Que raconte le modèle de choix intertemporel d’Irving Fisher ?
Rédacteur : Stéphane Ménia
Hypothèses
Le modèle est un modèle intertemporel, les agents font leurs choix de consommation et d’épargne sur plusieurs périodes. On se limite à deux périodes pour la simplicité de l’exposé, mais on peut généraliser sur un nombre infini de périodes.
C’est un modèle microéconomique qui donne par sommation une fonction de consommation ou d’épargne macroéconomique.
Les agents sont néoclassiques, c’est à dire qu’ils maximisent une fonction d’utilité (intertemporelle) qui dépend de la consommation de la première période (C1) et de la seconde période (C2). Ce calcul se fait en tenant compte d’une contrainte de budget, l’agent ne peut consommer plus que ce que son revenu (sur deux périodes) ne le lui permet. Les revenus et consommation de la seconde période sont évidemment actualisés par un facteur d’actualisation (1/(1+r))qui dépend du taux d’intérêt r. A partir du calcul de maximisation de l’agent, on déduit la forme de sa fonction de consommation (d’épargne) et on peut expliquer pourquoi certaines variables ont une influence sur la consommation.
Formellement le modèle peut s’écrire de la façon suivante :
max U(C1 , C2)
sous la contrainte de budget p1C1 + p2C2/(1+r) = W
C1 la consommation en période 1, C2 la consommation en période 2, p1 les prix en période 1, p2 les prix en période 2 et W le revenu de l’agent.
Si on suppose les prix constants entre les deux périodes, p1 = p2 = p, on peut écrire :
C1 + C2/(1+r) = W/p
Principe et résultats du modèle
L’agent doit faire un choix entre consommer maintenant et consommer demain. Normalement, il est impatient et raisonnant selon le principe de “mieux vaut un tien, que deux tu auras”, il préfère consommer beaucoup aujourd’hui. Cependant, plutôt que de consommer tout de suite, il pourrait épargner, gagner un intérêt sur cette épargne, ce qui lui permet de consommer plus demain.
Le résultat du choix intertemporel va donc dépendre de deux variables, le taux d’intérêt et la richesse de l’agent, et d’un paramètre, le taux de préférence pour le présent (qui est une caractéristique de la fonction d’utilité de l’agent).
D’après le modèle, la consommation de la première période est :
– Une fonction croissante du revenu (ou de la richesse) de l’agent, il est plus riche, donc peut consommer plus ;
– Une fonction croissante du taux de préférence pour le présent ; si l’agent attache soudain plus d’importance a sa satisfaction immédiate, il consommera plus aujourd’hui ;
– Une fonction ambiguë du taux d’intérêt. En effet, imaginons que le taux d’intérêt augmente. Dans ce cas, la consommation de la première période voit son coût d’opportunité augmenter par rapport à celle de la seconde période. Il a plus intérêt à épargner pour pouvoir consommer encore plus à la seconde période, puisque cette épargne lui rapportera encore plus grâce à la hausse du taux d’intérêt (effet de substitution).
Cependant, dans le même temps, il peut faire le calcul suivant : puisqu’en épargnant moins, je pourrais dorénavant consommer autant à la seconde période, pourquoi ne pas augmenter ma consommation présente et simplement maintenir ma consommation future, grâce à la hausse du taux d’intérêt (effet de revenu).
Le sens de variation de la consommation par rapport au taux d’intérêt dépend donc de la supériorité d’un effet ou de l’autre. Si l’effet de substitution l’emporte, la consommation décroît avec le taux d’intérêt. Si l’effet de revenu est plus fort, alors elle augmente.
En pratique, on suppose souvent que l’effet de substitution l’emporte et que la consommation est une fonction décroissante du taux d’intérêt. Mais il faut bien préciser à ce moment là que l’on fait une hypothèse sur la fonction d’utilité de l’agent. Car c’est sa forme qui détermine lequel des deux effets sera supérieur.