeant d’entreprise et un haut fonctionnaire. Il n’y avait que peu de différences entre les pratiques managériales employées chez Trabant et chez Volkswagen, ni de différence de compétence entre les dirigeants : simplement des environnements différents.
Il s’agit en revanche d’investir dans les sciences, dans la création de petites entreprises, de créer le milieu dans lequel les entrepreneurs et les cerveaux se sentiront libres de réussir. Parce que lorsqu’ils réussissent, nous en profitons tous.
L’Etat est un grand département de ressources humaines au service des entreprises. La connaissance vaut pour les entrepreneurs, pas en tant que telle.
Cinquièmement : ce nouveau monde a encore besoin des syndicats. Le nouveau monde manque d’assurance, il est incertain, plein de risques, mais le rôle des syndicats aujourd’hui doit être celui de partenaires du changement, d’agent du changement, et non pas d’agent de la résistance. Les pratiques professionnelles désuètes permettent peut-être à un employé de garder son travail plus longtemps, mais si elles freinent l’économie, elles étouffent la possibilité de créer d’autres emplois pour d’autres salariés.
Si vous acceptez la rhétorique du changement, vous êtes sauvé. Les syndicats doivent être des “partenaires” : là encore, la possibilité d’un conflit entre salariés et dirigeants est niée comme “pratique désuète”. Surtout, si vraiment le monde est fait de nouveaux risques, il faudrait trouver de nouveaux mécanismes assurantiels pour se protéger de ces risques (voir les propositions de R. Shiller sur le sujet). Pas d’imposer aux gens de se trouver dans des structures hiérarchiques “agents du changement”.
Alors, à tous les niveaux, de la manière dont nous exploitons nos entreprises à la manière dont nous dirigeons le gouvernement, de la répartition des pensions à la fourniture de soins de santé ou de l’ordre public ; nous sommes obligés, à cause de la cadence du changement, d’évoluer également.
Tout change, ce que nous faisons est inéluctable. C’est lancinant, n’est-ce pas?
À mesure que les anciens problèmes s’estompent, d’autres font leur apparition. Aujourd’hui, notre croissance économique doit être durable pour l’environnement. C’est la raison pour laquelle nous devons impérativement parvenir à un nouvel accord sur le changement climatique. Aujourd’hui, la politique énergétique a repris sa place prioritaire à l’ordre du jour avec le renouvellement de l’énergie nucléaire, domaine dans lequel la France occupe la tête depuis longtemps.
Grâce à l’action et au leadership, nous sommes mêmes capables de modifier le climat. Vous avez dit Hubris?
Aujourd’hui aussi, nous constatons des vagues migratoires du monde entier et nous ne sommes pas les seuls. Savez-vous quelle question domine quasiment la campagne électorale américaine, encore plus dans certains Etats que la question de la sécurité ? C’est l’immigration.
Moi qui croyait que c’était l’assurance-santé…
Et c’est une autre caractéristique de notre monde moderne. Nous sommes tous confrontés au même défi, celui du changement généré par la mondialisation. Ne pensez pas qu’en France les débats sont si différents de ceux formulés en Allemagne, en Italie ou au Royaume-Uni. Et j’irai plus loin, ils ne sont pas si différents des débats formulés en Amérique ou au Canada, en Amérique du Sud ou en Asie.
C’est inéluctable, je vous dit : le MONDE ENTIER est concerné. Vous croyiez pouvoir vous échapper?
Ce qui porte à une autre conséquence : les nations comme les nôtres doivent travailler ensemble, la France et la Grande-Bretagne. Même si nous aimons parfois prétendre le contraire. Nous avons énormément de choses en commun. Pour commencer, nous sommes fiers de notre histoire, même si, je vous l’accorde, nous traitons notre monarchie différemment de la manière dont vous avez traité la vôtre… Peut-être certains d’entre vous, je crois que oui, ont-ils vu le film « The Queen », il a très bien marché aux Etats-Unis, tant et si bien que souvent lorsque j’y vais les gens à qui l’on me présente disent : oh yes, Tony Blair, i did so love you in that movie ! N’oubliez pas Nicolas, en mars prochain pendant votre visite au palais de Buckingham, quelle que soit notre fierté envers notre histoire, nous allons devoir reconnaître une chose si nous voulons pouvoir être fier de notre avenir. À mesure que nous avançons dans le XXIe siècle, quand la Chine puis l’Inde ont toutes les deux une population plus grande que celle de toute l’Amérique et de l’Europe réunies multipliée par deux, notre mission dans ce monde ne consiste pas à regarder derrière nous, pleins de nostalgie pour l’époque de l’Empire britannique ou français, quand nous nous battions chacun de notre côté. Mais de regarder devant nous vers un avenir où nos deux grandes nations européennes pourront, avec d’autres nations européennes, faire l’Europe et, à travers elle, nous faire nous-mêmes forts et puissants. Faire en sorte que le XXIe siècle nous apporte un bilan positif, faire compter nos idées et nos valeurs.
Nous pouvons tout, même forger l’avenir au 21ème siècle.
C’est la raison pour laquelle, une fois de plus, en matière d’Europe, il ne s’agit pas de droite ou de gauche, mais d’avenir ou de passé et même de force ou de faiblesse. Le terrorisme, la sécurité, l’immigration, le crime organisé, l’énergie, l’environnement, les sciences, la biotechnologie, l’enseignement supérieur, dans tous ces domaines et dans bien d’autres, nous sommes tellement plus puissants, plus efficaces, plus capables de donner ce que nos citoyens attendent de nous en tant que nation individuelle si nous faisons partie de l’Europe ensemble, unis et forts. Pour l’Europe également, ses citoyens et ses institutions, qui dit nouvelle époque, dit nouvelle réflexion. Alors, pour l’Europe, pour chacun d’entre nous : modernisme ou déclin ?
Nous sommes plus forts que jamais, nous sommes omnipotents. On croirait entendre un certain premier ministre britannique qui pensait qu’il serait facile de transformer une dictature moyen-orientale en démocratie en deux coups de cuiller à pot…
Quand j’étais Premier ministre, j’ai beaucoup réformé. Il arrive parfois que l’on m’attribue, parfois même dans certaines régions de France, une tendance à pencher un peu vers la droite. Mais, en réalité, mon gouvernement est à l’origine de l’adoption historique du salaire minimum en Grande-Bretagne pour la première fois ; de l’attribution de droits de base aux syndicats ; de la multiplication par deux d’allocations et des congés de maternité ; d’égalité pour les homosexuels ; de nouveaux droits pour les handicapés ; de la majoration des pensions de retraite. Nous avons également doublé les budgets de l’enseignement et des soins de santé. La Grande-Bretagne avait besoin de ce coup de pouce de l’Etat et mon gouvernement lui a donné. Mais, c’est vrai, nous avons aussi beaucoup, beaucoup réformé. Dans nos écoles, dans notre système de santé, dans le financement des universités, les pensions, les services sociaux et bien d’autres domaines.
Pour quel résultat? Cela ne compte pas. Ce qui compte, c’est de bouger, d’agir. Et si on doit refaire trois fois les mêmes réformes sur les mêmes domaines, quelle importance? Cela montre qu’on “traite le problème”.
Ce que j’en ai appris, c’est que le changement ne plaît jamais. Dès que vous l’annoncez, on vous dénonce. Dès que vous le mettez en oeuvre, tout le monde proteste. Quand vous parvenez enfin à le faire aboutir, tout le monde l’accepte. Au final, vous vous dites souvent que vous auriez dû en faire plus, que vous auriez du aller plus loin. Je me souviens du jour où, en plein milieu de réformes très controversées des services de santé, j’ai dû me faire hospitaliser pour une petite intervention. J’étais allongé sur mon lit d’hôpital, quand l’anesthésiste est entré, muni d’une énorme seringue et au moment de se baisser pour me piquer, il m’a dit : Monsieur Blair, je vais vous dire une chose parce que je n’aurais sans doute jamais plus l’occasion de le faire, je suis catégoriquement contre vos réformes de la santé ! C’est un fait, le changement est difficile, le chemin de la réforme est pavé d’embûches, mais c’est le chemin du leadership. On y rencontre des obstacles, des adversaires et de nombreux intérêts qui, disant représenter le peuple, au final, ne représentent qu’eux-mêmes. Mais c’est le peuple qui a le plus besoin de ce leadership.
Ce qu’il faut à la populace, c’est un grand leader.
Il n’y a pas de pire trahison que le faux espoir. Il n’y a pas de devoir plus noble que de prendre la bonne décision même si elle est impopulaire. Les politiques ne déçoivent pas lorsque les dirigeants ont du mal à prendre les grandes décisions, mais quand ils choisissent de les ignorer, parce qu’alors les gens sont seuls et la vie facile mais éphémère que leur apporte une décision lâche les amoindrit pour une génération. À mesure que les nouvelles nations émergent, prêtes à agir et à lutter pour faire face aux défis de l’avenir, les nations qui ne le font pas se retournent avec regret et contemplent leur passé. Le voilà notre défi.
La politique, c’est le leadership qui prend la “bonne décision” (qui bien entendu, est impopulaire). Il n’y a pas de choix, ce que je fais est inéluctable : si vous ne comprenez pas pourquoi, c’est que vous êtes lâche.
Passons sur la fin, qui n’apporte rien de plus. Voilà l’essence du managérialisme en un seul discours. Laissons la conclusion à Chris Dillow : Managerialism is not a neutral, ideology-free way of creating a what is an uncontroversially better world. It is, as Aneurin Bevan said in a different context, a mere “emotional spasm.”
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<em><strong>Aujourd’hui aussi, nous constatons des vagues migratoires du monde entier et nous ne sommes pas les seuls. Savez-vous quelle question domine quasiment la campagne électorale américaine, encore plus dans certains Etats que la question de la sécurité ? C’est l’immigration.</strong>
Moi qui croyait que c’était l’assurance-santé…</em>
On va dire les deux, c’est surtout fonction de la personne à laquelle on parle: pour les conservateurs, l’immigration arrive franchement en premier tandis que les liberals s’intéressent davantage à l’assurance-santé.
Merci pour ce commentaire, c’est effectivement assez instructif …
On peut noter qu’une conséquence de cette vision manageriale et de cette absence de choix, c’est la croyance au "gouvernement des meilleurs" (je n’ose dire l’aristocratie) comme le pratique Sarkozy : puisqu’il n’y a pas de choix à faire, on prend les meilleurs techniciens dans chaque domaine (d’où qu’ils viennent) et on les met au gouvernement.
Il me semble que <mode troll on> Badiou (l’homme de l’homme aux rats) a écrit quelque chose de similaire dans son livre : la perspective manageriale, c’est "la fin de l’histoire" implicitement défendue par Sarkozy, et la première tâche de l’opposition aujourd’hui, c’est de rappeler que le réel, ce sont des choix politiques à faire.
</mode troll off>
Mais…
"Le managérialisme est la négation de la politique, qui est fondée sur la reconnaissance de l’existence de choix indécidables, entre lesquels il faut trancher."
… vous ne confondez pas la forme et le fond? Personne ne nie l’existence de choix en politique, mais le managérialisme dont vous parlez m’a plutôt l’air de relever de la FAçON de traiter les problèmes de politique publique, en introduisant des procédés issus du privé, et représente une évolution de la politique.
Vous voyez un choix politique décrit dans ce discours? Il n’y en a aucun. Un seul message : le monde change à toute vitesse, et voici ce que nous devons faire. Et la méthode consistant à “introduire les procédés du privé” n’est pas nouvelle : elle date au bas mot des années 30 et a donné des résultats systématiquement mauvais. Mais ce n’est pas grave, du point de vue Blairiste, puisque l’histoire et les leçons de prudence qu’elle enseigne n’ont aucun intérêt. Ce qui compte, c’est l’avenir, parce que l’on peut y projeter n’importe quoi.
De même, ‘déterminisme technico-politique’ c’est un peu exagéré: Blair défend et promeut un certain système de valeur, (un libéralisme un peu débridé), c’est vrai. Mais contre celui-ci, il existe d’autre arguments que l’accusation de manichéisme que vous soulevez. De là à dire que sa vision est déterministe…
Il n’y a pas de libéralisme chez Blair : il n’est pas favorable au marché, mais au monde des affaires, qu’il faut soutenir et dont il faut s’inspirer des méthodes. Et l’ensemble de ses politiques est présenté comme inévitable. Dire “ce que je fais est inévitable parce que c’est la seule chose efficace et parce que le monde qui change l’exige”, si ce n’est pas du déterminisme technico-économique, qu’est-ce que c’est?
Avis intéressant sur ce qui est la base sur lequel le succès de Blair s’est sans doute construit. Toutefois, je pense que le fait qu’il ait passé 10 ans comme premier ministre a aidé à vider le discours des choix à faire. Aujourd’hui, Blair doit être à sec d’idées … et c’est un peu pour ça qu’il a été viré.
La tactique consistant à enfermer ses adversaire dans un faux choix (moi: je sais où va le monde; lui: il est toujours à contre courant) est tout de même pas nouvelle. Cela doit faire partie des armes polémiques de base, je crois. Par contre, sa fréquence d’utilisation est extrêmement élevée chez Blair! Et cela recouvre toujours 2-3 idées comme quand il parle de la relance du nucléaire (inéluctable, cela va sans dire 😉 ). Mais probablement moins qu’avant. Une fois passé du temps au pouvoir, ne reste-t-il pas que l’emballage?
Ce qui est aussi étonnant, c’est l’incapacité qu’eurent (ont?) ses adversaires de se sortir de cet enclos où Blair les avait enfermés. Il est étonnant qu’ils n’aient pas trouvé la formulation qui puisse les faire sortir du piège blairiste qui fait de vous un vieux. C’est en cela qu’il est très fort. Avoir accompli cette performance mérite tout de même un coup de chapeau.
Le point du "traitement" des problème me paraît aussi très intéressant et comme une des réelles nouveautés du blairisme. Il faut remarquer qu’elle a dû être importée ces dernières années en France… Mais on en vient à se demander, comme vous le faites, si l’«action» n’est pas le prétexte à une autre «action» du même tonneau. Auraient-ils appris les leçons dispensées par Bill Gates selon lesquelles il est indispensable que la nouvelle version soit buggée si on veut que les clients achètent la suivante? En quelque sorte, il faut agir pour agir… Ça ne mène pas bien loin… Ou plutôt si: le temps a passé et les sortants réussissent à rester au pouvoir, ce qui doit être un but de tout politique qui se respecte…
Merci pour cet excellent billet d’une grande profondeur.
Il touche vraiment juste et offre de véritables clés de décryptage.
Est-ce que finalement, le but de tout ce discours n’est pas de nous faire accepter le monde
tel qu’il serait décidé en dehors de nous ? On dirait les discours du PS en France : "bon, voyez-
vous, on ne peut rien faire, alors, on va faire au mieux, hein, mais bon, on ne peut rien faire." (Et je
ne parle pas du discours de l’UMP qui applaudit des deux mains l’offrande du politique à
l’économique)
C’est inquiétant de voir que Blair est écouté en France comme un théoricien. Mouais, bon, entre ça
et Attali ou Minc…
Accepter le monde tel qu’il est n’est pas en soi contestable; ce qui l’est, c’est de déduire du monde tel qu’il est qu’il n’existe qu’un seul ensemble de politiques possibles, que le seul choix politique se limite à la désignation des plus compétents pour le mettre en oeuvre; d’autant plus lorsque cet ensemble repose sur l’obsession du contrôle exercé sur les individus.
Mouais. Moi – sans avoir lu le bouquin bien sur – je m’etais fait l’idee suivante des theses de Chris Dillow : oui il y aura toujours des choix politiques, mais sur certains points les idees partisanes se font reellement au detriment de l’efficacite. Trois exemples (souvent issus de ce blog d’ailleurs) :
– la question de l’adaptation de notre systeme de retraites
– la question de la remise en question des 35h – au moins de la loi Aubry II
– l’evaluation des politiques publiques.
Non qu’il n’y ait des choix tres forts a faire dans ces domaines, mais l’affrontement partisan actuel ne les reflete pas. En disant "il y a *necessite* d’adapter le systeme de retraites", un politique fait faire un grand pas a la politique en general car il situe le debat deja ailleurs, sur la forme de cette adaptation. Forme qui sera ensuite discutable, meme si comme Blair (et comme tout politique finalement) il le nie.
Mais s’il y a vraiment nécessité elle s’impose d’elle-même. Cela ne nous dit rien sur la forme prise par l’ajustement. Pour les retraites, décider de ne pas modifier les systèmes est un choix; retarder l’âge de la retraite un autre; augmenter les cotisations un troisième; réduire les pensions et subventionner l’épargne privée encore un autre, etc. Il n’y en a pas un qui soit “meilleur” et qui soit connu de façon certaine même si chacun peut avoir des préférences.
Je pense que c’est une question de curseur : sur les points cites ci-dessus le debat est *trop* partisan, ce qui empeche d’y voir clair sur ce que l’on sait vraiment, sur d’autres points (Europe, immigration, universite, droit a la clope), il ne l’est au contraire pas assez, ce qui bloque toute alternative.
Bien sûr que le débat est tronqué sur ces différents domaines. Mais dire “cette solution est la bonne parce qu’elle est dictée par les évènements” est une autre façon de tronquer le débat. Je ne suis pas certain qu’il y ait un curseur à ce niveau : il y a des questions, et pour chacune d’entre elles des tas de réponses possibles.
Le discours sur l’efficacite a le merite de clarifier les points qui devraient etre acquis pour ceder la place aux vrais debats. Le temps que ces vrais debats se mettent en place, celui qui a tenu ce discours beneficie certes d’une lateralite un peu excessive.
Le problème de la focalisation sur l’efficacité c’est qu’elle conduit à oublier le débat sur les buts. Faire une politique migratoire fondée sur le comptage des flux entrants et sortants ne nous dit rien sur les différentes alternatives en matière de migrations; c’est une façon de noyer la discussion.
Et oui je m’etonne de cet anti-blairisme , sur un site qui explique bien souvent que les politiques sont des clowns et qu’ils devraient rechercher l’efficacite plutot que les grands discours.
Tout simplement, parce que Blair n’est pas différent des autres. Il impose son idéologie en la présentant comme inéluctable : le pragmatisme, c’est afficher des choix, et se confronter à la complexité sociale.
Derniere chose : je ne comprends pas du tout l’idee "La rhétorique du changement permet de se dispenser de ce travail d’introspection et de doute." Au contraire, elle oblige a une remise en question perpetuelle, a la confrontation dialectique avec le reel. Le fameux Badiou cite plus haut a certainement moins remis en question ses idees que Tony Blair….
Mais Blair ne se remet jamais en question. Il change d’avis souvent, mais ses certitudes sur l’infaillibilité de son jugement restent tout aussi inchangées que celle d’Alain Badiou. N’est-ce pas un problème?
Perso, j’ai du mal à m’intéresser au discours des politiques. Les politiques sont des hommes d’action, leur discours n’a en général que peu d’intérêt; il sert à justifier leur action, c’est tout. Je me méfie énormément du commentaire de texte, exercice vénéré dans notre pays, mais qui est voué, par nature, à une certaine stérilité.
Mais il n’y a pas de différence entre le discours et l’action chez Blair : le managérialisme est à la fois un discours et une pratique consistant à considérer que les hiérarchies, l’organisation et le leadership constituent des réponses à tous les problèmes.
Il faut voir aussi que le régime anglais favorise ce genre de choses: les valeurs sont incarnées par la monarchie, le PM est élu pour faire un travail technique, celui de gérer le pays. En France le président cumule: roi et technicien.
Il y a encore que les politiques nationales sont vouées à se vider de leur substance, l’essentiel des choix se faisant à Bruxelles.
ceci est extrêmement contestable, mais c’est un autre débat.
Enfin Blair ne conteste pas qu’il faille faire des choix; il dit seulement que ce sont des choix techniques, et que la définition des grandes orientations lui échappent. Ce n’est pas de l’idéologie, c’est du vécu. Le vécu de tous les dirigeants européens d’aujourd’hui.
Bref, le discours de Blair me paraît plus symptômatique d’une époque, et de la sociologie des dirigeants européens, que du personnage Blair. Et d’une certaine manière ça me rassure plus d’entendre ça que d’entendre un Sarkozy prétendre qu’il va tout changer lui tout seul à la force de son petit poignet.
Après, il y a sans doute aussi chez Blair le souci de présenter son action comme la seule possible, aux yeux des autres mais aussi peut-être à ses propres yeux.
Qu’appelez-vous un "choix politique", au juste? Quel "choix politique" pourrait faire, par exemple, notre président aujourd’hui?
Mais il en fait sans arrêt. Supprimer les droits de succession, détaxer les heures supplémentaires sont des choix politiques par exemple. On peut être pour ou contre, mais il n’y a pas de “bonne” solution qui s’impose naturellement face à ces questions.
Les conséquences particulièrement déstructurantes pour les institutions par le changement perpétuel des politiques blairistes ont cependant pour conséquence de mener au marché au moins aussi sûrement qu’une politique explicite. Personellement, je ne vois pas d’autre solution que le blairisme pour convaincre une fraction suffisante des technocrates d’avancer en partie inconsciemment une économie de marché vers laquelle ils refuseraient d’avancer consciemment.
(Attention : je ne dis pas que c’est bien : je ne fais que constater)
Détrompez-vous : au contraire, ces politiques visent systématiquement à accroître le pouvoir des technocrates.
Merci pour ces commentaires, et pour
alimenter le débat, je ne peux que conseiller
deux ouvrages très stimulants qui dénonçaient déjà en leurs
temps ces dérives managériales/techniciennes de la politique
et leurs corollaires : l’absence de choix.
Il s’agit de
"La dictature de la raison" de John Saul (Payot)
et de
"L’illusion politique" de Jacques Ellul (la table ronde)
qui date de 1965 (et qui est plus que jamais d’actualité
comme le montre votre billet) !
Mais tous les hommes politiques défendent une certaine vision du monde, en la présentant comme le bien, le futur et l’inévitable. Je ne vois pas en quoi Blair serait pire que qui que ce soit en prétendant détenir la vérité sur le monde, et la proposer à ses électeurs.
Que la mise en pratique de cette vision du monde soit encadrée par des "méthodes managériales" pour diminuer les effets négatifs du jeu politique me paraît plutôt aller dans la bonne direction.
En quoi, exactement, cela va-t-il dans la bonne direction? En quoi le management et la technocratie constituent-ils des réponses supérieures aux problèmes contemporains? En quoi les technocrates sont-ils en dehors des effets négatifs du jeu politique?
très instructif…on voit comment la forme l’emporte sur le fond, le ton sur les mots, la prestation sur le discours ;comment le message aboutit à "faites-moi confiance : c’est moi qui ai le plus d’énergie", avec cette illusion que tout est possible parce qu’avec lui tout devient simple,donc facile (je pense à ces vieux articles du Reader Digest : "Comment se faire des amis en 10 leçons").
La politique comme technique pour emporter le morceau . La définition même de la démagogie.
Bonjour
merci beaucoup pour cette analyse détaillée qui pointe les travers de la politique du gouvernement!
je voudrais ajouter que Blair n’est plus premier ministre depuis qq mois. Ce n’est plus son role de défendre des choix politiques.
D’ailleurs s’il avait du en parler devant l’assemblée réunie samedi dernier, il n’aurait pas obtenu un franc succes. Il se pose comme socialiste (-réformateur).
Son discours est symptomatique, peut etre d’une "certaine idée" de la politique, mais surtout de son statut de retraité de la politique.
Oui et non. Ce qui est caractéristique dans ce discours, c’est que c’est ce qu’a toujours répété Blair, au mot près, même lorsqu’il était premier ministre. Dillow le montre très bien.
Une bonne analyse vraiment très pertinente qui me donne à réfléchir.
Comme si à la base de son action gouvernementale il y a de la simple et essentielle croyance, que seul l’hérétique ne partage pas.
A voir la candidature affichée de Tony Blair à la Présidence de l’Europe, je me pose une question : ne pourrait-in dire exactement la même chose en ce qui concerne l’ensemble de la construction européenne, qu’il s’agisse de l’ère Delors, de lère Prodi, ou, bientôt, de l’ère Blair ?
Pour l’ère Delors, et pour ce que j’en connais, non. La commission a alors joué un rôle moteur tout-à-fait politique. Voir les deux "paquets Delors" successifs, et la proposition et le soutien aux fonds structurels (exemple de vraie décision, pas de "traitement managérial d’un problème").
En revanche, l’article ew-econ.typepad.fr/mon_we…
tend effectivement à montrer (pour le déplorer) que, pour des raisons en partie techniques, la commission se "managérialise" : elle est mangée par ses multiples tâches de gestion et de suivi des politiques déjà décidées. Son rôle d’élément moteur, par sa réflexion de fond et ses propositions, de la politique européenne, s’y noie.
Dans les faits, le managerialisme se traduit par une avalanche de "targets" venues d’en haut. Le resultat, previsible, est que tout se base sur ces "targets", au depend du reste. Un exemple sont les ecoliers, qui sont formes a passer les examens, mais qui ne savent rien en dehors de ca (ou ceci inspectorgadget.wordpress… ). Tout ca accompagne du socialisme de Brown, qui a effectivement double les budgets. Le probleme, c’est que cet argent a surtout servi a augmente les couts salariaux de la fonction publique, avec une productivite en baisse.
Et maintenant, il n’y a plus d’argent…
La chose incroyable, c’est qu’il a quand meme gagne 3 elections, la derniere malgre une guerre impopulaire ! Il est vrai que le systeme electoral fait qu’on peut etre 1er ministre avec seulement 25% de l’electorat votant pour vous, et que l’opposition tory est minable (Cameron est d’ailleurs fier de se presenter comme l’heritier de Blair…).
En tout cas, on a la preuve que la fréquentation d’Anthony Giddens n’a pas suffit pour que quelque chose passe du cerveau de ce dernier à celui de Tony Blair.
Pour changer et ne pas citer systématiquement Rancière, on peut également se reporter à l’ouvrage "la république des fonctionnaires" qui décrivait ce même mécanisme de dépolitisation de la vie politique en France et le fondait sur le recrutement socio-professionnel des hommes politiques.
Par ailleurs, on a là, enfin je crois, la raison de l’échec du TCE. Peut importe ce qu’il était, il a été vécu comme l’expression d’un discours dominant qui tourne en se légitimant tout seul à partir de mots valises "progrès", "l’Europe c’est l’avenir", "modernité", "s’ouvrir au monde" etc. (lors d’une réunion publique, j’ai même entendu "il faut voter oui, parce que oui, c’est aller de l’avant, tandis que voter non c’est pas positif, c’est reculer") quoi qu’on pense de Onfray, il avait bien exprimé ça dans un texte qui disait grosso modo "ils n’ont pas vraiment d’argument sauf de faire culpabiliser tous ceux qui sont trop cons pour ne pas reconnaître le progrès". Bon, je voudrais pas ouvrir la porte aux trolls, mais tout ça pour dire qu’on est face à un problème assez général dont Blair constitue la caricature. C’est après tout pas très différent de l’ouverture de Sarkozy, ou plus encore des positions de Bayrou qui avait poussé cette rhétorique encore plus loin pendant la campagne (je prendrais les hommes compétents qu’ils soient de gauche ou de droite).
@clic: pas faux, c’est un peu ce que je voulais dire. Je crois qu’il y a là tout simplement l’expression du fait que l’histoire ne s’écrit plus chez nous, mais ailleurs.
(Hé hé, c’est le genre de constats grandiloquents qui exaspère les maîtres des lieux).
Lecteur fidèle,
Je suis un peu déçu par cet article dans ce blog.
Une des questions soulevée par ce post est la suivante
Jusqu’où faut-il conduire l’expertise avant de faire un choix politique? A partir de quel seuil de connaissance peut-on engager des réformes?
Comment éviter la confiscation du débat politique au profit d’experts-politiciens auto-proclamés, alors qu’en définitive toute décision politique, aussi informée soit-elle, comporte un élément d’arbitrage?
Eh bien vous donnez à travers votre analyse du discours de Blair une réponse peu satisfaisante et qui est souvent en contradiction même avec la logique de ce blog, qui est justement en partie d’éclairer les choix des politiques économiques.
Reprenons un de vos exemples: l’emploi à vie c’est fini, vraiment? Soit.
En effet, si on étudie par exemple les discours politiques, syndicaux, patronaux sur ce thème depuis en gros la fin des années 1970 et qu’on croise cela avec les stats du marché de l’emploi, il devient clair que le développement de l’emploi atypique est instrumentalisé de toutes parts. On part du constat que les CDD et les CTT progressent et on agite alors le chiffon rouge de la fin du CDI et de l’emploi à vie (en dépit des chiffres disponibles) pour soit: 1) protéger les insiders 2) justifier une flexibilisation du marché du travail (mais qui prend généralement la forme d’un développement de l’emploi atypique, sans toucher au CDI, aujourd’hui presque à son plus haut niveau historique de protection légale).
Danger de la rhétorique du changement donc.
En définitive, je semble d’accord avec vous: les choses bougent beaucoup moins que ce qu’il peut sembler. La rhétorique du changement sert souvent à déguiser des arbitrages cachés au public. En tant que telle, elle est dangereuse et aboutit à une confiscation du débat politique. Mais 1) ce n’est pas nouveau en politique. Blair a beaucoup travaillé là-dessus, mais on rappelle qu’il a dû sortir le Labour de sa vision un peu passéiste du monde (ce que le PS n’a pas réussi à faire totalement 2) ce n’est pas le monopole des politiques; en France au MEDEF, à la CGT etc. on sait faire aussi; et les commerçants dont le pouvoir d’achat baisse de 20% tous les ans; et la destruction de la famille etc.
3) la rhétorique de l’immobilisme est tout aussi dangereuse: ex= le "modèle social français", c’est quoi sinon une apologie du statu quo; et les "acquis sociaux"; la tradition du café-cigarette? la préservation d’une agriculture bien de chez nous? etc. etc.
Et en définitive, les choses changent quand même non? Internet c’est nouveau et ça a créé plus d’emplois aux E-U qu’en France, le chômage de masse dans les années 60-70 ça n’existait pas etc… (désolé je vais vite c’est un peu faible)
Le problème ce n’est pas celui de la rhétorique du changement et de l’action, c’est celui de l’identification des facteurs et des manifestations des bouleversements sociaux. Voilà la tâche des politiques accompagnés des experts en amont de la prise de décision.
L’essence de la politique, ce n’est pas d’arbitrer sur des sujets indécidables, "éthiques".
Vous dîtes:
"c’est la nature même de la politique : dans une société complexe, faite d’intérêts divergents, la politique consiste à trancher entre les différents intérêts."
Bof.
Vous semblez nier qu’il y ait un intérêt général et qu’un citoyen soit à la fois un individu et un membre du corps social. ensuite vous semblez supposer que les intérêts sont toujours identifiables et séparés les uns des autres. c’est oublier que la femme de Monsieur A, fonctionnaire, peut être employée dans le privé, leurs enfants intermittents du spectacle, trader et chômeur, leurs parents retraités de l’agriculture et du petit commerce et que leurs meilleurs amis possèdent une licence de taxi dans Paris.
La rhétorique du progrès, si elle ne cherche pas à dissimuler d’autres intérêts cachés, peut aussi se lire comme une évolution – influencée par le vocabulaire de l’entreprise – de la notion d’intérêt général, notion dont vous faites peu de cas. Il est vrai qu’elle n’est plus réellement à la mode aujourd’hui chez les économistes (voir la proposition par ex. de Wyplosz: "La fin des privilèges, payer pour réformer"; et on fait comment pour indemniser ceux qui ont été lésés toute leur vie par une société injuste?).
Prétendre que la politique doit d’abord se préoccuper de choses indécidables, et donc faire des choix éthiques, c’est ouvrir la porte aux politiques les plus idéologiques contre lesquelles vous sembliez lutter dans votre blog (et c’est au passage en contradiction totale avec la conception de la démocratie de Rousseau).
Le seul bon point de Blair, c’est de ne pas avoir remis trop en cause les reformes de Thatcher.
Je crois qu’il faut par ailleurs compter dans les personnes soutenant les approches managériales en France l’ensemble de celles qui en ont été victimes.
Je m’explique : il y a bien des façons en pratique de concevoir la société de nos jours. Une fraction très significative de la population s’est déjà fait mondialiser la gueule contre son gré et y a souvent beaucoup perdu ce faisant. Les bénéfices de la managéromondialisation qu’ils ont subi, ils ne les percevront que lorsque le reste de la société l’aura, à son tour, subie : alors, ils votent pour les hommes politiques décidés à appliquer, à leur tour, les méthodes de la mondialisation sur ceux qui y ont jusqu’alors échappé : par intérêt personnel tout d’abord, mais aussi par souci de justice sociale.
Dès lors, nul diagnostic n’est nécessaire à la "réforme", puisque dans l’esprit de ceux qui la soutiennent, ce n’est qu’une question d’équité et non plus d’efficacité.
trackback manuel : http://www.vicnent.info/blog/ind...
Sinon, dans le titre, to Fisk, avec un ‘t’, je vois bien, mais avec un ‘k’, ça veut dire quoi ? (Et je pose ma question de Londres)
voilà l’explication. C’est du jargon de blogosphère…
Le danger du Fisking est de mener à une lecture peu objective, ou en tout cas d’en donner l’impression. Personnellement, je ne suis pas encore convaincu, même si vous avez peut-être raison sur le fond.
Merci pour ces clefs de lecture trés utiles sur le managérialisme. Surtout quand comme la pluspart des salariés, on a le droit aux discours sur la proactivité et l’adaptation au changement en dolby stéréo au boulot, toute la journée.
Je comprends bien mieux pourquoi la stratégie de mon patron est la bonne (en tout cas c’est la seule qu’on suivra) 😉
Jai remarqué à la lecture, que quelque chose ne collait pas, aussi bien dans le discour de Blair que dans les commentaires. J’ai l’impression que ça vient tout bêtement du fait que la mondialisation n’est pas l’avenir inéluctable mais bel et bien un état de fait (donc un changement du passé avec lequel on vit déjà aujourd’hui). Il reste bien encore tout un tas de chose à mondialiser comme les services (et d’autres qui j’espère ne le seront jamais comme ma compagne :)). Mais tout de même, on parle de quoi là ? c’est quoi le gros changement de la mondialisation qui va tout nous changer dans les 2 prochains mois et qui nécessite qu’on fasse allégeance aux activistes débordant sous peine d’être des gros boulets pour la société ? D’ailleur, je remarque au passage qu’ils nous demandent, ces managérialistes, de les plébisciter à l’occasion d’un scrutin, alors que de toute façon il n’y a pas d’alternative (ben oui, puisqu’on vous dit que le PS c’est le passé et le centre, ben c’est pas aussi dynamique que Nicolas).
Finalement, ces activistes n’auraient-ils un temps de retard (en retard donc pas bien) ?
Toujours est-il que la notion de leader qui se contente de suivre les rails d’une destinée déjà toute tracée, et bien au final, c’est pas si glorieux. Mais bon, quand on a réussi à passer à la TV, en bien ou en mal, de toute façon, le contrat est rempli et la cote de dynamisme est renforcée (ce qui justifie la prochaine future demande d’allégeance et donc le prochain passage TV).
C’est tout simplement de la plus pure langue de bois: pas de justification réelle ni même de véritable but affiché mais la certiture d’avoir raison. Mais je crois que ce genre de discours se retrouve chez n’importe quel homme politique.
De plus, je ne pense pas que l’on pouvait attendre autre chose que çà d’un homme politique invité par un parti auquel il est censé être opposé.
En revanche la confusion entre état et entreprise (qui n’occupe pas tant de place que çà dans ce discours) est effectivement très regrettable. Son hôte semble également faire cette confusion (je pense bien sûr à l’évaluation des ministres par le cabinet Mars).