Alexandre, suite à un mail où je lui signifiais que le triptyque bébé-boulot-déménagement me laissait peu de temps, m’a insidieusement répondu : “Sinon, pour le blog, je t’aurais bien vu t’énerver sur ça “. Qu’était donc “ça” ? Simplement un texte publié aujourd’hui sur debat2007, qu’on peut lire ici. Las… Je n’ai plus la force de m’énerver. Et quand je ne m’énerve plus, je me marre (après tout, il y en a bien qui vomissent quand ils sont contents…). Je me disais qu’il était sûrement important de répondre de façon posée à cet article très discutable. Oui, mais voilà, il est 23h51 et j’ai franchement sommeil. Donc il m’est venu une super idée.
Je demande à tous les lecteurs du site qui en auront envie de critiquer le texte sur les aspects qui leur paraissent incorrects, imprécis, caricaturaux et d’expliquer pourquoi. Mais… car il y a un mais, j’aimerais que ce soit fait sur un mode économique, peu politique. En reprenant, donc, l’angle du discours revendiqué par Henri Prevost dans son article. Si ça vous branche et que j’ai assez de contributions, j’en ferai une synthèse d’ici quelques jours. Il n’est pas question de pondre des commentaires de haut niveau, mais essayons d’éviter le café du commerce.
Je rappelle que le sujet, en résumé, c’est le lien entre performance du système scolaire, temps de travail et rémunération des profs. Sans faire de mystère, mon point de vue est que le texte de Prevost est absolument insipide. Mais terriblement en phase avec ce qui se fait dans l’enseignement secondaire depuis quelques temps : une gestion comptable, au jour le jour, qui ne peut satisfaire personne et laisse persister gaspillages tout en réduisant les incitations au travail des enseignants, y compris des plus motivés.
Ah, au fait, je vous promets, il m’arrive fréquemment de me faire des ennemis de classe ou de caste en salle des profs, en raison de mes points de vue sur le système scolaire. Donc, ce que je reproche à Prevost n’est pas de soulever le “tabou” de notre temps de travail. On en reparle ?
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Effectivement, l’article est plutôt insipide. On pourrait le résumer en « Le ministère va faire des économies en mettant de l’ordre dans la rénumération des profs et ça va être bien pour les élèves ».
Je me lance sur quelques constatations basiques :
* les indemnités versées aux profs, même pour des raisons dépassées (« préparation des cartes ») représentent un moyen d’améliorer leurs revenus. En les supprimant, on diminue le salaire des profs, donc l’attractivité du métier, ce qui incite les étudiants à éviter cette carrière, ou à travailler dans le privé, ou à s’expatrier. Comme par ailleurs, l’état recrute automatiquement (grosso-mode) un certain nombre de profs par an, si ce métier est moins attractif, les postes vacants vont être occupés par des gens moins brillants, moins motivés, moins bons pédagogues. Ainsi diminuer l’attractivité du métier d’enseignant-fonctionnaire va mécaniquement diminuer la qualité de l’enseignement public.
* Je voudrai rappeler que l’enseignement est un métier, un vrai. Un enseignant reçoit une formation initiale (en France, elle est très académique), et accumule ensuite des années d’expérience, de savoir-faire, de connaissance des élèves et du terrain. Ce savoir-faire global, il le vend à l’état : non seulement il dispense un certain nombre d’heure de cours, mais il assure aussi l’encadrement des concours publics (bac, CAPES, agrégatio, concours des grandes écoles), il peut aussi assurer un travail d’encadrement des tâches d’enseignement (conception des programmes, conseil aux élèves et au parent, orientation).
Par la suite, sa carrière peut évoluer : il peut vouloir devenir inspecteur, formateur en IUFM, proviseur, ou même recteur, etc.
Je ne suis pas économiste, mais ne peut-on pas parler d’un véritable marché du travail, ou les enseignants apportent leur travail et l’état une rénumération sous formes d’heures supplémentaires, de dispenses horaires, etc. ?
* Car contrairement à ce qu’on peut penser de l’extérieur, le système actuel, à défaut d’être économiquement clair, est relativement souple. Le ministère dispose d’un large panel de moyens pour recruter la main d’œuvre dont il a besoin pour les différentes tâches. L’enseignement en classe n’en étant qu’une parmi beaucoup.
* Bien, maintenant le lien entre temps de travail et rénumération des profs. Moi, comme je dis toujours, je veux bien qu’on surveille mon temps de travail, mais à condition qu’on me fournisse, au lycée, un bureau dans lequel je suis censé passé tant d’heures par semaine. Or, pour des raisons immobilières évidentes, c’est impossible.
Ainsi, on peut « évaluer » le temps de travail des profs, mais il est matériellement impossible de le fixer, de l’imposer, etc.
Mais somme toute, est-ce si grave ? Après-tout, de nombreuses professions sont payés à la tâche et non pas à la durée : un écrivain qui vend des romans, un médecin libéral, une prostituée, etc. Le principe selon lequel un prof est payé pour dispenser un certains nombres d’heure de cours (c’est sa tâche) n’est pas absurde.
* Bon, je ne suis pas économiste, mais prof de math. Alors la notion de « performance du système scolaire » me semble terriblement imprécise. Cette performance, il faudrait la mesurer. Or dans ce domaine, chaque instrument de mesure peut-être détourné. Un exemple : les résultats du bac. Hier, peu de gens avaient le bac, ce qui impliquait beaucoup d’exclus. Or la lutte contre l’exclusion sociale est un objectif affichée de l’EN.
Aujourd’hui, énormément de monde a le bac, le niveau de celui-ci est devenu si bas, que plus personne ne fait confiance a un bachelier. On a amélioré spectaculairement un indice, mais je pense que le système scolaire est devenu moins performant.
Question : comment mesurer cette performance de manière fiable ? Comment peut-on comparer différentes « économies scolaires » ?
Merci pour ce premier commentaire. J’espère que d’autres suivront. Je sens que, finalement, je pourrais avoir plus de boulot pour synthétiser l’ensemble qu’en pondant un texte ad hoc. :o)
C’est sans doute ma déformation de thésard en organisation industrielle, mais le principal manque de l’article que vous citez me semble être sa totale méconnaissance d’un quelconque mécanisme d’incitations. Il semble partir du principe que le travail fourni par les enseignant est complètement indépendant de leur rémunération. Evidemment, prendre le problème sous cet angle obligerait à poser les questions qui fâchent, concernant la définition de ce qui fait un "bon" enseignant, de la différence de travail fourni entre celui qui sert le même cours depuis dix ans et l’enseignant tenu par un programme d’examen qui change tous les ans, l’évaluation des enseignants ou encore la différence de travail à faire en fonction du niveau du public au départ. Bref, toutes choses qui induiraient deux idées aussi pénibles à admettre l’une que l’autre : d’une part les enseignants font un vrai travail, et d’autre part il pourrait être intéressant que leur rémunération soit moins uniforme, ce qui ne veut pas dire, loin de là, moins importante.
leconomiste : On a la même déformation visiblement… Tout ce que vous écrivez est exactement ce qui saute aux yeux du scientifique lugubre.
Le texte pointé me semble caractéristique d’une certaine conception du métier d’encadrement dans la mesure où il ne définit ni la situation qu’il décrit (supposée connue du lecteur) ni l’objectif auquel le texte dans sa globalité se propose de parvenir, ni même la nature de la contribution qu’il se propose d’apporter dans sa globalité à quel débat.
Au delà des affirmations gratuites telles que, apr exemple : "le temps de travail des enseignants est difficile à apprécier de façon très précise, car, au-delà des obligations de cours devant les élèves, ils ont, outre la participation à un certain nombre de réunions, des heures de préparation dont la durée peut être très variable selon le niveau d’enseignement et la matière.", qui me semblent davantage relever de la mise en garde du lecteur averti que du raisonnement à haute voix, il me semble qu’on trouve le coeur de l’argument dans :
"il y a là l’opportunité d’une réforme dont les élèves seraient les vrais gagnants."
"Parallèlement, les formations des enseignants pourraient être en partie dispensées hors du temps scolaire, pendant les vacances notamment, ce qui permettrait d’économiser des moyens non négligeables aujourd’hui consacrés aux professeurs remplaçants, payés pour assurer les cours de leurs collègues en formation.
Les élèves seraient les principaux gagnants de cette réforme. En outre, des économies non négligeables pour le budget de l’Etat pourraient être dégagées, de l’ordre de plusieurs centaines de millions d’euros, et cela même si cette réforme était accompagnée d’un réexamen du régime de primes des enseignants, pour l’instant très mal dotés, comparés à leurs autres collègues de la fonction publique. Mais, à la différence des améliorations des conditions de rémunération des enseignants jusqu’ici accordées, celle-ci aurait une contrepartie significative et conduirait à une amélioration de l’efficacité du système éducatif."
Je résumerais l’argument ainsi : "Faire en sorte que l’enseignant assure ses cours devant ses élèves habituels plutôt que de se faire remplacer quand il part en formation est bon pour les élèves", ce qui est sans doute exact (ou, du moins, "sonne juste").
Que cela permette d’économiser des centaines de millions d’euros est, à mes yeux du moins, surprenant.
L’auteur semble suggérer que même si tout l’argent économisé était restitué aux enseignants sous la forme de primes, il y aurait un bénéfice en termes de qualité de l’enseignement dispensé.
Sous un angle économique, l’auteur me semble insinuer que la formation pendant le temps de travail pourrait être dans certains cas perçue comme un moyen de réduire le travail qu’on fournit en contrepartie du salaire qu’on perçoit, et donc, que la disparition de ce dispositif pourrait, au besoin, être compensée par une hausse de la rémunération de l’enseignant, l’organisation gagnant en contrepartie en "qualité" par la continuité du service d’enseignement délivré.
"une économie de 3 700 postes au seul titre des décharges"
La conversion heures gagnée en postes est inexacte. En grappillant des heures de-ci de-là, on va réussir à gagner des morceaux de postes, mais pas des postes entiers. Additionner une heure de math + une heure de français + une heure d’anglais ça ne fait pas un poste, juste des diminutions de salaire.
"les formations des enseignants pourraient être en partie dispensées hors du temps scolaire, pendant les vacances notamment, ce qui permettrait d’économiser des moyens non négligeables aujourd’hui consacrés aux professeurs remplaçants, payés pour assurer les cours de leurs collègues en formation."
Si les formations sont dispensées majoritairement hors période scolaire, de quoi vivrons les formateurs sur la période scolaire.
Une fois de plus on retrouve un vieux problème typiquement français. La formation continue est rangée dans les coûts et pas dans les investissements. Effectivement pour réussir la formation continue du personnel il faut un pool de personnel supplémentaire (les professeurs remplaçants). Si cela permet d’améliorer l’efficacité des profs ce n’est pas grave.
"les formations des enseignants pourraient être en partie dispensées hors du temps scolaire, pendant les vacances notamment, ce qui permettrait d’économiser des moyens non négligeables aujourd’hui consacrés aux professeurs remplaçants, payés pour assurer les cours de leurs collègues en formation."
– les profs en formation sont remplacés? (c’est nouveau ça!)
– Lorsque je travaillais dans le privé (je suis actuellement contractuel dans les services administratifs d’une université), ma formation était assurée (évidemment) pendant mon temps de travail (principalement des formations hygiène et sécurité): jamais au grand jamais on ne m’a demandé de poser un jour de congé pour suivre ses formations. Non, cet argument des formations prises pendant les congés c’est juste une autre façon de dire que les profs sont des branleurs qui ont trop de vacances. (sinon, c’est vrai que c’est certainement plus prtique pour un élève d’avoir un seul prof par matière et par an, qu’il ne tombe jamais malade, qu’il soit brillant et exellent pédagogue oui, c’est vrai mais ça ne fait pas avancer le scmilblick. A mon avis, soit les formations sont sans intéret (j’y crois pas) elles doivent alors être abandonnées. Soit elles sont importantes…. et alors 2 solutions se présentes: le système actuel ou l’incitation financière à les suivre sur son temps libre (soit en devant récupérer les heures: ouille pour les administratifs gérant l’emploi du temps, soit sur les congés dur pour les organismes de formations(voir commentaire précédant).
Sinon, il est difficile de discuter sérieusement de cet article: je n’y ai pas trouvé grand chose d’autre que l’argument ‘les profs n’en foutent pas une rame’ et je ne crois pas avoir lu d’arguments sérieux pour alléguer cette affirmation.
Les profs ont des vacances oui, c’est vrai, mais c’est dans leur contrat, et on peut imaginer sans trop se forcer que l’évolution de leur salaire a tenu compte de ce fait (selon cette page de l’INSEE: http://www.insee.fr/fr/ffc/chifc...
les cadres A (fonction publique: concours à Bac+3 comme le Capes ou le concours de professeur des écoles) ont un salaire mensuel net médian de 2490 euros soit 29880 euros annuel. Les enseignants ont un salaire net mensuel médian de 1900 euros soit 22800 euros annuels. Ce salaire annuel correspond à 9.2 mois de travail d’un cadre A[*] (on pourrait imaginer que c’est une prise en compte du temps de vacances des enseignants, non?)
[*]-Les cadres du privé gagnent en moyenne plus que les cadres A de la fonction publique (hors BTP) selon cette enquète INSEE.
– Il y a certainement dans les cadres A de la fonction publique pris en compte dans l’enquète les hauts fonctionnaires qui ont naturellement un salaire supérieur à celui d’un chef de service ce qui doit un peu relever le salaire médian de ces cadres A, les saliares des enseignants étants plus homogènes
– de la même façon pour les autres cadres du privé, il y a également un certain nombre de cadres sup ayant des salaires très supérieurs au salaire médian
– mais dans ces deux cas, le salaire donné étant un salaire médian (et non moyen), et le nombre de cadre ayant des très hauts revenus étant certainement minoritaire dans leur branche, mon calcul doit être relativement pertinant (si ce n’est pas le cas, je m’excuse de vous en avoir imposé la lecture)
Dans le prolongement des remarques de leconomiste, concernant l’adaptation des rémunérations à la variété des situations des enseignants, je voudrais faire deux remarques:
1/ Une bonne incitation (pour des enseignants déjà sélectionnés) fait dépendre la rémunération des efforts founis. Mais il y a nécessairement un problème de mesure de l’effort des enseignants pour y parvenir. La plupart des indices globaux sont trop simplistes pour approximer la complexité des situations et leurs évolutions (cf. Paul). Et il me semble que ce que dit la théorie c’est tout simplement que la décentralisation est souhaitable. Il me parait en effet acceptable de considérer que le proviseur et son équipe ont une information suffisante sur ce que font les profs de leur établissement. L’octroi d’une incitation efficace ne peut donc se faire par le ministère ou le rectorat, mais par le proviseur. C’est un autre sujet tabou s’il en est.
2/La rémunération dépend basiquement de l’offre et de la demande de travail, et il serait regrettable de considérer une rémunération uniquement fonction de l’effort optimal. S’il y a peu d’enseignants cherchant enseigner en banlieue parisienne et beaucoup en EPS dans le centre des villes de Province, c’est probablement parceque la rémunération (au sens large, incluant toutes les gratifications) par rapport au boulot demandé est probablement trop faible dans un cas et trop forte dans l’autre.
L’article est assez creux, la rhétorique de la levée des tabous permet de faire de l’esbrouffe sans proposer grand chose de tangible.
1)Après avoir affirmé qu’ "il sera souhaitable d’engager la réflexion au-delà, sur la méthode de comptabilisation des heures de travail des enseignants", et reconnu que "le sujet est complexe : le temps de travail des enseignants est difficile à apprécier de façon très précise", l’auteur ne propose rien de précis pour faire cette évaluation. On peut supposer comme le premier commentateur que pour exercer ce contrôle il serait demandé aux enseignants de faire leurs préparations et leurs corrections dans l’établissement,mais outre les problèmes matériels à régler (locaux), cela ne permettrait de contôler qu’un temps de présence et non un temps de travail effectif (à moins de créer un corps de contrôleurs spécialisés: vivent les économies!).
Au final il n’est nullement prouvé qu’il soit plus facile de mesurer le temps de travail des profs que de mesurer leur efficacité.
2) Pour justifier qu’on s’attaque enfin au "tabou" du temps de travail des profs, d’une part l’auteur invoque des raisons d’efficacité (il évoque "une réforme dont les élèves seraient les vrais gagnants", et indique des économies réalisables) d’autre part il se place "sur le plan de la transparence et de l’équité" (je suppose qu’il veut dire qu’il est juste que les profs qui travaillent plus gagnent plus).
Ces deux ordres de justifications ne sont pas équivalents. L’auteur peut se réjouir de la suppression des heures de première chaire parce que cela permet de réduire les couts (concédons-lui que ça n’affectera pas sensiblement les performances des profs); mais du point de vue de l’équité cette suppression est discutable : après tout ce dispositif permettait de prendre en compte le fait que le travail de préparation et de correction n’est pas le même en 6e et en terminale.
Cette confusion des motifs s’explique peut-être parce que l’auteur présuppose que les profs qui travaillent le plus sont aussi les plus performants. Dans ce cas, il se trompe: un prof débutant fournit davantage de travail de préparation qu’un prof d’expérience qui fait grosso-modo les mêmes cours d’une année sur l’autre, ses cours sont pas meilleurs pour autant.
Non seulement il n’y a pas de relation simple entre temps de travail effectif et efficacité, mais il n’y a même pas de relation simple entre temps de travail effectif et motivation : un prof qui travaille plus qu’un autre n’est pas nécessairement plus motivé, il se peut qu’il ait simplement plus d’élèves, plus de classes différentes, ou qu’il doive s’adapter à un changement de programme qui n’affecte pas l’autre.
3) Concernant la seule mesure concrète proposée (le déplacement des formations hors de la période scolaire) j’y serais plutôt favorable, mais j’ai tendance à penser que cela n’aurait qu’une incidence limitée sur l’efficacité du système. De plus, il me semble qu’il faudrait distinguer le cas formations obligatoires et celui des formations choisies par les profs / les formations de courte (un ou deux jours) et de longue durée (ces dernières étant facultatives et donnant lieu nécessairement à remplacement). En déplaçant les formations pendant les vacances, ne court on pas le risque de réduire l’incitation à choisir des formations (sauf à rémunérer celles-ci)?
Merci à tous ceux qui ont déjà contribué. On continue encore un peu ?
Cela n’a pas de lien immédiat avec l’article dont nous parlons, mais le ministère des finances vient de publier un audit sur la grille horaire des enseignements au lycée (http://www.audits.performance-pu... ).
Les conclusions sont assez étonnantes, du moins pour ceux qui sont familiers avec la rhétorique des syndicats d’enseignants : les lycées proposent trop d’heures d’enseignements, et cette offre pléthorique n’améliore pas les performances de l’éducation nationale.
Je vous passe les détails de l’analyse, mais voici quelques points relevés dans le rapport :
* l’idée centrale est qu’entre le dédoublement généralisé des classes et la multiplication des options, l’éducation nationale en vient à financer beaucoup trop d’heures. Pour ne donner qu’un exemple : en 2005, en seconde, pour un horaire-élève moyen de 1044 heures, l’EN finance 1458 heures-enseignants, soit un ratio de 1,39.
Il est vrai que la seconde est un niveau de détermination, ce qui exige beaucoup d’options, mais le ratio est aussi elevé en Terminale S (1,34) ou en Terminale ES (1,17).
* Le plus étonnant, c’est que ce modèle de dépense horaire n’est absolument pas performant. D’autre pays pratiquent des enseignements beaucoup plus souples. Par exemple la Finlande, un des pays qui a les meilleurs résultats dans les comparaisons internationales, proposent un enseignement modulaire sur 2 à 4 ans, pour un horaire-étudiant moyen de 713 heures !
* Contrairement à ce qu’on entend parfois, l’Etat dépense de plus en plus d’argent pour l’enseignement *par lycéen* : la dépense par lycéen a crû de 50% entre 1990 et 2004 (l’inflation n’a cru que de 28% dans le même temps). Mais cette dépense est passée quasi-intégralement dans les dépenses de personnels.
Conclusion logique : la manière dont les enseignants passent leur temps au lycée est un problème beaucoup plus grave que celle dont ils le passent à la maison !
* Ce que montre aussi clairement le rapport, c’est que la répartition de cet horaire chargé ne se fait pas de manière très rationnelle : elle doit plus aux pressions politiques, aux exigences des parents d’élèves, à la réputation des lycées (les options rares sont un élément important du standing des lycéens), qu’aux nécessités pédagogiques. D’ailleurs, la coordination entre les différents intervenants est minime, pour ne pas dire indétectable.
Moi je pense très fort aux syndicats qui demandent sans cesse de plus en plus d’heures et aux enseignants qui défendent le moindre quart d’heures alloué dans leur discipline. Tout se passe comme si tout le monde se battait pour avoir le plus d’heures possibles, dans une pagaille magnifique et dispendieuse.
* Toujours en terme de comparaison internationale, vous pouvez aussi lire le rapport « Regard sur l’éducation 2005 » de l’OCDE ( http://www.oecd.org/dataoecd/40/... ).
On y voit que la France dépense sensiblement autant que ses voisins dans l’enseignement (mais moins, par exemple, que les USA) mais pas de la même manière : la dépense par étudiant dans le supérieur est de 15% inférieure à la moyenne de l’OCDE. C’est avant le bac que la France dépense plus d’argent que ses voisins.
Autre chiffre, qui m’a bien surpris : en terme d’encadrement, la France est en ligne avec… les Etats-Unis ! Le personnel enseignant et non enseignant représente environ 120 personnes pour 1000 élèves dans les deux pays, et 70 enseignants pour 1000 élèves en France contre 60 enseignants pour 1000 élèves aux USA.
Conclusion suprenante : si l’EN est un mammouth, ce n’est peut-être pas par la taille !
Attention quand même : le rapport se sert d’indicateurs globaux du système éducatif français pour le comparer à d’autres et y puise des arguments pour souligner son propos dans le lycée, ce qui n’a aucun sens.
Les indicateurs globaux enregistrent la peformance globale du système, et non celle du lycée, en particulier les effets du collège. Par exemple les élèves quittant le système éducatif sans diplôme sont-ils révélateurs des performances du lycée ? J’en doute puisque pour arriver au lycée, l’élève detient quasiment automatique le diplôme national du brevet.
De la même manière, dans les recommandations du rapport, on insiste sur la continuation des dédoulements en langue alors qu’en introduction on souligne le problème de la consommation d’heures des dédoublements… Or s’il y a bien des disciplines consommatrices d’heures se sont bien les langues, et ce depuis le colège. Pour bien comprendre, il faut savoir qu’un établissement reçoit l’équivalent de 3h par division de 30 élèves pour la langue vivante 2 en quatrième et en troisième et ce, qu’il propose une seule V2 ou trois (parfois quatre) différentes. Or, il suffit que deux LV2 soient proposées pour que l’organisation de l’enseignement nécessite 6h. Dans les grands établissements il est facile de regrouper les LV2 par classe ou par division (sans surcoût), mais dans les petits il faut piocher des heures dans le volant d’heures en sus, et ces heures ainsi dépensées ne pourront servir à autre chose (soutien dans d’autres matières, innovations pédagogiques, etc.).
De la même manière la moyenne d’élèves devant un prof n’a aucun sens. En seconde, par exemple, l’horaire de maths et le suivant : 3h devant la classe entière (36 élèves), 1h devant la moitié (18 élèves), 1h devant l’autre moitié, 1h d’aide individualisée devant quelques élèves, disons 6. Soit une moyenne de 25 élèves devant le prof par heure. Peut-on en conclure que cela fait trop de profs par élèves ? Et si oui, quelle(s) heure(s) doit-on faire sauter ? L’aide indivdualisée ? Cela ferait monter la moyenne ! Mais quid du profit pour les élèves ?
Par ailleurs le rapport semble sous-entendre que les heures de dédoublements systématiques (les demi-groupes) devraient plutôt être affectées dans des heures de soutien. A-t-on une étude sérieuse là-dessus ? Je n’en ai pas entendu parler. L’impression qu’en ont les enseignants (mais cela reste une impression, il faudait trouver ou faire une étude là-dssus) c’est que les heures de dédoublement sont bien plus utiles que les heures d’aide.
Pas un mot sur les pratiques des établissements qui fabriquent par le jeu des options des classes de niveau (qu’on sait par ailleurs être dommageables à l’ensemble des élèves) ?
Pas un mot sur les contenus des enseignements, là où se situe, à mon avis, tout l’enjeu.
L’ensemble de l’étude me semble donc globalement un peu léger.
Si des propositions me semblent intéressantes, ces propositions comme les critiques ne me semblent guère étayées et je n’arrive pas à distinguer ce qui relève des idées reçues de ce qui relève d’une étude approfondie.
Je ne dis pas qu’il ne faut rien changer, mais il me semble qu’il faudrait une étude un peu plus sérieuse.
Il en existe plein notez bien, en sociologie ou en sciences de l’éducation, mais les rapporteurs préfèrent visiblement des petits caculs de moyenne.
Cher Nathanaël, je propose d’éviter d’orienter le débat sur la politique de l’enseignement, et de se cantonner, econoclaste oblige, à l’aspect économique.
Le rapport dont il est question est issu du ministère des finances, il est donc bien inutile de lui reprocher de ne pas se pencher sur les contenus des enseignements et sur l’opportunité pédagogique du système actuel : ce n’est aucunement son objectif.
La question qu’il pose est la suivante : les heures des professeurs sont elles dépensées efficacement ? Par exemple, les heures d’enseignement en groupe. D’un point de vue strictement économique, que je prend ici à dessein, il serait plutôt intérressant de fixer un effectif plancher pour ces groupes (mettons 12 élèves) et de s’astreindre à s’organiser pour atteindre cet objectif, au niveau des groupes d’établissements.
Je sais qu’il y a des oppositions dogmatiques à ce genre d’idée : cela romprait le dogme de l’égalité entre établissement, le dogme de l’uniformité de l’EN sur le territoire, etc.
Mais c’est exactement ce dont il est question dans ce rapport : évaluer le coût de ces dogmes. Ensuite, on peut continuer à y tenir ou pas, c’est une autre question, mais sachons au moins ce qu’il nous coûte.
Vous critiquez l’utilisation d’indicateurs globaux : mais ces indicateurs portent sur une même classe d’âge pour différents pays. Ils me semblent tout à fait pertinent. Certes les années de collège et de primaire ont une influence sur le niveau des élèves en fin de lycée. Mais je ne vois pas par quelle coup de baguette magique on pourrait en faire abstraction dans une étude quelconque…
Pour information, si une critique plus pédagogique de l’organisation horaire des lycées vous intéresse, vous pouvez lire ce rapport de l’inspection générale de l’EN : trf.education.gouv.fr/pub…
Je ne critique pas les indicateurs globaux en général, je critique le fait de prendre des indicateurs globaux qui mesurent une chose (la réussite globale d’un système éducatif) pour leur faire dire autre chose (la réussite des lycées). Je sais parfaitement qu’on DOIT faire des statistiques pour ce genre d’étude.
Si le rapport se basait sur les indicateurs globaux concernant les lycées, je n’aurais point objecté.
Bien à vous.
Nathanael dixit:
"Les classes de niveau (qu’on sait par ailleurs être dommageables à l’ensemble des élèves)."
Qui est ce on qui sait ?
Ceux qui ont étudié le phénomène : des sociologues.
Sur des établissements ayant le même profil, et par le biais de tests uniformisés, ceux pratiquant des classes de niveau ont globalement des résultats moins bons que les autres.
De nombreuses explications viennent expliquer le phénomène, en particulier l’effet pygmalion. On doit trouver sur internet des comptes rendus de ces études.
Lire ici par exemple : http://www.cnrs.fr/Cnrspresse/Ar...